Le voyage était terminé. Paris se montrait enfin sous un soleil de printemps.

Gabrielle du Plessis tenait le bras du prince Sernine, elle était fatiguée et triste.

Ce furent deux semaines de rêve dans une vie de chagrin et de faux-semblants. Une illusion de bonheur.

Le prince sentit son désarroi et sa main chercha celle de sa compagne. Il la serra doucement.

" Une dernière nuit avec moi ?, proposa Sernine.

- Alexeï, soupira la cocotte. A ton avis ?

- Mon avis ?"

L'homme repoussa doucement la femme contre la cloison du taxi qui les menait au One-Two-Two. Il chercha ses lèvres et fut heureux de la sentir frémir dans ses bras.

Sous ses caresses.

" Mon avis est que je devrais te garder auprès de moi et ne pas te rendre à ta vie, moya zvezda.

- Mon fou de Russe !, susurra Gabrielle, légèrement amusée.

- Non, pas fou, réaliste !

- Réaliste ? Tu me vois dans ta vie, monsieur l'envoyé du Tsar ?

- Je te vois surtout dans un appartement à Paris, loué et meublé par mes soins. Loin de cette vie.

- Alexeï, Alexeï, Alexeï. Si seulement c'était si simple...

- Tout est simple ! J'ai les moyens et je te veux."

Gabrielle caressa la joue de son homme et lui répondit :

" Et le jour où tu te délaisses ? Le jour où tu te décides à retourner dans ta Russie ? Auprès de ton Tsar ? Qu'adviendra-t-il de moi ?

- Je ne me délaisserai jamais, moya zvezda.

- Oui, mon tout-beau. Bien entendu."

Mais le coeur n'y était pas et le sourire restait forcé.

" Gabrielle, insista le Russe. Reste avec moi encore une nuit !

- Tout ce que tu désires, tesoro."

Alexeï Sernine appela le chauffeur et lui indiqua sa propre adresse. Le prince vivait au rez-de-chaussée d'un bel immeuble, à l’angle du boulevard Haussmann et de la rue de Courcelles.

Un appartement dans lequel, malgré tout ce que pouvait croire la cocotte, aucune femme n'était jamais venue.

Il ne désirait pas grand-chose pour lui, le prince Alexeï Sernine.

Seulement le bonheur de cette femme, Gabrielle du Plessis.