Quand Madame a une nouvelle idée...
Gabrielle profitait de son dimanche ensoleillé. Les jours à venir semblaient plus beaux, elle avait confiance en ses amants, elle se sentait rassurée quant à sa place au One-Two-Two. La jeune Elvire ne se pavanait plus dans le canapé, elle jouait aux dames contre Suzy.
La pauvre supportait le bavardage de cette dernière avec un sourire angélique.
Gabrielle se fustigeait de manquer de compassion.
Enfin, presque.
La cocotte songeait à ses enfants et aux beaux jours de l'été. Peut-être, d'ici là, elle trouverait une nouvelle situation. Une ferme ? Un internat ?
Là, le front s'assombrissait et le regard se voilait.
Gabrielle ne voyait pas comment elle pouvait faire. Ses moyens étaient limités et ses amants, certes adorables, ne suffisaient pas à assurer une meilleure vie à ses enfants.
La cocotte ferma les yeux et tenta de s'endormir sur le canapé...
Puis, la porte fut claquée et Madame apparut, le chignon penché à droite et les yeux étincelants.
Elle fit peur à tout le monde.
" J'ai une nouvelle idée, les filles !"
Là, elle fit blêmir tout le monde.
Madame Germaine, toute contente d'elle-même, déposa sur la table des petits sachets de velours.
" C'est notre délicieuse Elvire qui m'en a parlé. Elle a utilisé ceci chez son ancienne patronne, Valtesse de la Bigne. Regardez !"
Suzy saisit un sachet et l'ouvrit, quatre petits jetons argentés tombèrent dans sa main. La jeune femme les examina et pouffa de rire.
" Mais Madame ?! Qu'est-ce que c'est ?
- Des jetons de bordel ! Vous avez tous et toutes un sachet brodé à votre nom."
Suzy examina son sachet et s'exclama :
" C'est celui de Mathilde ! C'est quoi qu'est différent ?
- Les spécialités !, expliqua Madame Germaine. Et ça, c'est mon idée !
- Les spécialités ? Mathilde aime bien en prendre deux en même temps ?! C'est possible ?!"
Mathilde vint rageusement récupérer son sachet et ses jetons et rétorqua :
" Moi au moins, je sais en prendre une ! C'est pas donné à tout le monde, vu les ratages qu'on rapporte sur toi !
- Mais je t'en prie, la vioque !, cracha Suzy. Moi, j'en prends qu'une, mais je la prends bien.
- Mais de quoi parlez-vous ?, demanda candidement Louison.
- Des bites ! Regarde ton sachet.
- Des bites ? Mais..."
Louison saisit son sachet et regarda ses jetons. Elle en rougit.
Madame, satisfaite, continua son explication.
" Vous avez tous reçu cinq jetons. Vous allez pouvoir les offrir à certains de vos clients pour des passes gratuites. Mais le mieux est le cadeau !
- Le cadeau ?, fit Gabrielle, sceptique.
- Votre ami, M. Laroche ! Imaginez Gabrielle ! Il en achète cinq d'un coup et les offre à ses amis ! Hop ! Cela vous fait cinq clients assurés et déjà payés ! Plus de souci d'argent et de dettes ! On est sûrs d'être payés !
- Je vois bien M. Laroche en acheter en effet, sourit sans joie Gabrielle.
- C'est pour cela que je vous en fais faire dix à vous. A vous de les écouler dans la semaine, ma chère Gabrielle.
- Dix ?!"
Dans son sachet, Gabrielle du Plessis trouva dix jetons. Chacun affichait une spécialité différente. Madame contemplait la cocotte et lui souriait gentiment.
" Vous savez tout faire, Gabrielle, alors vous avez tous les talents.
- M. Laroche sera ravi !"
Suzy et Mathilde se crêpaient le chignon, tandis qu'Elvire s'exclamait, vexée :
" Mais je ne suis pas spécialiste en levrette anale, moi !
- Y a plus qu'à s'entraîner, fit Madame en haussant un sourcil. Il y a une courgette conséquente à la cuisine. A vous d'agir, ma fille !"
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