6 juillet - 14 heures
Suzy posait dans toute sa beauté de blonde évanescente, les yeux dans le vague et le sourire tendre.
" Plus large le sourire, ordonna Gabrielle. Montre tes dents, elles sont très belles."
La jeune femme se redressa, flattée.
" C'est vrai ? Ho merci ma Gaby, Tu es gentille !
- Remets-toi bien ! Que je te prenne en photo !"
Suzy prenait la pause, son sein appelait la caresse et ses jambes croisées ne demandaient qu'à encercler des reins.
Madame Germaine examinait la scène d'un air critique, puis elle approuva.
" C'est un bon cliché ! Ce sera notre premier !
- Oui, madame. Passons à Mathilde !"
De fait, Mathilde s'assit sur le fauteuil en osier de madame. Ses mains jouaient avec un long collier de perles et ses bottines faisaient ressortir la blancheur de sa peau. Ses seins étaient nus et magnifiques.
" Mon Dieu ! Si tes clients te voyaient ainsi, Mathilde... Ils seraient éblouis !
- Ils me voient comme ça, Gabrielle. Pourquoi crois-tu qu'ils ne veulent que moi ?
- Je les comprends !"
Gabrielle du Plessis jouait les apprenties photographes, derrière son Kodak Brownie, cadeau de Jim Barnett. Elle tirait le portrait de toutes ses compagnes du bordel.
Madame Germaine avait approuvé avec joie l'idée. On allait publier un recueil du One-Two-Two à destination des habitués.
Louison était couchée sur le lit, une cigarette à la main, ses cheveux noirs coupés à la garçonne encadrait son visage mutin. Devant elle, on avait disposé un revolver. Cadeau du cogne de Gabrielle à cette dernière.
" Là ! Tu es belle, Louison ! On croirait une Apache !
- J'aime bien ton petit revolver, Gaby. Tu me le prêteras ?
- Faudrait que j'en demande un autre à Javert !"
On se mit à rire et de nouveaux clichés furent pris.
Elvire était simplement assise sur un fauteuil, dans une petite robe blanche qu'elle avait remontée au maximum sur ses jambes. On voyait les cuisses et il lui suffisait de croiser et de décroiser les jambes pour perturber son vis-à-vis. Ses cheveux, coiffés en arrière, accentuait son air autoritaire.
Même Gabrielle se devait d'avouer que sa rivale était une très belle femme. Trop à son goût.
" Bon, il ne manque que Margot et Corine. Vous êtes prêtes les filles ?"
Margot était désolée, elle arrivait avec sa compagne, toutes deux, les cheveux trempés, recouvertes de robes de chambre épaisses.
" Mais que vous est-il arrivé ?, s'inquiéta Madame Germaine.
- Je voulais aider Corine avec son bain et nous nous sommes mouillées.
- Un bain ? A cette heure ? Mais quelle drôle d'idée !, s'indigna la patronne.
- On voulait être jolies pour la photo... Il faut nous laisser le temps de nous sécher. On peut, madame ?
- Attendez ! Vous connaissez l'art grec ?, demanda Gabrielle, en pleine réflexion.
- Comment ça ?"
Un drap mouillé servant de toge, des seins moulés par le tissu, des jambes esquissant un pas en avant... Deux Victoires s'avançaient, plus érotiques sous leurs toges humides que les autres pensionnaires du One-Two-Two, à moitié dévêtues.
Pour les invertis, ce fut la même histoire. Deux beaux lutteurs s'empoignèrent devant le Kodak de Gabrielle. On se demandait d'ailleurs s'ils combattaient vraiment...
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