20 juillet - 14 heures

3 minutes de lecture

L'océan était glacé. Gabrielle du Plessis restait plantée sur le bord de la plage, les pieds dans l'eau et les bras entourant sa taille.

Elle ne comprenait pas comment ses enfants pouvaient nager dans cette mer de glace. Janine jouait avec eux à se laisser porter par la houle. Victoire les surveillait avec soin.

Quant à Arsène, il l'attendait.

" Viens, Gabrielle. Tu verras, le froid disparaît vite.

- C'est plutôt moi qui vais disparaître, murmura la cocotte. Je vais geler.

- Et si je te porte ?"

La femme se mit à rire, se moquant gentiment de son amant.

" Allons, monsieur Lenormand ! Vous n'êtes plus un jeune homme !"

La pique porta et Gabrielle se retrouva entre les bras d'un homme, pas si cacochyme que cela. Elle en glapit.

" Mais tu es trempé ! Tu es glacé ! LÂCHE-MOI !

- Certainement pas ! Mon orgueil de mâle en répond !"

Gabrielle se sentit portée dans les airs et la pensée de se retrouver jetée dans l'eau la galvanisa.

" NON NON NON ! Elle est froide ! Je ne veux pas y aller !

- Ho que si, tu vas y aller, Gabrielle ! Tu vas voir le cacochyme ce qu'il est encore capable de faire !"

Les enfants applaudirent tandis que M. Lenormand entrait résolument dans l'eau, Gabrielle dans ses bras, portée comme une mariée.

Puis, délicatement, il la déposa sur le bord de la plage, l'eau n'atteignait que leurs chevilles. Il s'inclina.

" Arsène ne force jamais une femme ! Si tu ne veux pas aller dans l'eau, libre à toi, ma toute belle."

Gabrielle se sentit plus aimée que jamais, elle saisit la main de son compagnon et avec une témérité à toute épreuve, elle entra dans l'eau.

" Il ne sera pas dit qu'un vieillard cacochyme aura plus de courage qu'une cocotte parisienne !"

Arsène Lenormand serra ses doigts et tous deux avancèrent dans l'océan.

Tout étincelait autour d'eux. La mer, les falaises, les galets...sous le chaud soleil de juillet. Là-haut, sur la falaise, trônait le château fortifié de Dieppe.

Une belle plage que celle de Dieppe. Les touristes se promenaient sur le front de mer, quelques courageux se risquaient dans les vagues sauvages de l'océan. On sautait dans la houle et on se laissait porter par la force de l'eau. La mode des bains de mer remontait à la Duchesse du Berry, elle se baignait à Dieppe en 1820, pour des raisons curatives...puis pour se divertir...

Les vagues étaient fortes ce jour-là, Gabrielle apprenait ce que signifiait une "grande marée". Arsène saisissait sa taille et la serrait contre lui.

" Durant mes voyages, j'ai pu voir des hommes en Polynésie chevaucher les vagues sur des planches de bois... J'ai essayé, c'est grisant.

- Tiens ? Tu as été en Polynésie, Arsène ?

- De la Cochinchine à la Polynésie, ce n'est pas si loin, se justifia-t-il maladroitement. Etienne n'est pas le seul à voyager, ma toute belle.

- Je vois ça ! Vous êtes un homme de ressources, monsieur Lenormand.

- Ce soir, je t'emmène jouer au casino. Tu me porteras chance, ma toute belle."

Dieppe possédait un casino de style mauresque, qui faisait office de salle de spectacle. On y assistait à des concerts tout en jouant à la roulette ou au poker.

Les hôtels particuliers, les cabanes de bois sur la plage, les glaces au citron...

Le soleil, les rires des enfants, les yeux d'Arsène...

Il y avait de quoi perdre la tête...

Jouer à la roulette, dans un décor digne des mille-et-une-nuits, en écoutant un concert de Saint-Saëns, était exaltant.

Vêtue de sa plus belle robe, couverte de ses bijoux les plus exceptionnels, Gabrielle du Plessis s'amusait. Elle perdait surtout...mais comme c'était l'argent de son amant...

Soudain, les lumières s'éteignirent et des cris de panique résonnèrent.

Lorsqu'on ralluma enfin, plusieurs femmes hurlèrent que leurs bijoux avaient disparu. Gabrielle glissa ses mains sur son cou et sentit deux mains la caresser.

On refermait son collier de brillants, cadeau du prince Sernine.

Elle se retourna affolée et aperçut Arsène Lenormand, tout sourire.

A ses côtés, un jeune homme inconnu paraissait bien penaud.

" On ne touche pas à mes affaires, Grognard.

- Oui, patron."

L'inconnu disparut et Arsène Lenormand vint paisiblement s'asseoir près de Gabrielle du Plessis.

" Un bain de minuit, cela te tente, ma toute belle ?"

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