Chapitre 1

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L'an 543 a.p la longue nuit


Un grand feu flambait doucement, apportant chaleur et sentiment de sécurité aux personnes se trouvant autour. Cinq compagnons fêtaient allègrement leur dernier jour d'entraînement. La joie était au rendez-vous mais pas que, être officier confirmé rendait leur approche du danger différente. Une odeur étrange flottait dans l'air, celle de la mort. Elle les entourait et s'infiltrait partout dans leurs pensées.Iris fut la première à la sentir et la tristesse la frappa de plein fouet.

- Si on en est là, c'est grâce au général Agnès. Elle a su nous former et faire de nos carcasses maladroites des officiers doués.

Un reniflement bruyant se fit entendre à sa gauche. Un jeune homme aux mèches châtain clair s'essuya le nez dans un mouchoir en tissu rouge.

- C'était une femme extrêmement courageuse, mais cela n'a pas suffi. Vous pensez que nous allons survivre ? Demanda-t-il tremblotant aux autres. Les huit paires d'yeux se posèrent sur lui, et ils avaient presque tous la même expression. Une incertitude sur l'avenir et la peur pouvaient s'y lire.

- Buvons à Agnès et à notre future mort horrible, dans d'atroces souffrances ! Dit un autre homme tout en portant sa bouteille à la bouche. Les autres le suivirent un sourire aux lèvres en repensant à leur bien aimé général.

Seule la jeune Iris n'avait pas les mêmes incertitudes qu'eux, son regard était emprunt d'une forte détermination. Et elle avait su faire preuve de cela durant toute sa formation.


Un an plus tôt


Iris avait pour qualité principale de n'avoir peur de rien. Elle ignorait le sentiment de peur et cela l'avait aidé à se faire une place dans les rangs de l'armée Sylve. Elle n'avait d'ailleurs pas eu vraiment d'autres choix, les orphelins de Sylve devant obligatoirement faire carrière dans l'armée. Elle ne s'en était jamais plainte bien au contraire, à ses vingt ans, elle n'avait pas attendu que les soldats viennent la cueillir de force dans son foyer d'accueil. Elle était partie tôt le matin avec le peu d'affaires qu'elle possédait pour être la première à signer le registre de convocation. Les officiers chargeaient de l'accueil des nouvelles recrues avaient bien ri en la voyant arriver avec tant de motivation.

- Tu dois faire quoi fillette ? 1m60 à tout casser, tu seras la première à te faire tuer par ces saloperies de sorciers. On va te faire une fleur en t'envoyant sur les remparts.

Ils avaient ri pendant de longues secondes sous le regard déterminé de la jeune femme. Elle les avait laissé faire pour ne pas chercher

d'ennui le premier jour.

- Monsieur, je souhaiterai intégrer l'équipe des éclaireurs, quitter notre territoire pour me heurter directement à l'ennemi, Monsieur.

Les deux officiers la regardèrent quelques instants, sûrement un peu surpris par ce petit bout de femme prêt à en découdre. Iris savait qu'être courageuse était une qualité, mais elle savait aussi que cela ne suffirait pas pour prouver sa valeur. Avant d'être répartie dans une branche de l'armée, elle devait suivre une formation d'une année, lui apprenant les rudiments du combat et de la guerre. Elle serait répartie dans une équipe durant cette même année, qui serait sélectionnée par les généraux eux même en fin de formation. Ainsi durant cette année d'entraînement, elle devrait tout donner pour que son équipe soit envoyée chez les éclaireurs.

- nous verrons si tu tiens le rythme durant la première année déjà. Tu es dans l'équipe d'entraînement numéro 345, ton équipement t'attend sur ton lit dans ton cabanon. Même numéro. Suivant !

Iris ravi, fit un salut militaire maladroit avant de récupérer un formulaire en papier, qui validait son inscription. D'une démarche rapide, elle s'empressa d'entrer dans le camp pour trouver à la hâte son cabanon. Elle était très excitée à l'idée de déballer ses nouvelles armes et d'apprendre enfin à s'en servir. Le cabanon 345 était tout en bois comme les autres bâtiments du camp. Bien qu'il ait plusieurs années d'usure évidente, il était plutôt en bon état et la porte ne grinça même pas quand elle entra. Pourtant, le cabanon était très bruyant, pour cause, deux hommes se disputaient un lit.

- Tu passes ta vie à faire toujours le premier choix, cette fois-ci c'est moi. Tu dors en haut ! Dit le premier d'un ton dur.

L'autre ricana de bon cœur avant d'attraper son adversaire par le col. En plissant les yeux, Iris s'aperçut qu'ils s'agissaient de jumeaux, ils avaient exactement le même visage, mais leurs chevelures avaient des reflets différents.

- Ne joue pas au plus malin avec moi Al, tu sais très bien que je gagne tout le temps.

AL répliqua en lui donnant un coup de pied dans le ventre et une bagarre commença entre les deux frères. Ils n'avaient pas remarqué la présence d'Iris. Cette dernière en profita pour poser son sac sur l'un des lits vides à l'autre extrémité de la pièce. Elle avait choisi le lit du haut, pour pouvoir avoir un meilleur point d'observation. La jeune femme aimait garder un œil sur tout ce qu'il se passait.

Tandis que les deux compères se disputaient avec acharnement, elle se déshabilla rapidement avant d'enfiler son nouvel uniforme. Il était vert foncé, une chemise et un pantalon élastique avec des bottes en cuir noir. Sur la chemise étaient brodées son premier insigne d'officier junior, représentant une main tenant une autre main plus frêle. Un jolie symbole pensa-t-elle en l'effleurant.

- Bien les gars ! Vous n'avez pas songé à tirer à la courte paille ? Questionna-t-elle soudainement en parlant d'une voix forte.

Al et son frère sursautèrent en cœur avant de se tourner vers elle les yeux écarquillés.

- Et tu es qui toi ? Grogna le jumeau sans prénom en la pointant du doigt.

- Votre coloc de chambre à mon grand déplaisir. Et votre dispute commence à me taper sur le système.

Elle passa rapidement devant les deux hommes pour ramasser deux brins d'herbe à l'entrée.

- Vous en tirez un et celui qui a le plus long gagne le lit, ça vous va ?

Al approuva et s'empressa de prendre un brin d'herbe. Malheureusement pour lui son frère avait le plus long et encore une fois apparemment il perdit.

- Moi, c'est Phil au fait, se présenta le gagnant en installant bien confortablement son nouveau lit. Al grommela lui aussi son prénom en peinant à monter l'échelle trop étroite pour ses grandes jambes.

- Iris, vous pensez qu'on va avoir d'autres camarades de chambre ? Demanda-t-elle en désignant les trois autres lits vides. Au même instant, deux autres personnes entrèrent dans le cabanon. Une femme et un homme.

Ils cessèrent toute discussion en les voyant et se présentèrent à leur tour.

- Je m'appelle Sam, et c'est tout ce que vous avez à savoir sur moi.

La jeune femme marcha d'une démarche lente vers la couchette en dessous de celle d’Iris. Elle y jeta son sac et commença à s'habiller, ignorant les regards surpris des jumeaux. Iris s'empressa de détourner le regard pour lui laisser son intimité. Grâce à son foyer, elle savait parfaitement vivre en collectivité et pour elle cohabiter avec quatre personnes serait un jeu d'enfant. De toute façon, elle n'avait jamais été seule, et elle appréciait la compagnie.

- Moi, c'est Louis, et j'espère vraiment survivre à cette première année.

Le garçon semblait nerveux et quand il posa son sac sur un lit, il fit tomber la plupart de ses affaires sur le sol. En jurant, il les ramassa avant d'essuyer discrètement une larme sur sa joue. Iris l'avait remarqué, son engouement pour l'armée lui avait presque fait oublier que pour une majorité de personnes, s'engager était un enfer. Louis devait être terrifié et elle eut beaucoup de compassion pour lui. Ils n'eurent pas vraiment le temps de faire plus ample connaissance, qu'une femme entra dans le cabanon. Elle avait un uniforme noir et de nombreux insignes étaient cousus dessus. Elle observa l'équipe avec grand soin tout en gardant le silence. Personne n'osait bouger dans la cabane.

- Leçon numéro 1 : quand j'entre dans une pièce vous vous alignez parfaitement et vous me saluez. Nous sommes à l'armée pas dans une prison, un minimum de politesse est exigée. Leçon numéro 2 : si vous ne voulez pas subir une mort horrible dans d'atroces souffrances je vous conseille de m'obéir au doigt et à l'œil. Je suis le général Agnès et c'est moi qui vais tenter de faire de vous des soldats.

Le groupe s'empressa de s'aligner maladroitement. Louis faillit tomber et c'est Sam qui le rattrapa en grommelant. Les jumeaux avaient pu trouver une place sans trop de dispute et Iris était déjà prête à obéir aux ordres. Agnès les regarda satisfaite de son effet et les fit sortir du cabanon. Il s'ensuivit une première journée d'entraînement sportif et tactique, qui ne prit fin qu'à la nuit tombée. Et cet entraînement se répéta chaque jour de l'année qui suivit. Des connaissances de l'ennemi au combat en lui-même, Agnès n'avait rien laissé au hasard et c'est ce qui fit que son équipe fut la mieux formée en finalité.

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