Mata - Maely Santos

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Elle me faisait peur, et pour cause, je ne l’avais jamais aimé. Elle avait des excès de colère réguliers sur n’importe qui, parfois même les professeurs. Elle n’avait aucun respect pour les adultes, à croire qu’elle se sentait supérieure. Je dois avouer que j’appréciais quand elle remettait à sa place certains enseignants, mais quand elle déchaînait sa haine sur nous, ça, j’aimais moins.

Une fois, alors qu'on était en voyage pour Gredien vers la fin de nos années de lycée, elle s'était mise à pleurer en voyant les statues de pierre. Personne n'avait compris pourquoi et personne n'osa parler. Ses larmes étaient réelles, douloureuses et libératrices à la fois. Je ne saurais expliquer comment, mais je savais qu'elle avait eu besoin de voir ces statues. Après ce jour, je ne faisais que de l'observer. Elle avait montré de la sincérité, de la douceur que je ne lui connaissais pas quand elle avait passé sa main sur les rochers rugueux. Je commençais à l'apprécier, après trois années de ressentiment. Elle le remarqua : m’observant à son tour.

Quand j'ai cru que nos chemins se sépareraient, chacune poursuivant sûrement des études supérieures différentes, je la vis, trois rangs devant moi pendant notre tout premier cours magistral. J'avais laissé échapper un sourire. J'avais oublié ma peur et sa soi-disant arrogance. Je l'avais rejointe à la fin du cours sans attendre qu'elle ait fini de ranger ses affaires, on s'était regardé dans le blanc des yeux pendant au moins dix secondes avant que l'une de nous deux n'ose adresser la parole. Je me suis demandée pourquoi j'étais allée la voir et elle a dû se demander pourquoi elle m'avait accompagnée jusqu'au restaurant universitaire. Je me suis demandée pourquoi on mangeait ensemble et elle a dû se demander pourquoi elle était restée avec moi le reste de l'après-midi.

Je la vois encore aujourd'hui, et elle reste un mystère à mes yeux. On nous appelait la paire, j'étais perdue sans elle, mais elle n'était pas perdue sans moi. Nous ne sortions jamais sans l'autre. Pourtant, je ne sais pas ce que ses yeux ont vu, je ne sais pas ce que ses oreilles ont entendu ni ce que sa bouche a pu dire. Hier soir, j'ai reçu un message de sa part disant qu'elle devait me parler, mais que ça serait dur à avaler. Et que je ne la croirais sûrement pas. Je rassemble mes affaires pour la rejoindre chez elle, je lui ai demandé pourquoi nous n'allions pas dans le café de la petite rue comme d'habitude et elle m'a répondu que c'était trop important. Devant sa porte, une boule se forme dans mon estomac, signe de stress. Mes paumes sont moites et je crains qu'elle ne remarque mes préoccupations. Elle ouvre la porte, me regarde avec un sourire crispé, son chat vient me dire bonjour et ses oiseaux chantent mon arrivée. Elle ne semble pas remarquer mon état, sûrement trop occupé avec le sien. Elle me dit de m'asseoir, j'obtempère. Elle part dans sa cuisine et revient avec deux tasses de thé, s’assoit, frictionne ses mains, signe de stress. Puis son regard capte le mien et elle se met à parler, énumérer des prénoms.

"Loénia, Hôya, Piedür, Pür, Bôna, Bôria, Für, Dôna et Mata ne sont pas des légendes."

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