Chapitre 4
Une mouche tournait autour de moi, me chatouillant le menton du bout des ailes. En fait non, ce n’était pas une mouche, mais une plume. J’ouvris les yeux et souris. C’était Océane qui jouait avec la plume. Je refermais le livre ouvert sur mes genoux et le posa sur ma chaise en allant m’allonger au côté de la femme qui faisait battre mon cœur. Du bout des doigts, je caressais délicatement son beau visage.
— Qu’est-ce qui te fait sourire bêtement ? m’interrogea-t-elle en me caressant le bras.
— C’est toi. Tu avais raison, je suis folle amoureuse de toi. Mon cœur est entièrement à toi, pour toujours et à jamais.
— Tu admets que tu es accro à moi ? sourit-elle.
— Totalement. Ta bouche, ton sourire, ta peau, ton parfum. Tu es ma drogue Océane et je ne compte pas te laisser partir de sitôt.
— J’aime quand tu me dis ça.
Océane glissa une jambe sur moi et m’attira contre elle. Dans sa poitrine, je pouvais entendre son cœur battre. Cette douce mélodie ne devait jamais s’interrompre.
— Océ ? Est-ce que je peux te demander de faire quelque chose pour moi ?
— Je t’écoute.
— Peu de temps avant ton coma, j’ai découvert un livre signé de la main de ma grand-mère. Et je voulais te demander de m’aider à la retrouver.
— Je peux essayer de voir avec mes contacts de la Résistance.
— Pas Camille ! Je ne sais pas comment elle a su, mais le jour où… Julien s’est en prise à toi, elle a essayé de me détrôner. Elle a profité de ton absence. Elle a toujours voulu t’éloigner de moi.
— Tu penses qu’ils étaient de mèche ?
— Je ne sais pas. Je n’ai aucune preuve et ce n’est qu’une simple intuition.
— Ça n’a pas d’importance de toute façon. On est ensemble aujourd’hui. Et je vais t’aider à la retrouver ta grand-mère. Du côté de ton père ou de ta mère ?
— De ma mère. Si elle est toujours en vie, je pourrais peut-être avoir enfin une explication sur ce qu’il s’est passé.
— Comment s’appelle ?
— Maria. Enfin c’est qui était écrit sur le livre.
Océane caressa mes cheveux quelques minutes en réfléchissant. Ma tête était toujours posée contre sa poitrine.
— Ta mère était folle, c’est certain, mais je ne pense pas qu’elle irait jusqu’à tuer sa propre mère puisqu’elle ne t’a pas tué toi. Au sein de la Résistance, j’ai appris qu’il y avait une petite île au sud-ouest de l’Empire d’Eryenne qui accueillait les exilés et ceux qui s’enfuyaient sous le règne de ta mère.
— Tifna ? Tout ce que je sais c’est qu’il n’y a qu’une seule ville du nom de Kelnya. Le Commandant Fauster m’en avait parlé quand j’ai voulu contacter les dirigeants étrangers. Mais il m’a dit qu’il n’y avait aucun moyen d’entrer en contact avec eux.
— Si, il y en a un. Le responsable Sauvetage de la résistance était en contact avec une femme d’une soixantaine d’années qui habite là-bas. Ensemble ils aidaient ceux qui voulaient fuir. Ta mère n’avait aucun pouvoir sur cette île que ne fait pas partie de l’Empire. Je pourrais me renseigner auprès de lui.
— Merci, vraiment.
— Je vous aime, Votre Majesté l’Impératrice d’Eryenne.
— Carrément, mon titre au complet ? Dans ce cas, je vous aime, Amante de Sa Majesté l’Impératrice d’Eryenne.
— Sympa comme titre, quoiqu’un peu long.
— Je peux l’allonger encore plus si tu le souhaites.
Elle bascula au-dessus de moi, ce qui me fit rire et m’embrassa dans le cou, l’une de ses mains sur mon bassin. J’attrapais son beau visage entre mes mains et l’attirais à moi, heureuse de l’avoir enfin retrouvé. Je dus cependant m’éloigner d’elle quand on frappa à la porte, laissant entrer le Dr Langstone.
— Je dérange peut-être ?
— Pas du tout, répondis-je. On discutait juste.
— C’est l’heure de votre première séance. Êtes-vous prête ?
— Il est déjà dix-sept heures ? Oui je suis prête. Elena ?
— Vas-y, je vais aller nager un peu.
— On se retrouve pour dîner alors ?
— Évidemment.
Je sortis de la chambre pour la laisser aux bons soins du Dr Langstone et retourna dans la mienne me mettre en maillot de bain. Au moment où je sortis, je croisais Emma.
— Je peux me joindre à toi ?
— Pourquoi pas. Je serais à l’étang.
— Près du grand chêne ? Très bien. Et je t’amène de quoi goûter.
— Emma, soupirais-je.
— Non, je ne veux pas savoir. Si tu fais du sport, tu manges.
— Dans ce cas, on se rejoint là-bas, je suis déjà prête de toute façon.
— Je me dépêche.
J’ajustais ma serviette sur mes épaules et marchais tranquillement jusqu’à l’étang. J’installais la serviette près du grand chêne au soleil pour la faire légèrement chauffer. Je m’étirais un peu avant de rentrer lentement dans l’eau un peu fraîche et de commencer à nager. Au retour, Emma disposait sa serviette à côté de la mienne. Je voulus repartir pour un tour, mais elle m’interrompit en levant le panier qu’elle avait apporté.
— Qu’est-ce que tu as apporté de bon ?
— Tu verras, sourit-elle.
Je sortis de l’eau et m’assis à côté d’elle sur ma serviette. Dans le panier, je récupérai une pêche et un torchon.
— J’ai parlé de ma grand-mère à Océane. Elle va m’aider à la retrouver, commençais-je après avoir goûté au fruit juteux.
— C’est vraiment ce que tu veux ?
— Oui. J’ai besoin de savoir qui est ma famille, pourquoi ma mère a fait ça et du coup, qui je suis vraiment.
— C’est ton choix et je comprends. Après tout ce que ta mère t’a fait, il est normal que tu veuilles des réponses. Mais il faut t’attendre à ce que certaines réponses ne te plaisent pas.
— Je m’en doute. Tout ne peut pas se passer comme prévu. Mais je tiens vraiment à savoir qui elle est, à la rencontrer si elle est toujours en vie. Et puis, si ça se trouve, elle sait où est mon père ou ce qu’il lui est arrivé.
— Tu as raison, parfois il vaut mieux savoir la vérité, même si elle ne plaît pas que de ne jamais savoir.
— C’est pour ça. Bon tu viens nager ?
— Aller, je suis ton rythme.
Emma se déshabilla pour dévoiler un beau maillot de bain deux pièces blanc. Je me levais et rentrais dans l’eau. J’attendais qu’Emma se soit totalement immergée pour recommencer à nager. Je fis environ cinq allers-retours avant de la voir bronzer sur la serviette.
— Emma ! criais-je pour qu’elle m’entende. Ce n’est pas l’heure de faire bronzette !
— Je ne suis pas aussi sportive que toi. Bronzer est un super sport, tu sais.
— Mais bien sûr, rigolais-je en la rejoignant.
Elle me regarda quelques instants, allongés sur le côté, sa tête posée au creux de sa main.
— Tu es un peu pâle, Elena, tu devrais prendre le soleil un peu plus souvent.
— Tu crois que ça plairait à Océane une sortie ici ?
— Tu sais qu’elle n’est pas encore capable de marcher seule ?
— Je sais. Mais juste un pique-nique, assise là et à discuter.
— C’est une bonne idée, mais c’est trop tôt. Elle est réveillée depuis vingt-quatre heures à peine. Elle est encore trop faible pour sortir du château. Attends au moins deux semaines voire un mois.
— Bon d’accord.
— Mais si tu tiens vraiment à avoir un rendez-vous amoureux avec elle…
— Mais non, ce n’était pas pour ça !
— Et bien, si tu veux faire quelque chose avec elle, je pourrais vous organiser un rendez-vous dans la salle de bal.
Je m’allongeais sur le dos, bras sous la tête et réfléchi un moment, en regardant le magnifique ciel bleu. Dix-huit heures arrivaient bientôt et le soleil était encore haut. En Eryenne et surtout à Glenharm, il était rare que le soleil se couche avant vingt et une heures.
— Je ne sais même pas ce qu’il pourrait lui plaire. J’ai l’impression de la connaître depuis toujours et pourtant, je ne sais pas ce qu’elle aime ou ce qui pourrait lui faire plaisir.
— Pourquoi ne pas lui demander directement ?
— Je ne saurais même pas comment lui demander.
— Tu y arriveras, je ne m’inquiète pas là-dessus.
— Heureusement que tu es là, Emma.
Elle me sourit, se leva et s’entoura de sa serviette. Comprenant qu’il était temps de rentrer, je fis comme elle. Emma avait raison. Je ne savais peut-être pas ce qu’Océane aimait, mais je pouvais lui demander. Ma prochaine tâche consistait donc à en apprendre un maximum sur elle, en vue de l’inviter à notre premier rendez-vous. Celui que Julien nous avait empêchés d’avoir pendant six mois. Celui que j’avais tant attendu.
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