Chapitre 39

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Cela faisait déjà trois jours qu’Océane était partie retrouver ma grand-mère. Elle m’avait envoyé un message à chaque fois qu’elle changeait de moyen de transport. Elle avait dû prendre un premier avion pour rejoindre les limites de l’Empire. Puis un bateau pour se rendre sur l’île et enfin une voiture pour se rendre à Kelnya. J’avais régulièrement des nouvelles d’elle et de comment ça se passait là-bas. Elle avait rencontré ma grand-mère et discuté avec elle en tant qu’ancienne membre du groupe de résistance.

Les gens là-bas savaient pour la mort de ma mère, mais semblait attendre que je fasse, seule, les démarches pour les rencontrer. Ce que je comptais faire de toute façon. Océane n’avait pas dit à ma grand-mère qui j’étais, mais cette dernière avait parlé de moi. Comme mon père l’avait dit, c’était grâce à elle que j’avais vécu avec tous les biens matériels qui me fallait et grâce à elle qu’Emma avait été embauchée pour s’occuper de moi. Elle suivait les actualités de l’empire par l’intermédiaire de ses propres journalistes et était fière de ce que j’avais accompli. Il me tardait de la rencontrer.

Océane rentrait aujourd’hui. Elle était montée à bord de l’avion du retour quelques heures auparavant. Il lui restait encore beaucoup de chemin à parcourir pour rentrer au château. Afin de ne pas voir le temps passer ni de tourner en rond dans mon bureau, impatiente, j’avais volontairement caché l’heure et travaillais sur ce que j’aimerais mettre en place avec cette île libre.

Pourtant, alors que j’étais concentrée sur le dossier d’apprentissage de David, de la musique dans mes écouteurs, j’entendis un grand fracas provenir de l’extérieur. Le bruit avait été si fort que je l’avais perçu même avec la musique et je crus un instant que la terre avait tremblé. Abandonnant ce que j’étais en train de faire, je courus dans la grande salle afin d’en apprendre davantage. En arrivant, je vis que toute la garde royale ainsi le Dr Langstone était présent. À croire qu’ils été là avant même que ça ne se produise.

– J’ai prévenu tous les hôpitaux du coin, les médecins nous viendront en renfort sur place, dit le Dr Langstone

— Parfaits. Soldat ! Aujourd’hui, votre mission sera de tenir à l’écart des habitants et de sauver le plus de personnes possibles, mais surtout ne vous mettez pas en danger !

— Oui chef !

— Que se passe-t-il ? m’inquiétais-je alors.

— Un avion vient de s’écraser à une vingtaine de minutes du château. Des médecins sont en train d’arriver sur place et j’allais envoyer toute la garde royale. Nous avons été prévenus d’un problème par les pilotes, nous avons pu nous préparer avant le crash de l’avion.

— Bonne initiative. En quoi puis-je être utile ?

S’il y avait un crash d’avions pas loin du château, c’était de mon devoir d’aider les victimes de cet accident. Mais la raison principale qui me poussait à intervenir, à vouloir aller sur place, c’était la peur de savoir Océane à l’intérieur. J’avais peur d’apprendre que c’était l’avion qui l’a ramenais à la Capital.

— Serait-il possible d’envoyer ici les passagers qui n’ont pas besoin d’intervention en urgence pour éviter de surcharger les hôpitaux ?

— Bien sûr, je les accueillerais. Dr Langstone, irez-vous sur place ?

— Oui, ils ont besoin de moi là-bas.

— Bien. Je pars avec vous et rentrerais avec les blesser. Il est hors de question que je les attends là à ne rien faire.

— C’est ce que nous pensions. Si tout le monde est prêt, nous partons maintenant, enchaîna le chef de la garde royale. »

N’ayant pas assez de véhicules pour transporter tous les soldats, certains prirent des chevaux. Le Chef de la garde pensait qu’ils pourraient être utiles pour dégager certaines zones. Quand on arriva sur place, on se crut sur un champ de bataille. Des dizaines de corps étaient éparpillés un peu partout, une vingtaine d’arbres avait été déracinée, l’avion était détruit en plusieurs dizaines de morceaux et tous les passagers criaient. Ce carnage remua mon estomac et je du vite m’éloigner pour vomir. Entre les nausées et ça, j’étais servi.

— Tout va bien, Majesté ? m’interrogea alors le Dr Langstone.

— Oui, c’est bon merci. Docteur ?

— Je vous écoute.

— Océane était à bord d’un avion avant que celui-ci ne s’écrase. Je ne veux pas qu’elle soit dans celui-là.

L’un des pilotes de l’avion arriva à ce moment-là et me tendit le manifeste de l’avion. Dessus, il y avait la liste des tous les passagers et mon cœur fit un bon dans ma poitrine quand je vis le nom d’Océane y être inscrit.

— Elle fait partie des passagers, paniquais-je.

— On va la rechercher en priorité, ne vous inquiétez pas.

Le chef de la garde royal ainsi que le Dr Langstone organisèrent le camp de soin d’urgence et trièrent les passagers pour soigner en priorité ceux qui en avaient besoin.

— Il y a combien de passagers exactement ? demandais-je ensuite au pilote.

— Cinq cents Majestés, dont deux cents enfants. Il y avait plusieurs classes qui revenaient de vacances.

— Que s’est-il passé ? Vous êtes formé pour éviter ce genre d’accident.

— En effet, mais les appareils électroniques n’ont subitement plus répondu. Comme en cas d’orage magnétique sauf que là il n’y en avait pas. Avec mon co-pilote, nous n’avons rien pu faire pour éviter l’accident. Nous avons seulement pu prévenir la tour de Contrôle de l’aéroport de Glenharm qui a ensuite prévenu l’armée pour qu’on nous vienne en aide.

— Vous avez fait votre maximum. Aller vous faire soigner.

Je restais une minute à observer la scène quand j’entendis à ma gauche les cris d’un enfant. Sans même réfléchir, je courus en direction des cris et vis une fillette coincée sous un morceau de l’avion. J’essayais de soulever le débris en vain, je n’avais pas assez de force et je n’étais pas encore totalement rétablie de ma séquestration. Je demandais alors de l’aider à des soldats qui passaient par là et réussis à dégager la petite fille. Je la pris dans mes bras et courus rejoindre le Dr Langstone. Elle avait un morceau de l’avion dans l’abdomen et saignait beaucoup. Le Dr Langstone réussit rapidement à enlever le débris et à arrêter l’hémorragie, elle était désormais hors de danger.

— Comment tu t’appelles ? la questionnais-je en m’asseyant dans l’une des tentes.

— Estelle, me répondit-elle entre deux crises de larmes.

— Tu n’as plus rien à craindre Estelle. On est tous là pour vous aider.

— Tu es l’Impératrice ? Me demanda-t-elle en voyant ma couronne.

— Oui, c’est moi.

— Dans l’avion, j’étais assise à côté d’une gentille dame, elle m’a aidée à ne plus avoir peur.

— Je suis sûre qu’on va la retrouver.

— Elle m’a dit qu’elle était dans l’avion pour l’Impératrice. Pour retrouver sa grand-mère.

— Océane ? Je sais qu’elle est dans l’avion.

— Oui, elle m’a dit qu’elle s’appeler comme ça.

— Ils vont la retrouver, ne t’inquiète pas.

J’attendis une dizaine de minutes qu’un maximum de passagers soit sain et sauf, pendant qu’Estelle mangeait et buvait un peu avant de rentrer au château avec tous ceux qui en étaient capables. Durant tout le trajet, je gardais Estelle dans mes bras. Des lits avaient été installés dans la grande salle pour accueillir tous les passagers. J’avais seulement eu le temps de prévenir Emma de ce que j’avais en tête et elle avait tout organisé. Emma circulait entre les lits pour donner de l’eau, de la nourriture, des couvertures ou pour soigner des blessures légères. David, quant à lui, faisait la même chose. Il n’était plus supervisé par Emma, mais se débrouillait très bien. Il prenait des initiatives en une période de crise. Quand Emma s’approcha et qu’elle vit le sang qui tachait ma robe, elle s’inquiéta aussitôt.

— Elena ! Tu es blessé ?

— Non, ce n’est pas le mien.

— Qu’est-ce qu’il se passe là-bas ?

— Les pilotes n’ont rien pu faire à part éviter un drame bien pire. Et… Océane est dans l’avion. Ils vont la retrouver, j’en suis sûr, mais… je ne peux pas la perdre, Emma, pas après tout ce qu’il s’est passé.

— Ne perd pas espoir, Elena. Essaie de penser à autre chose d’accord.

— Je vais essayer.

— Je dois aller m’occuper des blessés, fais attention à toi.

Emma s’éloigna et rejoignit aussitôt un groupe de jeune en état de choc. S’il y avait quelqu’un pour les rassurer, c’était bien elle.

— C’est qui la gentille dame pour toi ? Me demanda innocemment Estelle.

— Mon amoureuse, lui répondis-je avec un grand sourire.

Je repérais un lit vide, un peu à l’écart et parti m’y asseoir. Je commençais de nouveau à avoir des nausées. Je devais me ménager ou je risquais de subir la colère d’Emma, mais aussi d’elle d’Océane. Je m’assis sur le matelas, m’appuya contre le mur et déposa délicatement Estelle entre mes jambes.

— Dis-moi, tu étais avec tes parents dans l’avion ou tu étais avec l’école ? Tu me parais bien jeune pour faire un voyage scolaire.

— Oh, mais j’ai cinq ans ! me répondit-elle fièrement. J’étais avec mes parents, mais ils sont aussi professeurs.

— J’espère qu’ils les retrouveront. En attendant, tu veux bien rester avec moi ?

— Je veux bien. Ma maman dit que tu es une bonne Impératrice.

— Repose-toi alors. Je reste à côté et si l’un de tes parents arrive je te réveillerais.

— Merci.

Estelle s’allongea à ma droite et s’endormit immédiatement. Alors que je restai là à la surveillé, à regarder les autres passagers, je ne cesser de m’inquiéter pour Océane. N’ayant aucune nouvelle du lieu de l’accident, je tentais d’appeler Océane sur son téléphone. J’essayai plusieurs fois en espérant qu’elle réponde ou que quelqu’un trouve son portable. Après le cinquième essai, quelqu’un répondit.

— Majesté ? C’est le Dr Langstone. Nous avons retrouvé Océane grâce à vos appels.

— Oh merci. Comment va-t-elle ?

— Elle est inconsciente, des collègues l’emmènent en ce moment même dans l’hôpital le plus proche. Ils vont lui faire des examens en priorité.

— Merci Docteur. Prévenait moi s’il se passe quoi que ce soit.

— Un groupe de 20 passagers vont bientôt arriver au château.

— Même s’il n’y a plus de place, j’en trouverais toujours pour ceux qui en ont besoin.

— Parfait. Je dois vous laisser Majesté.

Après avoir raccroché, j’essuyais mes larmes et me concentra sur Estelle qui pleurer dans son sommeil. Délicatement, je la soulevais et la pris dans mes bras. Elle se calma rapidement, sa tête posée contre ma poitrine. Comme par hasard, Emma passait par là au même moment.

— Tu as l’air doué avec les enfants.

— Je ne sais pas, j’improvise un peu là. Ces deux parents étaient dans l’avion, ils sont tous les deux prof. Et c’est la dernière à avoir vu Océane.

— Tu as des nouvelles ?

— Oui. Ils l’ont retrouvée et emmenée à l’hôpital le plus proche.

— Tu devrais aller la retrouver.

— Non, je préfère rester ici. Ils ont plus besoin de moi qu’Océane, même si ça me fait de la peine d’y penser. Et je ne veux pas laisser cette petite seule.

— Tu as un grand cœur, Elena. Je ne connais personne qui soit capable de faire passer le bien du peuple avant son propre bien.

— C’est mon devoir. Océane est entourée de médecin, je ne leur servirais à rien alors qu’ici je suis utile.

Emma posa ce qu’elle avait dans les mains et s’assit devant moi sur le lit de camp. Comme toute gouvernante et amie, elle s’inquiéter pour moi. Elle était d’autant plus protectrice depuis Marc.

— Je t’aurais bien demandé d’aller chercher des vêtements, mais ça n’a pas l’air d’aller.

— Je suis un peu épuisée oui. Et voir tous ses morts…

— Tu devrais te reposer. J’ai tout bien organisé ici, chaque domestique sait ce qu’il doit faire. Et David gère comme un pro.

— Je ne sais pas si je vais arriver à fermer l’œil.

— Tu as eu des nausées récemment ?

— Sur place oui.

— Alors je vais te chercher une tasse de mon thé secret et de quoi manger. Tu devrais aller te coucher dans ta chambre.

— Non, je veux rester ici.

— Comme tu veux, mais tu te reposes.

Emma était pire qu’une mère poule. En même temps c’était son travail de se préoccuper de ma santé en priorité. Quand elle me ramena de quoi me ressourcer, elle attendit que je mange et boive avant que je ne m’allonge. Je rapprochais Estelle contre moi et Emma remonta la couverture sur nos épaules.

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