Marianne observa Pierre peiner à ouvrir la bouteille de vin. Son incompétence pour un geste si banal lui fit penser à leur relation de couple. Comme si l'improbable intuition masculine pouvait l'alerter qu'elle le trompait avec le caviste. Elle n'aurait jamais dû inviter son amant à la maison.

- Merde ! cria Pierre alors que le bouchon s’était enfoncé.

Marianne leva les yeux au ciel, se retenant d’intervenir pour ne pas attirer l’attention. Sur elle et surtout sur ses vêtements remis à la hâte. Un bris de verre la fit sursauter. Pierre avait perdu patience. Il se servit un verre et s’installa sans cérémonie dans son fauteuil. Ce fauteuil. Marianne observa la bretelle de son soutien-gorge dépasser sous l’oreiller, priant pour que son mari boive assez vite pour ne rien remarquer.

- Je ne suis pas idiot, Marianne, commença Pierre avec une voix qui n’annonçait rien de bon.

Marianne se raidit. Avait-il déjà tout compris ? La tête de Jean dépassa par-dessus l’escalier. Elle lui fit signe d’attendre. Ce n’est pas encore le bon moment.

- Pourquoi ? demanda-t-elle

Pas assez d’innocence, ta voix tremble ma fille, se morigéna-t-elle.

- Je vois bien que tu caches mes bouteilles de vin. Le stock diminue. Je suis un ivrogne pas débile.

Le soulagement envahit aussitôt ses tripes, déjà nouées à l’idée de l’affrontement qu’elle évitait depuis des mois déjà.

- Réponds quand je te parles ! hurla-t-il.

- Oui… elles sont dans la cham…

Non ! Pas la chambre ! Pierre se leva et chacun de ses pas étaient comme le glas sonnant l’approche de sa tombe.

- Je vais pisser, lâcha-t-il en abandonnant son verre.

Marianne hésita, devait-elle le suivre à l’étage, au cas où ? Mais ne serait-ce pas trop suspect ? Ses yeux le suivirent en train de gravir les marches. L’attente était insoutenable, elle le suivit, courant presque pour le rattraper.

Alors qu’elle arrivait en haut de l’escalier, Pierre se retourna d’un geste brusque et la poussa violemment vers le bas.

- Je ne suis pas idiot, Marianne.