STATION TO STATION
"Dance, dance, yeah ! Dance baby, shake your body..."
— Damn it ! tona Osborne tentant de suivre la route tout en changeant de station radio, quand soudain elle entendit des riffs de guitare.
L'averse se déchaînait sur le parbrise de sa petit Austin. A la fin de la chanson, l'animateur enscence le nouvel album de Mars Hunter, louant les qualités de l'artiste, le considérant même comme le fils caché de David Bowie. On parle rock à la radio nationale ! se dit Oswin, totalement bluffée par ce qu'elle venait d'entendre. Entre les tubes sans texte, ni fond et les chanson à la guimauve de nanas en mal d'amour, le monde de la musique c'était désespérément appauvri. La jeune femme accéléra malgré le danger. Il fallait annoncer la nouvelle aux gars. L'Austin pilla devant la grille du "1984", le squatte qui leur servait de salle de répétitions et de studio d'enregistrement. Une vieille bicoque que les musiciens avaient retappée, il y a cinq ans, quand ils étaient au lycée, avant de faire la connaissance d'Osborne. Une furie traversa en trombe le jardin innondé, puis s'engouffra dans la maison. Dans le salon, les gars étaient en train de décapsuler des bières, avachis sur le vieux Chesterfield, récupéré chez nana Hennelly, la grand-mère d'Alex, le guitariste.
— Les mecs, vous imaginez, le rock revient à la mode ! s'exclame la jeune femme, devant son assistance abasourdie par son apparition.
Trempée jusqu'aux os, elle se tiens raide comme un i, les yeux brillants d'espoir.
— Alors, on lâche nos jobs de merde, on arrête de végéter comme des gros loukoums et on se bouge le derche !
Oswin arracha la bouteille des mains d'Alex et engloutit la moitié cul sec. Les trois amis se regardent, dubitatifs. Puis Eivann acquièce, balançant sa tête l'air de dire : "t'as raison, faut qu'on se bouge !".
— Wild Anarchist à la une de The Frog ou de Spotlight ! Le nouveau souffle triphop-rock, made in Glasgow !
Bien sûr, ce genre musical n'a jamais cessé d'exister, au Royaume Uni. Radiohead, Keane, Muse... Et les légendes qui ne se sont jamais arrêtées depuis les années soixante- dix/quatre-vingt, comme Depeche Mode, Pink Floyd, David Bowie... ce dernier était la référence ultime d'Osborne. Mais comme elle ne cessait de le répéter :
— Vous n'en avez pas assez de buller dans les pubs et de faire des petits concerts insignifiants pour à peine cent quidams ? Alors qu'on pourrait jouer au River Sound Festival devant une foule de plus quatre cent mille enthousiasmée par notre son !!
Assez de l'image du rockeur métaleux pas lavé ou du produit commercial formaté pour adolescents prépubaires ! Ou pire, ces stars de télécrochets qui se prétendent musiciens rebels ! Osborne en avait assez de se faire rembarrer par les maisons de disque. "Vous n'êtes pas assez si, vous n'êtes pas assez mi"... Les écossais ont la classe et elle allait le prouver au monde entier en réabilitant ce rock nerveux, racé, fusionnant l'anticonformisme recherché de Bowie avec l'énergie sensuelle de Deep Purple. C'était le moment de prendre sa revenche sur tous ces abrutis qui se payaient sa tête au quotidien depuis le lycée. Chose à laquelle ses amis de dix ans de plus n'avaient pas échapés. Les piques cinglantes sur leur look vintage, à se faire traiter de tapettes, finissait par les faire déprimer. Sans parler des anciens potes, qui au pub ne se privaient pas de leur adresser un "Salut les pédales !"...
Oswin jubilait. Il était hors de question qu'elle laisse passer cette chance.
Une semaine après, Wild Anarchsit signe chez Universal, mais au bout d'un an le soufflé est retombé, trop vite sorti du four. Osborne rompait son contrat avec la maison de disque. Me demander de faire de la pop alors que j'ai horreur de ça ! Elle saturait. Alex et Eivann reprirent leur jobs merdiques. Sylass parti pour un road trip en Nouvelle Zélande, il avait besoin de prendre l'air. Osborne retourna à l'usine pour profiter de ses après midi au jardin du 1984 à dessiner des plans, en attendant de trouver un contrat de paysagiste.
Deux ans s'écoulèrent, Oswin avait besoin d'un break, elle alla rendre visite à Alex, travaillant dans le salon de thé londonnien de son oncle. Ce petit établissement avait acquis sa petite réputation. Hennelly ayant travaillé chez Ladurée pendant ses études à Paris, le jeune homme avait créé une carte sur mesure, l'adaptant aux goûts des Britanniques. Les deux amis profitaient du soleil sur la terrasse en philosophant sur la musique et leur passé de Rock stars recalées. A ce moment directeur de Domino reccords les interpella :
— Le monde de la musique stagne, aujourd'hui. Tu es une amie de Declan McKenzie ?
Osborne eut l'impression de tomber de sa chaise :
— Oui.
Elle regarda Alex, sceptique.
— Tu as une maquette sous la main ?
— On a un site web. Des échantionns de nos albums sont dessus. Les CD sont à Glasgow, je ne pensais plus...
Elle ne pu finir sa phrase, pensant que sa chance lui filait encore une fois entre les doigts. L'homme se leva et lui tendit sa carte.
— Passe me voir demain matin.
— Pourquoi nous ? Pourquoi maintenant ?
— Je t'ai entendue parler de l'expo David Bowie au St Paul's Gallery. J'ai entendu dire que tu étais sa fan numéro 1. Il vient de sortir son dernier album. Beaucoup d'artistes en place s'inspirent de son travail, mais ça ne vole pas haut. Je veux du sang neuf, je suis prêt à prendre le risque. Declan me parle souvent de votre groupe. Vous devrier faire le soundtrack de sa série. Ton site je l'ai vu, ça décape. Je pensais que tu aurais peut-être un nouvel album sous le coude, mais on fera sans maquette. Passe demain.
Le directeur de Domino Records sera la main des deux comparse, puis s'en alla. Oswin ne voulait pas s'enthousiasmer, mais la recontre était magique.
— J'espère que tu as une bonne bouteille de whisky en stock !
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