Séraphin
L’attente était longue, comme si le temps avait ralenti sa course. Dans un noir d’encre, les croiseurs, les chasseurs et les vaisseaux-amiraux étaient tous stationnés aux diverses zones stratégiques, attendant les ordres. Toutes les unités qui n’affronteraient pas l’ennemi de front avaient leurs feux éteints et étaient à dix minutes de distance en vitesse semiluminique.
L’objectif était de prendre au piège la flotte Black-Tron après son arrivée dans l’aire de combat en la bloquant sur huit points d’attaque en formant un globe défensif. Les premiers à engager la lutte seraient les deux vaisseau-amiraux et quatre escadrilles de chasseurs parfaitement visibles afin d’attirer l’armada Black-Tron sur leur position.
La situation était déjà des plus stressantes, mais cette attente interminable mettait une pression supplémentaire, d’autant plus que les communications entre les agents en veille étaient interdites afin d’éviter que celles-ci ne soient interceptées par l’ennemi. L’effet de surprise devait être total pour que la bataille soit une réussite.
Dans son cockpit, Spiros patientait nerveusement. Cette bataille était peut-être enfin le dénouement final de cette guerre spatiale de cinq ans, mais l’issue était incertaine.
S’ils venaient à perdre, que feraient les Black-Trons à la colonie ? S’ils remportaient la victoire, que ferait-il, lui ? Retourner sur Terre Nouvelle et prendre un poste à Centralville ? Et dans quel domaine ? Vivrait-il avec Niki ? Voudra-t-elle revenir elle aussi ?
Il pensa également qu’il n’aurait peut-être plus l’opportunité de piloter un engin spatial. Après l’incident sur Képhas il y a deux ans, il était sûr de ne pas réintégrer M:Tronic. Mais il y avait plusieurs secteurs où il était possible d’être pilote, comme chez Futur-On ou Exploria.
Pour l’heure, rien n’était encore gagné. À l’heure qu’il était, la première ligne de défense n’avait probablement pas entamé le combat. La flotte ennemie n’avait peut-être même pas dépassé la ceinture d’astéroïde.
Spiros frissonna. L’appareil étant en veille, il ne générait aucune chaleur redistribuée dans le cockpit. Il régla le thermostat de sa combinaison sans trop monter la température pour économiser ses batteries. Et puis, lorsque la bataille aura commencé, il se retrouvera facilement en nage dessous.
Il regarda autour de lui. Les autres chasseurs flottaient lentement dans un mouvement calme, comme une respiration. Une des nouvelles améliorations de ces derniers était l’état de veille prolongée qui permettait un arrêt quasi complet des moteurs tout en pouvant effectuer un redémarrage rapide. Les commandes avaient été perfectionnées, mais Spiros regrettait les réglages de Pierrik qui avaient rendu son Protector plus maniable encore.
Son PR-21 avait été reconstruit comme il l’était avant sa modification, mais avec de meilleurs moteurs, plus réactifs et plus puissants.
Les boucliers énergétiques avaient été renforcés et calibrés pour permettre un repli derrière le bouclier atmosphérique sans être désintégré. Les lasers étaient également plus puissants, sans pour autant affecter les matières solides, le conteneur à mines IEM était plus grand et les missiles IEM étaient aussi plus rapides. Avec un tel arsenal, Spiros se disait qu’ils avaient toutes leurs chances.
***
Sur le pont de commandement de l’Odysséas, l’amiral Quotor était à la place du capitaine Ferne qui, elle, avait son siège sur le côté. C’était l’une des rares fois où l’équipage voyait un haut gradé prendre son poste sur le bâtiment. Ferne s’en sentait soulagée. Avoir avec elle son supérieur hiérarchique pour la prise de décision lui permettait d’avoir une charge de responsabilité en moins et ainsi un stress fortement allégé. Cependant, il lui fit remarquer que son expérience à bord n’était pas aussi éblouissante que celle du capitaine et qu’il comptait sur elle pour l’épauler au mieux.
Du moment qu’il assume ses responsabilités…, pensa-t-elle.
L’équipage était aux aguets et les membres de la vigie scrutaient la moindre parcelle dans un angle périphérique de 180°. Ferne avait suggéré de surveiller d'autres secteurs que la direction de la flotte Black-Tron, dans le cas où un poste avancé Black-Tron, qui aurait échappé à leur vigilance, enverrait une seconde armada à revers.
— Si seulement nous avions eu plus de temps pour les recherches, déplora l’amiral. Il est possible que vous ayez raison à ce sujet et si c’était le cas, nous aurions mal à les contenir sur plusieurs fronts.
— En contrôlant les régions dans un périphérique assez large nous pourrons voir approcher le moindre renfort ennemi, assura Ferne.
— Il faut déjà que nous nous occupions de celle qui arrive en face de nous. Puis-je vous demander votre avis sur cette offensive, capitaine ?
— Oh, heu… Eh bien, je pense qu’ils ont précipité leur attaque après nos assauts sur Képhas et Orphos. Probablement pour éviter l’amélioration de nos équipements après avoir récupéré quelques-uns de leurs nouveaux vaisseaux.
— C’est aussi mon opinion. Et je suis sûr que ces vaisseaux en question ont été fabriqués avec la matière première qu’ils nous ont dérobée.
— C’est une certitude. Rien dans les bases de données que nous avions prises il y a un an ne faisait mention de telles armes.
— En effet. Je serais curieux de découvrir leurs installations et leurs usines. Ils doivent avoir une société bien organisée et ingénieuse pour concevoir tout cela. Rien que par la présence de leur mégastructure sur la Lune noire, nous pouvons constater qu’ils possèdent une technologie très avancée, sûrement supérieure à la nôtre !
— Sauf votre respect, amiral, on pourrait penser que vous les admirez…
Quotor leva les yeux au ciel en réfléchissant puis répondit nonchalamment :
— En quelque sorte… oui. J’admire leur technologie. Si nous avions pu établir un contact cordial depuis le début, je suis persuadé que nous aurions pu faire de grandes choses ensemble. Cela paraît utopique, mais ce n’est peut-être pas trop tard pour cela.
— Nous l’espérons tous amiral.
— Capitaine ?
La vigie s’était présentée devant Ferne, annonçant probablement ce que tout le monde redoutait.
— Je vous écoute, sergent Blake.
— Nos senseurs ont repéré la flotte ennemie, capitaine. Elle approche par vingt degrés tribord de notre position.
— Comment ? s’étonna Ferne. Elle s’est décalée à ce point ?
— Ils ont dû modifier leur trajectoire dans la ceinture d’astéroïdes. Toujours est-il qu’ils convergent dans notre direction, mais dans l’état actuel des choses, ils peuvent découvrir les flottes dans les secteurs à proximité et se douter de notre stratagème.
— Voilà qui est fâcheux…, souffla Ferne.
— Gardons notre calme, dit posément Quotor. Pouvons-nous demander aux effectifs à tribord de se déplacer ?
— Oui, mais dès qu’ils allumeront leurs réacteurs, ils seront immédiatement repérables.
— Prévenons le Destiny dans ce cas. Nous devons modifier notre stratégie.
Quelques secondes après, deux hologrammes apparurent devant eux. C’était l’amiral Bekker et le capitaine Russo.
— J’imagine que vous avez également eu les dernières informations sur la position de l’ennemi, amiral Quotor ?
— C’est exact, amiral Bekker. Malheureusement, nous devons revoir immédiatement, et dans un délai très court, notre plan de défense !
— Effectivement… des idées ?
— Nous avons pensé prévenir les flottes à tribord pour qu’elles se déplacent, mais cela avertirait les Black-Trons de leur présence dans le secteur.
— Nous avons eu la même conception des choses de notre côté, confirma le capitaine Russo. Le temps jouant contre nous, nous n’avons guère le choix : les escadres du flanc droit doivent engager le combat à notre place en interceptant l’armada Black-Tron !
— L’idée me paraît bonne, admit Quotor après un moment de réflexion.
— Mais dans ce cas, intervint Ferne, il nous faut réduire le temps d’action qu’aurait dû avoir la flotte après le premier contact. Ils ne sont pas suffisamment armés pour tenir aussi longtemps que nous. Or, l’objectif était que nous puissions débuter le combat en attendant que toute la force Black-Tron soit dans notre zone de bataille afin de la bloquer de toutes parts avec nos effectifs. Et de plus, nous quitterions la zone où le bouclier atmosphérique sera déployé.
— Le capitaine Ferne a raison, approuva aussitôt le capitaine Russo. Lancer les flottes du flanc droit déplacerait notre zone de combat. Le flanc gauche mettrait également plus de temps pour intervenir.
— Ce qui sera forcément le cas, peu importe ce que nous décidons, souleva Quotor.
Si seulement l’agent Derry était là, pensa Ferne qui regrettait que Julius ait été assigné comme pilote sur cette mission. Il aurait été plus qu’utile en tant qu’aide stratégique que ces pipelettes !
— Où en sont les calculs de trajectoire de la flotte Black-Tron ? demanda Bekker.
— Elles arrivent, amiral, répondit le lieutenant Perguet. Nous avons émis trois possibilités d’itinéraire que l’ennemi pourrait emprunter. Les voici…
Ferne regarda les données du lieutenant Perguet et les transmit au Destiny.
— Cela manque de précision ! lança alors Quotor. Ne peut-on établir une estimation plus pointue ?
— Je pense que nous pouvons balayer de la main deux possibilités, intervint Russo. L’une d’elles éloignerait la flotte ennemie de Terre Nouvelle, car elle part dans le sens inverse de sa révolution. La seconde rencontre Lydda sur son chemin.
— Lieutenant Perguet, dit Quotor, il est évident que des données soient manquantes à vos calculs.
— J’en suis fort désolé, s’excusa Perguet qui semblait bien moins sûr de lui qu’auparavant. Je vais retourner à ma table pour recommencer.
— Inutile, lança impatiemment Bekker. Nous avons fait nos propres calculs. Il n’y a qu’un chemin possible à l’ennemi pour atteindre Terre Nouvelle.
— Leur itinéraire passe assez loin de la flotte du secteur N4 pour espérer qu’ils ne les voient pas, mais ce n’est pas une certitude à cent pour cent. Nous pouvons émettre également l’hypothèse que le corps armé se divise pour combattre sur plusieurs fronts, nous empêchant de les encercler.
— Il nous faut prendre une décision rapidement ! déclara Quotor. Pendant que nous discutons, l’ennemi se rapproche !
— Il n’y a pas à tergiverser, dit alors Bekker. Nous allons nous déplacer pour leur faire face. Prenons le risque de laisser le flanc droit être vu, mais dans ce cas-là, il serait préférable que nous soyons là pour leur prêter main-forte.
— Entièrement d’accord, approuva Ferne.
Sur l’autorisation de l’amiral Quotor, elle lança un appel à tous les vaisseaux de leur changement de position.
— Manœuvre de direction ! ordonna-t-elle. Transmettez les données à l’équipe de pilotage pour se placer dans l’axe de l’ennemi et les modifications à la flotte de bâbord !
— Données transmises, confirma la vigie. L’armada Black-Tron a augmenté sa vitesse de croisière. Nous entrerons en contact dans moins de vingt minutes !
— Que dites-vous ? s’écria Ferne, interloquée. Ils sont si proches de nous ?
— Affirmatif !
— Faisons avec ! Enclenchez l’hypervitesse !
La flotte quitta alors sa position initiale en vitesse semiluminique pour rejoindre la nouvelle zone de combat selon les coordonnées établies.
— Nous avons manqué une donnée, en conclut Quotor. Ne cédons pas à la panique ! Procédons d’urgence à une alerte maximum. Que chacun se prépare au combat.
— Artilleurs, soyez parés à tirer sur les croiseurs ennemis, ordonna Ferne. Lieutenant Perguet, vous dirigerez les escadrilles de chasseurs et transmettrez directement les ordres à chaque chef de groupe. Que les pilotes encore en poste dans les hangars soient prêts à décoller. Prévenez Terre Nouvelle pour déplacer les satellites de déploiement du bouclier atmosphérique !
— Bien, capitaine !
— Avez-vous des nouvelles du Séraphin ? demanda-t-elle à la vigie.
— Pas encore.
— Nous nous débrouillerons sans lui, dit calmement Quotor.
— Oui amiral.
Cependant, en visionnant les images de la flotte Black-Tron, elle savait qu’un troisième vaisseau-amiral serait le bienvenu dans ce combat.
***
— Nous venons de recevoir une information de la flotte principale, déclara Bannoc à toutes ses équipes. L’ennemi a changé de trajectoire après sa sortie de la ceinture d’astéroïdes et se déplace plus vite que selon nos estimations. Nous allons nous lancer dans la bataille plus tôt que prévu et à un autre point de saut.
Tant mieux, pensa Spiros. Cette attente devenait insoutenable…
Il sentit une sueur froide couler le long de son dos, le faisant frissonner. Les nouvelles coordonnées arrivèrent sur son écran de contrôle et il les rentra dans l’ordinateur de bord.
Le temps de trajet va être plus long. Ce qui veut dire…
La voix de l’adjudant confirma sa conclusion :
— Départ de la flotte dans une minute ! Je répète : Départ dans une minute ! Démarrer vos réacteurs, passage en vitesse semiluminique imminent !
Cette fois, les dés étaient jetés. L’escadron dirigé par l’adjudant Bannoc partit dans le tunnel de vitesse pour un trajet qui dura une demi-heure. En arrivant, ils constatèrent que la bataille était déjà engagée.
La flotte ennemie était en très grand nombre et composée de divers vaisseaux. Cependant, il ne semblait pas y avoir un seul de ces nouveaux appareils. Il y avait quatre gros transporteurs d’où sortaient des essaims de chasseurs Intruders. Les croiseurs Deserters occupaient les flancs de l’immense armada et la défendaient efficacement.
Néanmoins, le stratagème de la Police Spatiale avait réussi : les vaisseaux Black-Trons étaient désormais piégés au centre d’un globe formé par les différentes escadrilles de police. Cependant, l’ennemi était beaucoup plus nombreux qu’eux et offrait une offensive bien plus violente que les astropoliciers n’avaient vécu jusque-là. Les deux vaisseau-amiraux bombardaient de leurs puissants lasers les croiseurs Deserters qui s’approchaient dangereusement. Deux d’entre eux étaient déjà hors service et dérivaient dans le vide. Les Protectors s’occupaient de tout ce qui passait à leur portée, évitant les tirs des croiseurs encore opérationnels.
La flotte du flanc gauche arriva à son tour, finalisant ainsi la formation.
— Escadrille deux, avertit Niki, prenez position à deux heures ! Ne laissez aucun chasseur ennemi sortir du périmètre !
— À vos ordres !
Spiros brancha ses moniteurs puis suivit ses compagnons. Son écran de contrôle afficha les données de la bataille, signalant l’état de chaque Intruder qui passait devant ses détecteurs. Plusieurs d’entre eux avaient déjà leurs boucliers énergétiques fortement affaiblis, il ne restait plus qu’à terminer le travail. Chacun s’élança alors à la poursuite de l’un d’eux.
Celui que Spiros avait choisi lui donna un peu de fil à retordre. Ce dernier anticipait chaque tir de laser en esquivant habilement, lui permettant de recharger son bouclier. Niki lui porta assistance après s’être débarrassée du sien et ils finirent ensemble par court-circuiter l’appareil.
— Merci mon c… heu… Sergent… Niki !
— Ils sont beaucoup plus coriaces, dit Niki sans tenir compte du lapsus de Spiros. Il va falloir être deux pour un seul adversaire…
— Mais ils sont plus nombreux que nous ! Ça va être vachement compliqué…
— Pas le temps de tergiverser ! répliqua-t-elle. Suis-moi !
— OK…
Ensemble, ils formèrent un duo efficace, pourchassant et neutralisant inlassablement les chasseurs ennemis qu’ils croisaient. Beaucoup d’Intruders étaient de simples drones, offrant une certaine facilité pour les abattre au contraire de ceux pilotés par cette fameuse élite qui était très résistante et combative. Plusieurs Protectors avaient déjà succombé sous les rafales de lasers malgré la protection des croiseurs Commanders.
Après une heure de combat intensif, Spiros commençait à fatiguer et transpirait abondamment sous sa combinaison. Il perdait en réflexe et dextérité, mais il remarqua que c’était également le cas pour l’ennemi. Au bout d’un moment, une escadrille Black-Tron se faufila derrière lui, l’arrosant de lasers en continu. Les premiers tirs le touchèrent avec violence, l’obligeant à se déporter vers un croiseur Commander pour se protéger. Bien que celui-ci les mit en déroute, ils avaient suffisamment réduit le bouclier de Spiros pour endommager son Protector et le rendre instable.
— PR-21 à C-3 ! Je suis gravement touché ! Je ne contrôle plus l’appareil !
— Ici C-3 ! Essayez de vous placer en arrière-garde dans nos six heures et éteignez vos réacteurs ! Nous allons envoyer un drone de remorquage !
Malheureusement, Spiros n’arrivait pas à maintenir la moindre stabilité sur son chasseur. L’un des réacteurs était endommagé et menaçait d’exploser. Il dériva pendant de longues minutes, s’éloignant involontairement du combat. Il finit par attraper la manette d’arrêt d’urgence qui lui permit de couper tout le circuit d’alimentation, à l’exception du module de survie et de la radio. Le chasseur se mit à tourner moins vite, mais, pris dans un élan dans le vide spatial, il ne s’arrêtera que lorsque le drone l’aura récupéré. Pour l’heure, il était totalement paralysé.
— Julius… Niki… je suis désolé…
De rage, il frappa son tableau de bord face à son impuissance. Et alors qu’il regardait les éclairs de la bataille dont il s’éloignait de plus en plus, il vit avec horreur trois Intruders qui s’approchaient de lui, tirant à leur tour pour terminer le travail.
Je suis foutu !
Pour sûr, cette fois c’était fini. Il ferma les yeux, espérant que cela se fasse le plus rapidement possible et sans douleur.
Mais voyant que cela prenait du temps, il les rouvrit et s’aperçut qu’il ne dérivait plus. Tournant la tête dans tous les sens pour comprendre ce qui se passait, il ne remarqua pas tout de suite l’imposant vaisseau qui se dressait devant lui, immense et majestueux. Il ne ressemblait en rien à ce qu’il avait vu jusqu’à présent. Ses couleurs étaient différentes de tous les organismes de la colonie : au lieu du bleu habituel sur la carlingue, c’était le gris qui prédominait et les vitres étaient d’un vert émeraude. Le logo de la Police Spatiale était pourtant bien présent sur les côtés. Des Protectors ainsi que des Strikers l’accompagnaient. Ces derniers avaient déjà neutralisé les trois Intruders sans ménagement. Une voix résonna alors dans le communicateur de Spiros :
— Pilote du chasseur PR-21, m’entendez-vous ?
— Je vous reçois cinq sur cinq, répondit-il, essayant de dissimuler sa joie.
— Votre état ne vous prédispose pas à continuer le combat. Nous allons vous remorquer à l’intérieur du Séraphin.
— Merci infiniment, souffla Spiros.
Il n’avait jamais eu aussi peur de toute sa vie. Celle-ci s’était mise à défiler devant ses yeux comme un film biographique. Ses mains tremblaient nerveusement. Il s’enfonça dans son siège, attendant que le drone de remorquage ait fini de le tracter jusqu’à l’un des hangars du nouveau vaisseau-amiral.
***
— Capitaine ! s’écria la vigie de l’Odysséas. Le Séraphin vient d’arriver à proximité de la zone de combat !
— Enfin ! souffla Ferne, sans dissimuler son soulagement. Envoyez-leur un message : Nous sommes ravis de les voir et qu’ils prennent position sur le flanc gauche.
— À vos ordres !
— Je ne suis pas mécontent qu’ils soient là, avoua Quotor en s’essuyant le front avec un mouchoir. Nous résistons, mais la situation devenait dangereuse. Ces pilotes d’élite sont vraiment très efficaces !
— D’après la dernière analyse, la moitié de l’armée Black-Tron est neutralisée, mais… nous avons perdu un tiers de nos effectifs, dont deux croiseurs.
— Mon Dieu… Je savais que c’était impossible d’éviter cela, mais…
Le lieutenant Perguet s’avança vers les deux officiers.
— Voici un autre rapport, capitaine, dit-il. Il y a… quelque chose d’étrange sur l’arrière-garde ennemie.
— Des précisions ?
— Voyez plutôt…
Il afficha une image sur l’écran principal du pont.
— Elle a été prise il y a quinze minutes par le Striker de l’adjudant Kerrel. Regardez ces trois appareils derrière les transporteurs…
L’image montrait trois sortes de satellites aux couleurs noire et jaune. Ils étaient aussi hauts qu’un transporteur Black-Tron et longs qu’un Deserter.
— Qu’est-ce que ceci ? demanda Quotor.
— Nous l’ignorons… cependant, ces vaisseaux émettent un signal semblable à celui émis par les balises découvertes récemment dans la ceinture d’astéroïdes.
— Vraiment ? murmura Quotor, intéressé. Et s’ils prévoyaient autre chose qu’une simple bataille ?
— Que voulez-vous dire ? demanda Ferne.
— Les balises ont été trouvées il y a peu, mais depuis combien de temps sont-elles là ? Mystère. Maintenant, nous découvrons que le signal qu’elles émettent est identique à celui émis par ces trois étranges vaisseaux. Je parie ma casquette d’officier qu’il y a un lien et que c’était préparé d’avance par l’ennemi.
— Une nouvelle arme ?
— Sans nul doute. Il faut orienter l’attaque sur ces trois appareils.
— Les atteindre est très difficile amiral, prévint Perguet. Ils sont gardés par trois Deserters sur tous les côtés.
— Mais pas sur l’avant où seuls les transporteurs font office de garde… Contactez nos meilleurs pilotes ! Qu’ils forment une nouvelle escadrille d’attaque où leur objectif sera de neutraliser ces vaisseaux. Que les escadrilles du Séraphin les couvrent.
— Bien amiral.
— Je n’aime pas ça, souffla Quotor au capitaine Ferne. Encore des nouveaux vaisseaux qui, par ailleurs, n’ont toujours pas attaqué…
— Je suis d’accord, affirma-t-elle. Cela cache quelque chose. Je préviens immédiatement le Séraphin et le Destiny.
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