Chapitre 12
Léana
Voilà trois semaines que je suis de retour en France. Ce break me fait beaucoup de bien. J’ai retrouvé famille et amis ; aussi je rends visite à mes grands-parents tous les trois jours, les sors se promener et profite de leur compagnie. J’ai également passé du temps avec la sœur de ma mère, Emie et mes cousines Amélie et Anne. J’ai aussi rencontré Orane, la petite amie de mon frère Arnaud, pour la seconde fois. Je me suis excusée un millier de fois de ne pas me souvenir d’elle, même si elle n’a pas semblé m’en vouloir. Hier soir j’ai appris que j’allais devenir Tata, et depuis je suis sur un petit nuage. J’ai un peu l’impression de revivre au contact de mes proches français. C’est presque comme si je n’avais pas perdu la mémoire, que j’étais simplement partie en voyage un long moment et que nous reprenions contact une fois mon retour.
Amélie m’a invitée à déjeuner chez elle. De trois ans mon aînée, cette jeune femme a toujours été mon modèle. Jolie, gentille, intelligente et drôle, Amélie a tout pour elle. Nous avons la médecine en commun, puisqu’elle est infirmière aux Urgences de l’hôpital près de chez ma mère.
- Tu m’as l’air bien pensive aujourd’hui.
- Moi ? Pas plus qu’hier, soupiré-je. J’ai un secret que je ne suis pas en droit de te révéler et ça me tue parce que je suis tellement contente que j’ai envie de le crier sur tous les toits.
- Ton frère m’a appelé ce matin, sourit-elle. Je suis au courant.
Je souris de toutes mes dents et sautille sur place comme une enfant. Je sais d’avance que je serai une tata totalement gaga, et l’idée de repartir aux Etats-Unis me vrille à présent les entrailles. Je suis partagée entre mes deux univers, j’aimerais pouvoir me dédoubler et ne rien manquer de la grossesse d’Orane, de la vie de ce bébé qui n’est pas encore là mais que j’aime déjà.
- Je n’arrive pas à croire que je vais devenir tata !
- C’est top, rit-elle en se moquant clairement de moi.
Je finis d’assaisonner la salade et l’apporte à table avec le fromage quand mon téléphone sonne. Je fronce les sourcils, tentant de me souvenir où je l’ai laissé traîner. Amélie me le tend avec un sourire en coin.
- Matt hein ? Encore lui ?
Je hausse les épaules en me retenant de sourire comme une ado lorsque je récupère mon téléphone. Matthew m’envoie des messages tous les jours pour prendre de mes nouvelles, me raconter les derniers ragots de la caserne, me dire que je lui manque, que la maison n’est pas tombée en mon absence.
Matt :
Un petit coucou du groupe pendant la garde. Paul est venu
nous apporter à manger. Tu y crois toi ? Tu me manques
Chouquette. Comment ça va aujourd’hui ?
-Ouvrir la pièce jointe-
Je souris en voyant la photo de mes collègues pompiers et ambulanciers grimaçants et faisant coucou à l’appareil. Ils me manquent tous beaucoup, un peu plus chaque jour en vérité. Mon petit cœur est tiraillé entre ma famille française et ma famille de cœur, de l’autre côté de l’Atlantique.
- Matt ouais. Il prend de mes nouvelles et m’en donne, comme tous les jours.
- Tu as un sourire à la con quand tu lis ses messages cousine. Enfin bon, je comprends, il est canon et en kiffe sur toi.
- En kiffe sur moi ? je ris. Non, certainement pas.
- Oh ma belle, je l’ai vu quand vous êtes venus à Noël, je t’assure qu’il a des vues sur toi. Et vu ta tête, tu ne dirais certainement pas non. D’ailleurs, peut-être que tu avais dit oui mais que tu ne t’en souviens pas ?
- Arrête Amélie, ça fait partie des choses qui me torturent l’esprit depuis des mois, mais je ne me souviens de rien, soupiré-je.
- A mon avis, tu t’en souviendrais si tu te tapais un mec pareil, rit-elle.
- Je ne me souviens pas de la copine de mon frère, d’un de mes collègues, comment veux-tu que je me rappelle de ça ? Mon cerveau n’a pas fait de sélection tu sais, j’ai tout zappé.
Je réponds à Matthew plutôt que de replonger dans une phase de regrets.
Moi :
Et c’est bon ? Parce qu’apporter à manger ne veut pas
dire que c’est mangeable ahah ! Tu me manques aussi.
Vous me manquez tous d’ailleurs. Merci pour la photo.
Je me remémore cette fameuse soirée à la caserne où, après avoir appris à Paul à faire un gratin de courgettes à la coloc, il s’était décidé à assurer son tour en cuisine autrement qu’en commandant des pizzas, nous servant une mixture dégoûtante où le sel avait été accidentellement remplacé par du sucre. Du moins, nous espérions tous qu’il s’agissait d’un accident et non d’une vengeance pour s’être fait moquer si souvent de ses menus pizzas.
Matt :
C’est…pas dégueulasse dirons-nous. Tu ne m’as pas dit
comment tu allais, un souci ?
Moi :
Appelle-moi quand tu as 2min, j’ai un truc à t’annoncer.
J’ai à peine le temps de reposer mon téléphone qu’il sonne. Une conversation vidéo démarre lorsque je décroche et je vois apparaître Matt, dans le dortoir de la caserne, vêtu de son tee-shirt de pompier. Il a les cheveux ébouriffés et semble sortir de la douche. Il m’adresse son sourire ravageur, comme si voir ses beaux yeux bleus et sa barbe de quelques jours n’était pas suffisant pour mes hormones.
- Salut Colocator, dis-je en souriant.
- Tout va bien alors ?
- Oui, super bien. Et toi ?
- Ça va. La routine quoi.
- Salut Matt, minaude ma cousine en français en se plantant derrière moi.
- Bonjour Amélie, répond Matt avec son accent américain qui ferait mouiller toute petite culotte française, y compris la mienne. Alors Léa, reprend-il en anglais, qu’est-ce que tu as à m’annoncer ?
- Ma belle-sœur est enceinte, je vais être tata !
- Ouah, félicitations tata ! sourit-il. Ils savent déjà si c’est un garçon ou une fille ?
- Non, pas encore. Je dois accompagner Orane a l’écho des trois mois, jeudi prochain, mon frère bosse.
- C’est génial Chouquette, je suis content pour toi.
- Hey ! crie Théo en débarquant derrière Matt.
- Salut nounours ! souris-je. Comment tu vas ?
- Bien et toi ma jolie ?
- Ça va, mais vous me manquez les gars !
- Tu nous manques aussi, enfin surtout à Matt, rit-il en ébouriffant la tignasse de mon colocataire.
Matt bougonne et l’envoie bouler. Et moi, mon cœur se réchauffe en voyant sa mine faussement enjouée qui semble cacher qu’en effet je lui manque. Depuis mon accident, Matthew est mon repère, mon roc et ma constante. Il ne passe pas un jour sans que l’on se voie, normal puisque nous sommes colocataires et collègues, mais il a toujours une attention, un mot, un petit quelque chose qui me fait du bien. Je crois que c’est ce qui me manque le plus ici en France. J’en suis même sûre, et l’idée de rentrer me traverse pour la première fois depuis que je suis arrivée lorsque je le vois me saluer à la va-vite lorsque la sirène retentit.
Matthew
Un mois et demi que Léana est en France. J’hésite entre prendre un avion pour la kidnapper et la ramener à la maison ou simplement prendre un avion pour la retrouver et prendre ma dose. Le sevrage a été brutal et, si c’est censé être plus facile avec le temps pour une drogue basique, la mienne n’est en rien ordinaire et le manque se fait de plus en plus ressentir.
Je suis bien implanté dans un quotidien morose et banal sans ma femme. Même s’il ne se passait plus rien entre elle et moi depuis son accident, l’avoir près de moi me faisait du bien et me rassurait. Ici, je ne sais rien ou presque de ce qu’elle fait. Et si elle rencontrait quelqu’un en France ? Je crois que je ne m’en remettrais jamais.
Je profite d’une soirée en tête à tête avec la télévision pour décompresser. Paul me bouscule pas mal en ce moment. Il joue le pote qui s’inquiète, qui veut me sortir et me changer les idées, mais mes idées, elles, ne veulent pas quitter ma tête et cela ne sert à rien. Léa m’a envoyé des messages jusque tard dans la nuit, pour elle, et je suis ravi de voir que je lui manque et qu’elle l’exprime clairement.
Depuis une dizaine de minutes, un pot de glace à la vanille repose sur la table basse. Il m’en faut peu pour que les souvenirs resurgissent, et celui-ci est particulièrement agréable.
****
Dix-huit mois plus tôt
Lorsque je rentre de mon entretien annuel avec le Chef des Pompiers de la ville, Léana est dans la cuisine, le nez dans le congélateur. Elle porte une de ses chemises blanches féminines qu’elle laisse toujours suffisamment déboutonnée pour me faire saliver sans que cela ne devienne vulgaire, et une petite jupe noire volante. Je dépose ma veste sur le canapé, déboutonne le col de ma chemise en la rejoignant alors qu’elle s’assied sur le plan de travail, un pot de glace et une cuillère à la main.
- Où est Paul ?
- Il vient de partir prendre une douche, sourit-elle en ouvrant le pot de glace vanille.
Il ne m’en faut pas plus pour me glisser entre ses cuisses et déposer un baiser sur ses lèvres. Nous avons convenu que nous serions discrets, les relations entre collègues étant interdites à la caserne, mais cela se révèle plus compliqué à la coloc étant donné que nous travaillons avec Paul.
- Comment s’est passé ton entretien ? me demande-t-elle en déboutonnant un peu plus le col de ma chemise.
- Pas mal. Ils cherchent à savoir ce que vaut Jones pour le remplacer, mais ils sont tombés sur un os.
- Fidèle en toutes circonstances Monsieur Wilson.
- Tu n’as pas idée.
Je dépose mes lèvres sur les siennes et trace une ligne de baisers le long de sa mâchoire, remonte jusqu’à son oreille que je mordille avant de murmurer.
- Tu es magnifique aujourd’hui, je suis jaloux de Sophia qui a pu profiter de cette vue toute la journée.
- Rejoins-moi ce soir dans ma chambre et tu pourras avoir cette vue et plus encore.
Je grogne en glissant mes mains sous sa jupe pour caresser ses cuisses tout en embrassant son cou. Cette femme réveille en moi mon instinct primaire, l’homme de Cro-Magnon tapi sous la bienséance. J’aimerais la posséder encore et encore, la toucher constamment et l’entendre gémir contre moi jusqu’à ce qu’elle me supplie de ne plus lui faire l’amour.
- Arrête, Paul pourrait sortir de la salle de bain à tout moment, murmure-t-elle en récupérant le pot de glace après s’être légèrement reculée.
On entend l’eau de la douche se mettre à couler et la musique démarrer pour la faire mentir. Je lui souris et déboutonne entièrement son chemisier pour découvrir son soutien-gorge en dentelle blanche. Je dépose un baiser entre ses seins en remontant mes mains sur ses hanches.
- Matt, arrête, soupire-t-elle. Laisse-moi manger ma glace tranquillement.
- Hors de question, murmuré-je contre sa peau.
- Je suis sérieuse, répond-elle en me repoussant gentiment avant d’enfourner une cuillère de glace entre ses jolies lèvres. Tu en veux ?
J’acquiesce, à défaut d’avoir mieux pour le moment. Elle porte une cuillère à mes lèvres et lorsque j’ouvre la bouche, la descend contre mon torse et trace un sillon de glace jusque dans mon cou. La fraîcheur me fait frissonner, le côté érotique de la scène réchauffe le sang dans mes veines et envoie une décharge électrique de ma nuque jusqu’à mon entrejambe. Léana me sourit malicieusement et lance un « Oups » tout en venant lécher la glace qu’elle a déposée sur ma peau. Bordel, cette femme est la tentation même.
- Nouvelle tentative ? sourit-elle en avançant une nouvelle cuillère de glace jusqu’à mes lèvres.
Cette nouvelle bouchée m’échappe pour atterrir dans sa bouche. Je souris et me penche pour l’embrasser, glissant ma langue contre la sienne pour goûter ce délicieux parfum de vanille.
- Hum, un régal, ris-je après avoir lâché ses lèvres.
- A qui le dis-tu, sourit-elle en déposant à nouveau de la glace sur mon torse.
Elle me sourit et vient lécher le sillon qu’elle a tracé avant de s’attarder dans mon cou jusqu’à me faire frissonner. Lorsqu’elle remonte le long de ma mâchoire et finit par poser ses lèvres sur les miennes, c’est tout mon corps qui s’est embrasé au contact du sien. Je glisse une main sur sa nuque et approfondis notre baiser, jouant avec sa langue, la câlinant, mordillant sa lèvre inférieure.
Léana plonge à nouveau sa cuillère dans le pot de glace et vient dessiner des arabesques sur sa cuisse en se mordillant la lèvre. C’est érotique à souhait et le « oups » qu’elle murmure est provocateur et sexy.
- Bon sang Diablesse, tu auras ma peau.
Je l’embrasse à nouveau puis me penche pour venir lécher sa cuisse, remontant plus haut que le sillon de glace laissé par la cuillère. Léana gémit lorsque j’embrasse l’intérieur de sa cuisse, puis fait courir la cuillère sur son ventre, traçant un cercle autour de son nombril puis remontant jusqu’au creux de ses seins et je suis, docile, le chemin dessiné par ma belle.
- Matt, soupire-t-elle pour mon plus grand plaisir lorsque je mordille son épaule.
- Oui Diablesse ?
- Tu me rends dingue, tu le sais ça ?
Je lui prends la cuillère de la main et la plonge dans la glace pour dessiner un nouveau chemin sur son corps, que je suis avec plaisir, de son épaule à son bas-ventre.
- Je sais, et c’est réciproque.
Je me redresse et la plaque contre mon torse. Nul doute qu’elle peut sentir mon érection plaquée contre son intimité, mon souffle court dans son cou, ma peau échauffée contre la sienne.
- J’ai envie de toi Léa, tellement envie de me perdre en toi.
Léana entoure ma taille de ses jambes et nos bouches se rejoignent pour ne se lâcher que lorsque nous sommes à bout de souffle tous les deux. Je lui souris et m’apprête à la porter jusqu’à sa chambre lorsque j’entends la musique s’arrêter dans la salle de bain. J’adresse un regard désolé à ma belle tout en reboutonnant ma chemise. Léa fait de même. Le feu crépite dans mon pantalon et à voir la façon dont elle serre les cuisses sur le plan de travail, il en est de même sous sa jupe. Paul sort de la salle de bain alors que je fais mine de fouiller dans le frigidaire, tentant de refroidir mes ardeurs.
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