Ma tête me fait mal. Elle bourdonne. Mes yeux parviennent difficilement à s’ouvrir. Je suis couchée sur une surface dure et froide. Mon cœur sursaute. Où suis-je ?

Vous connaissez cette sensation de peur et d’inquiétude qui monte en vous lorsque vous fouillez dans votre manteau et que vous ne trouvez plus votre portefeuille. Vous êtes pourtant sûr de l’avoir pris le matin même. Vous devenez livide et finissez par vous apercevoir qu’il est dans votre poche.

Je suis certaine que mon visage pâlit comme dans cet exemple. À la différence que la solution n’est pas à portée de main. Je commence à angoisser. Mes paupières se soulèvent difficilement.

Des taches noires s’impriment devant ma rétine. Des murs bougent autour de moi. Se stabilisent après quelques minutes. Que m’arrive-t-il ?

Pendant un instant, je me vois plongée dans un mauvais cauchemar. Un genre de rêve lucide. Mais tout est trop réel. Les détails sont nombreux. Les murs de béton blancs qui m’emprisonnent refoulent une légère odeur d’humidité.

Du calme Alice.

Plus facile à dire qu’à faire. Je me rends soudain compte qu’une petite fenêtre, en haut, dans le coin gauche, pas plus grande qu’un set de table, laisse filtrer un rayon de soleil. Elle est située au-dessus d’un WC, lui-même mitoyen à un mur et à un petit lavabo. Je fais couler l’eau. Tout est fonctionnel. C’est quoi ce bordel !

Et là, je réalise.

Je suis enfermée dans une pièce souterraine semi-enterrée !

Une porte me dévisage, silencieuse et infranchissable. Mon souffle s’accentue. Ma tête imagine tous les scénarios. Mes mains deviennent moites, sans parler de mon esprit qui ne parvient pas à rationaliser les évènements.

Bordel ! Hier soir je me rappelle m’être endormie dans mon lit après avoir souhaité une bonne nuit à ma mère ! Ce ne peut pas être vrai, je n’y crois pas.

Je ris nerveusement. Les larmes prennent le dessus. La panique s’instaure.

Non, non, pourquoi moi !

Je ne voyais ça que dans les films. Une boule se coince dans ma gorge. Ma respiration saccade et devient plus difficile. Je dois me détendre, même si c’est compliqué. Je vais me réveiller.

Pince-toi.

À ce moment, j’ai peur de le faire car, sur les deux solutions possibles, une seule va voir le jour ; soit je me réveille précipitamment dans mon lit, trempée de sueurs, soit rien ne se passe et je suis dans la sombre réalité.

Je tremble. Caresse mon bras. Les sensations sont faibles. Le rayon de soleil se fait plus intense dans ma tête. Une lueur d’espoir.

J’attrape la peau de mon avant-bras gauche et pince un grand coup. Je crie en fermant les yeux. Quand mes paupières se soulèvent, je suis toujours là. Bloquée entre quatre murs. Je hurle.

— Ouvrez-moi ! Qu’est-ce que je vous ai fait, putain !

Les larmes ruissellent. Un gros nuage gris passe devant le petit rayon de soleil qui maintenait une once de clarté dans le creux de mon cœur. Qu’ai-je fait pour mériter ça ?

Dans une dernière tentative, malgré le temps qui commence à noircir, j’imite les films à suspense et colle mon front contre la fenêtre, sans doute triple vitrée, et m’époumone à quémander de l’aide.

De l’extérieur, on ne doit certainement apercevoir que la partie haute de mon visage en se rapprochant suffisamment.

Seuls les arbres entendent mes supplications. Je suis anéantie. Des gouttes de pluie martèlent la terre.

Même la nature ne veut pas que je sois retrouvée. Est-ce une réponse que le ciel m’envoie ?

Tu deviens folle Alice.

Folle, mais réaliste. Je suis prisonnière d’un fou. Que va me faire mon agresseur ? D’ailleurs, j’espère qu’il ne m’a pas touchée depuis que je suis ici. Ma haine se déverse contre la vitre par des coups puissants et répétés. Une rivière coule le long de mes joues.

Une tempête se décharge contre les arbres.

Sur le moment, je ne pense même pas aux questions les plus importantes ; qui me veut du mal ? Comment m’a-t-il capturée ? A-t-il fait souffrir ma mère ? Où est-elle ?

À la place, je me noie dans le paysage en enviant les arbres enracinés dehors à quelques mètres de moi, malmenés par le climat. Au moins, eux, sont à l’extérieur.