Chapitre 9 - Un nouveau chemin
Dans l'intimité d'une chambre à coucher professorale :
─ Chéri, tu sais, j’envie Aël et Caleb.
─ Ah oui ! Le petit couple. Pourquoi tu les envies ? Tu voudrais retourner au lycée et te taper des ados. Un " vieux " de plus de trente ans, ça ne te fait plus bander ?
─ Ne les appelle pas comme ça. Et non, je ne veux pas me " taper " des ados. J’en vois toute la journée alors non merci, et un trentenaire, je trouve ça très sexy. Non, ce que je veux dire c’est qu’ils sont tombés amoureux pendant leur première année au lycée et qu’ils sont trop mignons ensemble.
─ Mouais, enfin, j’ai eu peur qu’il y ait un meurtre avant les vacances de Noël ! L’air était électrique entre eux.
─ Oui, mais les choses ont évolué et maintenant, ça sent l’amour à plein nez. Au fait, plusieurs de nos élèves n’ont plus de patrons pour effectuer leur stage en entreprise. J’ai pensé qu’on pourrait au moins aider Aël et Caleb.
─ Ah ! Notre petit couple ! Comment veux-tu les aider ?
─ Ne dis pas " notre petit couple ", ils ne sont même au courant que nous savons pour leur liaison. Pour les aider, je pensais demander à Alfred. Tu sais, le menuisier que l’on a rencontré lors de la soirée " Arc en ciel " aux " Ateliers du Bonheur ". Comme ils n’accueillent que des hommes gays dans leur communauté, je crois que c’est une bonne solution pour eux.
─ Je te suis à 100%. Par contre il faudra présenter ça aux parents comme un stage normal. Affirme le professeur de mathématiques d’Aël et de Caleb.
─ Mais c’est un stage normal ! Il y a des moments où tu me déçois à dire ce genre de chose. Répond le professeur de français du " petit couple ".
─ Je suis désolé. J’ai encore du mal à assumer d’être gay. Pour en revenir à nos amoureux, Alfred est très sympa. Il vit avec deux gars.
─ Oui ! Avec un plombier et un électricien. Ils pourraient être leurs maîtres de stage. Demain, j’ai du temps alors je vais l’appeler et lui demander d’intercéder auprès de sa communauté.
─ D’accord ! Bon moi, je dors. Je suis lessivé. Bonne nuit, mon amour !
─ Non, pas tout de suite, s’il te plaît ! Allez, juste un petit câlin. Après promis juré, je te laisse tranquille. Minaude le prof de français.
─ Je sais très bien que cela ne va être un petit câlin rapide et vite fait. Je te connais comme ma poche. Dit le prof de maths en se pelotonnant contre son partenaire.
─ J’aime quand tu me cèdes aussi facilement. Répond son compagnon en embrassant tendrement son chéri. Ne t'inquiète pas, je n’oublierai pas d’appeler Alfred demain.
─ Appelle demain à la première heure. Maintenant c’est notre moment sexe, alors chut, on ne parle plus boulot. Dit-il en baissant le pantalon de pyjama du professeur de français et en plongeant sous les draps.
Maman approuve mon point de vue. Elle ne révèlera rien à la famille de Caleb au sujet de notre relation.
─ Ce n'est pas que je veuille épargner la sensibilité de ses parents et de ses frères, mais je comprends que Caleb ne se sente pas assez fort pour dire qu'il y est. Chacun a son rythme. Personne ne doit ou ne peut le faire à sa place. Et puis, il n'y a aucune raison de faire un coming-out. On ne demande jamais aux hétéros de faire le leur ! Ajoute-t-elle avec un air très sérieux.
─ Maman, tu es très woke.
─ Est-ce une insulte ?
─ Absolument pas ! Au contraire. Tu es ouverte d'esprit. Tu es la meilleure des mères qui soit.
─ J'ai pris la décision de me mettre en retrait de cette famille afin de ne pas commettre d'impair.
─ Je te fais confiance. Tu sais ce qui est le mieux.
─ C'est moi qui te fais confiance. Tu avais raison : Caleb a beaucoup changé. Il est vraiment gentil.
─ Ce n'est pas qu'il ait changé, c'est qu'il s'est libéré d'un poids. Il sait qui il est, quels sont ses préférences sexuelles. C'est juste dommage qu'il ne puisse pas le dire à ses parents.
─ Il a de la chance de t'avoir comme petit ami. Je suis sûre que tu le soutiens du mieux que tu peux.
─ On n'a pas le choix lorsque l'on est amoureux !
─ C'est certain.
Durant les quinze premiers jours de vacances d’été, Caleb rattrape le stage qu’il n'a pas pu effectuer cet hiver à cause de sa maladie. J’en profite pour étudier : il faut que j’avance en français et en histoire-géo, sans compter les maths, la physique et la chimie des classes de seconde et de première. Je fais ça en secret. Je vais bien passer mon CAP, mais je veux aussi passer la première partie de mon baccalauréat. La situation financière de maman s'est améliorée. Elle n'aura pas besoin de mon soutien et j’ai vraiment envie de faire du génie électrique.
J’ai mis mes profs de maths et de français dans la confidence. Ils m’apportent leur soutien et leur aide. Ils m’ont prêté des manuels scolaires. Ils corrigent les exercices que je fais en cachette de Caleb. J’appréhende de lui dire : ne sera-t-il pas déçu que je le lâche après le CAP ? Si j’arrive à avoir mon baccalauréat S, je devrais aller étudier dans une école d'ingénieur hors de la ville. Je me sens comme un lâcheur ou un traitre. Mais tant pis, il faut que je le fasse pour n'avoir aucun regret.
Plusieurs élèves doivent trouver un nouveau maître de stage. Soit à cause d'un patron qui met la clef sous la porte ou de problèmes internes dans l'entreprise. Caleb et moi faisons partie du lot.
Maman a été contactée par mon prof principal qui m'a trouvé un nouveau maître de stage. Le problème est que c’est à l’autre bout de la ville. Elle a quand même pris rendez-vous :
─ On ne peut pas refuser tout de suite car si tu ne trouves rien d’autre, tu devras peut-être faire ton stage hors de la ville et ça sera très fatigant pour toi.
─ Ne t'inquiète pas maman, je serai d'attaque même si je dois passer du temps dans les transports en commun.
─ Je sais bien mon chéri. Ton professeur principal m’a assuré que c’est une entreprise très sérieuse qui est reconnue pour son savoir-faire dans la région. En général, elle ne prend pas de stagiaire mais elle est prête à faire exception cette fois-ci.
Maman est très enthousiaste. Je la suspecte de me cacher quelque chose. Je sais qu'elle ne va pas me faire un sale coup. Je me demande quand même pourquoi elle a l'œil qui vrille en parlant de cette entreprise si prometteuse.
Caleb trouve lui aussi un nouveau maître de stage. Maintenant, je comprends pourquoi maman avait l’air de me faire des cachotteries : Le stage de Caleb et le mien sont au même endroit ! C’est vraiment une bonne nouvelle.
Avec Caleb, nous allons dans un centre de prévention des maladies sexuellement transmissibles. Nous rencontrons un infirmier, du nom de Dorian. Il est très sympa. Il répond à toutes nos interrogations. Caleb ose lui demander comment faire pour la sodomie, quelles sont les précautions à prendre ? Il nous donne un fascicule, des noms de livres bien faits et une boîte de préservatifs ainsi que du lubrifiant. Il est très didactique et appelle les choses comme elles sont. Ces explications sont très claires. Il nous invite à revenir si nous avons d'autres questions ou des soucis.
Il fait une prise de sang à Caleb pour détecter les infections sexuellement transmissibles (IST) comme le VIH, l'hépatite B et la syphilis. Dorian examine les organes génitaux de Caleb afin, le cas échéant, de détecter des lésions comme des condylomes qui peuvent être à l'origine de cancer du canal anal. Ouf ! Il n'y a rien. Il faudra le faire régulièrement autant lui que moi. Il fait même pipi dans un flacon pour rechercher des chlamydioses.
─ C'est très bien d'être venu tous les deux. Aël, je vais aussi te faire un examen externe. Par contre, tu n'as pas besoin de subir le reste puisque tu es vierge.
─ Caleb peut rester avec moi ?
─ Bien sûr !
Caleb me serre la main très fort et tourne la tête pour préserver ma pudeur.
─ Vous pouvez être fiers de vous, les garçons. Venir vous faire dépister avant même d'avoir pratiqué la sodomie, c'est exactement ce qu'il faut faire. Dommage que les établissements scolaires n'en fassent pas la promotion, que cela soit pour les hétéros, pour les gays ou pour les bi. Il y aurait beaucoup moins de problèmes sanitaires chez les gens.
Nous savons que nous avons trouvé un interlocuteur de confiance et de qualité. Demain, nous viendrons chercher les résultats.
Nous passons toutes nos soirées et nos nuits chez moi. J'ai toujours envie de faire l'amour avec lui. Il ne cède pas à chaque fois.
─ J'aime bien que l'on soit dans les bras l'un de l'autre sans faire de trucs sexuels.
─ Enfin de compte, c'est moi le plus obsédé !
─ Et oui, mon lapin ! Comme quoi, il faut pas se fier aux apparences !
─ Depuis qu'on pratique la sodomie et que je n'ai plus mal quand tu me pénètres, et bien, c'est tellement bon que j'ai envie de le faire tout le temps.
─ Tu devrais avoir un peu de pitié pour ma bite qui n'en peut plus.
─ Je sais bien que je suis horrible !
─ T'es pas horrible, c'est moi qui suis un petit joueur. Tu devrais trouver un amant qui soit plus endurant.
─ Ah non alors ! Je préfère ne plus rien faire que de le faire avec quelqu'un d'autre. C'est toi qui est excitant, pas un autre type.
─ Tu dis ça mais t'as pas essayé avec un autre mec !
─ Je ne veux même plus en parler ! Je suis triste, dis-je en pleunichant.
─ Oh non, mon lapin ! Ne pleure pas ! Je disais ça mais je veux pas que t'ailles ailleurs. Mon lapin, pardonne-moi, je suis allé trop loin.
─ Ne dis plus jamais des choses si affreuses. Je ne veux que toi. Tu as compris ? Que toi !
─ Oui mon lapin ! J'ai compris. Je t'aime, mais...
─ Quoi mais ? Il n'y a pas de mais ! Tu me fais peur.
─ Le " mais " est que je ne peux pas suivre ton rythme de rapports sexuels. Une fois par jour, impeccable, mais plusieurs fois de suite tous les jours, je peux pas le faire. Désolé, je ne suis qu'un faible homme !
─ Ce soir, restons dans les bras l'un de l'autre alors.
─ Dommage, car ce soir, je t'aurais bien mis une bonne giclée.
─ Comme tu es élégant quand tu me parles de sexe !
─ Alors je reprends : Mon lapin, ce soir, peut-on baiser un petit coup ?
─ Tu le fais exprès !
─ Oui je le fais exprès ! J'ai envie de te câliner et même un peu plus, mon lapin. Me murmure-t-il au creux de l'oreille.
J'aime bien lorsqu'il joue les vilains garçons ! Mais j'aime aussi lorsqu'il est tendre et affectueux. Je suis heureux entre ses bras.
Maman nous réveille tôt, car nous avons rendez-vous avec nos futurs maîtres de stage. J'ai beau l'interroger sur notre destination, elle refuse de lâcher un seul petit indice.
─ Caleb, appelle-moi lorsque vous aurez fini. Je serais dans le quartier à vous attendre.
Maman nous dépose devant un endroit que je connais déjà : les " Ateliers du Bonheur ".
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