“Party Rock is in the house Tonight,

Everybody just have a good time,

And we gonna make you lose your mind,

We just wanna see Ya… Shake that !

Everyday I’m shuffling”

Tapotant avec vigueur ses pieds contre le sol pavé de la cour de Saint-Clair, Selim sentit une pression sur le haut de son crâne qui l’empêcha de hocher la tête davantage. Il se retourna, pris par surprise, et releva ses yeux en amandes pour tomber dans le bleu de ceux d’Alex. Celui-ci s’invita sur le banc où il avait pris place.

• Tu m’as fait peur, souffla-t-il en déposant une main contre son torse.
• Tu écoutes quoi, minus ? demanda le blond qui s’amusait a lui ébouriffé ses cheveux déjà en pagaille.
• Party Rock Anthem, de LMFAO, une tuerie ! Je sais pas si tu conn…

Il n’eut le temps de finir sa phrase qu’Alex avait déjà porté la musique à son oreille. De ses yeux de félins, Selim l’observa avec attention. S’il ne le connaissait pas si bien, il n’aurait jamais pu dire qu’il appréciait le son. En effet, tout ce à quoi il eut droit, fut un battement de paupière.

• J’aime, dit-il simplement en lui rendant l’oreillette.
• Je suis impatient ! Kimi m’a demandé de choisir des musiques pour notre première séance de danse ! Du coup, il y a celle-là et…

Le grand blond regardait sans grand intérêt l’écran du plus petit, il lâchait seulement un “ah” de temps en temps quand il reconnaissait une chanson ou un musicien. À eux deux, ils formaient une drôle d’équipe, entre “l’excité des Richess” et celui qui n’avait aucune expression. Selim Hodaïbi se montrait particulièrement turbulent. Incapable de rester en place, il avait une énergie débordante, voir dévastatrice. Il était donc d’autant plus étonnant que celui qui le supporte le mieux soit quelqu’un de l’envergure d’Alex Stein. Le mystérieux garçon en faisait craquer plus d’une par son côté “inatteignable” et son manque d’émotion lui avait valu de nombreuses ruptures prématurées.

Malgré leurs personnalités totalement opposées, sans compter leur physique, les deux Richess ne se quittaient jamais. Lorsqu’on voyait Selim quelque part, Alex n’était jamais loin et inversement, et ce depuis que le groupe des “sept” avait vu le jour.

Des exclamations de part et d’autre de la coure les interpellèrent et bien vite ils virent arriver Faye, un journal à la main.

• Saluuut, les gars ! s’exclama-t-elle tout en leur collant la bise.
• Yo, chicka ! répondit Selim avec bien plus d’engouement que son ami et en lui tendant son poing pour débuter une série de gestes qui s’articulait dans une poignée de main.
• Regardez-moi ça ! Kyle a publié son article et Kimi, comme prévu, dit-elle en levant les yeux au ciel, est en première page ! “Une nouvelle avec une poigne d’enfer”, lit-elle à haute voix. Et il décrit toute la scène de la gifle, mais surtout…

Alex amena sa main à sa bouche pour couvrir son bâillement et prit du recul sur le banc, Faye y jetant ses fesses immédiatement. Elle continua de reprendre les mots de Kyle avec à la fois une sorte d’amusement et outrance.

• “l’orpheline n’aura pas tardé à se faire remarquer grâce à l’histoire tragique de sa famille…”, il va s’en prendre plein la gueule, je le sens ! Autant par Kimi que par Sky et d’ailleurs il n’a pas lésiné sur les compliments envers lui, s’il pouvait le suc…
• Cache ça ! Elle est là ! lui envoya Selim dans un coup de coude.

Plus loin dans la cour, Kimi passait le grand portail, les deux mains portées sur les lanières de son sac. Elle arborait un air inquiet, voyant qu’on la dévisageait avec beaucoup d’intérêt et de mépris. Elle avait tant appréhender ce moment, celui de revenir à l’école après un weekend passer avec ses amis. Est-ce que ces rencontres à Saint-Clair serait toujours autant réjoui de faire sa connaissance ? Ces quelques jours de retour aux sources lui avait donné l’impression que rien de ce qu’elle avait vécu la semaine précédente était réelle. Les regards qu’on lui attribuait servit de piqure de rappel. Elle se jeta presque sur Laure, qui avait la tête enfouie dans le journal, à son arrivée. Cette dernière sembla vouloir éviter le contact, mais surtout qu’elle ne voit pas ce que Kyle avait écrit.

• Kimi, comment vas-tu ? Tu as passé un bon week-end ? demanda-t-elle très courtoise en cachant le bout de papier derrière son dos.
• Pourquoi est-ce que tu le caches ? C’est si terrible que ça ? entra-t-elle dans le vif, fronçant les sourcils.
• Oh non, mon but n’était pas…
• Alors je peux lire ? fit-elle en tendant la main.
• Si tu veux mais…

Elle lui arracha presque des mains, écarquillant les yeux en se voyant en première page. Elle n’aimait pas la photo qu’il avait choisi et savoir qu’elle devait être au centre de toutes les conversations. Quand elle ouvrit le journal, elle tomba sur une phrase qui lui donna envie de le jeter immédiatement. Comme si elle avait vraiment eut l’attention de porter l’attention sur elle, bien au contraire. Laure récupéra son bien, légèrement froissé et lui accorda un geste amicale.

• Les gens passent vite à autre chose, surtout qu’il y a toujours de quoi parler dans cette école, tu verras, lui sourit-elle.
• Je ne sais pas si c’est censé me rassurer, se renfrogna-t-elle pour lui tourner les talons.
• Elle fuit encore…
• Et alors ? Qu’est-ce que ça peut faire ? lui parvint une voix directement au creux de son oreille.
• Bon sang ! C’est toi, grogna-t-elle un instant en découvrant Sky. Celui-ci lui colla un bisou sur la joue et s’accrocha à son bras. Il ne la regardait pas pour autant dans les yeux. Sans qu’elle ait eu quoi que ce soit à dire, il se justifia.
• J’ai besoin d’un peu de compagnie, souffla-t-il encore.
• Je connais une fille, répondit-elle sans un sourire.
• Parfait…

***

La situation actuelle donna à Kimi l’impression d’être revenu au point de départ. La même sensation qui l’avait parcouru le jour de la rentrée la hantait et ses entrailles tendaient à l’abandonner. Elle sentait son estomac se nouer à chaque nouveau regard qu’on lui accordait. Tout ce qui lui fit plaisir c’est le fait que Sky n’en rajoute pas une couche et elle regrettait déjà d’avoir rejeté Laure de cette manière. Et si elle ne revenait pas ? Qu’est-ce qui lui prenait de penser de cette manière ? Les mêmes pensées sur la solitude lui revenait en mémoire, son attention se déposa alors à nouveau sur le bracelet à l’origine de tout ce scandale. S’il ne s’était pas cassé, jamais elle ne l’aurait giflé et peut-être qu’elle n’aurait rencontré aucun des Richess. Le simple fait d’y penser revenait à leur accordé une grande importance. Elle ne voulait pas agir comme les autres, à fangirliser les Richess juste à cause de leur statut. Mais elle devait bien avoué, qu’au moins elle n’était pas seule.

Elle détestait Kyle pour lui avoir joué un mauvais tour. Si seulement elle pouvait revenir en arrière, elle se convint que ce serait lui qui se serait fait avoir. “Les gens passent vite à autre chose”, lui avait confié Laure. Ce n’est pas la sensation que ça lui donnait lorsqu’elle s’aventura jusqu’à la table des Richess durant le temps de midi. Elle eut une impression de déjà vue quand Selim l’accueillit à bras ouvert et se sentit presque de trop quand ils continuèrent leur conversation.

• Je pense que tu devrais envisager la place de déléguée, dit Loyd à Nice qui le regardait alors avec de grands yeux écarquillés, les pommettes rouges comme des tomates.
• Cette fille est trop sexy, je suis jalouse, s’en alla Faye qui pointait une élève du doigt avec toute la discrétion du monde.
• Bella chicka, tu n’as rien à lui envié ! s’écria Selim qui dessina une poitrine imaginaire devant son torse. Celle-ci le bouscula tellement elle appréciait le compliment.
• Loyd je pense que nous devrions parler plus longuement de la place des délégués, intervint Laure et Sky, j’aurais besoin de toi. Tu crois que tu pourrais prendre contact avec Davis ? Ce serait sympa qu’on organise une petite fête de rentrée ?
• Je peux, mais Kyle va forcément venir fouiner dans nos affaires, répondit-il alors qu’il s’apprêtait à croquer dans son sandwich.
• Une fête !! Yaaas ! hurla presque Faye.
• Hum, s’intéressa soudainement Alex à la conversation.
• Cela dit une petite fête n’existe pas vraiment, on invite toute l’année ? Et ceux du dessus ? En tout cas hors de question d’y accueillir de la vermine, envoya-t-il avec un sourire en coin quand il vit Kimi relever la tête doucement. Le mot fête signifiait danse à ses yeux et cette idée lui apparaissait alléchante.
• Sky ! Arrête un peu, ce n’est pas vraiment le moment en plus, le réprimanda Laure.
• Quoi ? Parce qu’on apprend que Mademoiselle est orpheline, on devrait la traiter autrement ? Si j’organise…
• Finalement, tu n’es pas aussi con que tu en as l’air, riposta Kimi à la grande surprise générale. Son visage s’égayait d’un grand sourire ricaneur et sincère qui plongea Sky dans l’embarras. Il se renfrogna, passant un doigt sous son nez, plus gênée qu’il ne voulait le laisser paraître.
• Ouuuuh bien envoyé bella ! s’en amusa Selim, à propos, est-ce que ça tient toujours pour tout à l’heure ?

L’interrogation se lisait sur le visage de la blonde qui frappa dans ses mains en se rappelant de sa promesse. Le début de cette mauvaise journée lui avait fait oublier qu’elle devait lui apprendre à danser. Finalement, avec cette demande, elle eut l’impression de remonter dans le peloton.

• Puisqu’on a déjà perdu beaucoup de temps, alors que dis-tu d’après les cours ? lui demanda-t-elle, rayonnante.
• J’adhère ! cria-t-il en brandissant son poing au plafond, ah ! Est-ce que tu me passerais ton numéro ? Plus simple pour se donner rendez-vous, expliqua-t-il en sortant son téléphone de la poche de son énorme sweat.
• Tu as raison, alors c’est…
• Eh bien, eh bien, gloussa Faye, je vois qu’on se rapproche, fit-elle pendant que Kimi lui récitait la série de chiffres.

La rousse semblait à prendre un malin plaisir à les taquiner, mais Selim ne l’écoutait pas, comme s’il en avait l’habitude. Il s’installa à ses côtés pour lui partager les musiques qu’il avait sélectionnées. À cause des écouteurs, Kimi et Selim se voulaient plus proches que jamais, accoudés à la table pendant qu’ils débattaient sur les meilleurs morceaux. Devant eux, Nice osait à peine relever les yeux.

• Tu sais que je n’ai pas ton numéro Selim ? lui fit remarquer Loyd, on devrait peut-être tous profiter de l’occasion pour les échanger ? Hum ? fit-il en regardant sa petite voisine.
• T’es sûr ? J’ai ton numéro pourtant ? s’étonna ce dernier qui vérifiait dans ses contacts.
• Oh vraiment ? Mais ce n’est pas le cas de tout le monde donc…
• Ah c’est vrai, tu ne l’as pas Nice, n’est-ce pas ? lâcha Faye en lui jetant un petit coup de coude.

La petite devint instantanément rouge comme une tomate, et ne savait plus où donner de la tête.

• Ah ? C’est vrai qu’on a jamais échanger, tu le veux ? demanda-t-il avec embarras.
• M’enfin Selim, tu sais qu’elle n’est pas du genre à réclamer !
• Ça… suffit ! s’écria la concernée dont le visage était devenue écarlate, si je… je ne réclame pas, c’est que je n’en ai pas besoin ! fit-elle en serrant ses petits poings, les larmes lui montant.
• Calme-toi, p’tite sœur, lâcha Alex en passant son bras autour de son épaule pour loger sa tête contre son torse. Tu ne vois pas que tu l’embêtes ? fit-il alors à l’égard de Faye.

Tandis que Nice essayait de se débattre de l’emprise de l’apollon, Faye l’attrapait par-dessous le bras pour la récupérer. Elle tira la langue à Alex, et s’excusa auprès de son amie mille fois dont le visage se voulait toujours cramoisie de honte. Le trio à la tête des sept familles était quant à eux déjà reparti dans les préparations de la fête. Kimi rigolait face au spectacle et tourna la tête vers Selim comme pour chercher son approbation. Elle le vit effacer le contact “Nice” dont toutes les informations était déjà enregistré sauf son numéro. Pendant un fragment de seconde, il sembla hésiter et l’envoya dans la poubelle comme à contre cœur. Quand son regard perçant croisa le sien, il s’agita à nouveau et se perdit dans des rires.

Première leçon : même les plus beaux sourires ne sont pas les plus sincères.