52. La folle énergie du poète
Malcolm
Alors que je déambule entre les convives, je me demande ce que je suis venu faire à cette célébration organisée par le Conseil. Clairement, ils veulent faire oublier les derniers événements avec Oliver et Zoé en faisant comme les Romains de l’Antiquité : des jeux et du pain. Mais moi, je ne suis pas dupe. Et en plus, c’est soi-disant pour capitaliser sur la soirée des célibataires et offrir aux nouveaux couples une occasion de s’amuser et d’afficher leur bonheur. Tu parles. C’est surtout pour vérifier quels sont les couples qui ont résisté aux premières nuits et à qui on va pouvoir confier les prochains bébés.
En tout cas, la fête bat son plein. Il y a un groupe de jeunes qui font de la musique que je qualifierais de moderne et qui n’est vraiment pas à mon goût. Trop bruyante, et les paroles… une telle pauvreté dans les mots est affligeante ! Pourquoi ne demandent-ils pas à quelqu’un qui a du talent pour composer de les aider ? Franchement, le Conseil a dû leur demander de venir animer juste parce que le batteur est un ami de Marco et que celui-ci a demandé à son père de leur laisser une chance. Horrible idée.
Comme à chaque fête, tout le monde ou presque est là. Hommes comme femmes, nous nous mélangeons et nous côtoyons même si nous nous ignorons. Je n’ai pas encore vu Jade et je pense qu’elle n’est pas arrivée. J’ai hâte de la voir débarquer car je compte bien sur cette opportunité pour passer un peu de temps en sa compagnie. Ou pas loin d’elle car elle me manque énormément, c’est fou. Quels idiots on a été de vouloir prendre un peu de distance, comme si c’était possible ! Certes, il y a un risque, mais on devrait s’en moquer, non ?
Alors que je m’éloigne de la scène où se déhanche le chanteur, quelqu’un attrape mon bras et je me retourne, espérant que ce soit Jade qui soit venue me surprendre mais je tombe sur Joël qui me sourit. C’est un des ingénieurs qui travaillent pour le Conseil et qu’on voit peu car il est toujours occupé sur des missions qui nécessitent sa présence en continu. Je me demande ce qu’il me veut et me dis que je n’ai vraiment pas envie de me faire draguer ce soir.
— Bonsoir Joël, tu as besoin de quelque chose ? demandé-je poliment mais plutôt froidement.
— Salut, Malcolm. Je peux t’accaparer quelques minutes ? J’ai eu vent de tes exploits, mais je ne voudrais pas te déranger.
Mes exploits ? Mais de quoi parle-t-il ? Comment peut-il être au courant que j’ai battu mon record de descente à vélo depuis chez moi ce matin ? Il m’a observé ?
— Je ne vois pas de quoi tu parles, là. Tu veux m’accaparer pour faire quoi ?
— Je parle de ta petite manifestation, enfin ! sourit-il avant de lâcher un soupir. C’est moche ce qui est arrivé aux deux autres, vraiment injuste.
Je ne sais pas vraiment comment réagir à ses propos et je l’observe un instant avant de lui répondre en essayant de ne rien montrer de ce que je pense réellement.
— Le Conseil a pris sa décision, il faut la respecter, quoi qu’on en pense, commencé-je par répondre en gardant une neutralité de façade. Et tu n’as pas répondu à ma question. Tu veux que je fasse quoi ? Une nouvelle marche solitaire pour avoir des histoires à raconter à tes collègues ?
— Tu sais dans quoi je bosse, Malcolm ? me demande-t-il en baissant d’un ton. Je ne crois pas une seconde à ton petit discours policé, en vérité, même si je comprends qu’il faut sauver les apparences.
— Je sais que tu bosses pour le Conseil et que tu es ingénieur. Donc, il va falloir faire avec les apparences. Je n’ai pas envie de finir recyclé. Enfin, pas tout de suite, si tu vois ce que je veux dire.
Surtout que Jade vient d’arriver et qu’elle est superbe. Ce serait un vrai crime de ne pas profiter d’elle et de la vue qu’elle offre ! Elle est d’une beauté à couper le souffle avec sa petite jupe verte, son chemisier fleuri et un décolleté à tomber. J’ai l’impression que tout le monde la regarde, que tout le monde est intéressé par elle. Je détourne le regard et reporte mon attention sur Joël qui m’observe, un peu intrigué.
— Justement, je bosse pour le Conseil et, donc, je vois des choses que vous ne voyez pas. Je… je pourrais me faire recycler pour oser te parler de ça, mais plus le temps passe et plus vivre ici m’oppresse. Je dirais que le recyclage des amoureux hétéros n’est qu’une goutte d’eau de plus, pas loin de faire déborder mon vase. Tu sais que… ils nous mentent, Malcolm. Sur tout ou presque, c’est effarant. On vit dans un monde de rêves et de fantasmes qui sont bien loin de la réalité.
— Un monde de rêve et fantasmes ? A ce point-là ? Mais pourquoi dis-tu ça ? demandé-je en baissant la voix et en regardant si personne ne nous écoute.
— Tu sais combien de panneaux solaires il faut pour qu’une de nos maisons soit vraiment autosuffisante ? Dix, Malcolm. Et je ne te parle même pas des immeubles. Tu crois vraiment qu’on est autosuffisant ? Je peux t’assurer que les chiffres prouvent le contraire.
— Il faut bien qu’on le soit, tout fonctionne à l’électricité chez nous et on n’a jamais eu de soucis. Je ne vois pas où tu veux en venir, Joël. Tu es sûr que tu vas bien ?
— Je t’assure que nous ne le sommes pas. Je ne sais pas comment on peut tout faire fonctionner ici, mais je peux te garantir qu’on a de l’électricité qui n’est pas verte, c’est certain.
J’ai un peu décroché pendant qu’il me parlait car Jade s’est mise à danser, seule, à quelques mètres seulement de moi. Elle ondule et se meut avec grâce sans me quitter des yeux, et j’ai les plus grandes peines du monde à me concentrer sur ce que l’ingénieur est en train de me dire et qui pourtant est d’importance capitale.
— Tu déconnes, là. Si elle n’est pas verte, elle vient d’où ? parviens-je à dire en détournant mon regard de mon amoureuse.
— Je n’en sais trop rien, marmonne-t-il en enfonçant les mains dans ses poches. Je pensais au continent, et puis je me suis demandé s’il n’y avait pas quelque chose sur l’île qui pourrait faire le complément. Je peux t’assurer que j’ai fait toutes les vérifications nécessaires, Malcolm, mais ça me ronge, je n’arrive pas à trouver.
— Et pourquoi tu me dis ça ? Tu veux que je refasse une manifestation tout seul pour demander des explications au Conseil ?
— Non, s’esclaffe-t-il, bien sûr que non ! Je me disais que peut-être on pourrait fouiner discrètement, tu vois ? J’ai besoin d’un allié, et tu es le seul qui semble ne plus vouloir dire “Amen” sans faire fonctionner ses neurones…
Là, j’ai envie de dire “Amen” et “Hallelujah” à ma déesse qui s’amuse à passer ses mains sur les contours de sa poitrine de manière lascive en fermant les yeux. Au fond de moi, je sais que ce spectacle n’est que pour moi, mais cela ne m’empêche pas d’être jaloux car tout le monde pourrait l’observer.
— Je suis déjà sous le feu des projecteurs, pas sûr que je sois le meilleur allié. Mais si tu me dis où je peux aller fouiner, peut-être que j’irais vérifier tes informations. Ou peut-être pas.
— Les rumeurs disent qu’il y aurait un genre de centre de contrôle, un bunker ou un truc dans le genre, dans la forêt. Une partie peu accessible, forcément, un coin où nous n’irions pas. Je n’en sais pas plus, soupire-t-il, mais je vais continuer à me renseigner.
Un bunker ? C’est ça qu’il me faudrait là, tout de suite, pour que je puisse m’y enfermer avec la superbe créature qui s’est encore rapprochée de moi et qui me fait perdre complètement la tête. Comment puis-je lui résister alors qu’elle déploie tous ses charmes pour me faire craquer ?
— Oui, fais ça et dis-moi si tu trouves. Je vais me renseigner de mon côté. Je crois d’ailleurs que j’ai une petite idée… Je dois te laisser, merci pour la discussion, on la reprendra, sois-en certain.
Je me souviens de la caverne que nous avions cherchée avec Jade et me dis qu’il faut que je creuse cette piste à nouveau, mais là, j’ai une autre urgence à gérer. Ma Chérie m’a fait un signe de la tête m’invitant à la suivre et je m’exécute sans me faire prier, laissant Joël sur place, un peu surpris de mon départ précipité. Je la suis sur le petit chemin qui part derrière la scène et va jusqu’à la plage où je la vois se dissimuler derrière de gros rochers. Je m’assure que personne ne m’a suivi et vais la rejoindre.
— Madame s’est perdue ? Elle a besoin d’aid… commencé-je avant qu’elle ne m’interrompe en posant ses lèvres sur les miennes.
Elle noue ses bras derrière ma nuque et presse son corps contre le mien. Je sens immédiatement que sa petite danse sensuelle l’a mise bien en forme car elle se love tout contre moi en continuant son baiser enflammé. Elle et moi, nous profitons de ces retrouvailles sans nous préoccuper du monde extérieur, protégé par les barrières naturelles que nous avons pris le soin de mettre entre les autres et nous. Lorsqu’elle parvient enfin à se reculer un peu pour reprendre son souffle, je suis à nouveau ébahi devant la sensualité et le charme qui se dégagent de tout son être. J’admire la pointe de ses tétons dressés sous sa chemisette et me délecte de ses magnifiques courbes que mes mains parcourent avec envie et gourmandise.
— Je crois que j’ai retrouvé mon chemin, en fait. Ou c’est lui qui m’a trouvé, me rétorque-t-elle en souriant. Tu m’as manqué…
— Je peux te dire que c’est réciproque. Il ne faut plus rester si longtemps sans se voir, j’ai cru mourir… Et tu es si belle, c’est incroyable que tous les autres ne s’en rendent pas compte. Moi, dès que tu apparais dans mon champ de vision, je ne vois plus que toi.
— Il paraît que l’amour rend aveugle, glousse-t-elle en m’embrassant dans le cou alors que ses mains se baladent sous mon tee-shirt.
Je ne peux résister à la tentation et défais les boutons de son chemisier afin de libérer sa magnifique poitrine, si belle, si ferme. A peine ai-je posé mes doigts sur le bout de ses seins qu’elle pousse un gémissement.
— On dirait que l’amour t’excite, Chérie… Peut-être que ces séparations sont bénéfiques après tout si ça te rend aussi réactive que ça.
— Tu veux bien arrêter de tourner autour du pot et juste, je sais pas… me faire l’amour ? souffle-t-elle en déboutonnant déjà mon pantalon.
Je réponds en la soulevant dans mes bras et en la plaquant contre le rocher. Jade pousse un nouveau gémissement quand ma bouche s’empare d’un de ses seins et que ma langue s’enroule autour de son téton. J’adore comme elle se cambre sous mes baisers. Je ne sais pas comment elle parvient à garder assez de clarté d’esprit pour y arriver, mais elle se saisit de ma virilité toute dressée et la positionne entre ses lèvres intimes avant d’onduler des hanches pour que je m’enfonce en elle. Je sens ses cuisses musclées contre mes hanches et empaume ses fesses pour l’aider à onduler sur mon sexe. Elle se frotte contre moi et je suis rapidement obligé de me saisir de ses lèvres pour étouffer les petits cris qu’elle ne parvient pas à retenir alors que je donne de puissants coups de reins en elle. Sous la voûte étoilée, nous nous aimons et le désir s’intensifie rapidement jusqu’à nous mener à une jouissance qui me donne le sentiment que j’ai décroché les étoiles du ciel et qu’elles sont maintenant en train de danser une folle farandole autour de nos deux corps imbriqués. L’orgasme est fulgurant et d’une intensité rare. J’adore quand elle se donne ainsi à moi, quand nos univers se retrouvent et s’unissent dans des vagues de plaisir qui nous font onduler dans une extase que seuls les personnes amoureuses peuvent connaître.
— Je t’aime, Jade. Et la force de cet amour est telle que rien ne pourra jamais lui résister.
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