19 ~
J'ai tellement peur que tu oublies de m'aimer un matin que je m'enfuis, souvent. Par protection. Par analogie. La fuite, c'est une affaire de sang. Je suis déjà partie tant de fois, t'infligeant ma blessure. Des plaies que je laisse, béantes. Tu dis que tu comprends en caressant mes cheveux. J'ai honte de moi.
Tombeau : "Arrête de me regarder lionne, là, avec ton cul fauve sous la crinière"
Abysse : "Mon gros cul, ouais..."
Tombeau : "Non, ton cul de reine, petit cul fauve, fauvette... !"
Je souris. Fauvette, oui. Oiseau. Plus migratrice que prédatrice. Quand c'est l'hiver entre nous, je fuis vers des soleils que j'imagine. Fauvette à tête noire. Fauvette à coeur noir.
Et puis, avec l'été je réapparais. Tu viens me chercher, toujours en retard, je monte dans ta voiture en soufflant. Des rituels. Tu démarres, un sourire gravé sur les lèvres, tes yeux brillants et tu dis "putain, qu'est-ce que tu m'as manqué, saleté". Je caresse ta peau du bout de mes doigts, c'est réciproque, même si je suis incapable de le nommer. On s'arrête dans une zone industrielle, tous deux étourdis par cette envie animale de l'autre, le feu au creux du ventre. Allongée sur la banquette arrière, tu me pénètres yeux dans les yeux, ta main qui tient ma tête. Je sens ton souffle, si près. Je voudrais le sentir toujours à cette distance, Tombeau. Les vitres se couvrent rapidement de buée. Je me fais eau, eau, eau. De l'eau sur la brûlure. Ta bouche, ta queue, ta contribution à mon sauvetage. De l'eau. On réalise qu'il y a un homme qui nous observe, depuis l'un des bureaux d'une entreprise. Contrarié, tu sors de la voiture en reboutonnant ton jean. On rit. Tu redémarres à fond la caisse. Je suis restée à l'arrière, lève à nouveau ma robe. Je me fais jouir pendant que tu me regardes faire, dans le rétroviseur intérieur, fou de désir.
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