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Ce matin, ma fierté en bandoulière et mes sandales à la main, je ne peux m'empêcher de rire.
Je ris de lui, de moi, de cette nuit catastrophique – oui, c'est le mot – et de ma propension à n'en faire qu'à ma tête.
Pourtant Alice, tu le savais que ce Simon ne t'allait pas du tout. Tant que vous parlez photos, que vous regardez un film, que tu lui gratouilles la tête, ça va. Mais une fois que tu te glisses dans ses draps, allons. Tu en perds ta répartie, tu redeviens cette femme timorée, complexée, stimulante, mais désespérément simulante. Une main glissée vers toi, un doigt, aïe ! Un cri de muqueuses. Une langue, fol espoir de douceur. Ah, sensible Alice, tu te tortilles pour échapper à la torture pourtant pleine de bonne volonté. Tu précipites la chose – autant en finir –, mais pourquoi, surtout ce sentiment d'obligation ? Tu fais bien ce que tu veux, et ne veux pas. Oui mais. Mais tu es là dans son lit, tu as dit oui avec le corps – au début –, le coeur s'en foutait un peu ce coup-ci. Bon, elle est où cette capote ? Tu es un peu lasse, déjà.
- Ne fais pas de bruit, il y a ma coloc' dans la chambre à côté.
Oh il n'y a pas de risque mon petit gars. Tu pouffes.
- Chut !
Ohlala... Mais il était touchant pourtant quand vous parliez d'art, de modèles, de nu.
Cette fois, tu ne te risques même plus à dire ce qui marche ou ne marche pas. Tu te souviens encore de la dernière fois : "Mais, avec les autres ça fonctionnait !" Innocence de petit garçon, goujaterie d'homme ?
Bon ça y est, c'est en cours, tu essaies d'y mettre du tien, tu agrippes, soupires – ah oui, en silence –, il besogne. Tu as l'impression de te détacher de tout ça, de flotter au dessus de vos deux corps à moitié couverts, gigotants, pas tellement en symbiose, hein, vu d'ici. Vu d'en bas non plus, tu me diras. Ça ne donne pas grand chose tout ça. Tu soulignes quand même, parce qu'il commence à se faire tard, et que tu travailles demain, mine de rien :
- Euh, tu sais... On peut arrêter hein ? Moi j'ai lâché l'affaire...
Silence.
- Ah, ok.
Alice non, ne ris pas maintenant, c'est un peu sauvage quand même.
Tu tentes des caresses et des baisers – au fond tu as un peu de tendresse pour lui, comme une vieille habitude, un réflexe –, il consent. Tu passes ta main sur sa nuque, il ronronne. Finalement tu t'en serais sortie avec un massage, eh.
Plus de métros, tu le sais Alice, il faut dormir là. Le lit est moelleux et Simon confortable une fois ses appendices rangés.
Dodo.
Et nous voici demain, à partir sur un baiser, chacun faisant comme s'il allait y avoir une prochaine fois – polis, ces jeunes.
Une fois dans la rue, tu te dis qu'on ne t'y reprendra plus, qu'il te fallait juste une piqûre de rappel. Ah ma belle Alice, ris avec moi, car tu sais bien que tu as la tête dure et l'ego fragile.
Je lève les yeux au ciel. Vivante.
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