Première rencontre

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Restaurant Vespaio, Down Town Los Angeles

Saka était arrivée la première, un peu en avance. Elle s’était fait accompagner de Judy, l’une de ses amies, afin de passer inaperçue. Nash n’avait pas choisi l’établissement au hasard. Saka et lui fréquentaient assez régulièrement l’établissement et ils savaient que l’agencement de la salle ne laissait que très peu d’angles morts. Elle avait choisi une table bordant la vitrine, lui donnant ainsi une bonne vue sur l’avenue. Nash arriva lui aussi en peu en avance et se présenta au maitre d’hôtel qui lui suggéra une table. Ayant repéré Saka et Judy, Nash déclina l’offre et en choisit une autre, plus favorable. Avec un peu de chance, si la salle n’était pas trop bruyante, sa partenaire pourrait avoir une opportunité de capter un peu de la conversation. Il avait de toute façon prévu un enregistreur dans sa poche.

Marco Riccio se présenta juste à l’heure. Les deux enquêteurs, chacun de leur côté, examinèrent l’individu qui se dirigeait vers la table indiquée par l’hôtesse d’accueil. L’homme avait une cinquantaine d’années, mais avait conservé la silhouette sportive, résultat d’une hygiène de vie et d’une pratique physique rigoureuses. Ses cheveux tournaient au gris, mais il ne cherchait pas à le dissimuler, assumant pleinement sa maturité. Nash se leva à son approche et lui tendit la main. Le shake-hand fut ferme et franc, sans excès. Lorsque le serveur vint s’enquérir de leur commande, les deux hommes se contentèrent d’un sandwich pour Nash et d’une salade pour Marco. Après quelques préliminaires, Marco entra dans le vif du sujet.

« Monsieur Nash, vous m’avez dit que vous aviez une proposition à nous faire. Je vous écoute.

— Vous pouvez laisser tomber le Monsieur, Nash tout court suffira. En effet, comme je vous l’ai expliqué hier, l’un de mes amis a un soucis avec Leonardo Giordano. Une banale histoire de jeu. Leonardo s’est retrouvé à la même table de poker que mon ami et malheureusement pour lui, il a perdu assez gros.

— Combien ? si je peux me permettre, demanda l’homme de Vegas.

— Trente mille dollars, c’est tout de même une assez grosse somme, je le reconnais. Enfin, vous venez de Las Vegas, ça ne vous impressionne peut être pas.

— Ne croyez pas ça. Je considère que l’argent est trop difficile à gagner pour être ainsi dilapidé. Ce qui, soit dit en passant, est une remarque tout aussi valable pour votre ami, mais je ne suis pas là pour juger. Continuez, je vous prie.

— Deux jours plus tard, deux individus ont agressé mon ami dans la rue, le sommant de rendre l’argent. Ils se sont à nouveau manifestés quelques jours plus tard, afin d’accentuer un peu la pression. Je pense que je n’ai pas besoin de vous faire un dessin.

— Ces pratiques sont d’un autre temps, Nash. Les sociétés que je représente sont des business tout ce qu’il y a de plus transparents. Nous publions nos comptes et payons nos impôts. Vous l’avez éprouvé vous-même puisque vous n’avez pas eu de mal à remonter jusqu’à nous.

— Je vous avoue que j’espérais plus de compréhension de la part de Leonardo. Mon ami était prêt à rendre l’argent, mais le fils de votre patron en a fait une affaire personnelle. Mike a dû quitter la ville pour se mettre à l’abri.

— Soit, cet incident est regrettable, mais en quoi le vol du fourgon est-il lié à cet événement ?

— Je dois reconnaître que nous avons affaire à un enchainement de circonstances. Comme vous l’avez compris, j’ai cherché quelques renseignements sur Leonardo Giordano. Ça n’a pas été difficile de localiser une Lamborghini jaune sur le port. Disons que là, mon contact a peut-être fait un peu de zèle et voulu jouer aussi pour son propre compte. La société Chance n’est pas seulement voyante, si vous voyez ce que je veux dire, elle est aussi assez perméable. Il ne lui a pas été trop difficile de connaître le contenu et l’itinéraire de votre camion. Ne me demandez pas d’où vient la fuite, je l’ignore totalement.

— Ne vous inquiétez pas, je trouverai par moi-même. Que proposez-vous maintenant ?

— Ma requête est des plus simples, je souhaite que mon ami puisse reprendre une vie normale en étant certain de ne plus être inquiété par les hommes de main de Leonardo.

— Je pense que je peux intervenir, mais que nous proposez vous en échange ?

— Je ne pense pas que le gang qui a volé votre camion soit en mesure d’écouler la totalité de la marchandise. Peut-être seraient-ils prêts à vous la restituer, en ne retenant qu’une commission pour leurs frais.

— Êtes-vous en mesure de traiter en leur nom ?

— À ce jour, non, mais je peux leur proposer la transaction.

— Je vous donne trois jours, je vous recontacterai en fin de semaine. D’ici là j’ai un peu de travail à faire à Long Beach. Je suis ravi d’avoir fait votre connaissance, Nash. »

Marco se leva et quitta la salle au moment où le serveur arrivait avec les commandes. Nash haussa les épaules en signe de dépit et laissa le garçon repartir avec la salade. Le privé mangea rapidement et commanda un café. Saka et Judy avaient déjà quitté le restaurant.


« Qu’est-ce que tu en penses ? demanda Nash en arrivant au bureau.

— Plutôt bel homme, répondit Mary, il a plus l’air d’un financier que d’un mafioso.

— On dirait bien que la Pieuvre change de peau.

— Je n’ai pas pu tout entendre, vous ne parliez pas très fort. »

Nash sortit le petit appareil de sa poche.

« Tout est là-dessus. Je te suggère de le sauvegarder. Pour faire court, je crois que ce Marco ne porte pas Leonardo sur son cœur et que Papa Giordano lui a demandé de remettre de l’ordre ici. Si je parviens à convaincre les bikers de restituer la plus grande part de la marchandise volée, Mike devrait être tranquille.

— Rien que ça ? Et comment comptes-tu t’y prendre ?

— Je ne sais pas encore très bien. Je vais commencer par retourner parler à mon ami sur le port. »

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