La lueur d'une bougie

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Il étais une fois, dans une campagne profonde d'Allemagne, un jeune couple qui désirait plus que tout avoir un enfant pour les aider dans leurs travaux du quotidien. Mais malgré tous leurs efforts, la femme ne parvenait pas à tomber enceinte.

Dans ces lieux où la médecine n'en était encore qu'à ses balbutiements, il existait un remède qui, disait-on, offrait la fertilité. Si une femme venait à manger des radis, elle se retrouverait enceinte. Mais pour cela, il ne fallait pas prendre le premier radis venu. Seuls des tubercules d'une blancheur laiteuse possédaient ce mystérieux don. Hors ces radis étaient aussi chers qu'ils étaient rares.

Notre pauvre couple n'avait pas les moyens de se l'offrir. Désespérés, ils étaient sur le point d'abandonner leur désir le plus cher quand l'homme fit une incroyable découverte. Dans le champ voisin, protégé par un immense mur de pierre, poussaient ces radis tant désirés.

Sans y réfléchir à deux fois, le mari escalada le mur et se saisit de plusieurs légumes. Sa femme se dépêcha de les consommer en priant pour que son voeu se réalise.

Quelques temps plus tard, elle vit avec joie son ventre s'arrondir. Tout cela aurait été merveilleux si une vieille femme n'était pas venue frapper à la porte. Enveloppée dans une lourde cape recouvrant sa chevelure grisonnante, elle était venue réclamer ses biens. Propriétaire du champ de radis, elle avait été furieuse de découvrir son dur labeur ainsi pillé.

Pas le moins du monde honteux, le couple voulut la renvoyer. Qui venait se plaindre pour quelques malheureux radis ? Mais la vieille dame ne l'entendait pas de cet oreille. Elle exigea l'enfant en paiement, sans quoi elle préviendrait les autorités. Craignant une lourde amende qu'ils ne pourraient payer, le mari et la femme n'eurent d'autre choix que d'accepter.

Lorsque l'enfant naquit, la vieille dame vint le récupérer. C'était une ravissante petite fille aux yeux cerclés de noirs et aux cheveux si longs qu'ils en atteignaient presque le sol. Ses parents furent finalement soulager de s'en débarrasser, ayant préféré un garçon pour les aider au quotidien.

Désireuse de conserver cette fillette pour elle, la vieille dame l'enferma dans une tour dont la seule sortie résidait en une fenêtre si haute qu'en sauter pour fuir aurait été pure folie.

Les années passèrent et la petite fille devint une ravissante jeune femme. Sa chevelure n'avait pas cessé de grandir, atteignant emplement le bas de la tour. La vieille dame se servait ainsi de ces derniers comme d'une corde pour rendre visite à sa captive.

Vivant dans une grande solitude, cette dernière fut très surprise, lorsqu'un jour, elle fit gravir la tour non pas à celle qu'elle considérait comme sa mère, mais à un jeune homme semblant avoir sensiblement son âge.

D'abord effrayée par cette première rencontre avec un autre être humain, elle fit peu à peu connaissance avec lui. Tous deux se plurent et, à force de visites en cachette de la vieille dame, finirent par tomber amoureux.

Désirant la présenter à ses parents, qui vivaient non loin d'ici, le jeune homme la convainquit de parler à sa gardienne. Sûrement comprendrait-elle son désir de vivre sa vie en dehors de cette tour.

Mais la discussion n'aurait pu plus mal se passer. La vieille dame fut tellement furieuse qu'elle coupa les cheveux de la jeune fille dans un accès de rage. N'ayant plus rien d'autre dans la vie que son champ et sa captive, elle ne voulait pas voir s'échapper le peu qu'elle possédait. Car c'est ainsi qu'elle la voyait : sa propriété.

Puisque cette dernière voulait tant partir, elle allait exaucer son souhait. Mais à sa manière. La traînant dans un long voyage qui dura plusieurs semaines. Elle fit finalement descendre la jeune de la cariole, otant le bandeau qui l'empêchait de voir le chemin. Et avant même qu'elle ne puisse poser la moindre question, la vieille dame était parti, la laissant seule au milieu de nulle part.

Lorsque le jeune homme revint à la tour quelques temps après avoir convaincue sa bien aimée de parler à sa "mère", il fut surpris de son absence de réponse. Alors qu'il commençait à chercher un moyen d'escalader les pierres, une longue chevelure descendit à lui depuis l'unique fenêtre.

Grimpant à la hâte, il découvrit un visage inconnu une fois en haut. N'ayant que le temps de s'aggripper à la fenêtre sous le coup de la surprise, il trouva devant lui une vieille dame aux longs cheveux gris et au regard débordant de malveillance. Elle tenait à la main la chevelure coupée de la jeune fille.

Avant qu'il ne puisse atteindre le parquet, il se sentit partir en arrière. L'ancienne gardienne avait lâché les cheveux dans un rire à glacer le sang. Il crut chuter pendant des heures, s'écrasant dans des ronces. Qui lui crevèrent les yeux.

Rendu fou par la douleur, il entendit à peine les mots de la vieille dame. Sa bien aimée était en vie, quelque part. Ou n'était-ce qu'une ruse pour le torturer ?

Ne pouvant retourner chez lui dans cet état s'il ne voulait pas mourir, sa cécité le rendant inutile auprès de ses parents, il prit la route pour tenter de retrouver celle qu'il aimait.

Il erra durant des semaines, des mois, se nourissant de ce que l'on voulait bien lui donner. Avant de finalement arriver dans une immense plaine. Se dirigeant à taton, il découvrit l'existence d'une petite maison en terre battue et y pénétra.

A l'intérieur, seul le silence régnait. Une odeur de poussière et de moisi atteignait son nez, mêlée à celle de la mort. Fouillant comme il le pouvait, il mit bientôt la main sur une petite bougie qu'il reconnut aussitôt.

Il l'avait offerte en gage d'amour à sa bien aimée, peu de temps avant qu'elle ne parle à sa "mère". Si elle s'éteignait, c'est qu'il était mort, lui avait-il dit. Sur le moment, cela lui avait paru romantique. Mais maintenant qu'il la tenait entre ses mains...

Si elle se trouvait là, c'est que la jeune femme l'avait emmenée avec elle. Que cette maison était la sienne. Et que l'un des trois corps qu'il venait de trouver était le sien. Les deux autres ressemblaient à ceux de jeunes enfants, ceux d'un petit garçon et d'une petite fille.

Petit à petit, il prit conscience de la situation : sa bien-aimée avait emmené la bougie avec elle, dans l'espoir qu'il lui reviendrait. Elle avait élevé leurs enfants avec amour jusqu'à ce que la bougie ne s'éteigne. Le croyant mort, tous les trois avaient ingérés du poison pour le rejoindre dans l'au-delà.

Fou de douleur, le jeune homme se saisit d'un couteau rouillé traînant sur la table et se l'enfonça dans le coeur. Ainsi il retrouvait celle qu'il aimait et leurs adorables bambins.

Ce fut la vieille dame qui trouva les corps, venu s'enquérir de l'état de sa captive. En voyant la scène, un rire rauque lui échappa. Comme elle avait bien manipuler cet idiot de couple qui avait oser la voler. Elle n'avait plus qu'à leur ramener les quatre corps et les laisser profiter du spectacle de leurs deux enfants ayant commis l'un des pires péchés et de leurs rejetons incestueux.

Après tout, ce n'était pas pour rien qu'on la prenait pour une sorcière...

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