Élodie a disparue

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- Bord (bip) de mer(bip), s'exclama Jean-Marie, le petit s'est noyé.

- Mais non, il avait sa ceinture.

- Alors s'il ne s'est pas noyé, où est-il passé ?

- J'sais pas.

- Élodie, aide-nous à remonter sur la berge.

- Mais vous n'allez pas sauver Maxime ?

- Où veux-tu qu'on aille ? On ne le voit même plus. Et à l'heure qu'il est il doit être loin. T'inquiète pas, quelqu'un finira bien par le trouver et nous le ramener.

Élodie essaya d'aider son grand-père et Francis à remonter. Les deux hommes dérapèrent, glissèrent se couvrirent de boue sans y arriver. Ils s'allongèrent un instant sous le vieux chêne pour reprendre leur souffle.

- Papy, Francis ? Qu'est-ce que vous faites en slip par terre ? Vous êtes tombés.

C'était Maxime qui les toisait sur la berge du haut de ses six ans.

- Heu…On venait te sauver de la noyade.

- Mais, je ne me noyais pas.

- Ah, bon ! Ben, nous on croyait.

- C'était trop cool de flotter dans le courant !

- Comment as-tu fait pour sortir de l'eau ?

- C'est Albert qui m'a aidé.

- C'est qui celui-là ?

- C'est moi, s'exclama un vieil homme bedonnant portant une casquette à l'envers, à l'instar d'un campeur des années trente. J'étais au milieu de la rivière lorsque j’ai vu le petit qui filait dans le courant. Bien sûr, je n'ai pas hésité un instant à l’attraper.

- Merci Albert, t'es un gars super, tu peux nous aider à remonter ?

- Ouais, bien sûr !

Albert essaya d'aider Jean-Marie à remonter sur la berge, mais sans succès, il failli même tomber à son tour.

- Vous pouvez aussi faire le tour, il y a un chemin qui remonte de la berge sur votre gauche.

- Albert, tu pouvais pas le dire plus tôt ?

- Ben, j’croyais que vous vouliez absolument remonter par là !

- Bon, allez viens mon Francis, faisons le tour.

Albert les attendait avec une bouteille de gnole à la main.

- Tenez, prenez-en une gorgée.

- Ah ! Ça c'est pas de refus, s'exclama Jean-Marie avec les yeux brillants de plaisir.

- Vous allez dire que ça ne me regarde pas, mais c'est quoi toutes ces olives sur le sol ?

- C’est papy qui a renversé le bocal quand il a plongé pour sauver Maxime.

- C'est dommage qu'elles soient par terre, on aurait pu les manger avec la gnole.

- Malheureux, c'est pour les poissons.

- Pour les poissons, s'exclama Albert étonné.

- Oui, c'est une nouvelle technique de pêche.

- Ah ! Je pense que vous voulez parler de la pêche à l'olive ?

- Ben oui, on dirait que tu comprends vite mon Bébert !

Albert se mit à rire.

- En réalité, ce n'est pas avec de vraies olives, mais avec une sorte de plomb qui ressemble à une olive.

Mais devant l'air septique des deux amis, Albert ne continua pas ses explications, il leva la bouteille à leur santé pour trinquer.

- Au p’tit et à notre rencontre !

- AIE ! AIE ! AIE !

C'était Maxime qui poussait des cris de détresse.

- Bon qu'est-ce qui se passe encore ?

- AIE ! AIE ! AIE !

Le garçon s'était planté l'hameçon dans le doigt.

- Écoute, Maxime, arrête de crier, tu nous casses les oreilles, fais-moi voir ça.

Jean-Marie regarda les dégâts, puis ce fût au tour de Francis puis d'Albert et enfin d'Élodie.

- C'est pas très beau à voir,

- En effet, on ne va pas pouvoir faire grand-chose.

- Vous n'allez pas laisser Maxime comme ça, s'exclama la fillette.

- Qu'est-ce que tu proposes ? Puisque tu es si maline !

- Il faut l'amener à l'hôpital !

- Hein, qu'est-ce que tu veux qu'ils fassent de plus à l'hôpital ?

- La p'tite a  raison, intervint Albert, mon beau-frère il s'est planté un hameçon dans la main et ils ont dû l'amputer.

- Ça veut dire quoi amputer ? s’inquiéta Maxime en pleurnichant.

- Ça veut dire qu'ils lui ont coupé la main expliqua Francis.

- Mais je ne veux pas qu'on me coupe la main ! sanglota le garçon.

- Bon ça suffit, intervint Jean-Marie, s'il faut l'amputer, on n'aura pas le choix.

- C'est quand même bizarre pour ton beau-frère, rajouta Francis.

- C'est peut-être parce qu'il avait du diabète ? D'ailleurs il est mort maintenant.

- Qui est-ce qui est mort ?

- Le beau frère d'Albert.

- À cause de l'hameçon ?

- Bon ça suffit, Élodie a raison, il faut l'amener à l'hôpital. Le problème c'est que l'on a plus de voiture.

- Y’à qu'à prendre la mienne, proposa Albert.

- Comment on fait pour prévenir Raymonde ?

- Tu n'as qu'à l'appeler !

- Mais, je n'ai pas de téléphone.

- J'en ai un moi, intervint Albert en sortant de sa poche un appareil flambant neuf. Ç'est quoi le numéro de votre Raymonde ?

Jean-Marie regarda Francis, puis Élodie, mais aucun des deux ne le connaissait.

- Y'a qu'à laisser la p'tite ici, comme ça elle expliquera où on est à Raymonde.

- Mais je ne veux pas rester ici !

- Tu n'as pas le choix, tu vas rester là.

- Et s'il fait nuit et que vous n'êtes pas revenus et que mamie non plus ?

- Je peux lui laisser mon téléphone, comme ça elle pourra appeler la police.

- Ça c'est une excellente idée.

- Comment je fais pour appeler la police ?

- Tu fais le 17.

- Je tape juste 17 sur le téléphone ?

- C'est ça, regarde, je vais même enregistrer le numéro dans le répertoire.

- Bon, d'accord, mais vous vous dépêchez alors ?

- Oui, oui, t'inquiète paupiette, juste le temps de faire l'aller retour.

Albert enleva quelques affaires qui se trouvaient sur le siège avant afin que Jean-Marie puisse s'asseoir.

- Comment on fait pour la canne à pêche ? demanda Francis.

- Tu n'as qu'à laisser le coffre ouvert et mettre Maxime dedans.

- Allez-viens mon grand, tu devrais boire un peu de gnole, ça te ferait du bien.

Maxime avala une gorgée d'alcool, qui le fit tousser, mais il trouva cela bon et finalement en réclama encore.

Quand le convoi arriva à l'hôpital la bouteille de gnole était vide, en entrant dans le bâtiment le petit groupe ne passa pas inaperçu.

Il y avait deux hommes en slip et un autre avec une casquette à l'envers qui sentaient l'alcool et qui tenaient une canne à pêche à la main au bout de laquelle était accroché un garçon par le doigt.

L'infirmière les accueilli et fit un geste inattendu qui laissa les trois hommes perplexes.

Elle coupa le fil qui reliait la canne à pêche à l'hameçon, libérant ainsi le garçonnet.

- Tu seras mieux comme ça, en attendant le médecin, déclara-t-elle en souriant à l'enfant.

L'interne de garde découpa la peau autour de l'hameçon, désinfecta le doigt avant de faire un pansement.

- Voilà Maxime, te voilà tiré d'affaire. Tu as été très courageux.

- Finalement, ça n’a pas été très long, se réjouit Francis, je suis sûr que Raymonde n'est pas encore rentrée du supermarché.

- Ce serait bien, comme ça je n'aurai pas à expliquer pour l'hôpital, se réjouit Jean-Marie.

Mais il était loin de se douter de la mauvaise surprise qui les attendait au bord de la rivière.

Élodie avait disparue, sans laisser de traces.

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