Première alerte
La nuit s’était écoulée sans incident. Comme vous devez l’imaginer, avec mon métier, je ne suis pas habitué à me coucher tôt. Malgré les heures de conduite, je n’avais pas du tout sommeil quand je me suis glissé sous les draps. Emily est d’abord venue se lover contre moi. Je lui avait prêté un T-shirt qui lui couvrait les fesses quand elle était debout, mais une fois au lit, c’était une barrière toute symbolique. Je sentais ses seins contre ma poitrine et sa main n’a pas tardé à venir juger de l’effet obtenu. Pas besoin de vous faire un dessin, avec une fille comme ça à mes côtés, le résultat était garanti. Elle m’a donné un bon échantillon de ses talents. J’avais beau savoir que j’avais affaire à une professionnelle, je dois admettre qu’elle a réussi à me surprendre.
Quant elle a fini par s’endormir, je me suis relevé en douceur pour penser un peu à la suite des événements. Je n’avais pas de plan préconçu et personne ne m’attendait à San Francisco. J’avais juste envie de changer un peu de paysage et d’ambiance pendant quelques jours avant le prochain engagement. La seule chose que j’avais inscrite à mon programme, c’était d’aller faire un tour dans la Napa Valley pour visiter quelques vignobles.
Emily ne faisait pas partie du schéma général, mais je ne voyais pas bien comment j’allais pouvoir lui expliquer gentiment qu’il fallait qu’elle reprenne sa route seule. Je décidai de remettre cet aspect à plus tard.
Je remis mon ordi en route, autant pour m’occuper que par réelle nécessité. Je passai un moment à chatter avec Boris, qui est un peu mon agent. Il se charge de me trouver des contrats à la hauteur de mon talent et me débarrasse ainsi de la corvée de rechercher et négocier les engagements. Boris vit à Las Vegas, qui est l’épicentre de mon activité, même si je refuse catégoriquement de m’y installer à demeure. J’ai gagné assez d’argent pour m’offrir une petite maison à Venice Beach, pas sur la plage quand même, mais assez proche de la mer pour que je puisse mettre ma planche à l’eau quand j’ai un moment de calme. Je travaille souvent pour les grands casinos, mais il m’arrive aussi de participer à des soirées vraiment privées, à Beverly Hills ou à Malibu.
Je finis par dormir vers une heure du matin, après avoir calé mon réveil sur cinq heures.
Le soleil n’était pas encore levé, mais l’aurore diffusait un début de jour, quand la sonnerie me tira du sommeil. Je laissai Emily dormir encore quelques minutes et passai sous la douche avant de lancer la machine à café. Je piochai un sandwich acheté la veille et le dévorai en trois bouchées. Ceci fait, je retournai réveiller ma passagère. Elle se retourna et tira le drap sur son visage. J’arrachai la literie en la priant de se lever en vitesse. En grognant, elle se dirigea vers la salle de bain au radar. Elle en ressortit quelques minutes plus tard, complètement nue.
— Je n’ai rien de propre !
Je piquai une des culottes dans le sac en papier.
— Mets déjà ça !
Son chemisier de la veille avait triste allure. Je lui tendis un autre de mes T-shirts. Heureusement que je mesure 1,78m. Pour le bas, il faudrait qu’elle fasse avec le même jean.
— On t’achètera d’autres vêtements quand on arrivera.
— Ça veut dire que je viens avec toi ?
— Bien sûr, tu ne penses pas que je vais te laisser là, à attendre que tes copains viennent te chercher.
— C’est déjà arrivé !
— Pas avec moi. Habille-toi en vitesse qu’on fiche le camp. Tu veux un café ? Il n’y a que ça de toute façon.
— Oui, pas trop fort, avec du lait, s’il te plait.
Ses seins libres sous mon T-shirt trop grand lui donnaient un look un peu trop voyant. Je me promis de lui trouver une tenue plus discrète dès que possible.
Il était un peu plus de six heures quand j’ouvris la porte pour ranger nos maigres bagages dans le coffre de ma voiture. Comme je revenais vers la chambre, je repérai un SUV Cadillac Escalade noir, aux vitres surteintées qui parcourait le parking à faible vitesse. J’attendis qu’il ait tourné au coin du bâtiment et je fourrai Emily d’autorité dans la voiture avant de démarrer aussi doucement que possible.
— Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi on part aussi vite ?
— L’instinct du soldat, ça ne s’explique pas. Est-ce que tes amis de Vegas ont un SUV Cadillac noir ?
— J’en sais rien, je ne connais pas les marques de voiture.
— Une grosse voiture noire, aux vitres teintées ?
— Peut-être oui, Mario en a une de ce genre.
— Qui c’est ce Mario ?
— C’est le second de Pablo, l’homme a qui on m’a donnée.
— Ta copine Nina n’a pas su tenir sa langue. Ils ont du rouler toute la nuit.
Je m’assurai que je n’étais pas suivi avant de prendre la route en direction du Nevada.
— Pourquoi tu repars vers la montagne ? On ne va plus à San Francisco ?
— Si, mais au cas où ils auraient repéré ma voiture, je préfère qu’ils croient que l’on retourne vers le parc.
Juste à la sortie de la ville, je tournai à droite deux fois, pour revenir sur une rue parallèle à l’axe principal, avant de reprendre la route vers l’ouest. J’avais prévu d’aller jusqu’à Modesto, à une heure de route. Cette ville a un aéroport et quelques agences de location de voitures. Mon idée était de laisser ma Mustang sur le parking et de repartir avec une voiture de location anonyme. Le moment venu, je trouverais bien un moyen de la récupérer.
Nous sommes repartis au volant d’une Toyota Camry grise, beaucoup plus discrète que mon cabriolet. J’ai trouvé un établissement ouvert pour prendre un vrai petit-déjeuner, en attendant l’ouverture des commerces. J’ai commandé des œufs et du bacon, Emily a pris des pancakes et du sirop d’érable. À neuf heures, nous étions les premiers clients d’un magasin de vêtements où j’achetai de quoi habiller Emily pour deux jours. Quand elle a vu ce que j’avais choisi pour elle, elle a commencé à râler, mais je voulais absolument qu’elle passe pour une nana ordinaire, pas une fille sur laquelle les hommes se retournent. Après être passé à la caisse, je la poussai dans une cabine pour qu’elle se change. Je lui demandai sa pointure pour ajouter une paire de sneakers bon marché.
On est remontés en voiture. La Camry n’était pas équipée pour recevoir les stations satellite. Je couplai mon mobile en BlueTooth et lançai ma playlist en mode aléatoire. Les premières notes d’Angus Young se firent entendre et je reconnus l’intro de « Highway to Hell » *. Je jetai un regard dans le rétro. Un gros SUV noir se rapprochait rapidement.
* Highway to Hell (Autoroute vers l’enfer) : titre du groupe australien AC/DC
https://www.youtube.com/watch?v=l482T0yNkeo
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