20. Endurance

17 minutes de lecture

Sixième jour.

Après deux heures de course entrecoupées de renforcement musculaire, nous retrouvâmes notre adjudante dans la salle de briefing. Tandis que nous prenions place, à peine rafraîchies par la douche express, l’écran affichait un clitoris rose dans son entièreté, avec ses oreilles et ses branches. Lorsque chacune fut installée, l’instructrice tourna un regard vers l’image et demanda :

— Qui peut me dire de quelle planète vient cette créature ?

— C’est un clito, hésita Sadjia.

— Exactement. Aujourd’hui, nous allons parler de l’anatomie et plus particulièrement de lui. C’est indispensable que vous compreniez que c’est lui qui est le déclencheur, l’unique solution à tous vos problèmes puisque c’est sa stimulation plus ou moins indirecte qui fait fonctionner nos ESAO. L’excitation commence là — Elle désigna son front. — Et se termine là. — Elle désigna sa braguette. Pour comprendre l’orgasme, il faut aussi avoir conscience de son corps et de comment il se modifie par le plaisir. L’excitation se mesure en neuf étapes.

Elle afficha la liste et commenta ce qu’elle appelait le niveau de chauffe en y apportant du détail. Dans les dix à trente premières secondes, l’humidité vaginale naissait, plus ou moins abondante chez les unes que chez les autres. Alors l’utérus et le col étaient tirés vers le haut, les grandes lèvres s’écartaient légèrement car les petites lèvres prenaient du volume et se lissaient. Le clitoris grossissait irrémédiablement. Pour certaines d’entre nous, les mamelons se durcissaient et la poitrine pouvait augmenter.

— Une fois ces étapes réussies, plus ou moins rapidement, vous parvenez à ce que le colonel Paksas vous a présenté : la zone de plateau. C’est la phase dans laquelle vous devez vous trouver en permanence pour être prête à tirer en un minimum de temps. Si vous vous trouvez en phase de chauffe au moment où vous vivez un stress intense ou un choc, vous ne pourrez pas atteindre l’orgasme et utiliser votre arme principale. Si vous êtes sur la phase de plateau, votre corps pourra répondre, même si votre esprit est en partie détourné… je dis bien en partie. Alors, voyons voir ce qui se passe pendant que vous êtes sur la zone de plateau.

Le diaporama passa aux neuf étapes de la phase suivante. L’excitation augmentait et la vasodilatation qui avait commencé faisait tant enfler la cavité vaginale qu’elle en réduisait l’ouverture d’un tiers, puis finissait par se contracter provoquant cette sensation d’être comblée. Le clitoris n’étant pas pour rien dans ce phénomène, sa tête était de plus en plus érectile. Les petites lèvres passaient du rose au rouge. Les aréoles enflaient, les deux tiers d’entre nous voyaient leur peau rougir au-dessus du nombril. Pour finir, l’excitation montait dans le haut des cuisses et des fessiers pour approcher de l’orgasme, une explosion de dopamine, d’ocytocine, de sérotonine et d’endorphine.

— Mais pour ce qui nous intéresse, c’est la libération d’une énergie incommensurable, variable selon l’intensité de l’orgasme. Cette énergie est catalysée via l’implant et est retransmise à travers le transmetteur vaginal jusqu’au canon à plasma. Inconsciemment, vous l’avez prouvé, vous savez quand vous y êtes. Mais que se passe-t-il exactement ? Vous avez, soldates, des contractions rythmées du vagin, de l’utérus et de l’anus toutes les 0,8 secondes. Elles s’espacent quand l’orgasme dure dans le temps. Elles s’étendent au-delà du bassin et selon l’intensité avec laquelle vous vivez cet instant, elles peuvent s’étendre à tout le corps, jusqu’à la tétanie complète. Les rougeurs sur la gorge sont alors plus marquées et s’étendent à d’autres parties du corps. Pour certaines, vous expulsez du liquide vaginal, voire de l’urine. À partir de là nous passons à la phase de myatonie, une phase de décontraction musculaire totale qui vous provoque cet effet de bien-être mais qui interrompt le tir pour douze secondes. Jusqu’ici, y a-t-il des questions ?

— Pourquoi douze secondes ? demandai-je.

— C’est le temps qu’il faut à votre corps pour s’en remettre. Mais ce qui est important, c’est ce qui se passe après les douze secondes.

Elle afficha plusieurs courbes de plaisir différentes. La première n’affichait presque pas de zone de plateau, touchait la ligne de l’orgasme et retombait.

— Ça c’est Dahlia, pouffa Sadjia.

— J’appelle ça l’express. Ça détend, mais sans plus. C’est bon pour un tir de snipe, mais si vous vous situez tout le temps sur cette courbe, au moins on sait sur quelles missions vous affecter.

La seconde courbe était plus commune, après le plateau la phase d’orgasme durait trois à cinq secondes. La myatonie de douze secondes, ne tombait pas à tout à fait zéro et remontait en zone de plateau, pour remonter à nouveau vers un orgasme un peu plus long.

— Ça c’est la courbe que doit faire l’excitation de toute pilote d’ESAO. Vous êtes toutes multiorgasmique, vous êtes des femmes. Et ça, c’est la courbe idé…

— C’est la courbe de la Teigne, pouffa Kirsten.

— Je l’espère, sourit l’adjudante.

La troisième courbe ne retombait pas beaucoup après le premier orgasme, elle remontait aussitôt, durait, retombait à peine, remontait, durait, et répétait des phases d’orgasmes à peine espacées. Mon imagination suffit à ce que le simple dessin de la courbe m’excitât. S’il était possible d’avoir des orgasmes répétés de cette manière, il fallait absolument que je le vécusse.

— J’espère que ça vous aura éclairé, cet après-midi, je veux un marathon en phase plateau. Pas de question ? Toujours pas ? Demain nous passerons à l’anatomie des crustacés, plus long et moins excitant.

En me levant je me rendis compte que j’en savais plus sur les crustacés que j’avais étudié pendant le service militaire que sur le clitoris. Car même si les effets de l’orgasme n’étaient pas inconnus à mon corps, je n’aurais jamais pu détailler chaque manifestation physiologique.

— Moi j’ai une question, pouffa Caitlin alors que nous descendions les escaliers. Est-ce qu’il y a des frites à la cantine ?

Peu avant quatorze heures, nous nous retrouvâmes toutes aux vestiaires. Je ne cessais de dessiner des courbes dans ma tête, essayant de trouver la représentation graphique du meilleur souvenir d’orgasme que j’avais pu m’offrir par le passé. J’étais persuadée de pouvoir parvenir à un orgasme long suivi de plusieurs sursauts qui feraient de moi l’artilleuse la plus redoutable.

Ma brassière enfilée, je m’assis sur le banc pour glisser mes jambes dans les bas de contention. Mercedes me fit remarquer :

— T’as l’air très concentrée.

J’opinai de la tête, et Kirsten désigna ma poitrine tendue d’un mouvement du menton :

— Concentrée ou déjà à bord.

— Les deux, répondis-je.

— Tu kiffes vraiment ça.

— Fais comme elle, répliqua Mercedes.

J’enlevai ma culotte puis pris la direction des hangars. Être qualifiée de chaudasse dans un groupe de débridées sexuelles, c’était un comble. Mais comme je l’avais dit à Jane, devenir la reine des nymphos était mon objectif. Alors il ne fallait pas que je m’en offusquasse. Kirsten devait, au contraire, m’envier.

— Je commence par toi ?

Je sursautai et me tournai vers Héloïse qui venait d’ouvrir le hangar.

— Je t’ai fait peur ?

— J’étais dans mes pensées.

Je passai avec elle, et elle fit descendre la selle. Par habitude, elle lubrifia le transmetteur avec le spray, mais je doutai que ce fut utile à cette heure. Elle plaça soigneusement les lentilles de contact.

— Prête pour une longue après-midi ?

— Oui.

J’enjambai la selle et glissai l’extrémité anale avant de remonter la fourche. Le transmetteur vaginal glissa sans un effort dans mon écrin détrempé et la fourche découvrit alors mon clitoris enflé. Héloïse sourit, puis me demanda :

— Qu’est-ce qui te fait cet effet ?

— Je n’arrête pas de penser aux courbes du cours de ce matin.

— Les courbes, ça t’excite ?

— Beaucoup.

Amusée, elle referma la bague métallique, effleurant malgré elle mon rubis et déclenchant un spasme dans mon ventre. Elle positionna le stimulateur tricéphale puis verrouilla mon coccyx avant de tendre les bras vers les arceaux d’épaule. Elle avait les yeux humides de malice et je me souvins de ce premier soir où elle avait avoué que nous entendre gémir l’excitait. Notre propre excitation mettait son imaginaire en émoi. Elle huila mon premier téton tendu et je lui fis remarquer son t-shirt que sa poitrine déformait :

— Qu’est-ce qui te fait cet effet ?

Ma question n’attendait pas de réponse. Elle rougit en fixant les palmes de massage, puis graissa mon second téton.

— Ça pointe tout le temps chez moi.

Je lui répondis par un marmonnement dubitatif. Elle attacha mon second sein, puis posa ses deux mains sur mes hanches nues :

— Bon courage, lieutenant.

— C’est une histoire de courage ?

— Une histoire de dosage. Bon dosage.

Nous nous sourîmes, alors je montai ma selle dans le corps de mon ESAO pour échapper à ses mains. L’armure se referma et elle ouvrit le compartiment sur le hangar. Jane se trouvait avec sa camarade assise à un blindé, la porte ouverte. La main de mon Furet lui fit signe d’un pouce levé.

— Clarine ?

J’opinai de la tête et elle me cria :

— Bon exercice !

J’avançai dans le hangar en lui lâchant un geste de la main. La Sauterelle de l’instructrice était en train de poser des petites balises en plastique rouge près des murets en béton disposés sur la piste. Elle me demanda :

— Prête, Fontaine ?

— Prête, mon adjudant.

— Alors échauffement musculaire et sexuel

Je me mis au trot, sans utiliser un seul des stimulateurs de ma selle. Les vibrations dans le pelvis suffisaient à elles seules à monter la température. Je prenais conscience de mon corps et cochai dans mon imaginaire les étapes correspondant au plateau. Mon sexe était gorgé de sang, mon clitoris était gonflé, le transmetteur vaginal me comblait pleinement, ma poitrine tendait et je ressentais l’excitation m’enflammer jusqu’à l’intérieur des cuisses.

Je pouvais déjà classer les différentes parties de corps. Mon épiderme, ma poitrine, mon anus, mes petites lèvres étaient parfaites pour les préliminaires, pour chauffer. Le vagin et le clitoris étaient les seuls à pouvoir me maintenir sur la zone de plateau et à me mener vers l’orgasme. Celui qui me permettait un meilleur contrôle sur l’accélération ou non du plaisir restait le clitoris. En phase myatonie, le clitoris fourmillait trop pour qu’il me fournît un retour de plaisir immédiat, mon corps tout entier était sans dessus dessous et ma poitrine ne réagissait pas aux stimuli trop doux. Le massage anal semblait prendre de la valeur à ce moment, diffusant ses ondes dans le périnée. Seulement ensuite le vagin écoutait à nouveau et le clitoris pouvait alors suivre pour permettre une seconde vague.

Mes notes mentales m’empêchèrent de voir le temps passer. Toutes les autres filles étaient prêtes. L’instructrice nous expliqua :

— Aujourd’hui, nous allons travailler la progression en groupe. Il y aura un binôme et un groupe de trois. Selon la disposition de l’environnement, vous allez progresser soit en tiroir, soit en perroquet. C’est là que la communication avec vos partenaires est très importante.

Nous partîmes en direction de la Petite Venise. Durant les vingt minutes de course, nous formâmes les équipes, et je décidai de me mettre avec Mercedes.

Le déplacement en binômes sur le terrain suivait les mêmes règles qu’à pied. L’environnement seul nous obligeait à nous adapter. Lorsqu’on choisissait de se déplacer en tiroir, l’une protégeait l’autre jusqu’à ce qu’elle arrivât à la même hauteur. Lorsque nous nous déplacions en perroquet, nous dépassions notre partenaire pendant qu’elle nous couvrait, jusqu’à ce que nous eussions trouvé un abri d’où la couvrir le temps qu’elle progressât. Lorsque nous devions nous déplacer sur une même ligne, nous effectuions un déplacement en rouleau.

L’instructrice nous fit nous déplacer en rampant, en roulant, en sautant par-dessus un obstacle, changeant la difficulté selon son humeur. La seule règle immuable était de respecter la progression soit en tiroir soit en perroquet. Toujours une fille protégeait l’autre, prête à ouvrir le feu.

Lorsqu’elle en eut vu assez, après deux heures, nous rejoignîmes la cour d’exercice près des hangars. J’étais en nage, j’avais l’impression d’avoir des clous dans les cuisses et des bourdons dans le vagin.

Tout en approchant de la piste, je laissai le palpeur vibrer par intermittence contre mon clitoris dans l’idée de battre mon record d’orgasme pendant le tir sur cible. Sauf que lorsque nous fûmes réunies, alors que j’étais à deux doigts d’exploser, elle ne nous demanda pas du tir sur cible :

— Exercice de coordination. Nous allons jouer au handball. Fontaine et Muñoz près des hangars. Johnston, Jorgensen et Birki, à l’autre bout de la piste. Votre but, poser le cube au pied du mur adversaire. Vous n’avez pas le droit de vous déplacer avec, uniquement de faire des passes.

Tout en gagnant ma position, je coupai tous mes stimulateurs pour ne pas exploser dans mon exosquelette. J’étais en train d’inonder mon habitacle de mes sécrétions. L’instructrice se plaça au bout du terrain après être allée chercher un cube de dextérité.

— Go !

Le Rhino de Mercedes démarra au galop en hurlant :

— Perroquet !

Je lui emboîtai le pas en m’élançant à quatre pattes. Elle fonça droit dans le Grizzli qui vola sur trois mètres, ramassa le cube rouge puis attendit que je l’ai dépassée. Je me tournai vers elles en levant les bras, et elle lança le cube. Mes doigts malhabiles le laissèrent échapper, mais je me précipitai pour le ramasser. Mercedes filait déjà vers l’avant. Kirsten se précipita vers moi, agrippa mes genoux et me fit valdinguer d’un coup d’épaule. Le choc avec le sol me secoua toute entière, mes doigts ne s’ouvrirent pas. Je fis rouler le cube au ras du sol en direction de Mercedes. Sadjia essaya de le chasser du pied sans y arriver. Mercedes le ramassa, et courut le poser au pied du mur, chassant Caitlin comme un moucheron sur le trajet d’un frelon.

— Premier point ! La balle à l’équipe adversaire.

La partie continuait.

Après une heure, alors que Mercedes et moi menions douze à sept, l’instructrice interrompit la partie.

— Parfait. Tir sur cible mobile dans dix minutes. Après, je veux que vous repreniez la course. Nous finirons la journée lorsque la dernière d’entre vous ne sera plus capable de marcher.

Je marchai en direction du pas de tir pour être la première à jouir. La rotation de mon transmetteur vaginal calé à son rythme le plus optimal, les tétons aspirés, le clitoris léché, je sentis mon souffle s’enflammer en quelques secondes.

Ne voulant pas que je décidasse à sa place, l’adjudante ordonna après dix minutes :

— Birki et Jorgensen, en premières.

Je m’écartai, frustrée, en arrêtant mes stimultateurs, les cuisses prêtes à trembler. Les homards surgirent au fond de la cour, se déplaçant en crabe et se croisant sans cesse. Sadjia désigna les deux cibles de ses doigts et des rayons surgirent pendant quatre secondes. Elle se recula et une autre cible vint remplacer les premières. Le Grizzli tira à son tour, deux ou trois secondes.

— Muñoz et Johnston.

À peine en place, le Koala de Caitlin tira durant cinq longues secondes. Puis les naseaux du Rhino grillèrent la seconde cible pendant deux secondes.

— Fontaine, tu peux y aller.

Je me positionnai, fébrile, remis en service le lapeur et le transmetteur vaginal. Je le fis accélérer et vibrer en même temps quelques secondes. L’orgasme me broya toute entière. Je lâchai un tir et laissai poursuivre le transmetteur et le lapeur. Le sursaut de plaisir ne se vit pas. Mon orgasme se poursuivit, ininterrompu. Je savourais les contractions qui se relançaient sans cesse, me brutalisant des talons jusqu’aux épaules. Le rayon s’acharna sur la cible déjà cramée. Puis les contractions s’espacèrent, les vibrations devinrent désagréables. Je coupai tout et reculai. J’augmentai la ventilation de l’air pour caresser ma peau.

— Vingt-deux secondes, Fontaine. Vous êtes à trois secondes d’égaliser le record du régiment. Allez, on bouge, je veux de la course d’endurance.

Etourdie, les muscles douloureux, je me demandai qui détenait le record. Je me mis en marche après quelques secondes de répit et me concentrai pour trouver dans chaque mouvement une sensation plaisante. Me voyant la dépasser, Mercedes ouvrit un canal de communication :

— Comment tu fais ?

— Concentre-toi sur chaque mouvement. Monte la climatisation pour faire des caresses. Pense à ce qui te fait fantasmer, à quelque chose de doux, comme si c’était les doigts de ton ex ou ses baisers.

Elle ne répondit pas, mais après trente secondes, je la vis accélérer.

Cailtin était déjà à l’arrêt, incapable de rebondir sur son orgasme.

Sadjia fut la seconde à s’arrêter, ce qui me surprit, car elle était bien plus délurée que Kirsten. Mais la Danoise la suivit après quelques minutes.

J’ignorais qu’elle heure il était, mais le soleil était si bas que les ombres des immeubles couvraient toute la cour. Mercedes et moi arrivions à nous maintenir côte à côte, elle sur deux jambes, moi à quatre pattes. Le transmetteur régulièrement lubrifié, bougeant d’un demi-centimètre à chaque foulée suffisait à maintenir le désir depuis plusieurs heures. Je n’avais ni envie de jouir, ni d’exploser, mais je savourais ce massage intime.

— Muñoz, Fontaine, retour au hangar. Vous avez validé votre billet pour la Lune. Il est vingt heures, je vous retrouve toutes demain à cinq heures précises pour un exercice au petit matin.

Nous bifurquâmes d’un même mouvement puis gagnâmes nos hangars. Héloïse qui m’attendait ferma le rideau de fer. J’ouvris mon ESAO et descendis la selle.

— Quel tir !

— Merci.

— T’es qualifiée pour aller sur la Lune après-demain.

— Vraiment ?

— Oui, une course d’endurance.

Alors que je détachai moi-même mes seins douloureux, elle débloqua mon bassin, révélant un Mont de Venus rose et enflé. Elle hésita avant d’effleurer mon clitoris pour le libérer de la bague. Un frémissement involontaire parcourut ma peau, et Héloïse s’excusa :

— Pardon.

Mes pieds poussèrent et me libérèrent des deux sondes. Héloïse semblant être incapable de détacher ses yeux de mon pubis, je lui demandai :

— Quoi ?

— C’est juste trop beau.

Mes nymphes étaient foncées et lisses, le transmetteur oint d’écume blanche. Je chancelai en passant ma jambe par-dessus la selle.

— Si tu le dis.

— Ne te vexe pas.

— Je ne me vexe pas. T’es folle mais je t’aime bien.

Elle sourit tandis que je levai le nez vers les spots pour qu’elle m’enlevât les lentilles. Elle les rangea soigneusement dans leur liquide physiologique et m’annonça :

— Je vais aider Mercedes.

Elle partit en trottant. Cela m’amusa d’imaginer son impatience de découvrir l’état d’excitation de ma camarade. Je m’appliquai à nettoyer ma sellerie, déclenchai le protocole à UV puis fermai mon ESAO. Je tapotai sa jambe pour lui souhaiter bonne nuit et gagnai le vestiaire abandonné et nettoyé.

Ce calme était plus que bienvenu. Dans l’obscurité reposante des douches, je m’apaisai avant même de mettre l’eau à couler. Je m’assis sur le sol pour défaire les bas, et Mercedes arriva à ce moment.

— Désormais, t’es ma conseillère attitrée !

— Cool, dis-je en me relevant.

— C’est grâce à toi que j’ai réussi ce marathon

JVoyant que je galérais à retirer la brassière, elle vint m’aider. Ma tunique tomba au sol.

— Fatiguée ?

— Un peu beaucoup, reconnus-je en me relevant.

— Moi aussi, j’ai faim.

J’ouvris le robinet et fermai les yeux tandis qu’elle ôtait sa tenue. Je laissai l’eau battre sur mon crâne, et après deux minutes, je dénouai mes longs cheveux blonds. Voyant la lascivité de mes gestes, Mercedes s’approcha dans mon dos et posa ses doigts sur les miens. Je sursautai, et elle me promit :

— C’est un remerciement, pas une avance.

Je baissai les bras, et elle savonna mes cheveux en commençant par un massage des tempes, royal d’efficacité. Mes paupières se refermèrent et je savourai ces minutes de détente.

La douche terminée, nous gagnâmes le réfectoire où nos camarades avaient terminé de manger depuis longtemps, et traînaient à papoter. Nous approchâmes une fois nos plateaux chargés. Caitlin s’exclama :

— Mes héroïnes !

— Nous n’avons rien fait d’exceptionnel, dis-je.

— Dis celle qui continue à prendre du plaisir après un orgasme de vingt-deux secondes, marmonna Kirsten.

— Ne sommes-nous pas toutes multiorgasmiques ? questionnai-je.

— Dans mon lit avec un bel homme ou une copine, lâcha Sadjia rêveuse. Mais pas en courant et en me disant qu’il faut tenir longtemps.

— Faut pas penser au temps, dit Mercedes.

— Je vais suivre le régime de la Teigne, ça semble porter ses fruits, conclut Kirsten.

Elle se leva pour aller chercher des frites. Caitlin en profita pour plaisanter :

— Elle ne t’appelle plus Suce-moule. Vous allez bientôt vous marier ?

Je souris, simplement ravie que de lui avoir tenu tête, même en me faisant démolir, avait changé le sobriquet que m’octroyait la Danoise. Lorsqu’elle revint s’asseoir, Peter changea la conversation en nous demandant :

— Prêtes pour la Lune ?

— J’aurais aimé un endroit plus fleuri, glissa Mercedes.

— Moi, je suis trop impatiente, confiai-je. Quitter la Terre, c’est trop cool !

— Courir toute une journée, à regarder le même paysage ? grimaça Mercedes.

— Moi je trouve ça beau, un paysage lunaire.

— T’es vraiment bizarre, conclut l’Espagnole. C’est pour ça que t’iras loin.

— Je suis d’accord avec Clarine, souligna Héloïse.

— Le contraire m’aurait surprise, grinça Kirsten.

Héloïse râla, n’appréciant pas d’être charriée chaque fois qu’elle disait du bien de moi.

Je terminai mon plat de frites en pensant à la Lune, puis, pris congés.

— Je m’excuse, les filles, mais mon père a essayé de me joindre, je vais le rappeler.

En m’éloignant à travers le couloir, sans remettre le béret sur la tête, j’ouvris mon smart-data et lançai l’appel. Mon père me répondit aussitôt, enveloppé par un brouhaha de rumeurs et de musique dont il s’éloignait.

— Ma chérie ! Oh tu as l’air fatigué !

— La journée s’est terminée tard. T’es en soirée ?

— Oui. Mais on peut discuter un peu. Comment tu t’en sors avec ton équipe ?

— J’apprends à les coordonner, à faire travailler leur progression et les obliger à m’écouter quand je change de stratégie. C’est plus difficile que ce que je pensais, mais le colonel est très content de moi. Il veut m’envoyer faire un test en conditions hostiles sur la Lune.

— La Lune ?

— Oui, je vais préparer une expédition, ils me donneront un scénario à la dernière minute et d’être sur la Lune, sans atmosphère, va faire monter le stress et permettre de bien tester mes équipes. Ils ont déjà travaillé contre des billes de peinture paralysantes. Il y a en a un qui a pris une bille en pleine tête, c’était mémorable !

Il sourit.

— Je suis ravi de constater que ça se passe bien.

— L’équipe devrait être prête plus tôt que prévu…

— Encore mieux.

— … mais je t’avoue que je ne suis pas pressée qu’ils affrontent des Crustacés. Je m’attache à eux, et l’idée que l’un d’eux y reste est très dure.

— C’est le lot de tout chef d’unité.

— Et toi, tu t’amuses bien ?

— Oui. La soirée est sympa, très féminine.

— Alors je vais te laisser y aller, moi faut que je me couche.

— Bonne nuit ma chérie.

— Bonne fête !

Je raccrochai après un baiser du bout des doigts, puis je marchai jusqu’à la cour paysagère où l’on nous faisait courir chaque matin. Même s’il fallait être prête à cinq heures du matin, je voulais passer un peu de temps seule. Je m’assis contre la vitre et humai la moiteur du manteau de rosée dont la nuit nous emmitouflait. Je m’épatais autant que je culpabilisais de mentir aussi naturellement à mon père. Je n’avais malheureusement pas le choix. Certes, si je lui annonçais, ça ne changerait pas mon avenir puisque j’étais déjà engagée, mais je n’avais pas envie qu’il me haït. De plus, je ne savais pas quoi penser de mes qualités de pilotes. Devais-je être fière de jouir plus longtemps que les autres ? Etais-je plus douée ? Ou n’étais-je que plus déviante ? Toutes ces questions étaient malsaines, car il fallait que je poursuivisse sur cette lancée. Malgré tout, je ne pouvais m’empêcher de me les poser.

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