2 janvier 2025

3 minutes de lecture

L’année 2024 vient de se terminer. Je ne peux pas dire que cela m’émeuve. J’ai en vu passer une certain nombre et je sais qu’elles se ressemblent beaucoup. J’ai appris à m’en méfier, leurs surprises sont rarement bonnes. L’inattendu se confond rarement avec la chance. La chance intervient plus fréquemment lorsqu’à force d’avoir souhaité quelque chose, d’avoir travaillé à sa survenance, les planètes s’alignent enfin sur une opportunité qu’il faut saisir. Ces ruptures dans la routine de nos habitudes demandent alors du courage et de l’inconscience pour quitter un chemin connu pour un autre plus aventureux. Je suis conscient de tenir un discours positif un peu simpliste, qui pourrait se résumer à des formules à la mode : « Il suffit de vouloir », « l’avenir sourit aux audacieux ». Ce n’est pas mon propos. Vouloir changer de travail, voire de filière en se reconvertissant, voilà un projet dont l’aboutissement comporte une dose de chance, mais bien davantage une prise de risque et de la volonté. L’âge venant, je n’éprouve plus ce genre d’élan et j’imagine ma destinée, très tranquille. En fait de surprise, ce qui peut m’arriver de plus probable, à présent, est de tomber malade et finalement d’en mourir. Cette perspective ne me réjouit pas mais elle commence à s’annoncer aux portes du château, celui que j’avais bâti, très jeune en Espagne, en me croyant immortel.


L’année dernière, l’écriture est entrée dans ma vie. Ma fille me poussait à raconter mes souvenirs afin qu’elle puisse conserver ce témoignage qui lui semblait précieux. J’ai effectivement rédigé quelques pages sur mon enfance, puis sur mes expériences de jeune adulte. Cette rencontre frontale avec la mémoire fut un peu rude, trop abrupte pour donner un résultat intéressant. Je n’ai pas trouvé très exaltant de retracer une vie bien loin de celle de d’Artagnan ou du Professeur Barnard. Même si j’en ai pourtant fait de bien bonnes. Après avoir réalisé une esquisse à gros traits et comportant de nombreuses lacunes, je remettais ma copie avec un sentiment d’inaccompli.


En me remettant à écrire, j’ai probablement ouvert une boîte de Pandore. Je prend le temps d’écouter ce que mes souvenirs et surtout mon inconscient veulent me dire. J’avais oublié ce que j’avais découvert pourtant tout jeune, que cette partie profonde de notre personnalité pouvait s’exprimer et nous surprendre. Elle semble vouloir me dire : « Faisons la paix, pardonnons-nous ces trahisons faites à nous même, à notre vie rêvée qui n’est jamais advenue ».


Cette pratique peut se révéler amusante ou salvatrice selon le sujet choisi.


J’ai déjà réglé quelques comptes avec mon enfance.


J’ai retrouvé avec bonheur les héros de ma jeunesse, dans mes premiers récits de science-fiction et d’heroic-fantaisy. Ils avaient des noms fantastiques : « Jongleur d’étoiles » , « Dame Lune », « Jarol Lutarc ». Mais eux ne m’ont pas reconnu, j’avais trop changé. On ne perd pas impunément son temps loin des chemins de l’écriture. Je ne suis plus le même et mes rêves ont changés.


Alors j’essaye un peu tout, afin de retrouver ma voix (ou ma voie, c’est selon). J’attends qu’un genre se détache, qu’une tendance émerge. J'écris même sur mes lectures.


Mes rêveries m’amènent parfois un conte ou un poème, que je prends avec plaisir. La nouvelle représente un exercice plus difficile, demandant un effort de construction auquel je rechigne. Une telle attitude (de jardinier) me bloque l’accès au roman.


Encore faut-il avoir quelque chose à dire ! Lorsque je serai à la retraite, je disposerai de temps, si ma santé m’en laisse le loisir. Faut-il avoir du temps pour écrire ? Ou l’impression d’en manquer ? (en devenant vieux par exemple) Il me semble qu’un écrivain ressent le besoin d’écrire, sinon pourquoi s’infligerait-il toutes ces heures de solitude ? Il doit également posséder un sens aigü de la psychologie humaine, sens que je ne suis pas certain de posséder. J’ai envie d’écrire, peut-être pour réenchanter ma vie, qui me semble un peu inutile souvent (ah cette quête de sens, personne n’y échappe). Mais je n’en ai pas totalement besoin. Ce dont j’ai besoin c’est d’être aimé, y compris par moi-même, le critique le plus dur qui soit et de ne pas souffrir. Pourtant je partirais bien, moi aussi sur un navire, à l’autre bout du monde, porté par le souffle de José-Maria de Heredia dans son poème les conquérants, vers Cipango et ses mines d’argent ! Ecrirai-je un jour les aventures qu’il m’inspire ? Nous verrons bien.


Il faut croire en la chance !

Annotations

Vous aimez lire Philippe Meyer ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0