L'enfant et le sage
Un enfant rencontre un vieux sage.
Entre les deux une discussion s'engage.
L'enfant demande : « Faut-il avoir votre âge pour être sage ? »
L'ainé l'invite à s'asseoir, réfléchit un instant, avant de répondre :
« La sagesse n'est pas une question d'âge. Certains mourront très âgés en l'étant à peine.
C'est une affaire d'expériences et de ce que l'on en fait. Il faut passer par plusieurs étapes, expérimenter le négatif et le positif pour connaître la sagesse.
Toi, tu découvres la vie. Tu n'es qu'au début d'un long chemin parsemé de surprises, parfois bonnes, d'autres mauvaises. En de nombreuses occasions, tu auras le choix entre plusieurs voies. Toi seul décideras de t'y engager ou pas.
Tu te retrouveras parfois au pied du mur. Il te faudra alors prendre du recul, réfléchir à la raison de tes échecs, pardonner à ton prochain s'il en est la cause et surtout apprendre à te remettre en question.
Retiens cette maxime « Aux âmes bien nées la valeur n'attend point le nombre des années ». Elle te sera utile lorsque tu échangeras avec des plus jeunes que toi, ainsi qu'avec des personnes plus âgées qui te sembleront être passés à côté de l'essentiel, ne pas avoir compris certaines leçons que tu auras déjà apprises. »
Pensif, l'enfant questionne à nouveau : « Est ce que l'on connaît tout sur tout quand on est sage ? »
Le sage médite quelques minutes.
« Non, beaucoup de questions demeurent sans réponse. Nous avons tous un trousseau de clés en notre possession, on n'en trouve pas toujours l'utilité. Il faut accepter que certaines portes restent fermées et que nous n'avons pas accès à la connaissance infinie.
Cependant pour le devenir, il faut d'abord être curieux : de soi-même, de ceux qui nous entourent, du monde en général. Puis il faut entretenir cette soif de découvertes à tous les sujets. Les savoirs accumulés sont autant de présents que l'on se fait afin de découvrir qui l'on est au fond, trouver sa juste place dans ce monde et parmi la foule de gens que nous rencontrons tout au long de notre vie.
Mais l'intérêt d'être sage c'est de transmettre son savoir, d'ouvrir les yeux à qui est désireux d'apprendre, de le guider au mieux dans son cheminement. C'est le meilleur héritage que l'on puisse offrir. Une chaîne essentielle pour ne pas reproduire les mêmes erreurs.
Personne n'est omniscient. Certains croient avoir la science infuse. Ceux là sont finalement les plus ignorants. »
L'enfant, attentif, reprend : « Comment sait-on que l'on est sage ? »
« Je pense qu'on le sait quand nous avons conscience de notre mortalité et que cela ne nous fait pas peur.
Lorsque l'on est patient, sachant que l'entêtement et le fait de se presser ne nous apporteront pas plus vite ce que l'on attend sur un plateau. Qu'au contraire, prendre son temps permet de mieux appréhender les choses, de profiter pleinement de ce qui nous est offert.
Lorsque l'on sait dompter sa colère, car dans toute équation elle donne seulement de vains résultats.
À mon avis on sait que l'on est sage lorsque l'on a perdu son insouciance mais que nous avançons tout de même avec confiance. Le fardeau du passé sur l'épaule, l'esprit empreint de beaux souvenirs pour se rappeller que l'existence peut être belle malgré les difficultés. Que nous sommes conscient que rien n'est insurmontable malgré les blessures.
Qu'au quotidien, nous dosons le bon et le mauvais pour équilibrer la balance et réussissons à extraire une leçon positive de chaque épreuve.
Qu'à tout âge, nous sommes encore capable d'écouter la voix de son enfant intérieur et de connaître l'émerveillement, de ne pas céder au désenchantement. »
Tout à ses pensées, l'enfant se lève et salue le vieil homme.
« Je prendrai le temps de réfléchir à vos paroles. Je n'oublierai jamais notre rencontre. Merci pour ce cadeau. »
Le sage regarde avec bienveillance l'enfant s'éloigner, en lui adressant ces derniers mots :
« Bonne route mon enfant. »
Annotations