Pourquoi nous pouvons courir le marathon
Il y a environ un million et demi d’années
Pourquoi nous pouvons courir le marathon
Une autre particularité de l’Homme
La bipédie, posture et déplacement, est apparue dans la lignée humaine peu de temps après sa séparation de la lignée des chimpanzés et des bonobos, il y a six à sept millions d’années. En revanche, la capacité à la course est beaucoup plus récente puisqu’elle remonterait à l’adaptation aux milieux ouverts par homo erectus il y a un million et demi d’années.
La vraie particularité de l’Homme dans sa locomotion est en effet plus la course que la bipédie.
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Lors de la marche, le poids du corps est toujours en appui sur une des jambes. Dans la course, l’appui est non permanent et cela a entrainé des modifications profondes du corps humain. Le squelette et les ligaments des jambes et les pieds ont évolués pour devenir de véritables ressorts permettant de récupérer l’énergie. Le tronc s’est également adapté avec une taille libre permettant sa rotation par rapport aux jambes, afin de faire contrepoids aux membres inférieurs. En remontant encore, le cou s’est renforcé afin d’éviter le ballotement de la tête pendant la course et de permettre au regard de maintenir sa cible. L’oreille interne, siège de l’équilibre, a également évolué pour maintenir la verticalité pendant les soubresauts de la course. Sans parler des mécanismes nerveux de régulation de cette masse aux formes changeantes en mouvement rapide.
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Tous ces traits contribuent à une gestion très particulière de la course humaine. Chez les autres mammifères terrestres, on constate un optimum énergétique selon l’allure et la vitesse. Ainsi un animal aura un optimum énergétique pour la marche, un autre pour le trot et un troisième pour le galop. Si on regarde l’énergie dépensée en fonction de la vitesse, pour chaque allure, l’énergie nécessaire passe par un minimum pour une vitesse donnée. Aller un peu plus vite ou un peu moins vite à cette allure consomme plus d’énergie dans les deux variations. Si, à une allure donnée, l’animal veut se déplacer plus vite, il va augmenter légèrement la vitesse de son allure, puis passer rapidement à l’allure supérieure, plus consommatrice d’énergie, mais qui présente elle aussi un optimum. Ainsi, il va pouvoir se déplacer selon deux ou trois vitesses, mais rarement à des vitesses intermédiaires.
Chez l’Homme, s’il y a bien un optimum énergétique pour la marche, à une vitesse de 1,5 m/s (environ 5 km/h), il n’y a pas d’optimum pour la course : l’énergie dépensée croît linéairement avec la vitesse. Seul l’Homme peut moduler facilement cette vitesse sans réel impact sur sa consommation d’énergie, en jouant sur l’amplitude et la fréquence de ses foulées. Plus on court vite, plus on dépense d’énergie, sans qu’apparaisse de pic comme si, plus on accélère, plus on devait monter un escalier de plus en plus raide.
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Autre caractéristique énergétique, l’endurance, capacité que l’Homme partage avec d’autres animaux, comme le loup ou le cheval. Un homme est capable de marcher plusieurs jours, sur de longues distances : les armées napoléoniennes se déplaçaient de trente kilomètres par jour en marche normale, cinquante kilomètres en marche forcée, voire plus, avec un équipement de vingt-cinq à trente kilogrammes sur le dos.
Si l’homme n’est pas un sprinter, car ce rythme est trop gros consommateur d’énergie, il peut courir très longtemps à allure modérée : presque une journée à 2,5 m/s (9 km/h), plus de cinq heures à 4 m/s (14,4 km/h). Au-delà de la vitesse de 5,5 m/s (19,8 km/h), la ressource énergétique est anaérobique et la course très limitée en durée. C’est la raison de l’essoufflement : le corps doit finir de brûler les résidus (l’acide lactique) de la glycolyse anaérobique du glucose et a besoin de beaucoup d’oxygène.
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L’observation des techniques de chasse des Boshimans dans le désert du Kalahari peut nous apporter un éclairage sur les raisons de cette adaptation. Le plus couramment, les prédateurs chassent en début ou en fin de journée et souvent par projection en sautant sur leur proie, ou avec une course ultra rapide. Les chasseurs humains du Kalahari lèvent une proie potentielle et vont la suivre à la course en se relayant, pendant des heures, jusqu’à ce que l’antilope s’effondre, épuisée et en hyperthermie. Cette chasse est appelée la chasse à l’épuisement.
Pour la rendre possible, il faut une dernière adaptation à la course, la thermorégulation, propre au corps humain. Par la perte de ses poils et une transpiration abondante, plutôt que le halètement, le coureur peut maintenir sa température interne basse pendant son effort.
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Beaucoup d’entrainements, mais aussi une adaptation évolutive spécifique, qui nous est propre, vont nous permettre ses courses folles. On connait le marathon des Sables (240 kilomètres sur 6 jours, en autonomie alimentaire, et sous 40°C dans le désert marocain), la diagonale des Fous (160 kilomètres et un dénivelé de presque 10 000 mètres sur l’ile de la Réunion) et d’autres, aussi démesurées.
À moins que les endorphines, antidouleurs et euphorisantes nécessaires pour supporter ces efforts, soient aussi un moteur de ces défis.
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