Chapitre 6
Alors qu’il regagnait l’avenue principale pour rejoindre l’arrêt du tramway, Akos se fit interpelé par une inconnue au regard affolé. Tentant de reprendre son souffle, elle tendit son bracelet, une sorte de gadget high-tech dernier cri.
« Vous pouvez prendre la communication ? C’est très important. »
Akos lui jeta un regard vide avant de réaliser qu’il pouvait y avoir une raison rationnelle à cet événement impromptu. Il mit quelques secondes à comprendre ce qu’il avait à faire. Il avait beau avoir pratiqué beaucoup d’objets numériques à la mode au cours de sa vie, il avait désormais toujours une phase de perplexité face aux nouveaux qui, pour lui, n’avaient rien d’intuitif. Il scanna des yeux l’écran de la montre et son communicateur s’activa tout seul.
« Akos ?
— Lui-même.
— C’est Lys.
— Je me doute. Qui d’autre cela pouvait-il être ? ironisa-t-il. J’en déduis que tu as du nouveau et c’est important, vu que ta messagère m’a l’air complètement affolée.
— Ah elle. Les gens comme elle sont d’une naïveté affligeante. Je lui ai juste dit que tu avais besoin de mes informations pour déjouer un projet d’attentat à la bombe.
— Tordant comme humour, râla Akos.
— Il faut bien s’amuser dans la vie. Je sais que ce n’est pas ton style et que tu es toujours premier degré. Mais on ne va pas épiloguer sur ça.
— Je suis d’accord. T’as eu accès aux dossiers de la Sécurité Intérieure ? Ils ont quoi sur ce type ?
— Justement, c’est pour cela que je te rappelais. Qui t’a dit que la Sécurité Intérieure était intéressée par ce gars ?
— Mon chef. Pourquoi tu me demandes ça ?
— Tu te doutes bien que c’est parce que je n’ai rien trouvé. Et pourtant je suis remontée assez loin. Mais là, pour trouver l’aiguille dans la botte de foin, il va me falloir trouver le fil d’Ariane. Tu n’imagines pas la montagne de dossiers qu’il faut lire, trier, classer, élaguer. Là, je n’ai rien qui ait fait frétiller mes détecteurs. Alors trois possibilités : soit, je ne cherche pas avec les bonnes clés d’entrée, soit, les données sont bien protégées et il faut que je change de métier ou encore troisième hypothèse, ton information est fausse.
— Tu peux regarder les appels reçus par mon chef depuis ce matin ?
— Tu veux fliquer ton boss, maintenant ?
— Arrête de plaisanter, s’il te plaît, Lys. S’il n’a pas inventé le truc, c’est que quelqu’un l’a contacté, non ? Et c’est forcément ce matin après huit heures, lorsqu’on nous a demandé d’aller sur place et avant onze heures vingt, quand il m’a convoqué dans son bureau. Essaie son portable, je doute que quelqu’un de la Sécurité Intérieur passe par les lignes officielles. Tu les as ?
— papillon ! Je ne fais pas de la magie.
— C’est super calme chez toi, fit remarquer Akos.
— Pourquoi dis-tu cela ?
— Pour rien, je t’entends taper au clavier.
— Et bien, ce n’est pas pour rien que tu es enquêteur. »
Les deux laissèrent passer un moment de silence après cette remarque.
« Et notre gagnant est une gagnante : Eléonore Walmsley, responsable de la section 23.
— Section 23 ?
— Je ne sais pas ce qu’est la section 23.
— Super. Il n’y a rien qui va dans cette affaire. Plus on avance dans la partie, plus on a de cartes.
— En tout cas, moi j’ai un fil conducteur cette fois-ci. Je vais peut-être pouvoir dérouler la pelote.
— Parle pour toi. Moi, je n’ai pas accès à tes infos et je vais devoir avancer à l’aveugle.
— Commence par retrouver le meurtrier, tu essaieras de comprendre le puzzle après.
— Tu as raison mais c’est Mason qui m’a fichu dedans avec son histoire de Sécurité Intérieure. Reste que si tu découvres quelque chose à propos de cette Eléonore, fais-moi signe. Je vais sûrement en toucher deux mots au chef.
— Lui parle pas de Walmsley direct. Sinon il va te demander d’où tu tires tes infos.
— Lys, je ne suis pas idiot au point de me griller tout seul. Non, je vais lui demander juste une entrevue avec cette fameuse Sécurité Intérieure. Pour échanger de l’info entre services, pour le bien de l’enquête. J’aurais dû le faire dès le début mais je n’ai pas l’habitude d’avoir un autre service dans les pattes.
— Ils ne sont pas dans tes pattes à proprement parler. C’est plutôt le contraire.
— Oui, d’accord, ne pinaille pas. »
Après avoir salué Lys, Akos raccrocha. Il prit la direction de la rue Khalfon puis appela son chef.
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