﴾ Chapitre 6.1 ﴿ : Le Célestium
Si on lui avait dit un jour qu’il se tiendrait sous la coupole sacrée du Célestium, à attendre aux côtés de ceux qui rêvaient de grandeur, Adrian ne l’aurait probablement jamais cru. Depuis de longues minutes à présent, le jeune homme avait le regard perdu dans la contemplation des immenses vitraux suspendus au-dessus de lui comme un univers à part entière. La douce lumière de l’aube s’infiltrait à travers les fresques gravées, projetant sur lui des éclats mouvants de violet, d’or et de bleu. Chacun des tableaux semblait conter une histoire, un passé glorifié qui peinait à résonner en lui.
Le centre de la coupole détaillait une scène de bataille où les Etherios, auréolés de lumière, affrontaient les silhouettes sombres et indistinctes des Ashirs. Leurs visages divins, empreints de fiertés et de courage, s’illuminaient à la lumière des flammes et des éclats de cristal qui semblaient éclater autour d’eux, figés dans une danse chaotique. Leurs armes brillaient d’un bleu d’éther, tranchant à travers les ténèbres comme des éclairs. À la périphérie, l’ardeur du champ de bataille laissait la place à des scènes plus calmes : une main tendue vers un blessé, un enfant serré contre la poitrine d’une figure lumineuse, des champs ravagés par les combats mais où quelques pousses d’herbe verte pointaient déjà. Vie et mort, sacrifice et espoir. La justice qui se voulait incarnée par les héros de l’humanité prenait la forme d’une grande balance d’or, comme si celle-ci pesait chaque action, chaque conséquence.
Mais pour Adrian, ce tableau idyllique manquait de vérité. Rien ne coïncidait avec le peu qu’il avait compris de Liz. S’il voyait les visages fiers, les postures héroïques, tout cela n’était pour lui qu’un récit trompeur et figé, une histoire racontée non par les vainqueurs, mais ceux qui avaient survécu. Il plissa les yeux, incapable de saisir ce qui le dérangeait tant. Était-ce la perfection froide, les couleurs trop éclatantes d’une idéalisation écrasante ? Ou bien était-ce la place qu’il occupait désormais sous cette coupole en tant que recrue ? Dans toute leur splendeur, ces fresques semblaient lui murmurer ce qu’il devait être à présent, ce qu’une fois de plus tous attendaient de lui. Le jeune homme détourna les yeux, mal à l’aise. La grandeur des lieux, leur solennité, tout semblait peser un peu plus sur ses épaules, comme pour lui rappeler qu’il n’était qu’un imposteur entre ces murs sacrés.
Il inspira lentement, mais cela ne calma pas le tambourinement nerveux de son cœur. Il savait la raison de sa présence, celle pour laquelle il avait accepté à contrecœur de rejoindre le Célestium, mais cette vision grandiose ne correspondait en rien à sa propre vérité. Il ne voyait pas l’éther comme une arme ou une balance. Il y voyait une force brute, ni bonne ni mauvaise, un potentiel. Et pourtant, alors qu’il attendait, immobile, il ne pouvait s’empêcher de lever à nouveau les yeux. Non pas pour chercher du sens à tout ça, mais pour se rappeler ce qu’il refusait de devenir : une image figée dans le verre, un écho glorieux mais creux de ce qu’on lui demandait d’être.
— Impressionnant, hein ? lui lança Félix d’un ton désinvolte. T’as vu là-haut, le mec balèze avec le marteau ? On dirait moi, à un ou deux muscles près.
Tiré de ses pensées, Adrian se tourna à sa droite, vers son camarade. Ce dernier levait lui aussi la tête pour contempler le Grand Hall, son regard sautant d’un détail à l’autre. Il n’affichait pas son habituel sourire narquois. Adrian connaissait cette expression rare : un calme de façade qui cachait un tourbillon d’émotions. Tout comme lui et les dizaines d’autres rescapés de la Sélection qui s’ordonnaient en rang serré autour d’eux, Félix portait désormais avec une certaine fierté l’impeccable uniforme blanc du Célestium.
Un silence solennel régnait, uniquement troublé du froissement occasionnel d’une manche ou le raclement d’une botte sur le marbre veiné d’or. Les rangs des recrues s’étiraient jusqu’aux imposantes portes de pierre du Grand Hall, gardées par deux statues ailées dont les yeux, deux gemmes d’éther, luisaient faiblement. Les battants fermés les isolaient du monde extérieur, comme si, dès qu’ils en avaient franchi le seuil, ils avaient quitté la réalité ordinaire. Devant eux, trônant prisonnier de son socle de pierre noire, le gigantesque cristal pulsait par instant en irradiant d’une lumière douce. À ses pieds, une estrade centrale avait été assemblée entre les jardins. Une série de sièges vides attendaient probablement ceux qui célèbreraient bientôt la cérémonie. De chaque côté, les longues bannières frappées du symbole du Célestium tombaient le long des colonnes qui soutenaient le toit. Le message ne laissait aucun doute : il n’y avait pas de place ici pour la médiocrité.
— Impressionnant, répéta Adrian sans grande conviction.
— Par contre je dois être honnête, reprit Félix en observant les rangs disciplinés autour d’eux. J’avais pas prévu le coup du défilé. J’ai pas pris mes chaussures de gala.
— Il est toujours aussi bavard ? demanda une voix discrète.
Sur la gauche d’Adrian, Talya se tenait raide, distante. Sa silhouette fragile semblait perdue dans l’immensité du hall. Elle ne regardait personne, fixait obstinément un point devant elle, roulant nerveusement l’une de ses mèches entre ses doigts. Quatre jours s’étaient écoulés depuis l’attentat. Quatre jours durant lesquels Lily avait pris soin de lui couper les cheveux aux épaules et de les lui teindre d’un noir d’encre. Ils ne pouvaient pas prendre le risque qu’elle soit reconnue.
— Non, lui répondit Adrian en soupirant. D’habitude c’est pire.
— Hé, protesta Félix, je vous entends, hein ?
— Il va finir par nous attirer des ennuis, reprit Talya.
— J’attire surtout les jolies filles, répliqua Félix en passant une main dans ses cheveux d’un geste grossièrement exagéré, les ennuis viennent avec.
Une candidate devant lui se retourna et Félix lui adressa un clin d’œil. Elle haussa un sourcil d’un air dédaigneux et se retourna dans la seconde.
— Tu vois ? Je crois que je lui plais.
— Arrête un peu, Félix, chuchota Adrian. Talya a raison, nous devons rester...
Adrian ne sut finir sa phrase. Les chuchotements dans l’assemblée cessèrent en un battement de cil et le silence tomba comme un couperet. Tandis que des gardes en uniforme venaient se placer le long des murs, plusieurs silhouettes gagnèrent l’estrade. L’une d’elle, imposante, se présenta en premier au pupitre d’un pas lent, ses bottes martelant le bois avec une régularité travaillée. Ses traits, burinés par des années de combats, lui donnaient l’apparence d’une statue vivante, un monolithe d’autorité. Chaque détail sur son uniforme semblait parfait, des galons impeccablement alignés aux médailles qui scintillaient faiblement sous la lumière diffuse du hall. Adrian, comme tous les autres, se redressa instinctivement. Ce n’était pas une consigne ni un ordre, mais une réaction naturelle face à une présence aussi écrasante.
Darius Grisemont balaya la salle du regard, son silence parlant plus fort que n’importe quelle introduction. Il semblait peser chaque visage, jauger les recrues une à une, comme pour s’assurer qu’aucune d’elles ne prendrait ce moment à la légère. Lorsqu’il prit enfin la parole, sa voix grave et tranchante résonna dans l’immensité du Hall.
— Recrues !
Comme un seul homme, les talons de la garde et des rescapés de la Sélection claquèrent. Pris au dépourvus, Adrian, Félix et Talya se gainèrent pour les imiter.
— Aujourd’hui, vous laissez derrière vous ce qu’hier encore vous pensiez être. Vous voici devenus l’élite de l’humanité. Des Etherios.
Le général marqua une pause, laissant le poids de ses paroles descendre sur les épaules de son auditoire. Adrian put jurer qu’il prenait plaisir à les torturer du regard.
— Cet uniforme qui est désormais le vôtre n’est pas un privilège. Il est notre fardeau, une responsabilité que peu d’entre vous comprendront pleinement avant d’avoir franchi les frontières que nul homme ne devrait transgresser. Être Etherios, ce n’est pas seulement être un soldat. Cela signifie devenir le dernier rempart entre ce monde, vos familles, vos amis, ceux que vous aimez, et ce qui menace de les consumer.
Le silence du Grand Hall était si profond qu’on aurait pu entendre une aiguille tomber. D’ordinaire incapable de retenir la moindre remarque sarcastique, même Félix se contenta de déglutir discrètement, les yeux rivés sur l’orateur.
— Regardez autour de vous.
Adrian détourna timidement les yeux, croisant les regards des autres recrues alignées. Jeunes, nerveux, certains tentaient de dissimuler leur peur derrière un fragile masque de fierté.
— Ce sont vos frères et vos sœurs d’armes. Vous vivrez désormais ensemble, combattrez ensemble. Et si le sort s’acharne, vous tomberez ensemble.
Un frisson parcourut l’assemblée, comme une onde silencieuse.
— Souvenez-vous simplement de ceci : porter cet uniforme, c’est incarner l’espoir de ceux qui n’ont rien. Vous avez eu le courage de choisir une vie de sacrifice, de faire passer la leur avant la vôtre, et pour cela, vous pouvez être fiers.
Le regard de Darius s’attarda sur eux, un à un, comme s’il leur transmettait personnellement le poids de ses mots.
— Qu’Aelion soit votre guide. Bienvenue dans les rangs.
Le dos droit, le général plaqua le poing sur son cœur, imité en retour par le reste de l’assistance. Devant la ferveur partagée, Adrian se surprit à esquisser un discret sourire alors qu’une douce chaleur gagnait ses épaules. Félix pencha la tête vers lui pendant que le général cédait sa place.
— Tu crois qu’il perd un pari si on le surprend à sourire ? murmura-t-il pour détendre l’atmosphère.
Adrian pouffa en secouant la tête, mais en tournant les yeux vers Félix, il remarqua que son ami se tenait involontairement l’avant-bras, frottant par mouvements légers au-dessus du tissu de l’uniforme.
— Ça te fait encore mal ? demanda-t-il d’un air préoccupé.
Félix haussa les épaules, essayant d’afficher sa nonchalance habituelle.
— Tolérable, lâcha-t-il. Le pire est passé... je crois.
Adrian ne répondit pas, mais une inquiétude sourde couvait dans son regard avant qu’un mouvement sur l’estrade ne détourne son attention.
Une femme se présenta à son tour, contrastant en tout point avec l’austérité du général. Une femme qu’Adrian reconnut sans aucun mal. Comme le reste de l’assemblée, il ne put s’empêcher de retenir son souffle. Elle avançait avec une aisance naturelle, une présence qui semblait s’imposer sans le moindre effort. Tout dans sa démarche dégageait une maîtrise tranquille et apaisante, comme si le poids de l’autorité reposait sur ses épaules sans jamais les alourdir.
Ses traits doux soulignaient une personnalité à la chaleur évidente. Coulant sur ses épaules, ses cheveux d’un blond cendré encadraient un regard pétillant et clair comme de l’acier poli. Ses yeux semblaient se poser sur les recrues avec une curiosité affectueuse, sans froideur ni dureté. Ils portaient une promesse : celle de protéger, de guider.
Adrian n’était pourtant pas dupe. Amanda Mireval pouvait certes inspirer les cœurs par sa seule présence, mais la Reine à l’épée, première des Etherios, restait de loin la plus redoutable combattante de tout Canaan, en témoignait la magnifique lame qui reposait dans le fourreau à sa ceinture. Le jeune homme comprenait à présent ce que Liz avait voulu dire à son sujet lorsqu’elle avait autrefois rejoint son unité. Elle avait compris avant les autres ce que deviendrait cette jeune épéiste dont le feu qui brûlait en elle n’aurait su être éteint par quiconque. Amanda en était désormais la parfaite incarnation : une guerrière rayonnante et inspirante, ce que Liz était elle aussi, tout ce qu’Adrian ne serait jamais.
Un pincement le prit au cœur tandis qu’Amanda s’immobilisait devant le pupitre. La sangle de son épée tinta contre le fourreau lorsqu’elle posa une main légère sur sa garde, un geste inconscient qui ne manquait pas de rappeler qu’elle était une combattante avant tout. Un autre Etherios se rapprocha à ses côtés en silence. Il était grand, élancé, les cheveux d’un brun sombre. Son visage inspirait tout l’opposé de celui de sa camarade. Ses yeux émeraudes balayaient l’assistance avec une froideur calculatrice.
— Toujours là ceux-là, maugréa Félix en claquant la langue, reconnaissant Zane de Valor. Je te jure que le jour où je verrais Jonas à sa place, ça m’fera mal.
— Bonjour à tous, le coupa Amanda d’une voix douce mais parfaitement audible dans l’immensité du hall.
Contrairement au général, ses mots n’impressionnaient pas par leur force, mais portaient une sincérité qui trouva immédiatement écho chez chacune des nouvelles recrues.
— Je sais que ce que vous venez d’entendre peut sembler intimidant. C’est normal, ajouta-t-elle d’un signe de tête appuyé tandis que quelques rires nerveux se perdaient dans la foule. Mais je veux que vous sachiez le plus important. Ici, vous ne serez jamais seuls. Le Célestium ne sera pas qu’un lieu d’apprentissage et d’entraînement. Ce sera pour vous un foyer. Un lieu où vous pourrez grandir, échouer, recommencer... et réussir. Ensemble.
— Je l’aime bien, moi, murmura Félix avec un sourire en coin tandis que les applaudissements pleuvaient autour d’eux.
Adrian tourna légèrement la tête vers lui, sceptique.
— Tu l’aimes bien, ou tu trouves qu’elle est jolie ?
Félix plaça une main sur son cœur, feignant l’indignation.
— Moi ? Réduire une personne aussi inspirante à son apparence physique ? Je suis blessé, Adrian. Blessé !
Avant qu’il ne puisse ajouter quoi que ce soit, un coup derrière le genou faillit le faire tomber en arrière. Il vacilla, manquant de se rattraper à son voisin.
— Non mais ça va pas ? protesta-t-il tandis que Talya repliait sa jambe, le regard fixé droit devant elle.
— Ça suffit, trancha-t-elle.
Félix rajusta son uniforme en la fusillant du regard.
— Je note, murmura-t-il. Mauvais public pour les blagues.
— Je corrigerai simplement le vénérable général Grisemont en précisant qu’être un Etherios est plus qu’un devoir, reprit Amanda. C’est une promesse. Nous sommes les gardiens de ce qui reste de ce monde. Vous aussi ferez partie de cet héritage. Soyez fiers de ce que vous êtes. Soyez fiers de défendre ce en quoi vous croyez.
Elle se tourna légèrement, croisant le regard de Zane, toujours silencieux à ses côtés.
— Ne vous y trompez pas, le chemin est semé d’embûches. Nous ne serons pas là pour vous porter. Vous devrez vous élever par vous-mêmes. Mais une fois encore, lorsque vous tomberez, sachez que vous aurez toujours quelqu’un pour vous relever.
Alors qu’un tonnerre d’applaudissement emplissait la salle une fois encore, Adrian senti une douce chaleur remuer en lui. Il ignorait pourquoi, mais il voulait croire à ces mots. Une partie de lui cherchait à se persuader qu’il pourrait trouver une place ici.
— Sur ces bonnes paroles, lança Amanda d’une voix plus forte en tâchant de calmer l’assistance d’un geste de la main, je vous laisse aux bons soins de notre intendante, madame Vermont, qui va à présent se charger de votre répartition. Bienvenue au Célestium !
Un dernier éclat de vivats retentit avant que les rangs des nouvelles recrues ne retombent dans un silence relatif. Sur l’estrade, une femme d’allure imposante s’avança avec un épais registre sous le bras, la chevelure argentée tirée en un chignon strict. Elle l’ouvrit sur le pupitre, ses lunettes rondes accrochant les reflets de l’éther diffusés dans le hall.
— Lorsque vous entendrez votre nom, vous avancerez vers vos responsables de sections, annonça-t-elle d’une voix claire.
Ses doigts parcoururent le registre, mais déjà certains regards se détournaient d’elle pour suivre Amanda et Zane. Les deux Etherios descendaient les marches de l’estrade pour entamer la traversée de l’allée centrale, entre les rangs des recrues. Radieuse et souriante, Amanda échangea quelques salutations en passant près des candidats. Derrière elle, Zane avançait comme une ombre d’un pas mesuré, un sourire feint sur le visage, indéchiffrable. Ses yeux s’étiraient comme ceux d’un serpent en une fausse complaisance.
— Encore une fois, tu me laisse tout faire, murmura Amanda d’un ton joueur en tournant légèrement la tête vers lui.
— Pas du tout, ma chère, répondit Zane d’un ton bas et tranquille. J’évite simplement de perturber l’excellence. Comment aurais-je pu interrompre un discours aussi magistralement inspiré ?
— Oh, vraiment ? reprit-elle. Tu sais que la flatterie ne te mènera nulle part, n’est-ce pas ? Peut-être devrais-je te punir pour ta paresse ?
Un sourire fin passa sur les lèvres de Zane.
— Je préfèrerais éviter. J’ai eu du mal à me remettre de la dernière fois. Tu ne voudrais pas me tuer, n’est-ce pas ? rétorqua-t-il, une pointe d’ironie dans la voix.
— Non... mais c’est tentant, admit Amanda en riant doucement avant de reprendre ses salutations comme si de rien n’était.
Depuis sa place, Adrian les observa approcher du coin de l’œil, une pression grandissante dans la poitrine. Amanda ne fit pas attention à lui, mais il croisa par hasard le regard de Zane, un bref instant qui sembla soudain s’étirer à l’infini. Une terreur inexplicable dévora Adrian de l’intérieur, comme si les ombres autour de lui voilaient la lumière du hall. Les yeux de l’Etherios s’animèrent d’une intelligence froide, comme s’il cherchait à sonder les tréfonds de son âme. Il émanait de lui une aura sombre, menaçante.
Adrian voulut détourner le regard. C’est là qu’il le remarqua.
Au poignet de Zane, un bijou de métal torsadé se balançait sur un bracelet. Le cœur d’Adrian manqua un battement. Un frisson glacial lui parcourut l’échine tandis qu’il croyait sentir le sol s’ouvrir sous ses pieds dans un vertige. C’était lui, l’Etherios de la Roseraie.
La pression se relâcha finalement tandis qu’Amanda et Zane s’éloignaient. Incapable de bouger, Adrian ne dit pas un mot. Un souffle court attira son attention. À côté de lui, Talya semblait pétrifiée. Ses mains tremblaient nerveusement tandis qu’une perle de sueur glissait irrémédiablement sur sa tempe. Adrian voulut lui parler mais Félix l’en empêcha d’une tape sur l’épaule.
— Hé, Adrian, regarde ! chuchota-t-il. C’est Lily sur l’estrade !
Adrian cligna des yeux, peinant à sortir de sa torpeur. Il releva la tête, constatant que Lily se tenait sur l’estrade aux côtés d’autres Etherios et de madame Vermont.
— Lily Tisseciel, chef de la section treize, annonça l’intendante avec toute la solennité du monde.
Un flot d’émotion contraires submergea Adrian tandis que les premiers noms étaient appelés : ce qui venait d’arriver, le fait que Lily soit nommée chef de section, à la tête de celle qui avait appartenu à sa propre sœur.
— Gabriel Haldorn, poursuivit l’intendante. Félix Ayamin, Adrian Tisseciel, Talya Tisseciel...
— Lily a du tout arranger, tu crois pas ? fit Félix avec un sourire. Je sais pas comment elle a réussi un coup pareil, mais on va rester ensemble !
Félix poussa un discret cri de joie en serrant les poings, mais Adrian était bien incapable de se réjouir. Ses jambes tremblaient encore.
— Je retire ce que j’ai dit ce matin, reprit Félix en soupirant de satisfaction, c’est une journée parfaite ! Y’a vraiment rien qui pourrait la gâcher !
— Et pour finir, acheva madame Vermont, Jonas de Valor.
Félix s’arrêta, l’air niait.
— Hein ?
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