The sound of silence
Hello darkness, my old friend,
I've come to talk with you again
Because a vision softly creeping,
Left its seeds while I was sleeping
And the vision that was planted in my brain, still remains
Within the sound of silence
The sound of silence, Simon & Garfunkel *
Il y a urgence.
La chaleur de ta main qui épouse ma joue, ta langue qui se plie quand nous faisons l’amour, la courbe de ton aine, la force de ton nez…
Cela demeure.
Ton regard, ton odeur, la musique de ton rire…
Effacés.
Alors j’écris tes silences. Je porte ta voix, alors que l’histoire est déjà écrite. Tu es mort. C’est du passé et pourtant il faut l’écrire au présent. Présent de vérité générale : quand on est mort, c’est pour longtemps. Présent de propriété : le silence est devenu ta caractéristique.
Jusqu’où dois-je remonter pour te retrouver ? Je ferme les yeux, je parcours les années… Certains souvenirs, je ne les souhaite plus. Je voudrais m’amputer d’eux.
Un parfum… Pas le tien. Celui de la forêt. J’avais treize ans.
Été 1990, nous déménagions pour la seconde fois en Allemagne. Mon père, militaire, venait à nouveau d’y être muté. En 1977, la bande à Baader fut incarcérée non loin de la maternité où je jetai mon premier regard sur un monde bien agité. Enfant, je ne comprenais pas pourquoi mes parents évoquaient ce nom avec gravité. C’est que je confondais ces terroristes avec la « Bande à Basile », les auteurs de la « Chenille », chantée et dansée dans toutes les fêtes populaires. Ma naissance fut donc marquée par les explosions de « l’automne allemand ». Mon imagination fit le reste : les attentats de la Fraction Armée Rouge se muèrent en 99 ballons emportés par le vent. Treize ans plus tard, le Mur était tombé. Nous roulions vers une Allemagne en voie de réunification. Notre rencontre aurait-elle eu lieu sans la Guerre Froide ? Enfants de militaires tous deux, nous nous serions peut-être croisés dans une autre ville de garnison. Peut-être…
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* Simon & Garkunkel, 1964
Bonjour noirceur, ma vieille amie,
Je suis venu encore une fois te parler
Car doucement en moi une vision s'est insinuée,
Elle sema ses graines durant mon sommeil
Et la vision qui fut plantée dans mon esprit,
Demeure toujours
Au sein de l'assourdissant silence
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