Chapitre 26 : Surprise !
Autant la quatrième année de mes jeunes patients se déroula tel un cauchemar, autant celle qui suivit s’annonça assez stable. Si je devais récapituler les grandes lignes de cette étrange année, je dirais qu’elle fut marquée par la procréation. En effet, une fois tous séparés, un nouveau partenaire au bras, les Richess n’avaient plus qu’une mission à accomplir : donner la vie ou en l’occurrence, faire en sorte que la graine soit déposer à temps pour le bonheur absolu de leurs parents, rien que ça.
Je les ai tous reçus, un par un dans mon bureau, pour discuter d’accouchement, de paternité et de maternité et des craintes de ne pas arriver à tomber enceinte. Je n’eus jamais autant de recherches à faire sur le sujet que durant cette année de folie. Et les pauvres n’avaient aucun repos, entre leurs sorties de couple pour apaiser les appareils photos des journalistes, leurs premiers pas dans le monde adulte, les moments entre amis et surtout les soirées passer au lit à tenter de fabriquer des bébés, autant dire qu’ils n’en pouvaient plus. Et n'oublions pas l'obligation de toujours rester premier de classe.
Certaines choses restaient les mêmes, dans la continuation de l’année précédente et même de leurs troisièmes. Chuck et Marry géraient toujours l’ensemble des délégués. Malgré leurs conflits familiaux et le souci de garder une distance, ils nous prouvaient tous les jours qu’ils savaient travailler ensemble. Un souci pour Marry ? La grossesse lui donnait tellement envie de manger qu’elle avait peur de devenir obèse, mais ça n’arriva pas avant le mois d’avril. Entre temps, elle tentait de garder son calme face à Pris Dechâteau qui la surveillait et l’accablait sans cesse d’insultes. Voilà, le dernier problème de Chuck, gérer les caprices de sa future femme.
À côté de ça, nous avions une Eglantine épanouie avec son Islandais qui attendait avec impatience de donner naissance. Et un Elliot qui se réconfortait de la magnifique et douce Alice. Contrairement à tous les autres, ils prirent tous leur temps pour planter la graine, le temps que le roux guérisse de sa peine de cœur. Leurs ex respectifs, Michael et Katerina vivaient aussi corps et âmes pour leurs nouveaux partenaires. Le premier mourrait d’angoisse à l’idée de ne pas arriver à faire d’enfant et la nouvelle de sa stérilité le plongea dans une grande dépression. Quant à la deuxième, bien qu’elle eût du mal à gérer Armin, elle était contente d’avoir hérité d’un homme avec beaucoup d’humour.
Il ne restait plus que le dernier couple, le plus problématique de tous : Blear et Dossan. Je n’arrivais plus à gérer la peine de ces deux personnes. De tous, je jurais contre le destin de les avoir séparé. Il était évident qu’ils étaient fait l’un pour l’autre. Je commençais à recevoir John-Eric en séance également. Je me retrouvais face à un homme très élégant, fidèle et loyal et qui derrière ses doux sourires semblaient cacher beaucoup de secrets. Je n’appris que plus tard la promesse des deux garçons envers la femme qu’ils aimaient tout deux. Et alors que Blear tenait le coup, entre toutes ses activités d’étudiante, de maman, de professionnelle, Dossan avait tout lâcher. Il ne venait plus aux séances et se réfugia dans la musique. Le succès du groupe grimpa les échelons jusqu’à gagner le cœur de nombreux de nos étudiants. Et le gentil garçon, respectueux et amoureux devint adepte du flirt avec l’alcool et les filles. Maintenant que tous les Richess étaient casés, il était la nouvelle vedette de l’école. Sombre, mystérieux, dramatique et brisé, elles lui couraient toutes après. Et rêvait de devenir la prochaine “Blear Makes” de l’attendrissant et ténébreux Dossan Dan’s. Il montra un vrai lâcher scolaire durant l’année et revenait avec insolence pour taper ses plus belles notes aux contrôles et aux examens. Chuck devait sans cesse couvrir ces absences et le réprimander quant aux risques qu’il prenait avec son père. Celui-ci s’enfichait, il prenait toutes les précautions nécessaires pour sa mère et il était habitué à se prendre des raclées de temps en temps. Les coups et les blessures sur un pauvre oisillon abandonné n’alimentait que l’amour de ses fans pour Dossan. Bien que je ne voulais l’abandonner, je m’avouais vaincu, n’arrivant plus à le rattraper. C’est durant leur dernière année que je me décidais à le venir voir en concert pour l’attaquer de front. J’aurais pu le faire plus tôt, mais c’est à l’apogée de sa popularité que je le fis, m’occupant de mes autres étudiants en attendant, car j’eus beaucoup de travail. Et notamment avec Alicia à qui j’apprenais à respecter la vie privée et l’intimité des autres. Une vraie de tête de mule, j’eus vraiment du mal à calmer ses pulsions. Les disputes entre elle et Blear ne s’arrêtèrent pas, mais je croyais en le fait que ces filles s’appréciaient. En ce qui concernait Louis, nous parlions essentiellement de sa crainte de devenir fou et des suites de sa maladie. Je le voyais principalement quand il faisait des crises, il restait stable, malgré quelques chutes. Nous avions vu des premiers symptômes se déclarer par des tocs lorsqu’il se trouvait dans des situations stressantes. Autrement dit, pour Louis au programme, il n’y avait que détente. Autant dire qu’Alicia s’occupa particulièrement bien de lui.
L’été qui précédait leur dernière année fut particulièrement chaud pour les amoureux, profitant de leur premières vacances en tête à tête. Vacances à la mer et sexe sur le sable chaud. Soirées romantiques dans l’appartement qu’ils avaient loué et qui finissaient toujours en partie de jambe en l’air. Louis était le plus heureux des hommes, dans les bras d’Alicia et dans ses draps aussi. Et revenant de leur escapade à la mer, le père de celle-ci leur demanda de garder la maison jusqu’au début du mois d’août. À cette demande, ils sautèrent de joie et comme des petits lapins sur tous les lieux. Quelle vie de rêve pour des adolescents de dix-sept ans de profiter pleinement des joies de leurs partenaires. Les chaleurs montant jusque des trente-cinq degrés, ils s’étaient construits une cabane entre les fauteuils pour profiter de la fraicheur du salon. Les matelas au sol s’avérait très pratique pour passer des nuits enflammées devant la télévision.
Un soir alors qu’Alicia se pavanait dans un mini short en jeans qui laissait presque entrevoir ses fesses avec pour seul haut un croc top noir, Louis ne résista pas à l’attraper par la taille pour l’embrasser dans le cou. Il passait ses mains le long de ses bras bronzés et la tourna vers lui pour ensuite glisser une main dans la poche de son short. Il la couvrit de baisers, descendant dangereusement au niveau de sa poitrine.
- Encore ? Tu ne t’arrêtes jamais, gloussa-t-elle alors que ses mains baladeuses la chatouillaient.
- Si ça ne te plaît pas, tu peux toujours m’arrêter, ricana-t-il à son tour.
- Louis, c’est trop, mangeons au moins avant, d’accord ?
- D’accord, j’allume les viandes sur le barbecue et je m’occupe de toi après le souper !
Il s’arma de deux pinces à viandes, mimant un crabe avide de lui ôter ses vêtements. Il fonça ensuite dans le jardin allumer le barbecue. Alicia le regardait jouer avec le feu et déposer les brochettes et les côtes d’agneau sur les grilles. Elle aimait tellement la viande, rien qu’à la vue, elle croquerait dedans, même crue. Telle une petite chatte quémandeuse, elle commença à faire des tours autour de Louis qui gérait son barbecue comme un pro. Mais l’odeur des grillades qu’elle aimait tant lui apparut étrangement repoussante. Elle plaqua sa main contre sa bouche, prise d’un relent et courut jusque l’évier de la cuisine où elle vomit ses tripes. Louis arrêta immédiatement toute activité pour la rejoindre, il dégagea ses cheveux en arrière, pendant qu’elle crachait le restant de son repas de midi.
- Est-ce que ça va ? s’inquiéta-t-il.
- Non je… je ne sais pas, tout d’un coup j’ai eu la nausée, je crois que c’est les fruits de mers de ce midi qui sont mal passé.
- Est-ce que tu veux qu’on appelle le médecin de garde ?
- Non, non, ça ne vaut pas la peine, je vais déjà mieux. Oui, c’est passé, assura-t-elle après avoir bu un grand verre d’eau.
- D’accord, mais manges léger ce soir, ok ? fit Louis en lui caressant le menton, suivit d’un clin d’œil.
Louis s’en voulut un peu de déguster les côtelettes d’agneau tout seul, tandis qu’Alicia mangeait des biscottes au beurre trempé dans de la soupe. Mais pour dire vrai, la viande qui la faisait tant baver, ne lui donnait plus aucune envie. Et à l’heure de se coucher, lorsqu’elle passa dans la salle de bain, instinctivement Alicia s’analysa dans le miroir. Elle passa une main sur son ventre et secoua e tête en ayant l’impression d’avoir pris du poids. Toutes ses légendes sur les femmes enceintes et les grillades ne lui auraient pas autant fait tourner la tête si elle n’avait pas eut trois copines attendant un bébé. Eglantine avait développé une horreur pour la viande dès le début de sa grossesse et quelques mois plus tard, elle s’en gavait telle une carnivore. Elle se mit à faire les cents pas dans la salle de bain, réfléchissant à la dernière fois qu’elle avait aperçu une goutte de sang dans sa culotte. En y pensant, elle avait un peu de retard, mais ce n’était pas la première fois que les coquines tardaient à pointer le bout de leur nez. Elle réussit à se calmer, rationalisant en appliquant les conseils que je lui avais donnés quand elle se sentait paniqué. Elle respirait profondément et se convainc que tout irait bien. Qu’elle achèterait un test de grossesse à la pharmacie le lendemain matin et qu’il serait négatif. Par chance, lorsqu’elle alla retrouver Louis dans leur cachette, celui-ci ne fit aucune tentative, sans doute parce qu’il la pensait malade.
Après un réveil compliqué et nauséeux, Alicia feint d’aller se chercher des comprimés pour les maux de ventres à la pharmacie du coin. Louis décida de faire quelques têtes dans la piscine puisqu’elle se refusait d’être accompagnée. Jamais elle ne se sentit aussi gênée et honteuse d’aller acheter des “médicaments”. Après avoir demandé ce dont elle avait besoin, la pharmacienne la regarda avec des yeux ronds un court instant. Elle habitait en campagne et cette dame la connaissait depuis qu’elle était toute petite. Cette dernière lui expliqua en détails le fonctionnement du test et lui précisa la nécessité d’une prise de sang s’il s’avérait positif. Durant tout le chemin inverse qui ne s’avéra pas très long, elle pria pour le résultat soit négatif.
Une fois rentrée, elle courut faire un gros bisou à son amoureux qui faisait déjà bronzette pour n’éveiller aucun soupçon. Il ne prêta pas attention à la façon dont elle entra avec angoisse dans la salle de bain. Installée sur le trône, les jambes légèrement écartée, Alicia tenait en main l’objet de convoitise. Sans se prendre la tête plus longtemps, elle le plongea entre ses cuisses, attendant que la petite commission se décide à arriver. Jamais, encore une fois, elle n’avait stressée autant et ce même pour un examen. Elle garda les yeux fermés longuement, prenant tout son courage pour les ouvrir sur l’appareil. Son cœur loupa un battement quand elle vit les deux barres se croiser pour un formé un plus sur le petit écran : enceinte. Elle ne bougea plus, puis se rua sur la notice pour relire une, deux, trois, dix fois, les signes que lui proposer celle-ci. Pas de doute, le “plus” disait qu’elle était enceinte.
- Ce n’est pas possible, souffla-t-elle, non, ce n’est pas possible… Non, la prise de sang, lui revint alors en tête les paroles de la pharmacienne.
- Ma belle, ça va ? s’écria Louis de l’autre côté de la porte qu’elle avait fermé à clé.
Très rapidement, elle cacha la boite et le test sous l’essuie qui surplombait le radiateur avant de lui ouvrir. Elle déposa une main sur son ventre et feint de se sentir malade.
- Ça ne va toujours pas, mon bébé ? dit-il en s’invitant dans la salle de bain.
- Je crois qu’on devrait appeler le médecin, je me sens encore nauséeuse…
- Oui, je vois bien que ça ne va pas. Faisons ça, je vais appeler le médecin pour toi, dit-il en prenant l’essuie sous lequel elle avait caché l’arme du crime.
En envoyant valser l’essuie dans la manne à linge, Louis fit tomber le test derrière le radiateur et s’empressa de le ramasser. En découvrant l’objet, il se figea et vu ensuite la boite. Il se retourna doucement tout en regardant le résultat des deux barres et releva les yeux lentement vers Alicia. Celle-ci tirait la tête la plus embarrassée qu’il ne lui avait jamais vue.
- C’est… positif ? lui demanda-t-il calmement, léchant ses lèvres nerveusement.
- Oui, mais…
- Tu ne comptais pas me le dire ? enchaîna-t-il directement.
- Si, mais il faut faire une prise de sang et…
- Alicia ! C’est pour ça que tu veux appeler le médecin ? Tu… Est-ce que tu te rends compte ? s’énerva-t-il instantanément.
- Je… je suis désolée, je ne savais pas… Vraiment, je ne savais pas quoi faire, balbutia-t-elle, ses yeux se remplissant de larmes.
- Oh, non attends excuse-moi, se reprit-il. Écoute, hum, depuis quand ?
- Hier, avec les grillades… Ça m’a semblé tellement suspect avec tout ce que les filles m’ont racontés, j’ai acheté le test aujourd’hui et… Louis qu’est-ce que je vais faire ?
- Comment ça, ce que TU vas faire ? Premièrement, on va appeler le médecin et… faire une prise de sang !
- Mais et si c’est positif ?!
- Alors il faudra le dire à ton père ? Non ? Et voir sa réaction, et prendre une décision, non ? répétait-il incertain.
- Il va me tuer, pleura-t-elle.
- Non, non, non ! Ton père est… un homme indulgent, je ne sais pas, mais faisons cette prise de sang et nous verrons, d’accord ? Nous devrions peut-être même sonner à ton père pour le prévenir ? Je m’en occuperais, si tu veux.
- Mais Louis !! Co...comment peux-tu être aussi calme ?
- Je suis loin d'être calme !! Mais, je veux gérer ça avec honneur, ok ? Tu es certainement enceinte et… je veux prendre soin de toi, quoi qu’il arrive.
Alicia fondit en larmes dans ses bras en entendant cette déclaration, la peur et l’angoisse s’atténuèrent légèrement à son contact. Ainsi, ils sonnèrent directement au médecin et le prévinrent de la situation. Dès le lendemain, ils eurent les résultats de la prise du sang qui annonçait qu’Alicia était bel et bien enceinte. Les deux adolescents se retrouvèrent alors sous le choc, ne sachant s’ils devaient pleurer de joie ou de peur. Le médecin qui connaissait son père depuis vingt ans se porta garant pour lui annoncer la nouvelle. Nouvelle qui le poussa à rentrer bien plus tôt de son voyage en France. Le chemin jusque la maison lui permis de se calmer et de serrer sa petite fille dans ses bras. Il la regarda tout autrement, même si elle pleurait telle une madeleine tandis que Louis ne savait ou se mettre. Après de longues explications et une tasse de thé, il leur posa la question :
- Que comptez vous faire ? Le garder ou… avorter ? Quelle que soit la décision, je la respecterais. Ta maman t’a eu à dix-huit ans et elle s’en est très bien sortie. Il y a les cours, mais nous pourrons trouver des solutions, alors j’aimerais connaitre vos envies en ce qui concerne ce bébé ?
À cette question, Louis et Alicia échangèrent un regard, tantôt incertain, puis cherchant l’approbation de l’autre, ils devinrent plus confiants. Je n’appris cette histoire qu’à la rentrée de la propre bouche du couple et ils me firent part de leur décision. Sortant de mon bureau, Alicia et Louis firent des pieds et des mains pour réunir tous leurs amis dans la même salle. Ils durent user de pièges pour les attirer les uns et les autres, sachant pertinemment qu’ils refuseraient s’ils avaient su qu’ils seraient tous réunis. Elliot avait toujours du mal à regarder Katerina dans les yeux, et Michael et Eglantine devait se retenir de se dévorer du regard. Quant à Marry et Chuck, ils géraient la situation beaucoup mieux que les deux derniers invités. Autant Blear que ces autres compagnons fut surprise de vir Dossan appaitre dans la pièce. Il semblât furieux de cette réunion, prêt à quitter la pièce.
- Dossan, s’il te plait, le supplia Louis.
- Que ce soit rapide, grogna-t-il.
- Alors quelle est la raison de toute cette mascarade ? s’avança Katerina.
À nouveau, le couple se regarda, cette fois avec beaucoup plus d’amour que durant cette conversation avec son père. Alicia passa son bras autour de celui de Louis qui lui fit un signe de tête et déploya son plus beau sourire à ses amis.
- Nous avons quelque chose à vous annoncer, lâcha-t-elle d’un doux ton de voix.
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