Chapitre 18 : lundi 28 mars 2005

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Ils se rendirent à Stirling. La campagne rappelait vraiment à Maureen celle autour de Dublin. Les collines avaient des formes douces. Le temps s'était remis à la pluie et elle se dit qu'ils avaient bien fait de profiter de l'éclaircie d'hier après-midi pour se promener dans les allées de Kelvingrove. Mickaël lui indiqua la direction de la distillerie. Harris avait besoin de passer une commande et lui, de se racheter une ou deux bouteilles de ce cru.

Ils furent accueillis par un employé qui faisait office de vendeur. Mickaël le connaissait, ils s'étaient déjà vus deux ou trois fois. Après les saluts d'usage, le jeune homme expliqua ce qu'il était venu chercher et demanda aussi s'il était possible de faire la visite des lieux, Maureen n'étant jamais entrée dans une distillerie. Le vendeur les précéda et décrivit les différentes étapes de la fabrication des whiskys. A l'issue de la visite, ils entamèrent une dégustation.

- Celui-là devrait plaire à votre patron, dit le vendeur en servant un petit verre à Mickaël. Vous voulez goûter, Miss ?

- Merci, répondit Maureen avec un petit sourire. Mais c'est trop fort pour moi.

- Hume-le, suggéra Mickaël, rien que pour les arômes. C'est fort en goût, oui, et encore, celui-ci n'est pas tourbé.

Il lui tendit le verre et elle inspira, laissa les odeurs envahir ses narines. Le vendeur ouvrit une autre bouteille, d'un whisky plus âgé, prit un autre verre. Il renouvela l'opération avec deux autres variétés, disposant les verres dans un ordre bien précis. Maureen les sentit tous, décela aisément les différences. Sérieux, Mickaël fit de même, en les goûtant aussi. Une ou deux gorgées à chaque fois.

- Le premier, en effet, pour Harris, ce sera bien. Je vais vous en prendre six bouteilles, pour le restaurant. Moi, je cherche quelque chose d'un peu plus typé. Le troisième était bien.

- J'ai aussi un autre, un peu particulier. Je vous laisse le découvrir, fit le vendeur.

Maureen prit le verre qu'il lui tendait, le huma également, s'étonna et, sans rien dire, donna le verre à Mickaël. Après avoir juste senti le liquide ambré, il sourit et comprit la réaction de la jeune femme.

- Alors ? lui demanda-t-il en la regardant avec les yeux qui pétillaient.

- Il est... comme fumé, non ?

Le vendeur hocha la tête, se dit que la jeune femme avait du nez.

- Exact, répondit Mickaël, puis il goûta enfin. Vous ne l'aviez pas la dernière fois que je suis venu...

- Non, on fait un essai, répondit le vendeur. Sur une petite quantité, on ne le propose qu'à des amateurs.

- J'aime bien. Je vais vous prendre une bouteille du troisième et deux de celui-là. A mon avis, Sam l'appréciera aussi... mais je n'ai pas intérêt à oublier la bouteille sur la table la prochaine fois qu'il passera à la maison.

Il songea néanmoins que cela pourrait faire un beau cadeau pour l'anniversaire de son ami, à l'automne prochain.

Quand ils ressortirent, l'après-midi touchait à sa fin et, dans la voiture, Maureen demanda :

- Ce n'est pas en France que tu as appris à goûter le whisky, quand même ?

- Si... indirectement, répondit-il en se redressant sur son siège après lui avoir indiqué la route à suivre. Nous ne recevions pas qu'un enseignement lié à la cuisine, j'ai aussi bénéficié de cours d'œnologie. Oh, pas au point d'être un grand spécialiste, bien entendu. On nous apprenait à utiliser les différents alcools, à savoir aussi choisir le ou les vins qui pourraient le mieux accompagner un plat. On apprenait donc à goûter. Et goûter du vin ou du whisky, c'est le même processus.

Elle hocha la tête, elle avait compris.

- Tu as vraiment du nez, poursuivit-il. Faire la différence entre tourbé et fumé, ce n'est pas toujours simple, surtout quand on n'a pas l'habitude. Tu pourrais essayer de les goûter aussi.

- Ca me brûle, j'ai du mal avec l'alcool, sauf la bière... ça passe.

- Normal pour une Irlandaise...

Il regretta aussitôt d'avoir dit cela, car le visage de Maureen se referma. Il se maudit et reprit :

- Oui, tu pourrais goûter en ajoutant de l'eau. Tu aurais ainsi tous les parfums du whisky sans en avoir la force.

- De l'eau ? Ce ne serait pas un crime de lèse-whisky ? s'étonna-t-elle.

"Ouf, elle est repartie sur autre chose... Micky, évite de parler de l'Irlande, espèce de sombre crétin. T'as pas encore compris qu'il ne faut PAS lui parler de l'Irlande ?"

- Non, répondit-il, ce qu'il faut éviter, c'est la glace. Mais de l'eau à température ambiante, c'est bon. Tu veux essayer ce soir ?

Elle haussa les épaules, hésita un peu, puis accepta. Ils retournèrent donc chez Mickaël. Elle n'y était pas revenue depuis la balade du dimanche précédent. A chaque fois, il l'avait rejointe chez elle, dans la nuit, après son service.

**

Ils s'installèrent d'emblée au salon, Mickaël prépara deux verres, sortit trois bouteilles, de l'eau.

- Tu veux me faire goûter tout ça ? demanda Maureen en ouvrant de grands yeux.

- Non, juste d'abord les sentir. Au goulot, ce sera suffisant pour que tu choisisses. Les arômes sont même encore plus concentrés. Sens les trois, et dis-moi lequel tu préfères, à son parfum. Et je te ferai goûter celui-là.

Il lui ouvrit les bouteilles, l'une après l'autre, les refermant avec soin quand elle eut terminé. Elle choisit un whisky dont la couleur se révéla très claire. C'était un Dalwhinnie. Il lui servit un tout petit verre, dosa l'eau. Elle prit une gorgée, c'était fort, mais elle supporta de l'avaler. Elle souffla, porta la main à sa gorge, puis en reprit une deuxième gorgée.

- C'est bon, mais c'est fort quand même... fit-elle.

- Tu veux un thé ? proposa Mickaël.

- Je veux bien. Mais à une condition !

- Laquelle ? sourit-il.

- Que je choisisse vraiment la lettre, cette fois ! dit-elle en riant.

Il rit aussi, approuva. Maureen choisit le M.

- On a le M en commun, expliqua-t-elle.

- On n'a pas que cette lettre-là en commun, répondit-il avec un petit air mystérieux, mais va pour M. C'est un bon choix, sauf que là encore, j'en ai deux...

- Et bien, fais-moi goûter les deux !

Il secoua la tête.

- Pas possible, ils sont trop différents et ne s'enchaînent pas bien. Et surtout, il ne faut pas oublier ce qu'on a bu avant... Il faut un thé qui va "passer" après le whisky.

- Surtout pour toi ! le taquina-t-elle gentiment.

- Comment ça, surtout pour moi ? renchérit-il, amusé.

- Tu as quand même bu plusieurs petits verres... un sacré mélange depuis le milieu de l'après-midi...

- Pas faux. Disons qu'en effet, j'ai le palais bien saturé. Donc, ce sera celui-là, dit-il en sortant une des boîtes du placard.

- Je peux lire les noms sur les boîtes ?

- Non... Sinon, ça enlève le charme de la découverte.

Elle sourit, se pelotonna sur le canapé. Elle n'avait pas bu beaucoup, mais cela suffisait à ce qu'elle ressente une légère euphorie. Pendant qu'il s'activait en cuisine, elle laissa son regard faire le tour de la pièce.

- Ca t'arrive de regarder la télé ?

- Jamais. Ou presque. Les rares fois où je la regarde, c'est quand Sam et d'autres copains viennent. On se mate un film en buvant un peu. Celle-ci, c'est ma sœur qui me l'a donnée en me disant : "Le jour où tu garderas Léony, tu seras content de pouvoir lui mettre des dessins animés..." Sauf que les dernières fois que j'ai gardé ma nièce, je l'ai emmenée en balade, même s'il pleuvait. On avait autre chose à faire que regarder la télé.

Il revint au salon, avec la théière et les tasses.

- Tu as faim ? proposa-t-il.

- Pas pour l'instant. Il est tôt encore.

Il s'assit à côté d'elle, elle vint se blottir contre lui, ferma les yeux. Elle était bien. Oui. Bien. Elle appréciait chaque moment passé avec Mickaël. Et cette visite, à Stirling, était une vraie nouveauté pour elle. Hier aussi, la promenade était agréable, et même si Mickaël avait été vivement intéressé par tout ce qu'ils voyaient dans la serre, s'il l'avait longuement interrogée sur les plantes, mettant presque ses connaissances à l'épreuve avec amusement, elle avait préféré la promenade d'aujourd'hui. Car c'était nouveau. Et elle avait pu voir Mickaël dans son élément. Elle en avait appris plus sur lui aussi, sur sa façon de faire, d'être. Elle remarquait également des similitudes entre sa façon de goûter un whisky, sa concentration, et certains moments plus intimes qu'ils avaient partagés, comme sa façon de l'embrasser, de goûter à ses lèvres, à sa langue. Non, elle ne s'était pas trompée, après ses premières visites au magasin, en jugeant qu'il était sensible.

Elle pensa à Lawra. Il faudrait qu'elle la rappelle. Elle savait son amie attentive, voire un peu inquiète. Elle se devait de la rassurer. Elles n'avaient pas pu se parler depuis le dimanche précédent, quand elle l'avait appelée, perdue, en partant de chez Mickaël. Et qu'Envoûtant, encore et toujours, lui tournait autour, l'entraînait. L'envoûtait.

Mickaël passa doucement sa main dans les cheveux de Maureen, il avait la tête levée vers le plafond et le contemplait d'un air songeur. Il resta un moment ainsi, il aimait l'avoir contre lui, juste comme cela. Il se redressa un peu, prit la théière et les servit, lui apporta sa tasse.

Ce qu'il ignorait encore, c'était qu'avec de simples gestes comme celui-là, Maureen s'attachait chaque jour un peu plus à lui.

Ils savourèrent, sans se presser, le thé.

Marin. Il avait choisi Marin, pour trancher avec le whisky, tout en restant dans des arômes assez marqués, un mélange de thés noirs et cette pointe iodée, son petit secret. Cette pointe qui suscitait toujours de la surprise pour qui la découvrait pour la première fois. Et Maureen eut une réaction semblable après sa première gorgée.

- Hum... fit-elle. Oh, encore une surprise... Laisse-moi deviner...

Mickaël sourit, heureux de son petit effet. Et heureux de lui revoir cette expression, la même que celle du dimanche précédent, quand il lui avait fait goûter le dessert à la pomme. Ce mélange de concentration, de réflexion.

- C'est un mélange de thés, n'est-ce pas ? Du thé noir ?

- Oui, exactement, fit-il avec un brin d'admiration dans la voix : en général, les gens ne pensaient pas à ce type de mélange, même s'ils percevaient qu'il y avait plusieurs ingrédients.

- Le reste... dit Maureen en respirant les volutes au-dessus de sa tasse. Le reste... Il n'y a pas d'odeurs particulières à se dégager, par contre, au goût... J'ai perçu comme un peu de sel, comme dans le beurre...

Elle leva les yeux vers Mickaël et sourit. Le regard du jeune homme pétillait : elle était sur la bonne voie.

- Par contre, ce n'est certainement pas du beurre que tu as mis là-dedans, donc à part imaginer une poignée de sel, mais quand même...

- Je vais te faire bénéficier d'un indice supplémentaire, dit-il en se levant pour retourner à la cuisine.

Il revint en tenant avec précaution la cuillère à thé, encore remplie, puis il l'ouvrit devant Maureen. Elle se pencha et regarda avec attention. Au milieu des petites feuilles de thé, gonflées par l'eau, elle put distinguer comme des filaments qui lui parurent d'un vert très sombre.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Que vois-tu ?

- Les feuilles de thé, des grandes et des plus petites, sans doute parce qu'il s'agit d'un mélange de thé noir.

- Oui, c'est exact.

- Sauf qu'il n'y a pas que cela. Je distingue des petites choses, là... fit-elle en désignant un des filaments. Mais je ne saurais dire ce que c'est. C'est de là que provient le sel ?

- Oui. Réfléchis... à ce qui est salé.

Elle se renfonça dans le canapé, reprit sa tasse et goûta à nouveau. Puis son visage s'illumina et elle regarda Mickaël. Il attendait, la cuillère à thé toujours à la main. Il était certain qu'elle avait trouvé, mais que cela la surprenait encore.

- Alors ? fit-il.

- Des algues ? osa-t-elle.

Il se redressa avec un sourire de triomphe. Elle avait trouvé.

- Oui, des algues. Juste une pointe. Le sel, cela réveille tout. Comme le sucre. Mais il ne faut pas en abuser...

Il ramena la cuillère en cuisine, puis revint s'asseoir aux côtés de Maureen. A son tour, il but une longue gorgée. Elle lui demanda, curieuse :

- Quel est le nom de ce thé ? Tu peux me le dire maintenant que j'ai découvert les ingrédients ?

- Oui, sourit-il. Je l'ai appelé Marin. Je voulais créer un thé qui me rappellerait la Bretagne, la région où j'avais suivi mes études, en France. C'est comme un petit hommage.

- D'où cela t'est venu de mettre des algues dans du thé ? demanda encore Maureen.

- Quand j'étais à l'école hôtelière, commença-t-il, on nous imposait régulièrement des épreuves un peu particulières, qui consistaient essentiellement à remplacer un ingrédient courant par un équivalent. Pour l'obtention du diplôme, par exemple, on devait préparer tout un repas pour un diabétique. Mais en nous imposant certains éléments, comme des féculents, et notamment, de faire un dessert. Il fallait ruser, être inventif. J'aimais beaucoup relever ce genre de défi. Une fois, il a fallu composer un plat sans sel, mais qui aurait été salé... On devait le réaliser de trois manières différentes. La plupart d'entre nous avons mis des coquillages dans une des versions, ce qui nous venait naturellement à l'idée car la petite ville où se trouve cette école est située près de la mer et une majorité d'étudiants est d'origine bretonne, donc familiarisée avec les produits de la mer. Après, certains ont mis des câpres, des anchois...

- Et toi, tu as eu l'idée des algues... compléta Maureen.

- Oui. Et un autre avec du thym.

- Je suis admirative, fit-elle.

- De quoi ?

- De toutes ces idées que tu as... C'est... C'est comme si tu pouvais puiser à l'infini pour faire des créations.

Il sourit. Elle n'était pas loin de la vérité...

- Enfin, dit-elle. Voici donc Marin. Une création de plus... Tu me disais que tu avais un autre thé en M ?

- Oui, mais il ne va vraiment pas du tout après le whisky. Et puis, celui-là, je l'ai choisi aussi parce que tes yeux me font penser à la mer...

Et il plongea son regard dans le sien. Maureen y vit s'allumer à nouveau cet éclat de bleu qui, sans qu'elle puisse s'expliquer vraiment pourquoi, la rendait déjà très émue. Le regard qu'elle lui rendit était apaisé, calme. Il s'en réjouit. Il ne savait toujours pas d'où lui venaient parfois cet éclat de tristesse, cette trace douloureuse, mais, au moins, il arrivait qu'ils disparaissent. Comme là, maintenant. Peut-être lui dira-t-elle, un jour, peut-être finira-t-il par savoir. Pour l'heure, cela lui suffisait d'y lire la paix, et quelque chose qui s'apparentait aussi à la confiance.

Puis il appuya sa tête contre son épaule, commençant à faire courir ses lèvres sur la peau fine de son cou. Et sa main remonta dans ses cheveux, caressant sa nuque, avec douceur. Son autre main glissa le long de sa hanche. Il la regarda à nouveau et l'embrassa, faisant durer ce baiser, et alors qu'elle glissait la main sous son pull, il dégrafa le premier bouton de son chemisier. Il avait très envie de lui faire l'amour, ici, chez lui et il l'entraîna bien vite vers la chambre.

Maureen ne vit pas grand-chose de la pièce, car elle ne pouvait détacher son regard de celui de Mickaël, ces yeux d'un vert profond, sereins et lumineux comme une forêt après une pluie d'été. Elle aimait ce qu'elle y lisait, même si, parfois, la force des sentiments qui s'y exprimaient la ferait presque reculer. Mais elle s'était promis de ne pas reculer. Elle se devait cela à elle-même, avant tout. Elle reconnaissait certains sentiments, pour les avoir vus dans les yeux de Brian, mais la façon dont Mickaël les exprimait était en total opposé. Désir, passion. Et aussi tendresse, ce qui était nouveau pour elle, et puis un autre, qui lui était inconnu, mais qui la faisait trembler et la bouleversait profondément.

**

Elle était restée.

Il la regardait dormir, blottie contre lui. C'était donc la première fois qu'ils dormaient ici, chez lui, et il en ressentait une vraie joie. Non parce que cela importait, mais parce qu'il avait l'impression qu'en acceptant d'être chez lui, elle avait franchi une nouvelle étape. Que c'était plus qu'un pas supplémentaire dans leur relation.

Ils avaient passé une nouvelle journée ensemble, depuis ce matin où il lui avait préparé un petit déjeuner à sa façon, jusqu'à cette visite à la distillerie et cette dégustation au retour. Et, ce soir, il lui avait fait goûter des coquillages qu'il avait congelés. Quand c'était la saison pour avoir des langoustines, il ne se privait pas. Dès que les prix baissaient un peu, il en profitait et en conservait ainsi. Certes, c'était un peu moins bon que frais, de même pour les palourdes et les praires qu'il avait ensuite préparées. Et Maureen avait apprécié.

Comme elle avait apprécié la promenade, la visite. Et même la dégustation de whisky, une fois de retour à la maison. Elle ne cessait de démontrer une vraie curiosité pour ce qu'il proposait et il en était heureux. Il retrouvait là, aussi, des moments qu'il avait vécus avec Ann-Aël, ce qui n'avait pas été une surprise à l'époque : ils étaient tous les deux passionnés par leurs études et leur futur métier, et étaient toujours prêts pour les découvertes, notamment culinaires. Ce qui était différent, en revanche, avec Maureen, c'était que, pour elle, c'était vraiment nouveau. Et qu'elle aimait cela. En ricochet, cela rendait Mickaël tout simplement heureux.

Elle dormait, tranquille. La joue appuyée sur son torse, ses cheveux étalés sur ses épaules et sur son propre bras. Sa respiration était lente, régulière. Elle avait posé une main sur son ventre, poids léger auquel il avait enlacé ses doigts. Qu'il était bon d'être avec elle ! Qu'il était bon de la tenir ainsi, entre ses bras ! Contrairement aux quelques aventures qu'il avait pu connaître, ils enchaînaient les nuits ensemble. Et cela ne lui posait aucun problème, bien au contraire.

"Je suis en train de tomber amoureux...", songea-t-il avec une sorte d'émerveillement mâtiné d'éblouissement à l'esprit. "Oui... Je crois bien que c'est vraiment cela qui est en train de m'arriver. Ca fait du bien..."

Oui, cela faisait du bien de retomber amoureux. Et pas seulement d'échanger quelques bons moments au lit, de réussir quelques galipettes endiablées. Mais d'inscrire une histoire dans la durée, d'avancer finalement pas à pas ou presque... Maureen lui imposait aussi ce rythme, qui correspondait à ce qu'il s'était promis à lui-même, même s'il avait tendance à s'emballer, toujours un peu. Dès qu'il sentait qu'elle reculait, il attendait, simplement. Surtout, ne pas la bousculer... C'était son autre crédo. Et il ressentait une certaine fierté à se dire qu'il y parvenait ou, du moins, qu'il semblait y parvenir. La preuve : elle était restée, ce soir.

Il ferma les yeux, se demandant ce qu'il pourrait bien lui proposer pour le prochain week-end. L'emmener dans les Highlands était déjà un rêve, mais, d'une part, ce n'était pas faisable sur deux petites journées à peine, et d'autre part, ce serait aller trop vite. Il fallait qu'il trouve autre chose. Lanark, puis Stirling avaient été des choix judicieux. Il pouvait suggérer d'aller vers la côte, même si ce n'était pas là que c'était le plus beau. Elle lui avait dit s'être rendue sur Great Cambrae et aussi à Edimbourg. Après tout, pourquoi ne pas retourner dans la capitale ? Cela faisait un moment que lui-même n'y avait pas été ; la dernière fois, c'était pour l'anniversaire de Sam, avec Willy. Il eut un mince sourire : heureusement qu'ils s'y étaient rendus en train, ils avaient pu cuver sur le retour... Harris n'avait pas récupéré un chef et un second bien frais pour le mardi suivant...

Ou alors, il pouvait aussi l'emmener sur les bords du Loch Lomond, ce n'était vraiment pas loin de Glasgow. Ils pourraient envisager une petite croisière, même si c'était un peu touristique…

Le sommeil le gagnait. Oui, il allait l'emmener sur le Lomond...

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