C'était avec une certaine appréhension que Maureen vit arriver cette première semaine de novembre. L'an passé, elle avait réalisé un chiffre catastrophique et avait craint de ne pas pouvoir faire face à ses engagements financiers si les choses avaient continué ainsi. Tout le mois de novembre, elle le reconnaissait d'ailleurs, avait été difficile. Elle avait fini par comprendre que c'était lié à la fin de l'année et que les clients réservaient leurs achats pour Noël. Elle avait donc l'intention de prévoir en conséquence et, pour cette semaine-là, si elle avait prévu deux commandes de fleurs afin d'en avoir des fraîches pour toute la semaine, elles étaient moins conséquentes que d'habitude. Elle se dit aussi, en rangeant sa livraison du jour, qu'elle pourrait toujours revoir celle du vendredi en fonction du déroulement de sa semaine et qu'elle ajusterait ainsi tout au long du mois.

Lawra lui avait téléphoné au cours de la semaine passée et elle songeait déjà à rappeler son amie. Son anniversaire était dans une semaine et, avec la complicité de Mickaël, ils allaient lui préparer un petit cadeau.

Il passa la chercher en fin de matinée, à son retour du restaurant où il avait déposé les achats du jour. Lui aussi revoyait les commandes un peu à la baisse, surtout pour les débuts de semaine, même si le restaurant tournait toujours assez bien en cette période de l'année. C'était plutôt au cours des premières semaines de décembre qu'Harris notait une baisse des réservations, les clients se gardant pour la période des fêtes.

- Tout va bien ? demanda-t-il en entrant par l'arrière-boutique.

- Oui, oui, répondit-elle en souriant. J'ai rentré mes fleurs de ce matin, je t'ai mis quelques-unes qui me restaient de la semaine passée de côté, et, comme tu me l'as demandé, j'ai fait livrer des petites roses jaunes, roses et blanches. Tu veux emmener lesquelles pour ce soir ?

- Je vais faire un assortiment et pour les jours à venir aussi. Oh, ce gardenia est encore bien beau...

- Oui, tu vois, mais la tige s'est abîmée et je ne peux rien en faire... lui fit remarquer Maureen.

- Ne te soucie pas, moi, je vais en faire quelque chose...

Elle sourit et il l'entoura de ses bras, l'étreignit avec tendresse. Elle se laissa aller à cette étreinte, toujours heureuse de savourer ces petits moments tendres qu'ils s'offraient l'un à l'autre.

Puis elle ferma sa boutique, monta la caisse dans l'appartement et redescendit bien vite. Mickaël l'attendait au-dehors, sur son vélo. Il ne pleuvait pas, même si le ciel était menaçant. En revanche, le vent était froid et Maureen avait prévu son chaud blouson, une écharpe et un bonnet.

**

Ils s'arrêtèrent devant "Le Palais des thés". Mickaël n'y était pas retourné depuis son anniversaire et il était bien content de cette occasion offerte par le colis de Lawra. Il poussa la porte, laissa passer Maureen. Il se sentait heureux d'y venir avec elle. Seul Mark officiait à cette heure, Daisy avait pris sa pause déjeuner pour relayer son mari peu après.

- Bonjour, Mark, dit Mickaël en tendant la main par-dessus le comptoir.

- Bonjour, Mickaël. Bonjour, Maureen, dit ce dernier en les saluant avec un sourire. Vous allez bien ?

- Très bien, Mark, merci, répondit Mickaël.

Et Maureen opina, tendant à son tour la main à Mark pour le saluer.

- Alors, comment as-tu trouvé la création de Maureen ?

- Merveilleuse. Merci de l'avoir aidée... C'est un très beau cadeau, sourit le jeune homme.

- Il vous en reste ou vous avez besoin de refaire des provisions ? demanda Mark.

- On va en reprendre. Deux sachets de 100 g, s'il vous plaît. On va aussi vous reprendre Subtil et Harmonieux, même quantité. Et puis, car ils conviennent bien à la saison en 100 g chacun, également Chaleureux, Fanfaron et Tonique. Et deux paquets de 200 g de Corsé. Celui-là, c'est le grand succès du matin.

- Pas de soucis. Tu refais déjà des provisions pour Noël ?

- Non, je repasserai.

Mark commença les préparations en s'aidant de son petit carnet, même si, pour certains mélanges, il les connaissait par cœur. Maureen le regarda faire tout en s'imprégnant de l'atmosphère du lieu, puis elle jeta un regard à Mickaël. Il était lui aussi très concentré, non sur ce que Mark faisait, mais sur les arômes. Et elle se demanda alors s'il n'allait pas avoir envie de créer un nouveau thé. Elle aurait aimé que ce fût le cas, pour pouvoir y assister.

Mais Mickaël se tourna vers elle et dit :

- Alors, que prend-on pour Lawra ?

- Et bien... Elle a beaucoup aimé Subtil, elle aussi. Mais je pense que ce serait une bonne idée que de lui envoyer des thés qu'elle n'a pas goûtés. Et notamment Joyeux et Nomade.

- Hum, bonne idée... fit Mickaël. Et sinon, à part le chocolat, qu'est-ce qu'elle aime comme saveurs ?

- Lawra n'est pas difficile, elle aime beaucoup de choses, tu as pu toi-même le constater, répondit Maureen. Je pense sincèrement qu'elle aimera être surprise.

- Ok, alors, on va rajouter Raffiné. Ce dernier la changera de Subtil, même s'ils sont dans le même esprit.

Maureen hocha la tête. Elle avait eu l'occasion aussi de goûter Raffiné, même si Mickaël le lui proposait rarement, car il était difficile à boire après un repas et convenait mieux pour l'après-midi.

Mark en avait terminé avec la première commande de Mickaël et il reporta son attention vers les deux jeunes gens.

- Donc, Mark, maintenant 100 g de Subtil à nouveau, et également : Joyeux, Nomade et Raffiné. Cela en fera quatre. Tu veux qu'on en ajoute encore un ou deux ? demanda Mickaël à Maureen.

- Non, ce sera bien déjà. Elle pourra toujours me dire ceux qu'elle préfère et je lui en reprendrai pour Noël, répondit la jeune femme.

- Alors, on s'arrêtera là, Mark.

- Très bien, je vous prépare cela.

Ils ne s'attardèrent pas à discuter avec Mark Hornfield, car une cliente arrivait. Ils se rendirent ensuite au bureau de poste le plus proche pour faire partir le colis de Lawra. En plus des thés, Maureen avait préparé une petite carte et elle joignit également une jolie écharpe qu'elle avait achetée à Lewis, au cours de leur séjour. Ils en avaient pris une similaire pour Ingrid et pour Véra qu'ils leur offriraient pour Noël.