Dimanche 8 janvier

Timothy et Mickaël étaient prêts à embarquer pour Paris. Harris les envoyait donc en France pour rencontrer des viticulteurs. Ils feraient un long circuit, de la Bourgogne au Bordelais, et termineraient par la vallée de la Loire. Harris avait choisi cette semaine de reprise en particulier, car c'était une période encore creuse et l'équipe pouvait tourner à cinq sans difficulté. Sam remplacerait Mickaël et lui-même officierait à la place de Timothy.

- A dimanche, ma douce, murmura Mickaël à l'oreille de Maureen en l'enlaçant tout contre lui. Passe une bonne semaine.

- Toi aussi, répondit-elle en le serrant fort contre elle. J'espère que vous trouverez ce que vous voulez !

- On a des contacts, on verra sur le terrain... Je te téléphone à notre arrivée à Paris.

- Oui, je veux bien.

- Allez, il faut qu'on embarque. Je t'aime.

Ils s'embrassèrent longuement une dernière fois, puis Maureen s'écarta, Mickaël se saisit de son sac et se dirigea vers la file dans laquelle Timothy avait déjà pris place. Maureen attendit un peu, puis se dirigea vers une des salles d'attente d'où on pouvait aisément voir les pistes. Elle assista au décollage, puis quitta tranquillement l'aéroport et rentra chez elle. Elle avait gardé la voiture d'Ingrid, celle-ci lui ayant proposé de ne la récupérer que le lendemain, puisque Sam ne lui rendrait sa propre voiture que le mardi.

L'appartement lui parut vide et silencieux, elle fit du ménage, une lessive, puis s'installa à faire ses comptes. Elle devait boucler son budget de l'année 2005, ce qui lui prit une bonne partie de l'après-midi. Mickaël lui téléphona une première fois à leur arrivée à l'aéroport d'Orly, puis plus tard dans la soirée, de l'hôtel où ils allaient loger deux soirs de suite, à Dijon.

Lundi 9 janvier

Dès le matin, après son petit déjeuner, Maureen s'activa dans sa boutique : elle voulait profiter de cette journée pour y faire le ménage en grand, d'autant qu'il n'y restait plus que deux plantes en pot. Elle n'était pas mécontente d'avoir vendu quasiment tout son stock, et de pouvoir ainsi le renouveler en s'adaptant au plus près des goûts des clients. Elle commença par retirer toutes les décorations des fêtes qu'elle avait accrochées, puis elle lava soigneusement toutes les étagères, passa un coup d'éponge sur les murs, la serpillière sur le sol. En fin de matinée, elle était en train de s'occuper des vases dans lesquels elle plaçait les fleurs coupées.

Ingrid arriva à ce moment-là et Maureen l'invita à déjeuner avec elle. Elle lui proposa du pot-au-feu de Mummy, ce qui fit bien plaisir à la maman de Mickaël. Puis Ingrid repartit, après avoir proposé un peu d'aide à Maureen. Elle déclina car elle avait déjà bien avancé dans son ouvrage.

Quand le soir tomba, elle terminait de disposer ses vases pour être prête à y placer sa livraison du lendemain matin. Elle remonta chez elle, se fit du thé pour s'offrir une petite détente bien méritée.

Elle avait craint un peu cette journée de repos, sans Mickaël, mais elle s'était finalement bien passée. Ce soir, après son repas, elle prévoyait déjà d'appeler Lawra, une fois que le jeune homme lui aurait téléphoné. Elle terminait sa vaisselle quand son téléphone sonna. C'était lui.

- Allo, ma douce ? Tout va bien ?

- Oui, et toi ?

- Bien... répondit-il. On a fait une très bonne première journée. Cela augure bien. Timothy avait déniché un petit producteur au sud de Dijon, il fait des bijoux... Bon, certains vins sont chers, on ne pourra pas les proposer au restaurant, mais il offrait aussi une gamme plus abordable et de très bonne qualité. Je suis vraiment content de cette rencontre et Tim aussi. Et toi ? Ta journée ?

- La boutique brille comme un sou neuf. Je suis prête à recevoir ma livraison de fleurs de demain matin et j'ai terminé le bilan financier de 2005.

- C'est bon ? demanda-t-il.

- Oui... Un petit bénéfice tout à fait honorable... J'avais terminé les premiers mois d'ouverture en étant juste à l'équilibre... Là, j'ai fait mieux. C'est sur toute une année aussi et avec deux périodes qui ont quand même bien marché, le printemps et les fêtes.

- Tu as réussi à mieux gérer tes commandes, fit-il remarquer, tu connaissais mieux les périodes creuses. Tu as su t'adapter.

Dans sa voix, Maureen put déceler un éclat de fierté. Elle en fut touchée, puis reprit :

- J'ai vu ta maman ce midi, elle a récupéré sa voiture. Et j'ai reçu un petit message de Sam me disant qu'il rentrait aujourd'hui, qu'il me ramènerait ma voiture seulement demain midi.

- Il allait bien ?

- Je pense que oui... Je ne l'ai pas eu directement.

- Ok... Je l'appellerai demain ou mercredi. Je pense que ça ira pour la reprise, fit-il.

- Vous êtes bien logés, alors ?

- Oui, répondit Mickaël. L'hôtel est tout à fait correct. C'est un peu impersonnel, mais calme et les repas sont bons. Les jours prochains, on sera en chambres d'hôte - l'équivalent des B&B. Ce sera encore mieux.

Maureen l'entendit sourire : il lui avait parlé de leur parcours, de quelques adresses dans lesquelles ils allaient se rendre. Elle savait notamment que deux des hébergements étaient réputés et qu'il y avait déjà séjourné. Ils terminèrent leur conversation, Mickaël promettant de la rappeler le lendemain soir, quand ils seraient à Clermont-Ferrand : avec Timothy, ils avaient décidé de faire une partie du trajet dès le mardi après-midi, pour ne pas perdre trop de temps pour rallier Cahors.

Elle termina ensuite son rangement, puis s'installa pour téléphoner à Lawra. Elles ne s'étaient pas reparlé depuis le jour de l'An. Elles discutèrent un bon moment, Lawra s'inquiétant déjà de la façon dont Maureen allait vivre l'absence de Mickaël.

- Je pense que ça va aller, Lawra, dit Maureen. Ils vont avoir des journées bien remplies !

- Où sont-ils ?

- En Bourgogne. Mickaël m'a téléphoné tout à l'heure, il était très content de leur première journée. Demain matin, ils voient encore deux autres producteurs, puis ils partent pour Clermont-Ferrand. Ils coupent la route en deux pour rejoindre Cahors. Ca leur fait traverser une bonne partie du Massif Central, il m'a dit que ça valait bien les routes des Highlands...

Lawra rit, puis dit :

- Et ensuite ?

- Ensuite, Bordeaux sur une journée, puis ils remontent vers les bords de Loire. Là, ils vont rester deux jours. Ils reprennent l'avion à Nantes dimanche matin.

- C'est un beau parcours en effet ! Et j'imagine bien qu'ils ne vont pas chômer... fit remarquer Lawra. Et toi ?

- Je vais avoir du travail, Lawra. J'ai tout le stock à refaire, y compris sur les plantes vertes. Déjà, ça va me prendre du temps de les disposer en boutique, de les mettre en valeur. Je dois refaire des bouquets aussi, des petites compositions... Je pense cependant que la semaine sera assez calme. Je préparerai aussi quelques cadres fleuris pour la fin de semaine : j'en vends toujours le samedi ou le dimanche.

- Bon, c'est bien... dit Lawra. Tu ne vas pas t'ennuyer !

- Non, je ne pense pas... Le plus dur, c'était presque aujourd'hui, d'être un jour de repos sans Mickaël. C'est aussi pour cela que j'avais prévu de faire le grand ménage de la boutique, pour m'occuper. Et j'ai vu Ingrid ce midi, elle m'a invitée à venir manger chez eux un soir si je voulais ! Elle m'a dit : "si tu as un petit coup de blues..." J'ai l'habitude des soirées sans Mickaël, tu sais, ça va presque faire comme une semaine normale. On ne se voit jamais le soir.

- Les journées te paraîtront peut-être un peu longues, cependant. En général, vous déjeuniez ensemble, ça te faisait une coupure, fit remarquer Lawra.

- Oui, c'est vrai, reconnut Maureen.

- Bon, tu m'appelles aussi si tu as "le petit coup de blues" !

- Promis ! sourit Maureen. Tu embrasses John et Kevin pour moi !

- Sans problèmes ! A bientôt, ma belle !

- A bientôt, Lawra.

Et elle raccrocha et se prépara pour la nuit. Comme la veille, elle trouva le lit bien vide. Elle s'efforça de ne pas trop penser à Mickaël, mais le sommeil la fuyait. Pourtant, elle ressentait la fatigue de sa journée, elle était rassurée aussi pour lui, pour son début de semaine. Elle se tourna et se tourna encore dans le lit, ralluma la lumière, lut un peu. Puis elle finit par aller chercher le dernier t-shirt que Mickaël avait porté et qu'elle n'avait pas encore lavé. Retrouvant ainsi son odeur, comme si c'était un petit doudou, elle finit quand même par s'endormir.