Les premières lueurs de l'aube se faufilaient discrètement par les fenêtres et caressaient les yeux engourdis par le sommeil de Richard. Celui-ci regarda - avec un pénible effort - son réveil. 5 heures et demi, s'il regagna ses rêves, il va s'endormir trois heures de plus, et ni le directeur de l'hôtel ni les clients seront aux anges. Il s'efforça de se lever et essaya de mouiller son visage avec de l'eau froide. Comme ça, il restera concentré et il ne brûlera pas - comme d'habitude - son toast.

Lorsque six heures pile sonna, il était déjà assis devant le volant de sa petite Golf. La pluie avait commencé à tomber, ce qui expliquait l'abaissement de température ces derniers-jours. Richard mettait son manteau de fourrure noir, et en bas, une multitude de colons pour subsister à cet affreux froid hivernal. Il mit le clim sur 29 °C et alluma le moteur. Malgré que la distance entre sa maison et son lieu de travail quotidien ne dépassait pas un demi-kilomètre, Richard n'eut aucune envie de marcher sous cette intempérie.

* * *

Arrivé devant le portail de l'hôtel, il stationna son automobile - ceci lui prenait une dizaine de minutes vu qu'il était débutant - dans le parking. En entrant, il salua les peu de gens dans la salle d'acceuil et évita de rencontrer le regard de la réceptionniste. Cette dernière le faisait trembler avec ses yeux brillants de malice et ses dents blanchies, ça lui rappelait les cannibales dans un film d'horreur. Richard rejoignit ses camarades déjà installés chacun dans sa place, il enleva son manteau et enroula la serviette autour de sa taille. Dès qu'il entrait dans cette cuisine, il ne se reposait qu'à l'heure du déjeuner, à quatorze heures. Après, il revint là pour travailler et travailler jusqu'à minuit.

En cuisinant le petit-déjeuner d'un jeune couple allemand - oeufs, bacon, baked beans, toasts et champignons -, il se demandait : "Devais-je continuer à être un chef-cuisinier durant toute ma vie ? N'ai-je pas le droit de se retirer un peu chez moi ? Si je continuerai comme ça, je serai chez le psychologue dans une semaine ou deux ! "

Richard sentait une irrésistible envie de se détendre, son stress augmentait avec le temps, il perdait ses nerfs avec chaque remarque, et faillit couper un doigt. Ses collègues tapotaient sur son épaule de temps en temps : " Rich, relax et ne te laisse pas emporter. Ou le boss ne sera pas content ! ". Il acquiesçait avec un signe de tête.

* * *

— Je veux prendre des vacances, affirma sérieusement Richard, assis devant le bureau de monsieur le directeur.

— Mmm, excuse-me ?

— Je n'en peux plus, je pars dès demain, et je reviendrai d'ici un mois.

L'homme aux lunettes arrondis et au visage allongé pouffa de rire. Il croisa ses mains et se rapprocha de son interlocuteur, puis siffla :

— Est ce que Noël est arrivé avant son heure ? Ou bien il y a une fête quelconque ? Rappelez-vous mon cher Richard, on ne prend de congé que dans les jours fériés. S'il vous plaît ne recommencez pas cette ...

— Je démissione donc, s'exclama le chef en souriant.

Le directeur ouvrit de grands yeux, il regarda bêtement l'homme poser sa serviette sur la table.

— Veuillez couper toute relation avec moi, et je veux que mon dossier soit vérifié et fermé dès maintenant. Pour mon salaire, ne versez plus rien. Appelez moi au besoin. Je vous remercie pour votre compréhension. Au revoir

Richard sortit sans attendre de réponse. Il courut vers ses amis et les étreignit un par un. Puis il franchit pour la dernière fois le portail de l'hôtel. En route vers sa maison, il se demandait pourquoi il n'avait pas fait ça il y a vingt ans.