Installée à une table, non loin des machines à sous, la jeune femme sirotait tranquillement son verre de whisky-coca.

Le brouhaha -cliquetis des machines et conversations animées- était dense en ce samedi soir, dans ce casino situé sur la Promenade des Anglais. Les machines à sous étaient quasiment  prises d’assaut par des personnes survoltées et concentrées, aiguillonnées par le démon du jeu.

Elle se dit qu’elle n’aurait jamais dû s’installer si près, mais elle y était contrainte pour le bon déroulement des opérations. Il fallait seulement qu’elle prenne son mal en patience.

Elle faisait mine d’étudier avec beaucoup d’intérêt la carte des boissons qui traînait sur la table, quand elle sentit des picotements dans la nuque. Elle releva lentement la tête et se tourna sur le côté, d’un air très naturel. Elle coula un regard, sous le rideau de ses cheveux, vers l’homme au comptoir qui venait d’arriver et qui s’installait confortablement sur un siège en cuir. Elle discerna un profil bien dessiné. Tout-à-fait à son goût, pensa-t-elle, avec un petit pincement au cœur.

Elle rejeta en arrière ses longs cheveux d’un noir de jais lui arrivant au bas du dos. Elle aurait dû les attacher, mais elle savait que sa chevelure d’ébène était un atout physique. Et elle devait se mettre en valeur. En souriant intérieurement, elle leva son verre et but une large rasade de son contenu. Elle sentit aussitôt l’alcool brûlant couler le long de son œsophage. En soupirant, elle rajouta du coca-cola dans son verre et redressa la tête. L’homme au comptoir la dévisageait. Elle sourit alors et leva son verre en trinquant à sa santé.

L’homme fit de même, tout en la dévorant des yeux. Elle supporta sans ciller son examen. Posant son verre, il vint vers elle d’une démarche féline, conquérant, sûr de lui.