Chapitre 32

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Paris, mercredi 28 mai 2025

Jour J, 19h58

Nathan se jeta à travers l’encadrement de la fenêtre et bascula dans le vide.

Les mains de l’assaillant au maillot de foot ne furent pas assez rapide pour le rattraper et celles-ci se refermèrent sur le néant. Nathan, lui, glissa sur la pente douce du toit en zinc. Ses pieds l’arrêtèrent in extremis, juste avant l’arrête quasi verticale du toit en ardoise. Il se redressa alors et reprit sa course effrénée sur les toits de Paris, entre les cheminées de brique rouge et les flaques d’eau grise.

Courir sur ces toits était devenu plus risqué encore que d’attendre bien sagement ses deux poursuivants. Sous l’action de la pluie, les toits en zinc s’étaient transformés en de gigantesques patinoires et le moindre faux pas pouvait s’avérer fatal.

Nathan se retourna après quelques foulées. La peur du vide n’avait visiblement pas eu prise sur ses deux poursuivants. Ceux-ci l’avaient suivi jusque sur les toits et se préparaient à reprendre leur chasse à courre. Tout juste Nathan avait-il pu récupérer une vingtaine de mètres d’avance.

Il passait maintenant d’immeubles en immeubles, sans jamais ralentir le rythme, enjambant les larges cheminées de briques qui séparaient chaque bâtiment du suivant. Il avait désormais deux cheminées d’avance sur ses poursuivants. Mais très vite il butta sur un mur. L’immeuble face à lui était plus haut que le sien d’un étage. Il dût reculer de quelques pas, s’élancer et sauter le plus haut possible pour prendre appui de son pied sur le mur et se propulser vers l'arête de zinc, qu’il accrocha de ses deux mains avant de se hisser sur le toit suivant.

Cet obstacle devrait lui permettre de gagner un peu d’avance sur ses poursuivants, pensa-t-il. Mais ceux-ci ne se découragèrent pas pour autant et s’entraidèrent pour escalader le mur. Une fois franchi, ils reprirent leur traque de plus belle.

Nathan savait que cela ne pouvait durer éternellement, que les toits de Paris n’étaient pas infinis. Il parcourut encore quelques dizaines de mètres avant de se retrouver face au vide. En bas, un passage menant à une cour intérieur. Devant lui, un autre toit situé à environ cinq mètres de distance. Derrière lui, deux cerbères prêts à en découdre. Au loin, près de l’enceinte périphérique, des fumées obscurcissant le ciel et de multiples détonations déchirant l’air. Nathan en avait maintenant la preuve sous ses yeux : le soulèvement de Paris avait bel et bien eu lieu et la bataille faisait rage en ce moment même. Galvanisé par l’abnégation de tout un peuple, Nathan se recula d’une dizaine de mètres, jaugea la distance à franchir, inspira profondément et puis s’élança.

Le vide défila sous ses pieds et bientôt la parabole décrite par sa personne vint s’écraser contre le rebord de l’immeuble opposé.

Il sentit tous les os de son corps s’abattre contre la pierre et s’en retrouva le souffle coupé, les jambes remuant dans le vide, mais les mains fermement accrochés au rebord de l’immeuble. Dans un ultime effort, il hissa le haut de son corps au niveau du rebord, balança sa jambe droite et bascula sur le toit. Il resta allongé là plusieurs secondes, totalement essoufflé. Lorsqu’il se releva, ses deux assaillants venaient d’arriver au bord du précipice. Il les observa avec attention. Ils hésitaient à se lancer. Puis, le plus élancé des deux, celui au maillot de foot, recula de quelques pas.

— Ne faites pas ça ! prévint Nathan.

Mais déjà le garçon au maillot de foot s’élançait dans le vide. Il atterrit lui aussi contre le rebord. Déjà il se hissait pour remonter. Nathan se trouvait juste au-dessus de lui. Il n’était plus question de fuir. Alors, du pied droit, il frappa son assaillant à la tête. Sous la violence du choc, ce dernier lâcha prise et alla s’écraser vingt mètres plus bas.

Nathan releva la tête et toisa son dernier adversaire encore en vie, le grand frère à la carrure massive. Celui-ci resta bien docilement de l’autre côté du gouffre, mais ses yeux lançaient des éclairs et ses poings étranglaient le vide. Sa bouche s’anima alors en un rictus de haine :

— Je te retrouverai, tu m’entends ?!!! Je te retrouverai et je te tuerai !!!!

Mais déjà Nathan disparaissait dans le dédale des toits de Paris.

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