Le Grand Jour
Il y avait une odeur de pomme et de canelle, qui flottait dans la petite chaumière. Les murs étaient flanqués de multiples étagères qui débordaient de livres et de grimoires poussiereux, ou de fioles multicolores qui renfermaient des substances aussi rares qu’étranges. Noldor était assis dans un fauteuil qui semblait confortable, et tirait sur sa pipe, le regard dans le vide. C’était aujourdhui. Dans quelques heures, ils seraient là, tous. Enfin, c’est ce qu’ils avaient assuré. Et ce que les étoiles avaient confirmé. Après son départ de Lonod, Noldor s’étai dirigé vers les Bois Hurlants, une toute petite forêt bien étrange logée un peu au sud est de Lonod. Les Bois Hurlants étaient nommés ainsi en raison des bruits étranges qui en émanaient. Les lutins étaient des êtres particuliers, facécieux et peu raisonnables. En pénétrant leur territoire, le vieux mage s’était fait à l’idée qu’il ne parviendrait pas à les rallier. Les lutins passaient leur temps à imaginer des farces et des sortilèges les plus bètes et parfois les plus cruels possibles. Et les humains en faisaient souvent les frais. Ainsi s’amusaient ils à faire disparaitre des outils dont on ne pouvait se passer la veille des moissons, ou faisaient ils apparaitre des taches rouges et urtiquantes sur la peau de certains enfants.. Voila ce qui faisait « hurler » des rires le petit peuple des « Bois ». Mais Noldor fut surpris. Il frappa à la premiere petite porte, nichée au pied d’un arbre, pour demander où il devait se diriger pour s’adresser « au chef ». Il fit la rencontre de Quimby, un petit lutin bien atypique, qui l’avait regardé avec des yeux tout ronds en ouvrant sa porte:
« Maî...Maî...Maître Noldo-do-dor ? Je..Je..Je suis trés hono-no-noré de vous rencon-rencon-rencontrer », avait il fini par tenter d’articuler. Quimby expliqua qu’il n’y avait pas vraiment de chef aux Bois Hurlants, c’était un peu contraire à la cacophonie permanente chez les lutins. Noldor arqua un sourcil et osa :
« Pardonnez moi Quimby, mais...vous me paressez bien... Calme.. je veux dire... pour un lutin. »
Un voile de tristesse passa dans les yeux verts de Quimby. Il prit sur lui pour ajouter :
« Nous ne so-so-sommes pas-pas-pas tous des esp-espèces de cré-crétins dé-dégenérés sans coeu-coeur et sans ju-ju-juju... Jugeotte. Voila-la pourquoi je-je vis si lo-loin des autres. »
Quimby vivait loin de ses semblables, parce qu’il était trop différent d’eux. Noldor n’avait pas insisté, et avait préféré s’adresser au seul lutin qui pouvait entendre ce qu’il vait à dire sans pouffer de rire pour rien. Quimby avait compris, et s’était contenté d’acquiescer en signe d’acceptation, évitant à Noldor d’entendre à nouveau son begaiement. Noldor avait ressenti dela compassion pour ce drôle de petit bonhomme, haut de trente centimètres à peine, habillé de haillons verts. Il était timide, chétif, et portait un bonnet vert lui aussi sur des boucles auburn.
Le vieux mage souriait en tirant sur sa pipe, dans une pénombre seulement troublée par quelques bougies, en repensant à la reflexion qu’il s’était faite en arrivant deux jours plus tard à Irindrilha. La Cité des Nains. Il souriait à la relativité des choses. Quimby était un nain pour les nains...
A Irindrilha, il avait demandé audience auprés de Finzwik, maître des lieus. Finzwik avait été contraint de stopper ses activités, ce qui l’avait rendu plutot grognon. Il taillait pour son plaisir, des gemmes magnifiques, que ses sujets passaient leur vie à chercher dans les galeries qui grouillaient sous la montagne. Là, il avait à nouveau déclamé son histoire, et avait vu palir le nain. De grognon, il était devenu presque aphone. Il avait été incapable de prononcer un mot. Et puis, il avait fini par se ressaisir, et s’était levé de son trône, sertis de pierres précieuses. La pièce taillée à même la roche, était éclairée par un puit de lumière. Finzwik traversa la pièce, pour s’approcher du mur du fond. Noldor l’avait observé sans mot dire. Le nain avait saisi son énorme marteau de guerre, accroché au mur comme un trophée, et avait fait volte face :
« Je serai parmi vous. »
Noldor n’était pas inquiet. S’il tirait nerveusement sur sa pipe, c’était par pure impatience. Jusqu’à présent, la seule ombre au tableau, avait été la fin de son périple à travers l’Alendhil. Il avait eu beau chercher, fouler le sol de la lande, il ne les avait pas trouvé. Et pourtant, ils auraient dû être les plus aisés à trouver ! Les geants étaient restés introuvables. Aucune trace d’eux aux Monts des Cimes, qui étaient désormais deserts. Qu’était il advenu d’eux ? A vivre en parfaite indifférence, les peuples d’Alendhil avaient peut être perdu l’un des leurs, sans même avoir connaissance de leur extinction...
L’obcurité se faisait moins dense... Il était l’heure. Noldor se leva de son vieux fauteuil, ce qui reveilla le vieil hibou, posté sur un branche d’olivier accrochée au mur qui faisait office de piedestal. Le mage prit sa cape, et sortit par la porte circulaire. Il tira sur sa pipe, regarda le chemin face à lui. A une cinquantaine de metres, par dela les arbres centenaires, se dressait le Cercle des Menhirs, la cathédrale des mages. Il avança presque solennellement en direction des mégalithes, où tout allait commencer.
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