Chapitre 10

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21 avril, Vol AF 66 de Charles de Gaulle à Los Angeles

Le vol Air France pour Los Angeles part de Roissy à 10h20. Il faut presque une heure pour embarquer et installer les cinq cents passagers dans l’Airbus A380. Philippe avait donné rendez-vous à Ange à 8 heures. Sachant qu’ils allaient faire la première partie du séjour à moto, ils avaient prévu de voyager léger et n’avaient donc pas de bagages à enregistrer. Le passage aux contrôles de sécurité avait été plutôt rapide et ils avaient eu le temps de déambuler dans la zone commerciale du hall M du terminal 2E. Avant même l’heure prévue pour le début de l’embarquement, une longue file s’était déjà constituée devant les portes lorsqu’il s’y présentèrent.

Philippe était habitué à voyager à titre professionnel, fréquentant régulièrement les congrès médicaux tout autour du globe et il était le plus souvent invité, ce qui lui assurait de voyager en Business. Pour cette fois, conscient de la forte différence de coût, il s’était résolu à voyager en classe Eco pour ne pas trop pénaliser son ami Ange, dont le traitement de fonctionnaire ne permettait pas les excès. Il eut néanmoins un regard d’envie pour l’accès Sky Priority qui embarquait déjà. Il avait tout de même réussi à obtenir deux sièges mitoyens sur le pont supérieur leur permettant de ne pas avoir de voisin. Il savait que la contrepartie était de se retrouver tout à l’arrière de l’appareil et qu’ils seraient les derniers à débarquer, mais après un vol de douze heures, on n’est plus à vingt minutes près.

L’embarquement lui parut interminable. Après avoir fait la queue dans le terminal, ils piétinaient maintenant dans l’allée, attendant que tous les passagers devant eux aient fini de ranger leurs bagages et de s’installer. Les stewards et hôtesses avaient beau essayer de presser le mouvement, chaque passager se croyait seul à bord et prenait tout son temps. Ange et Philippe avaient les sièges 92 A et B et devaient donc se frayer un chemin jusqu’à l’arrière de la cabine pour atteindre l’escalier menant au pont supérieur.Ils finirent par y arriver et trouver leurs places. Philippe étant le plus grand laissa le hublot à Ange et s’installa côté couloir pour avoir la possibilité d’étendre un peu les jambes durant ce voyage interminable.

Enfin l’énorme appareil commença à reculer et l’équipage entreprit de vérifier la bonne installation des passagers pendant que les consignes de sécurité défilaient sur les écrans incrustés dans les sièges.

Ange, peu habitué à ces vols long-courriers, afficha devant lui les images de la caméra embarquée, reproduisant la vue du pilote sur la piste. Après un long roulage, l’avion prit de la vitesse et se cabra doucement pour décoller.

La première heure de vol passa rapidement, Ange parcourant les différentes rubriques proposées par le système de divertissement de son siège tandis que Philippe s’absorbait dans un roman à succès, en anglais, « pour me remettre dans l’ambiance » avait-il précisé.

Le médecin avait passé en revue les passagers installés dans la même zone qu’eux et il fut rassuré de constater qu’il n’y avait pratiquement que des couples ou des personnes voyageant seules. Pas de familles nombreuses, de bébés ou de groupes de lycéens susceptibles de troubler leur tranquillité pendant le vol.

Le premier service fut annoncé. Négligeant le médiocre champagne servi dans la cabine Eco, Ange et Philippe choisirent des boissons plus fortes, whisky pour le policier et vodka pour le médecin. Ils doublèrent la dose au second passage, n’ayant rien d’autre à faire que rêvasser ou dormir dans les heures suivantes. Le plateau-repas qui suivait n’apporta aucune agréable surprise, pâtes ou poulet étant l’inévitable choix offert. Le vin n’était pas non plus d’un grand cru, loin des standards auquel Philippe était habitué.

Heureusement pour eux, le service de leur secteur était effectué par deux agréables hôtesses, délicieusement sexy dans leur uniforme.

Le seul événement notable intervint quand une jeune femme assise deux rangs devant eux, après un conciliabule avec son voisin, se dirigea vers les toilettes situées à l’arrière, presque immédiatement suivie de son compagnon. Quelques minutes plus tard, Philippe qui s’était levé pour se dégourdir les jambes les vit ressortir ensemble de l’étroit local. Il leur sourit avec un clin d’œil complice. Il se rappelait quelques voyages lointains avec Brigitte durant lesquels il leur était arrivé d’avoir de coupables activités. Tout particulièrement lors d'un vol de nuit, alors que la plupart des passagers dormaient profondément, les autres le casque sur les oreilles absorbés par une vidéo. Brigitte avait réussi à lui prodiguer une mémorable fellation.

Lorsque l’Airbus posa les roues sur la piste, Ange n’avait pas fermé l’œil. Philippe de son côté avait somnolé un bon moment. Quand le commandant de bord annonça l’heure locale 13h05, Ange se dit que la journée allait être encore longue.

Comme prévu, il leur fallut près d’une demi-heure pour sortir de l’appareil et arriver dans le terminal Tom Bradley. Par chance, la file d’attente dans le hall d’immigration n’était pas trop longue. Ils se retrouvèrent rapidement chacun devant une machine pour répondre au questionnaire habituel et se faire photographier. Philippe se remémora l’époque où ces formalités se faisaient devant un fonctionnaire zélé, après avoir rempli un long formulaire. Ils tendirent le bordereau imprimé par la borne automatique et se retrouvèrent dehors après avoir reçu le coup de tampon officiel sur leur passeport.

Dès qu’ils eurent franchi les portes de l’aérogare, ils furent accablés par la chaleur de ce milieu de journée. Un grand panneau d’affichage indiquait 90 degrés que Philippe convertit rapidement de Fahrenheit en Celsius pour Ange, trente-deux. Guère plus qu’en Corse en été pensa ce dernier.

Il ne leur restait plus qu’à rejoindre leurs motos.

EagleRider n’était qu’à quelques blocs de l’aéroport mais pas question d’y aller à pied. Philippe dut négocier avec un taxi pour qu’il accepte cette trop courte course, lui promettant un généreux pourboire.

Chez le concessionnaire, deux Harley Davidson « Road Glide » les attendaient sur le parking. Le temps de trouver des casques à leur taille, de choisir des gants légers et de terminer les formalités, ils répartissaient leurs bagages dans les larges valises et le top-case. Il était un peu plus de 15h00 lorsque Philippe suivi par Ange engagea sa machine sur La Cienega Boulevard, direction nord, vers Marina del Rey, Venice Beach et Santa Monica.

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