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C’est la nuit décisive, celle de l’action ! Il a tout préparé, il est prêt ! Il a jugé inutile de prévenir Quatre, car il compte sur le billet promis par les Américains pour rejoindre le Tualroc avec son butin porteur de sa victoire. Normalement, ils l’attendent à la sortie.
Ce soir-là, en sortant, il met sa carte dans la pointeuse, puis en la rangeant à droite, il dit :
— Zut, j’ai oublié quelque chose dans mon casier !
Cette remarque est inutile, puisque personne ne fait attention à lui et qu’il est le dernier à sortir. Il repart dans les vestiaires, se glisse dans la toilette du fond et attend patiemment. Il a le cœur qui bat un peu vite, car c’est vraiment sa première action en tant qu’agent secret. La nuit arrive, le silence règne depuis deux heures. Il sort en évitant le moindre bruit et grimpe au deuxième étage. La clé claque dans la serrure habituellement, mais depuis une semaine, il s’entraine à la retenir. Le déclic, même amoindri, résonne dans la cage d’escalier, qu’il sait déserte la nuit. Seuls la porte blindée et les barreaux aux fenêtres protègent ce lieu impénétrable. Il n’allume sa lampe de poche que quand c’est nécessaire, en la masquant de sa paume. La salle est éclairée par les terrariums qui nécessitent de la lumière en permanence. Ses cibles, vivant dans l’obscurité, sont dans l’angle opposé. Il pose soigneusement sa lampe, car la manœuvre du double couvercle est compliquée. Il l’a observée, mais jamais faite. Il ne faut pas effrayer les animaux. Alors qu’il vient de réussir à soulever la première protection, il sursaute au claquement de la serrure. Quelqu’un essaie d’entrer ! Il se jette sous le terrarium, le laissant ouvert.
Il voit des jambes parcourir l’allée parallèle à la sienne, celle qui est éclairée, tandis qu’il entend fredonner l’air du Toréador. Un gardien de nuit qui fait sa ronde ! Personne n’avait évoqué cette particularité devant lui ! Il l’entend actionner le mouchard et repartir. Heureusement, il n’a pas aperçu le couvercle soulevé, trop concentré sur sa mélodie. Après le bruit de la serrure, il entend le bruit du verrou extérieur. Horreur ! Il est prisonnier pour la nuit ! Après un moment de panique, il accepte la fatalité. Autant faire bon cœur contre mauvaise fortune.
Il se lève, referme le vivarium en espérant qu’un des locataires ne s’est pas enfui, ce qui semble impossible, puis il se dirige dans le coin le plus éloigné, s’allonge par terre et s’endort en se disant que, heureusement, le ménage est bien fait !
Le lendemain, il apparaît doucement derrière les premiers chercheurs, les salue et sort d’un pas lent, mais empressé, car tenaillé par une envie qu’il retient depuis le milieu de la nuit. Grandeurs et petits malheurs de la vie d’espion !
En sortant, il doit justifier sa défection aux Américains, qui l’attendaient de pieds fermes et énervés, puis aux Anglais dont le flegme légendaire se lézardait. Il trouve une vague histoire de changement de procédure, ce qui semble suffire pour les calmer, après force jurons, se félicitant de ne pas comprendre cette langue. Il sent bien la nervosité des uns comme des autres, surtout dans la phrase : « Il faut se dépêcher maintenant, il y a trop de monde sur le coup ! ». La promesse d’un avenir radieux, prochain, lui permet de se défaire de cette situation.
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