Bonus : Herwin et le forgeron (+18)
Courbé sur la chaise mal empaillée, Jameson semblait dans son monde, concentré sur son écriture. Le lit attenant couina sous le poids de l’ancien militaire qui s'y installa. Sortant son carnet il posa la pointe de son petit stylo sur une nouvelle page. Il tenait à consigner les faits pour un rapport qu’il ne remettrait à personne. Vieille habitude.
Passant une main sur son visage dans une réflexion intense, un soupir nostalgique s’échappa d’entre ses lèvres charnues. L’odeur du métal froid, de la sueur et du feu de bois s’en dégageait encore. Jetant un coup d’œil furtif à son ami, ses joues qui s’étaient colorées reprirent une teinte normale. L’imperturbable écrivain ne l’avait pas entendu. Rapprochant son carnet, il y inscrivit d’une petite écriture en bâton :
Jour passé
Jameson est concentré dans son roman. Au moins, nous ne sommes pas venus ici pour rien. Hier, l’homme de raison que je suis a expérimenté les premiers symptômes prouvant que cet endroit n’est pas normal. J’en ai vu des choses dans ma vie, mais ici, je ne me sens pas à l’aise. Cet endroit et j’ose le dire, me fou la trouille. Mais entre rester enfermé, dans un lit trop petit qui me coupe la circulation et tenter de trouver ce qu’il s’est passé dans le patelin miteux, le choix était vite fait. C’est pour ça que je me suis retrouvé en bas, dans la forge. Heureusement pour moi, il n’y avait pas plus de choses étranges qu’à nôtre premier passage. J’ai allumé la seule lampe à huile. Pourquoi il n’y a pas d’électricité ?! Je l’ai presque aussitôt regretté. La lumière a donné vie aux pierres et je pouvais presque entendre leurs murmures grinçants. Pire, j’avais l’impression qu’elles bougeaient tout autour de moi.
J’ai tenté de me ressaisir rapidement. Mais la suite, foutre Dieu, je me serais traité de fou si je me l’étais raconté.
Je me sentais de plus en plus nerveux. En même temps, allez-vous retrouver au 21ème siècle dans une forge vide, seul dans un patelin mort ! Personne ne serait calme. Je sentais mon corps se refroidir. J’avais la chair de poule. Moi, un grand gaillard, fort, j’avais peur alors qu’il n’y avait rien !
Et là, juste au coin de mon œil, j’ai vu une forme humaine. Je me suis fié, crispé. J’ai senti un frisson parcourir ma nuque jusqu’à mes reins. Cette fois, mon mètre quatre-vingt-cinq ne me servait à rien. J’étais comme un gosse dans un endroit interdit : retenant mon souffle en tentant de me faire invisible pour ne pas me faire surprendre.
J’ai retenu un cri en voyant le feu s’embraser dans le foyer. Je l’ai fixé, stupéfait. Immédiatement, j’ai senti la chaleur se propager dans la pièce. J’ai entendu des pas dans mon dos et j’ai senti mon cœur partir en courant, en me laissant planté là. Je ne me souviens plus si j’ai pivoté ou s’il est venu face à moi. À son tablier de cuir, il ne pouvait s’agir que du forgeron. Je distinguais mal son visage : ses cheveux en bataille aussi noir que du charbon se confondaient avec les murs couverts de suie. J’ai dégluti. Il m’a frôlé sans me regarder. J’ai senti l’odeur du bois chaud, de l’effort et du métal en fusion à son passage. Je l’ai respiré à plein poumon, mais elle est partie trop vite.
Il bandait ses muscles en actionnant un soufflet et s’empara de ses outils qu’il fit retentir dans un rythme régulier. Tout en lui semblait immense. La pièce était devenue encore plus chaude. Je sentais mon corps se détendre dans cette nouvelle atmosphère. Je m’excitais à la vue de cet homme. Enfin quelqu’un d’autre !
Mais que faisait-il là ? La question me sembla ridicule et il était bien trop concentré pour que je la pose.
Il travaillait un métal rougi qui s’allongeait à chacun des coups qu’il recevait. Il semblait presque danser avec les flammes et le marteau. Je sentais mon regard accroché à ses mouvements de hanches qui accompagnaient son travail. Des perles de sueurs glissaient le long de ses muscles taillés au burin. Je sentis ma gorge s'assécher. Quelques-unes s'échappaient de son corps et venaient s'évaporer dans un bruit infime sur le métal brûlant. Quel gâchis, alors que j'avais si soif.
Je n’ai foutrement aucune idée du temps que j’ai passé à l’observer, fasciné, les bras ballants et la bouche entrouverte, m’humidifiant les lèvres en permanence.
Il n’était pas gêné d’être dévisagé, puisqu’il souriait, mais c’était sûrement plus la satisfaction de son travail que ma présence qui l’enchantait.
Ses yeux ont reflété l’éclat de la lune lorsqu’il a regardé son travail, avant de le plonger dans un seau d’eau. La vapeur a envahi la pièce et j’ai perdu contact avec ces perles intenses que j’avais envie de voir encore.
Il est réapparu à travers la brume et j’ai percuté son regard. J’ai senti mes entrailles se remuer dans tous les sens. J’ai frissonné, mais je n’avais pas froid. J’avais les mains moites et le souffle court. A y repenser, on aurait cru un jeunot tout chamboulé. J’avais sûrement l’air d’un grand idiot. J’ai bredouillé :
- Herwin. Je ne suis que de passage chez vous. Enfin, nous. Avec Jameson. Mon ami. En haut.
Je me suis flanqué trois baffes mentales. Après avoir eu la honte de ma vie, j’avais maintenant les joues rouges, en feu.
Lui a haussé les sourcils d’un air amusé en s’essuyant les mains. Il a serré ma grande paluche fermement, posant son autre main sur mon bras nu. Sa peau était brûlante et rugueuse. J’ai tremblé et il a souri, sa grande mâchoire carrée s’ouvrant pour me répondre :
- Fabbro. Vous êtes effectivement chez moi. Bienvenue.
Je bombais le torse et lui fit face, respirant son odeur enivrante. Il s’est rapproché sans ciller. J’ai murmuré à son oreille :
- Je ne veux pas vous déranger.
J’ai senti son cou musclé se contracter et son souffle chaud se répandre sur moi tandis que sa voix m’envoûtait.
- J’ai fini mon travail. On peut passer un moment tranquille.
Il s’est écarté et m’a tendu une coupe d’une boisson sirupeuse. Il a bu en dénouant son tablier, révélant un corps musclé à mon image. Je goûtais la boisson à ses lèvres l’instant d’après, avide de boire cul-sec entre ses jambes ensuite.
Son membre gonflé entre mes doigts me fit réagir et j’étais très vite bien trop serré dans mon pantalon.
Agrippant sa nuque d’une main, je cognais mon corps au sien et sentis sa chaleur m’irradier. Dévorant son corps du regard, mes lèvres se mirent à le parcourir à leurs tour, descendant de sa nuque à ses épaules. Je sentais les siennes me marquer en retour et me faire connaître des zones sensibles que je ne connaissais pas. Je tentais de faire le moins de bruit possible, mais lorsqu’il me renversa sur la table, faisant tomber mes vêtements au sol dans des gestes brusques, sa langue glissa sur mes boutons de chair et je laissais échapper un gémissement rauque. Passant mes mains dans sa tignasse bouclée, j’agrippais à deux mains son crâne tandis que je sentais mon membre être aspiré au fond de sa gorge. Ma voix dérailla une nouvelle fois et je serais les dents d’une extase que je ne devais pas laisser entendre. Ne le lâchant pas une seule seconde du regard, je le vis me lancer un regard des plus enivrés. Un sourire en coin en se pourléchant les lèvres, il se redressa et vint s’empaler en moi me coupant le souffle. Je plantais alors mon regard dans le sien, ramenais mes jambes en redressant mon bassin et posais mes mains sur ses hanches pour l’avoir au plus profond de moi, intensément. Je perdis la tête en quelques instants mais loin de s’arrêter, je sentais des éclairs traverser mon corps de longues minutes encore tandis que je laissais reposer mon dos sur la table en tenant de retenir mes gémissement graves d’une main crispée sur ma mâchoire. Lorsque sa main brûlante s’empara de mon membre pour le branler en même temps qu’il continuait de me faire glisser sur la table, je me souillais abondement. Quelques instants plus tard, je sentis un flot se déverser en moi et Fabbro de sa voix grave m’envoya au 7ème ciel.
A la seconde où son corps s’est éloigné du miens, la chaleur m’a quitté. Par des gestes las, on a remis nos vêtements, sans se quitter des yeux. Cacher un corps comme ça, c’est un vrai crime de guerre, moi je vous le dis.
J’ai voulu toucher encore cette peau dure, mais quelqu’un déboulait dans les escaliers. En sueur et reprenant mon souffle, j’ai vu Jameson me regarder, sidéré. J’ai remarqué à ce moment que le feu était éteint et Fabbro disparu.
En remontant, perturbé, je peux jurer l’avoir vu là, juste au coin de mon œil. Je n’ai pas écouté Jameson. Je sentais l’odeur du bois, du métal et de la sueur accrochée à ma peau.
J’ai la preuve physique et sur mes vêtements que Fabbro était réel. Ou était-ce vraiment moi seul ? Une vapeur que j’aurais respiré ?
Foutu patelin. Je perds sûrement la boule…
Mais quel moment !
Rangeant son stylo, Herwin jeta un coup d’œil vers la porte fermée. Son regard glissa sur le bois en décrépitude jusqu'au sol.
Des rayons de lumière chaudes s'intensifient par à-coups.
Herwin sentit son cœur rater un battement. Très faiblement, il lui semblait entendre un bruit de métal que l'on forgeait. Jetant un coup d'œil rapide à Jameson, il s'éclipsa dans un grincement et descendit les escaliers, le sang affluant dans toutes les parties de son corps.
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