Sa Majesté des Mouches

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Drago livrait un combat à mort. Etendu sur son lit, recouvert de sueur, la tentation caressait tous ses muscles, hérissait les poils de son corps et piégeait ses pensées dans un cycle sans fin. Le soleil était levé depuis plusieurs heures déjà. Bientôt, il ne pourrait plus rester au lit, sous peine de s'attirer les soupçons de la maisonnée. Déjà les rayons lumineux frappaient l'angle de la pièce où il avait abandonné son sac, la veille au soir, en rentrant du travail.

Jamais il ne laissait traîner ses affaires de cette façon. Jamais il ne s'était débarrassé aussi rageusement du poids de sa journée. Mais à présent, le jour se levait pour lui dire qu'il ne pouvait plus l'ignorer.

« Arrête de faire de la poésie les samedis matins, Drago... »

Au moins, son esprit n'avait rien perdu de sa verve.

Drago finit par quitter son lit pour mieux s'enfuir dans la salle de bain. Là, il prit une douche brûlante, contemplant avec intérêt sa peau qui se marbrait peu à peu de rouge. Il s'habilla mécaniquement, sans réfléchir à ce qu'il mettait, sans se rendre compte qu'il enfilait une de ses tenues strictes et guindées qu'il gardait pour le travail.

Ne pas penser à la sacoche. Ne pas penser au livre. N'y pense pas, n'y pense pas...

Drago descendit les escaliers quatre à quatre, sanglé dans son costume noir. Arrivé dans la cuisine, il se servit une tasse de café fort, ce qu'il ne faisait jamais lui-même. Le regard médusé de la cuisinière attestait du nombre de fois où il avait mis les pieds dans cette cuisine. Drago l'ignora ; il ignora tout le monde. Il savait que d'ici quinze minutes, la rumeur aurait atteint les oreilles d'Astoria, alors il verrouilla ses pensées et profita du vide.

Le vide l'effrayait. On était samedi matin. Qu'allait-il faire de cette journée ? Et celle de demain ? C'était trop long, beaucoup trop long.

Drago reposa sa tasse, et il sentit les bras de l'ennui qui l'attiraient, l'enlaçaient...

Tout au bout, le visage blanc d'Astoria se profilait, mêlant souvenirs et craintes dans un mélange immonde. Mais il ne devait pas penser au livre.

« Pourquoi ? Les livres permettent de s'échapper. »

« Justement, c'est la porte ouverte à n'importe quel danger. »

« Quel danger ? C'est un bouquin. »

« Un bouquin prêté par Granger. Bon sang, il n'a rien à foutre chez moi ! »

« Depuis quand Granger est un danger ? »

Drago n'eut pas le cœur à se répondre. C'était une question idiote. Le genre de remarque que son ancien lui aurait pu faire. Bien sûr que Granger était un danger. Elle l'était depuis qu'il s'était racheté une conscience. Quelle bonne idée il avait eu...

« Granger est l'incarnation de tout ce que je ne suis pas. », proféra-t-il en lui-même. « De tout ce que je n'aurai jamais. De la vie que j'ai perdue. »

Il ne s'était pas rendu compte qu'il était sorti sur la terrasse en réfléchissant. Il s'avança sur la pelouse, balayant toutes les interdictions paternelles, et rejoignit la roseraie. Le parfum des fleurs commençait à s'ouvrir sous le soleil chaud. Il prit un pétale entre ses doigts et savoura sa douceur. Son cœur palpitait d'une souffrance très douce elle aussi. Granger était l'incarnation d'un monde qu'il n'atteindrait jamais. D'une expérience de la vie qui lui serait à tout jamais interdite. Il percevait la barrière qui les séparait, et il ne savait plus très bien si c'était lui ou le reste du monde qui l'avait érigée. Sans doute les deux. S'il décidait de la franchir, il y aurait tant d'ennemis qui estimeraient avoir leur mot à dire...

« Tu fais grand cas d'un pauvre bouquin qu'elle ne t'a même pas remis en personne. »

« Le Choixpeau... », songea Drago, interrompant son cynisme. « C'est le Choixpeau qui a dressé la barrière. A la seconde où il m'a envoyé à Serpentard, j'ai perdu Granger. J'ai perdu son monde. Tout espoir est mort ce jour-là pour moi. »

« Rentre à l'intérieur. L'escalier n'est qu'à quelques dizaines de mètres. Tu n'auras qu'à monter au cinquième étage, et de là, tu devrais pouvoir sauter sans te rater. »

Drago obéit. Mais dans un brusque accès de rage. Il voyait sa journée se profiler devant lui comme s'il l'avait déjà vécue, sa vie entière, en fait. L'ennui accentuait à chaque seconde le laser brûlant du regard d'Astoria, derrière la vitre de l'étage. S'il ne trouvait pas très vite quelque chose à faire, elle lui tomberait dessus comme un rapace.

Drago passa en coup de vent par sa chambre, saisit la sacoche et se réfugia dans la bibliothèque. Il se laissa tomber dans son fauteuil préféré et respira un grand coup.

Là, il se sentait en sécurité. La bibliothèque était sa seule amie. Depuis que la défaite lui avait fait se découvrir une passion pour la réflexion, il y avait trouvé refuge de nombreuses heures. Pour chercher des réponses aux questions qu'il se posait. Des explications sur la folie de ce monde, la sienne, celle de ses parents. Pour mettre des mots sur le tourbillon qu'il ressentait, et pour voir si quelque part, dans une autre vie, un autre lieu, entre les pages, il pouvait exister un espoir. Il n'en avait trouvé aucun. La connaissance l'avait coupé de ses illusions comme on équarrit les branches d'un arbre mort. Drago avait compris qu'il était trop tard, mais surtout, il avait eu une vision de l'avenir qui l'attendait. Son esprit ouvert, instruit, conscient, voyait l'Enfer qui l'attendait. Un Enfer de prévisibilité, d'autant plus terrible qu'il était inévitable. Il ne pouvait y échapper.

La bibliothèque, sa seule amie, lui avait révélé les verrous qui pesaient sur sa vie.

« Tu me donnes mal au crâne... Sors ce bouquin, qu'on ait enfin un peu de bonne littérature. »

Sa décision était prise, plus besoin de réfléchir. Peu importaient le pourquoi et le comment. Sa vie manquait cruellement d'inattendu. Alors, Drago saisit le livre de Granger entre ses doigts, et commença sa lecture.

Il plongea dans l'intrigue avec un scepticisme affiché. L'écriture ne lui plaisait pas. Au fur et à mesure des pages cependant, un phénomène étrange fit son chemin en lui. Une fascination malsaine, un petit point dérangeant aux frontières de sa conscience. Drago commença à entrevoir le cœur du problème. Des éléments trouvaient un écho en lui, des éléments que tout son être voulait repousser. Mais impossible de s'arrêter. La première moitié du roman avalée, la seconde moitié le happa, sans lui laisser aucune chance d'en réchapper. Drago dévora les cent dernières pages à un rythme frénétique, dans un état proche de la crispation, hystérique, les dents serrées, à bout de souffle. Il n'arrivait pas à croire à ce qu'il lisait. Et pourtant, l'auteur fut sans pitié : l'intrigue le précipita tout en bas, dans les limbes qu'il ne voulait pas affronter. Il en ressortit avec un profond sentiment de répulsion. Il haïssait ce livre. Il lui avait laissé une saveur huileuse sur la langue, une irritation dans les bronches, la peau, chacun de ses gestes, comme si on l'avait frotté avec du papier de verre. Et pourtant... un appel au fond de lui en demandait plus.

Pris d'un brusque frisson, Drago reposa le livre sur la table à côté de lui. Il laissa ses pensées dériver, trop étranges pour qu'il puisse les saisir.

« Qu'est-ce que tu m'as fait, Granger ? »

La porte s'ouvrit soudain, brisant ses réflexions :

– Oh, monsieur, excusez-nous... Je ne savais pas que vous étiez là.

C'était la gouvernante de son fils. Une vieille dame enveloppée, la soixantaine bien passée, de petits cheveux gris soigneusement bouclés sur son visage rond. Elle tenait la main à Scorpius, qui suçait son pouce d'un air interdit.

– Nous reviendrons plus tard. Allez viens, Scorpius.

Drago ne réagit pas. Il ne fit pas un geste, ne dit pas un mot. Son regard se fixa sur les étagères jusqu'à ce que la porte se referme. Alors seulement, il sentit la pression se faire plus forte. La solitude voulait lui imposer l'image de son fils, la pensée de son fils. Il la rejeta de toutes ses forces.

« Ça faisait une semaine que j'avais réussi à ne pas le voir... »

« Tu devais bien te douter que ça ne pouvait pas durer éternellement ».

« Si seulement... »

Cette idée contracta quelque chose en lui : de la culpabilité, de la terreur... Un jeu d'émotions complexes nouait ses stigmates en lui. Le parallèle se fit malgré lui : ce matin, il avait pensé à tout ce qu'incarnait Granger. Drago haïssait tout ce que Scorpius incarnait. Il lui hurlait sa capitulation et sa lâcheté ; il les projetait à la face du monde.

L'enfant de la reddition. Conçu uniquement par piété filiale.

L'héritier Malefoy.

Quelles conneries.

Toute cette rancœur dirigée vers un enfant de quatre ans... Drago parcourut la bibliothèque des yeux. Sa vieille amie avait raison. Il n'y avait plus aucun espoir pour lui.

Comme il s'y attendait, Granger se tenait postée à la sortie de la Salle du Recensement lundi au soir. Le weekend était passé, finalement. Drago avait survécu le reste du temps en s'enfermant dans la salle de bain pour boire du gin. Astoria avait frappé contre la porte au point d'y laisser son vernis à ongle, mais il s'en foutait. Le weekend était passé.

Drago s'avança vers Granger, muni de son air le plus impassible, et il lui tendit son livre :

– Tu as laissé tomber ça dans mes dossiers.

– Tu l'as lu ?

– Pas eu le temps.

Elle s'éclaira d'un sourire qui le stupéfia de malice :

– Bien sûr que si tu l'as lu !

– Non.

– Tu mens.

– Comment tu le sais ?

– Je le sais, c'est tout.

Drago plissa les yeux, et fit mine de s'en aller. Il fallait mettre un terme à toute cette histoire.

– Tu n'aurais pas un air aussi contrarié si tu ne l'avais pas lu, le poursuivit Granger.

Ces mots réveillèrent la flamme en lui. Peut-être pas la flamme, mais quelque chose. Quelque chose d'assez fort pour qu'il se mette en colère :

– Oui, Granger, ça m'a contrarié. Je ne sais pas ce qui t'a pris.

– Je me doutais que ça...

– Je suis Jack, n'est-ce pas ?

Drago ne savait pas d'où lui était venue cette réplique. Ou plutôt si, il savait. C'était le sentiment viscéral qui s'était glissé en lui alors qu'il lisait. Mais comment en était-il venu à franchir ses lèvres... Pourquoi avait-il sorti ça à Granger ?

« Pourquoi est-ce que je lui sors toujours tout ce qui me passe par la tête ? »

En face de lui, il vit que la jeune femme était touchée. Elle tendit la main et cette fois, elle lui pressa le bras :

– Allons discuter.

– Tu vas arrêter avec ça...

– Je veux juste savoir ce que tu as pensé du livre. Une conversation normale. Qu'est-ce que tu en dis ?

« Normale »... C'était ce mot qui faisait figure de magie désormais, dans sa vie. Ça ne pouvait que le séduire. Et Granger le savait. La garce.

Ils retournèrent dans ce café que Drago avait envie de surnommer le « café des horreurs ». Ou L'Enfer de Dante. Au choix. Ce qu'il s'infligeait valait bien les neuf cercles des damnés.

Cette fois, Granger ne lui laissa pas le choix : elle commanda un cappuccino pour eux deux. Comme s'il n'était pas déjà assez nerveux comme ça...

Mais visiblement, la boisson donnait du courage à Granger : après avoir bu deux ou trois gorgées, elle lui demanda d'une petite voix :

– Pourquoi tu as dit que tu étais Jack ?

– C'est évident, non ?

L'intrigue de Sa Majesté des Mouches s'imprimait en filigrane dans son esprit, sur sa vie. L'histoire était celle d'un groupe d'enfants entre six et douze ans, livrés à eux-mêmes sur une île à la suite d'un crash. Très tôt, un leader apparaissait, Ralph. Charismatique et intelligent, il organisait la survie sur l'île. Dans le roman, il incarnait la Raison.

Il se liait d'amitié avec un autre tempérament fort : Jack. Un autre charisme puissant. Deux forces qui au fil des pages en venaient à s'écarter, s'opposer, se haïr. Petit à petit, la superstition, la peur, les plus bas instincts primitifs envahissaient l'île, et Jack en était l'instigateur. Jack représentait la Violence, le pouvoir guerrier.

Les enfants se scindaient en deux groupes. Les disciples de Jack plongeaient dans une spirale de barbarie aveugle, oublieux de toute société, de tous droits, du bien et du mal, de leur condition même d'êtres humains.

A la fin du roman, les enfants s’entre-tuaient.

– Je me suis laissé entraîner par les événements sans réfléchir à ce qu'il m'arrivait..., murmura Drago.

Pourquoi avait-il les larmes aux yeux ?

– Jusqu'à ce que je n'ai plus le choix. Alors, j'ai compris mon erreur, et j'ai regretté. Je n'ai fait que ça depuis.

Il pressa une main contre ses yeux et regarda Granger :

– Mais avant ça, j'étais Jack. Je dirigeais ma horde, j'en étais conscient et j'étais fier de ça. J'adorais la violence, la peur et le respect que j'inspirais, le fait de me sentir supérieur... J'ai savouré tout ça. J'y croyais dur comme fer. Si mon père n'était pas tombé en disgrâce, si nous avions gagné... J'aurais pu sacrifier à toute cette folie et tous vous massacrer. Je ne saurai jamais ce que j'avais vraiment au fond de moi... Mais ce n'était pas bien.

Granger le dévisagea, et il crut lire la surprise dans ses yeux. Il ne la laissa pas parler :

– Ralph, c'est Potter. Potty le raisonnable. Potty qui sait quoi faire, et qui se plaint parce que personne ne l'écoute. Potty qui aurait évité le désastre si seulement on l'avait écouté. Seulement voilà, dans Sa Majesté des Mouches, c'est moi qui ai mené la danse. C'est Jack. Et Jack a tout détruit.

Granger secoua la tête :

– Malefoy... Ce n'est pas pour ça que je t'ai prêté ce livre. Je veux dire... Pas pour que tu le comprennes de cette façon.

Drago ne savait pas quoi répondre. Il attendait, sur la défensive. Granger soupira :

– Ce qui se passe dans ce roman est terrible. Mais ce n'est pas seulement dû aux personnalités, où aux choses qui s'y déroulent... C'est parce que ça arrive à des enfants. Malefoy, que tu sois Jack ou non, tu étais un enfant. Harry était un enfant. Comme moi, comme Ralph et Jack. Nous étions des enfants, qui avons été propulsés dans l'Enfer. Nous avons été livrés à nous-mêmes. Nous avons été seuls pour prendre nos décisions, pour sauver nos vies. Je t'ai fait lire ce livre pour que tu comprennes que dans une telle situation, il est normal que les événements t'aient échappé... C'est normal que tu aies fait des erreurs. L'essentiel, c'est que tu te sois retenu à temps. Que tu n'aies pas basculé. Tu n'as rien fait de mal, Malefoy !

Drago resta paralysé. « Tu n'as rien fait de mal, Malefoy ! »

Depuis douze ans... Depuis douze ans, c'était la première fois que quelqu'un lui disait cela.

Granger crispa les mains autour de sa tasse, et elle vrilla ses yeux dans les siens pour poursuivre :

– Nous n'aurions jamais dû subir ça ! Ce qui s'est passé nous a transformés, comme dans ce roman. Aucun de nous ne pouvait prévoir comment il allait tourner. Tout allait trop vite. Nous avons été confrontés à des choix qui nous dépassaient.

Malefoy ne comprenait pas ce qui l'aspirait. Les paroles de Granger l'hypnotisaient. Il n'était même pas sûr d'en saisir le sens, et pourtant, le roman se pliait à cet autre point de vue, et sa vie toute entière avec lui.

– Et toi, quel personnage es-tu, alors ? s'entendit-il demander.

« Question stupide... »

Si Granger fut surprise, elle ne le montra pas :

– Je suis Simon, dit-elle.

– Mais... Simon est le premier à se faire tuer par les autres.

– Je sais. Il est aussi le premier à comprendre la vérité. Et c'est pour ça qu'il meurt.

– Je ne comprends pas...

– J'ai perdu quelque chose, Malefoy. Pendant cette année... Quand j'ai dû effacer mon propre souvenir de la mémoire de mes parents... J'ai perdu quelque chose. Mon innocence, mes illusions. Ma foi en l'humanité, peut-être bien. Je n'ai pas subi le même destin que Simon, mais c'est le personnage que j'ai toujours préféré.

Drago baissa sur les yeux sur son café qu'il n'avait pas touché. Granger murmura doucement :

– A la fin, lorsque les secours arrivent, lorsque les adultes mettent enfin le pied sur l'île, juste à temps pour empêcher Jack et ses sauvages de tuer Ralph... Ce n'est pas vraiment la fin. On ne sait pas ce qu'il se passe après. Les adultes ont sauvé les enfants. Mais qui sauvera les adultes, Malefoy ?

Il eut l'impression que ses mots prenaient sens, enfin, en lui. Ils s'imprimaient comme une brûlure nette, vive et déchirante. Qu'était devenu Ralph après avoir vu ses amis se retourner contre lui, sombrer dans la folie collective au point de vouloir le transpercer à mort ? Et qu'était devenu Jack ? Qu'était devenu Jack après avoir régné sur un Enfer barbare, après avoir participé au massacre de Simon ?

Qu'était devenu Potter ? Lui arrivait-il encore de s'éveiller tard, la nuit, en songeant encore au Seigneur des Ténèbres ? Et lui, Drago Malefoy, qu'était-il devenu ?

– La guerre ne s'est pas terminée le jour où Voldemort est mort, Malefoy, dit Granger doucement. Pas pour nous. La mort de Voldemort nous a sauvés, c'est vrai, mais alors nous n'étions plus des enfants. Nous étions des adultes. Et personne n'est venu nous sauver. Encore aujourd'hui. Je vois Ron pleurer toutes les semaines sur la mort de son frère. Et ce n'est qu'une horreur parmi tant d'autres. C'est pareil pour toi. Peu importe le rôle que tu as tenu. Tu n'étais qu'un gosse. L'important, c'est ce qui s'est passé une fois que tout a été terminé. Lorsqu'il a fallu reprendre une vie normale... Mais tu n'étais plus normal. La guerre vit encore au fond de toi, au fond de moi. Personne ne viendra te sauver, Malefoy. Personne ne le peut. A part moi.

Les paroles de Granger laissèrent place à un long silence. Mais ce n'était pas un silence de rejet. Plutôt comme une communion. Drago but son café. Il fixait le vide, perdu dans les circonvolutions infinies que Granger avait éveillées. Lorsqu'il se leva, il insista pour payer et partit sans ajouter un mot.

Trois jours plus tard, il recevait un autre livre dans sa corbeille à dossiers.

« Expiation », de Ian McEwan. Un titre prometteur.

Tirant une feuille vierge d'un de ses tiroirs, Drago rédigea rapidement, de son écriture fine et serrée :

« Granger, arrête de me harceler. Cordialement, Malefoy. »

Il renvoya le tout au Ministère de la Justice où Granger travaillait.

Le soir même, un colis l'attendait sur le pas de sa porte. Il l'ouvrit, et tomba sur une vingtaine d'exemplaires du roman « Expiation », de Ian McEwan. Drago ne put se retenir de rire. Plus que ça, même : un fou rire. Il déplia la lettre glissée sur le dessus :

« Malefoy, n'y compte même pas. Avec l'expression de mes sentiments distingués, Granger. »

Il rit de plus belle. Finalement, il prit le carton sous son bras et rentra chez lui.

Les semaines s'écoulèrent. Les livres aussi : plus d'une dizaine. Cela prit du temps, mais un jour, Drago parcourut les rayons de sa vieille amie, la bibliothèque, et il choisit un livre lui aussi. Il l'empaqueta soigneusement et écrivit sur l'enveloppe : « Hermione Granger ».


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