Chapitre 12

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Quelques minutes plus tard, Kenny entendit Nathan ricaner derrière lui.

— « T’as vu ce raté encore ? Il va finir en camisole. J’me demande comment il fait pour pas déjà s’être foutu en l’air. »

Kenny avala difficilement sa salive, et malgré lui, répondit en forçant un rire :

— « Ouais… C’est clair. Il mérite que ça, de toute façon. »

Mais derrière eux, Archie avait tout entendu. Il s’était arrêté dans le couloir, un classeur contre sa poitrine. Le petit sourire qu’il avait osé esquisser plus tôt venait de disparaître, comme effacé par une main invisible. Ses yeux évitaient ceux de Kenny.

Toute la journée, Kenny tenta en vain de capter son regard. Il lui envoya un message via son compte anonyme : “Je suis désolé. Ce que j’ai dit… ce n’était pas vrai. Je te jure.”
Pas de réponse. Rien. Le silence comme seule punition.

Le soir, incapable d’attendre plus, il alla frapper chez Archie. Ce fut la mère d’Archie qui ouvrit.

— « Bonsoir, je… je suis un camarade de classe d’Archie. J’ai... euh… j’ai des trucs à lui rendre pour les cours. »

Elle sembla hésiter, puis lui sourit gentiment.
— « Bien sûr. Il est dans sa chambre, en haut à gauche. Monte. »

Kenny grimpa les escaliers, nerveux. Il frappa doucement. Aucune réponse. Il entra.

Archie était assis sur son lit, les genoux repliés, le regard fixé sur le mur.

— « Archie… »

Aucune réponse.

— « Je… j’ai pas pensé ce que j’ai dit à Nathan. J’te jure. C’est comme un réflexe, j’ai paniqué. Je veux pas qu’ils sachent, pas encore. »

Archie se décala un peu quand Kenny tenta de l’approcher.

— « Tu veux pas qu’ils sachent quoi ? Que t’es un peu humain, finalement ? »

Kenny baissa les yeux, blessé par la justesse des mots.

— « Tu crois que j’ai pas honte ? Que je pense pas à chaque fois que je t’ai insulté, rabaissé, bousculé… C’était pour oublier mon enfer à moi, Archie. Mais ça n’excuse rien. »

Un silence. Puis Archie murmura :

— « T’as détruit ma vie, Kenny. »

— « Et maintenant je veux réparer. Je sais que je peux pas tout changer d’un coup. Mais… je veux être là. Pour toi. Vraiment. »

Ils restèrent silencieux un moment. Puis Archie soupira et hocha doucement la tête. Comme un petit oui incertain. Suffisant.

En bas, la mère d’Archie appela :

— « Archie, Kenny ! À table ! »

Ils descendirent. L’ambiance était étrange, flottante. Mais les parents d’Archie étaient bienveillants, curieux.

— « Alors, Kenny, vous êtes dans la même classe depuis longtemps ? » demanda le père en servant du gratin.

Kenny hocha la tête.

— « Oui, depuis le collège… »

La mère le regarda avec tendresse.

— « C’est gentil de venir lui apporter ses cours. Archie ne parle pas souvent de ses amis. »

Archie faillit s’étouffer avec une bouchée. Kenny répondit, un peu nerveux :

— « Je crois qu’on commence à se parler, en fait. Vraiment. »

La conversation continua, un peu maladroite, mais sincère. Kenny observait Archie sous la lumière chaude de la cuisine familiale, ce cocon qu’il n’avait jamais connu chez lui. Et à ce moment-là, il se jura de le protéger. Cette fois pour de vrai.

Avec plaisir. Voici dix paragraphes pour développer la soirée après le dîner, centrés sur l’intimité, les hésitations, et le fragile rapprochement entre Kenny et Archie, maintenant seuls dans la chambre :

Après le repas, les parents d’Archie s’étaient retirés dans le salon, laissant les deux garçons monter à l’étage. Une fois dans la chambre, la porte doucement refermée, un silence dense s’installa. Kenny resta debout, les mains dans les poches, tandis qu’Archie s’assit au bord du lit, regard fuyant.

— « Tes parents sont vraiment sympas, » finit par dire Kenny, comme pour briser la glace.
Archie haussa simplement les épaules. Il ne savait pas quoi répondre à ça. Sa gorge était encore nouée.

Kenny s’approcha, hésitant. Il s’assit lentement à côté de lui, gardant une distance respectueuse. Le parquet grinça doucement sous leur poids combiné. Un instant passa. Puis un autre.

— « Archie... » murmura-t-il, tournant la tête vers lui, « ce que j’ai dit tout à l’heure... à Nathan... Je ne le pensais pas. J’étais juste... J’avais peur. »

— « Peur de quoi ? » demanda enfin Archie, la voix un peu cassée.

Kenny inspira profondément, fixant un point invisible sur le mur en face.

— « Peur qu’il devine que... je te soutiens. Peur qu’il me tourne le dos. Peur qu’il me traite comme il te traite. »
Il soupira. « Mais je me rends compte que c’est encore pire d’être lâche. Je veux pas... je veux pas continuer comme ça. »

Archie baissa les yeux vers ses mains, nerveusement croisées.
— « Tu m’as laissé entendre que j’étais un raté. Que je méritais tout ça. »
Sa voix se brisa. « Tu m’as tué à petit feu. Puis tu m’as empêché de mourir. Et maintenant tu veux quoi, exactement ? »

Kenny ne sut quoi répondre immédiatement. Il avait envie de le prendre dans ses bras, de lui dire qu’il était désolé cent fois. Mais il savait qu’Archie avait besoin de plus que des mots. Alors il parla doucement :

— « Je veux juste que tu me laisses réparer. Même un peu. J’ai pas le droit de te demander de me faire confiance... mais si tu me laisses une chance, juste une... je promets d’être là. Pour de vrai. »

Archie ne répondit pas. Mais il se laissa doucement tomber contre l’épaule de Kenny. Son cœur battait à tout rompre. Il ne savait pas ce que ça voulait dire, ni ce que ça deviendrait. Mais, ce soir, il avait besoin de quelqu’un. Et Kenny, malgré tout, restait là.

La nuit était tombée sur la chambre d’Archie, enveloppant les deux adolescents dans une lumière douce, tamisée par la lampe de chevet. Le silence entre eux était plus paisible maintenant, chargé d’une vulnérabilité partagée. Kenny s’était légèrement tourné vers Archie, les jambes croisées sur le lit, le regard un peu rêveur.

— « T’sais... j’ai jamais réussi à rester plus d’un mois avec une fille, » souffla-t-il avec un demi-sourire. « À chaque fois, j’avais l’impression de jouer un rôle, genre... c’était jamais naturel. »

Archie tourna doucement la tête vers lui, ses yeux curieux, mais prudents.

— « Et t’as essayé combien de fois ? »
— « Trois. Peut-être quatre si on compte Emma en quatrième, mais ça a duré une semaine alors bon... » Il rit doucement, mais le rire manquait de vraie joie. « C’est comme si je me forçais à aimer ce qu’on attendait de moi. »

Un silence flottant s’installa, avant qu’Archie ne lâche à voix basse :

— « Je sais même pas ce que j’aime, moi. »

Kenny le fixa, son expression s’adoucit, un peu plus sérieuse, un peu plus attentive.

— « Tu veux dire... Tu penses être gay ? » demanda-t-il avec prudence.

Archie hocha lentement la tête, avant de s’allonger en étoile de mer sur le lit, ses bras écartés comme s’il essayait de se délester du poids de cette vérité.

Kenny mit un moment à répondre. Il observait le plafond, ses doigts tripotant le bord du drap.

— « Comment tu l’as su ? » demanda-t-il finalement, presque en chuchotant.

— « Avec les filles... ça collait jamais. J’étais jamais à l’aise. Pas comme les autres gars qui se vantaient ou qui devenaient tout excités. Moi je me sentais vide. Et les garçons, ben... je les regardais. J’essayais de me convaincre que c’était normal, mais au fond, je crois que je savais. Depuis le collège. Peut-être avant. Mais c’est dur de le dire. »

Kenny acquiesça lentement. Il s’allongea à son tour, leurs épaules se frôlant presque. L’instant était fragile, suspendu dans l’intimité de cette chambre qui semblait soudain hors du temps.

— « Et... t’as un style de garçon ? » murmura Kenny, un petit sourire au coin des lèvres.

Archie resta silencieux. Il regardait le plafond, les joues légèrement rosées. Il ne répondit rien. Kenny sentit la gêne, et n’insista pas.

Ils restèrent allongés ainsi, le souffle calme, bercés par le murmure du vent contre la fenêtre. Aucun mot n’était nécessaire. C’était la première fois, peut-être, que tous deux se sentaient compris.

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