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Car il avait entendu la sorcière se vanter auprès de ses consœurs : sa potion, en plus de prodiguer aux mâles un attrait irrésistible auprès des femmes, leur donnait momentanément une force surhumaine.
Les barreaux de fer ne lui résistèrent pas longtemps, et il sortit enfin, triomphant, de la cage.
Pour faire bonne mesure et pour toutes les fois où elle s'était moquée de lui, il brisa les chaînes qui la maintenait au-dessus du feu, renversa la marmite et réduisit son couvercle en bouillie, s'assurant que jamais plus elle ne caquèterait ni ne sifflerait. Ainsi satisfait, Gédéon sentant déjà ses forces diminuer ne demanda pas son reste, renfila son pantalon, prit ses jambes à son cou, s'enfuit de l'horrible repaire de la sorcière et courut à perdre haleine vers son salut.
Ah, la liberté ! Le vent dans ses cheveux ! Le soleil sur sa peau ! Combien d'années était-il resté prisonnier ? Obligé de se soulager tous les matins, avec pour seule vision, cette vieille harpie qui couperait toute envie au plus ardent désir ? Forcé de regarder cette hideuse marmite avaler son fluide corporel avec une répugnante avidité ?
Il peinait à croire qu'il était enfin sorti de cet enfer !
Alors qu'il hurlait sa joie à pleins poumons, son euphorie fut stoppée net par un prodigieux coup dans le dos qui le projeta à plat ventre.
Se retournant douloureusement, Gédéon se retrouva face à face avec... la marmite. Utilisant les morceaux de chaîne comme des bras, elle baissa son pantalon, se hissa sur lui, et il sentit avec horreur qu'elle commençait à aspirer ses parties intimes. Il se débattit, hurla, mais elle ne s'arrêta pas.
Plus il frappait des poings sur son énorme corps de cuivre, plus elle aspirait, pompait, engloutissait, et tandis qu'elle l'avalait tout entier, la dernière pensée de Gédéon fut que tout de même, il n'avait fait que briser son couvercle et ne méritait pas une telle vengeance.
Il ignorait qu'elle aussi était prisonnière. Libre à son tour et suivant sa propre nature, la diabolique marmite avait choisi de suivre ses traces, par gourmandise, sans doute. Il ne le saurait jamais.
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