Chapitre 1

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Le dernier carton fut scellé avec un claquement sec, et Ethan se redressa, essuyant la sueur sur son front. Les rayons du soleil couchant baignaient l'appartement d'une lumière dorée, douce mais mélancolique, qui donnait à la pièce une atmosphère presque irréelle. Les murs nus, jadis couverts de photos et de souvenirs, semblaient maintenant plus petits, plus oppressants, comme si le lieu lui-même le poussait dehors.

Ethan jeta un coup d'œil autour de lui. Ce petit appartement avait été son refuge pendant des années, un endroit où il avait espéré échapper aux démons de son passé. Mais le temps était venu de partir. Sa nouvelle maison, une bâtisse ancienne à la périphérie de la ville, l'attendait. C'était une occasion de tourner la page, de commencer un nouveau chapitre de sa vie. Pourtant, une étrange appréhension s'insinuait en lui, un sentiment qu'il ne parvenait pas à secouer.

Il passa une main dans ses cheveux en bataille, ses doigts glissant sur ses mèches brunes humides de sueur. Chaque muscle de son corps protestait, endolori par la journée de déménagement. Il s'accroupit pour attraper une bouteille d'eau à moitié vide et prit une longue gorgée, savourant la fraîcheur du liquide sur sa gorge sèche.

Le silence régnait dans l'appartement déserté, seulement troublé par le bruit lointain de la circulation urbaine qui filtrait par la fenêtre entrouverte. Un léger courant d'air fit frémir les rideaux en lambeaux, leur mouvement spectral donnant une impression d'étrangeté à l'endroit. Ethan se sentit soudainement exposé, comme si quelque chose, ou quelqu'un, le regardait.

Alors qu'il se redressait, prêt à sortir pour charger le dernier carton dans sa voiture, un bruit retentit dans le couloir : trois coups secs frappés à la porte. Surpris, il hésita un instant avant d'aller ouvrir.

Lorsqu'il tira la porte, il se retrouva face à un homme d'une trentaine d'années, peut-être un peu plus âgé, avec un air sévère et un regard perçant qui semblait voir au-delà des apparences. Il était grand et mince, avec des cheveux bruns coupés court et des traits marqués par une vie manifestement rude. Il portait une veste en cuir noir usée par le temps et des bottes qui laissaient supposer qu'il passait beaucoup de temps à marcher. Ses yeux, d'un gris acier, scrutaient Ethan avec une intensité troublante.

  • « Salut, je suis Thomas, ton voisin du dessus, » dit-il d'un ton direct, sa voix grave résonnant dans l'espace vide. « J'ai vu que tu déménages, alors je me suis dit que je passerais te dire au revoir. »

Ethan hocha la tête, encore surpris par cette visite inattendue. Thomas ne lui avait jamais vraiment parlé auparavant, à part pour les salutations de routine dans l'escalier.

  • « Oui, c'est exact. Besoin de quelque chose ? »

Thomas sembla hésiter un instant, ses yeux balayant la pièce comme s'il cherchait quelque chose à dire. Ethan remarqua que l'homme paraissait tendu, presque nerveux, ses mains se crispant légèrement sur les poches de sa veste. Il avait l’air de quelqu’un qui portait un poids invisible, une charge que seuls ceux qui savent peuvent reconnaître.

  • « Écoute, je sais que ça peut paraître bizarre, mais la maison où tu vas... Fais attention. » Les mots de Thomas étaient lourds de sous-entendus, et il les prononça avec une lenteur calculée. Ses yeux se durcirent, et il baissa la voix, comme pour éviter d'être entendu par quelqu'un d'autre. « Il y a des choses que les gens préfèrent ne pas mentionner. Des trucs qu'ils essaient d'oublier. »

Ethan fronça les sourcils, ses instincts de journaliste prenant le dessus.

  • « Des choses comme quoi ? »

Mais Thomas ne répondit pas immédiatement. Son regard se détourna légèrement, comme s'il évaluait les conséquences de ce qu'il pourrait dire. Ethan pouvait presque voir la bataille intérieure que l'homme menait, partagé entre l'envie de parler et la crainte de ce que cela impliquerait.

Après un silence qui sembla durer une éternité, Thomas secoua la tête, abandonnant visiblement l'idée de partager ce qui le troublait. Son expression se referma, devenant indéchiffrable.

  • « Oublie ça. Tu verras par toi-même, » dit-il finalement, son ton redevenu neutre. Il fit un pas en arrière, déjà prêt à s'éclipser. « Juste... sois prudent. »

Et sans un mot de plus, Thomas tourna les talons et s’éloigna rapidement, ses pas résonnant dans le couloir désert. Ethan resta figé sur le seuil, le regard fixé sur la silhouette qui disparaissait dans l'ombre. Les paroles de son voisin résonnaient dans son esprit, amplifiées par le silence de l'appartement.

Il ferma doucement la porte derrière lui, le claquement du verrou brisant le calme pesant. De retour dans le salon, il sentit une étrange froideur l’envahir, un frisson inexplicable qui lui parcourut l’échine. Il haussa les épaules, chassant cette impression. Après tout, il n’avait jamais été du genre à croire aux histoires de fantômes ou aux superstitions locales. Pourtant, il ne pouvait ignorer le malaise qui s'était installé en lui, une sorte de pressentiment diffus qu’il n’avait jamais ressenti auparavant.

Ethan poussa un soupir, essayant de se concentrer sur les tâches à accomplir. Il attrapa le dernier carton et le souleva avec précaution, sentant le poids familier des objets qu'il contenait : des livres, des dossiers, et une vieille lampe de bureau qu'il traînait de déménagement en déménagement. Il jeta un dernier coup d'œil à l'appartement vide, se demandant s'il n'avait pas laissé quelque chose derrière lui. Mais non, tout était en ordre, prêt pour un nouveau départ.

Lorsqu'il sortit de l'immeuble, la lumière du jour déclinait rapidement, plongeant la rue dans une pénombre incertaine. Les lampadaires s’allumaient progressivement, projetant des halos jaunes sur le trottoir, tandis que les ombres s’allongeaient. Le vent s’était levé, faisant bruisser les feuilles des arbres le long de l’avenue. La ville semblait changer de visage à mesure que la nuit approchait, passant de l’agitation diurne à un calme presque inquiétant.

Ethan ouvrit le coffre de sa voiture, une vieille berline qui avait vu des jours meilleurs, et y déposa le carton avec précaution. Alors qu'il refermait le coffre, il jeta un regard vers l'immeuble qu'il quittait. Les fenêtres noircies par l'ombre le fixaient comme des yeux, et il se demanda brièvement ce que Thomas avait voulu dire. Avait-il juste voulu l’effrayer, ou y avait-il vraiment quelque chose dont il fallait se méfier ?

Les rumeurs autour de sa nouvelle maison lui revinrent en mémoire. Des bruits étranges, des apparitions fugaces... Il avait entendu quelques commérages à ce sujet, mais il n'y avait jamais prêté attention. Des histoires de vieux fous, des légendes urbaines que les gens aiment se raconter pour rendre leur vie plus excitante, se disait-il. Mais maintenant, les mots de Thomas ajoutaient un poids à ces histoires, les rendant soudainement plus tangibles, plus menaçantes.

Secouant la tête pour se débarrasser de ces pensées, Ethan s'installa derrière le volant. Le moteur rugit lorsqu'il tourna la clé, brisant le silence qui l'entourait. Il inspira profondément, essayant de se convaincre que tout irait bien. Ce déménagement, cette nouvelle maison, tout cela était censé être un nouveau départ, une chance de se reconstruire.

Il mit la voiture en marche et s'engagea dans la rue, ses phares perçant l'obscurité croissante. Alors qu'il roulait vers sa nouvelle maison, un sentiment d'appréhension lui nouait l'estomac. Il ne pouvait s'empêcher de penser aux paroles de Thomas, à ce regard intense qui semblait en dire bien plus que les mots prononcés.

Mais Ethan se força à se concentrer sur la route. Ce n'était qu'une maison, après tout. Et quoi qu'il trouve là-bas, il était certain qu'il pourrait y faire face. Il l'avait fait tant de fois auparavant, avec des situations bien plus dangereuses. Cependant, une petite voix au fond de lui ne cessait de murmurer que cette fois, les choses pourraient être différentes.

Alors qu'il s'éloignait de son ancien quartier, le soleil disparut complètement derrière l'horizon, laissant place à une nuit profonde et enveloppante. La route devant lui semblait s'étendre à l'infini, un ruban noir conduisant vers l'inconnu. Il ne pouvait pas savoir à ce moment-là que ce déménagement serait le début de quelque chose qu'il n'aurait jamais pu imaginer. Quelque chose qui allait changer sa vie à jamais. Et tandis qu'il conduisait, les ombres de la nuit semblaient se rapprocher, comme si elles attendaient patiemment de le rencontrer dans cet endroit qu'il allait bientôt appeler « chez lui ».

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