Feu de camp
Il fallut deux bonnes heures à Vaati pour rassembler des branches et ranger des pierres en un petit cercle. Il avait plu la veille, et trouver du bois sec relevait presque du miracle.
Il aurait suffi d’une petite étincelle pour enflammer les brindilles.
Vaati avait suffisamment d’énergie pour tenter un sort de feu.
Mais il n’y tenait pas.
Après la mort de Lyana, il s’était juré de ne plus jamais utiliser de sorts de feu. Jamais, même si sa vie en dépendait.
Le froid lui mordait les mains, les jambes, et même le visage. S’il ne faisait rien, il allait mourir gelé.
Le soleil se couchait derrière les hautes montagnes du nord d’Hyrule.
La fin d’une promesse ou la fin de sa vie ?
L’ombre s’abattant brusquement sur lui le fit se décider. Ce n'était qu'une promesse d'enfant, de celles qu'on fait en croyant que l'on aura même jamais l'occasion de la trahir. Il n'avait pas le choix.
Vaati se pencha près du tas de bois et, d’un claquement de doigts, tenta d’y mettre le feu.
Ses mains tremblaient. Au premier essai, il échoua. Le second ne fut pas plus fructueux. À la troisième tentative, le feu prit enfin.
— Ouah ! s’émerveilla quelqu’un derrière lui.
Il se retourna et croisa le regard d’un gamin miséreux presque caricatural. Perché sur une béquille de bois, habillé seulement d’une tunique de toile, il avait les cheveux couleur de paille et le nez rougi par le rhume. Il ne devait pas avoir plus de sept ou huit ans.
— Mais qu’est-ce que tu fais là ? demanda Vaati, essayant de prendre un ton rassurant.
— Ils me laissent pas entrer !
— Mais pourquoi ? Un enfant seul, ça…
— Ils veulent garder les étrangers et les mendiants dehors pour le festival ! Moi, j’ai jamais pu aller à la fête des Minish.
— Où sont tes parents ? Tu as quelqu’un qui s’occupe de toi ?
Le gamin haussa les épaules, l’air de s’en fiche pas mal.
Un enfant laissé seul, dans le froid, sans personne. Vaati retint un juron, à grand-peine. La cruauté des humains n’avait donc aucune limite ?
— Bon, alors approche. Ça me fera de la compagnie…
Le petit ne se le fit pas dire deux fois.
— Et toi, pourquoi t’es là ? Ils t’ont pas laissé entrer ?
— Non, ils ont dit que j’étais un shei… sheika ? hésita Vaati. Ce que c’est ? Aucune idée. Mais, attends… la fête des Minish… c’est quoi ?
Le petit mendiant sourit, les yeux mouillés, mais pleins d’étoiles.
— Une grande fête qu’ils organisent chaque année, au début du printemps. Y’a même un tournoi, et il paraît que le gagnant peut voir le cadeau des Minish aux humains !
— Le cadeau des Minish ? Et où est-il ?
— Dans le coffre scellé, mais y’a que le gagnant du tournoi et la famille royale qui peuvent le voir.
Vaati acquiesça, sûr de lui. S’il réussissait à reprendre le chapeau, ce n’était pas ce tournoi qui allait l’arrêter.
Demain, au lever du soleil, il serait assez en forme pour passer par-dessus les murailles.
Il se saisit du sac de noix qu’il avait emporté avec lui et en croqua quelques-unes. Puis il tendit le sac au petit.
Ce n’était presque rien, autant le partager,
— Demain, quand tu te réveilleras, je serai déjà parti, expliqua le Minish.
— Alors, au revoir.
— Au revoir.
Puis l’enfant s’endormit et Vaati, attendri, ne tarda pas à faire de même.
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