Crise du logement
Monsieur K regardait Catherine : la belle brunette portait une jupe encore plus courte que d'habitude.
Il interpréta le doux sourire de la jeune femme comme un bon signe :
- Vous pensez que ?
- Votre note sera changée ?
- C'est cela !
- C'est le cas, vous perdez deux points .
Le quinquagénaire se recroquevilla dans son fauteuil :
- Ce n'est pas possible ?
- Pourquoi donc ?
- Il doit y avoir une erreur.
- Je vais reprendre votre dossier
Monsieur K lorgna vers le décolleté de Catherine, il n'aimait guère les petites poitrines, mais elle avait, de façon assez étrange, choisi de mettre ses formes en valeur.
- Revenons au départ.
- Si vous le souhaitez.
- En 2016, vous aviez émis des réserves sur la mise en place du fichier numérique universel, pourquoi ?
- En fait, à l'époque, je craignais un recul des libertés individuelles.
- Et c'était une erreur, la société pouvait ainsi mieux contribuer à notre sécurité.
- Oui, c'est la bonne réponse …
- En 2018, vous avez signé une pétition en ligne contre la mise en place d'une notation individualisée universelle, pourquoi ?
- Pour les mêmes raisons : je pensais que le but était d'introduire une hiérarchie, une méritocratie.
- Ce qui n'était pas totalement faux ?
- Oui, mais à l'époque, je n'avais pas compris que le gouvernement voulait notre bien, à tous.
- Oui, c'est la bonne réponse …
- En 2019, vous avez manifesté contre l'attribution d'avantages et de droits , en fonction de la note obtenue, lors de l'évaluation individuelle, pourquoi ?
- Je craignais la victoire de l'injustice et de l'arbitraire.
- Et, en réalité ?
- En fait, je n'avais pas compris que ce système de punitions et de récompenses permettrait de donner à chacun ce qu'il méritait d'avoir, en fonction de son engagement au service du Bien Commun.
- Oui, c'est la bonne réponse …
- Je vous en supplie, Madame, ne baissez pas ma note, par pitié !
- Oui, c'est la bonne réponse …
L'homme en costume noir pleurait à chaudes larmes.
Catherine vint s'asseoir à côté de lui, elle lui prit la main et la caressa.
Il sentait l'odeur entêtante de son parfum :
- Allons, ne pleurez pas !
- Deux points !
- Oui deux points : de 98 à 96 .
- Les droits universitaires des enfants vont doubler.
- C'est exact !
- Dites moi ce que je dois faire.
Catherine se rapprocha de monsieur K, elle commença par caresser son genou, puis lentement remonta vers l'entrecuisse.
- Vous donnez toutes les bonnes réponses.
- Oui, madame.
- Ce n'est pas normal, il y a toujours des réserves, des doutes.
- Oui, madame.
- Votre femme est absente, demain ?
- Oui, Madame.
- Je viendrai , nous trouverons vos légers points de divergence.
- Et ?
- Nous passerons un moment agréable, ensemble.
Rouge, suffoquant, l'homme quitta la pièce, Catherine lui dit « à demain ».
Elle se retrouva seule et prit l'appel de son supérieur :
- Alors ?
- Cela a marché !
- Oui, j'ai vu . Vous pensez que ...
- Oui, entre la carotte et le bâton , il va parler.
- C'est bien : j'en ai assez de tous ces hypocrites qui nous ont dénigrés avant de faire semblant d'accepter toutes les mesures gouvernementales.
- Et vous me donnerez ?
- Tous les points qu'il perdra !
- Je me dévoue corps et âme .
- Corps , surtout ?
- Avec ce vieux , gros, myope, il faut de la sainteté !
Tous les deux éclatèrent de rire ;
Catherine resta seule, songeuse . Si elle arrivait à bien lui tirer les vers du nez, elle pourrait récupérer 10 points.
10 points ! Enfin , elle aurait son appartement parisien de 3 mètres carrés.
Une pensée, politiquement incorrecte lui traversa l'esprit : contrairement à ce que racontait la propagande gouvernementale, elle ne s'arrangeait guère cette crise du logement ...
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