Julie : sept heures.
L’allégorie souriait à Julie. La douce blonde était fascinée par la pureté des lignes de la jeune femme qui l’invitait à s’approcher d’elle. Le visage fermé, le regard condescendant, voire ironique avait laissé place à ce que la jeune fille pouvait considérer, sans hésitation, comme le plus tendre sourire du monde.
Julie soupira :
— Ô Marie.
— Mais comment connais-tu mon nom , on me nomme juste l’Allégorie ?
— Ton voile bleu, ta grenade et ta beauté virginale ne sauraient me tromper.
— Pourtant je ne suis pas réelle ? demanda Marie.
— Tu es bien plus réelle que tout ce qui m’entoure.
— Et désirable ?
— Je n’osais te le dire. Puis-je mettre ta beauté à l’épreuve ?murmura Julie.
— Si tu oses …
Julie ne répondit pas mais donna et reçut le plus tendre des baisers.
Soudain Marie se mit à rire :
— Tu devais avoir honte !
— Pour un simple baiser? minauda Julie.
— Non pour ta tenue !
Julie se rendit compte qu’elle était nue, entièrement nue.E lle se mit à rire et laissa la déesse explorer son corps. Le désir envahissait la jeune fille, elle avait le sentiment de sombrer dans le vice, de jouir du Mal.
Grisée, elle laissa ses lèvres glisser vers le foulard qui cachait le sein de Marie.
L’Allégorie la repoussa :
— Tu n’as pas honte ?
— Mais, toi tu…
— Si tu continues ainsi, ma fille, tu seras damnée pour l’éternité ! Rétorqua Marie.
Terrorisée Julie vit l’Allégorie grandir, encore et encore. Non, c’était elle Julie, qui, telle Alice, rétrécissait.
Marie devint immense et menaçante :
— Petite Julie, je vais te manger !
— Mais pourquoi? supplia la petite Julie.
— Car tes lèvres m’ont ouvert l’appétit !
— Non , non, non noooooooooooooon! hurla Julie.
Julie se réveilla, en sursaut, couverte de sueur.
Elle chercha Ozu du regard, puis se rappela que son petit ami était rentré au Japon, dès le début de la pandémie.
Elle songea à téléphoner à son frère Jules, mais à sept heures du matin, il devait encore dormir.
Julie se regarda dans le miroir, certes il y avait une lueur d’angoisse dans ses yeux, mais le reflet était plutôt flatteur : une jolie blonde aux yeux bleus, âgée de vingt-deux ans.
Sa terreur reculait, elle retrouvait son visage habituel : souriant, espiègle,avec des lèvres sensuelles prêtes à croquer la vie par les deux bouts.
Jules avait dû écrire un haïku sur le site littéraire.
Elle lut :
Terreur de la nuit
a pour but de te donner
clef de ta folie.
Julie fit une grimace et se rappela qu’elle devait aller au resto aujourd’hui.
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