Harold tira la questions suivante.

• Tu vas partir à l’autre bout du monde. Que représente pour toi le voyage ?
  Et oui, ça y est j’ai pris mes billets ! Dans deux mois je serai du côté de Vancouver. J’ai hâte de partir.
  Je t’avoue que quelques fois cela me stresse. Mais c’est une expérience que je dois faire et si j’ai un problème je pourrais toujours rentrer, j’ai un billet open pour le retour.
  J’ai toujours rêvé de voyager.
  Quand j’étais petit, parfois mon grand père m’emmenait avec lui visiter des endroits où il devait traiter une affaire. C’est avec lui que j’ai vu pour la première fois la mer. Je m’en souviendrai toujours. A chaque fois, il me faisait découvrir des lieux, des bâtiments ou des gens que je n’aurais pas pu imaginer en restant près de chez mes parents.
  J’ai adoré cela et j’ai toujours rêvé de partir pour un grand voyage.
  Il y a quelques années je suis parti avec ma copine en stop en Italie. Ce fut génial sur tous les points.
  Cette fois c’est différent, je pars seul et il va falloir que je gagne ma vie sur place. Je sais que cela ne va pas être évident, mais je suis sûr que je vais beaucoup apprendre et qu'après cette expérience, je serai plus à même de développer mes propres projets.
  Sinon, la musique me fait aussi voyager. Après une soirée, à vibrer dans les décibels et me laisser entrainer par des rythmes qui semblent venus d’ailleurs, je me sens dans un autre monde. C’est pour cela que j'aime tant la musique. Même si certains lundis sont difficiles après des raves géniales.
  Si tu veux je pourrais te faire passer des titres, mais je ne suis pas sûr que tu aimes.
  Il y a aussi les joints, mais c’est un autre type de voyage. On n’en sort pas souvent grandi. Je me suis fait peur plusieurs fois, aussi je limite ma consommation à de l’herbe dont je connais la provenance. Quant à l’alcool, je n’aime pas trop en abuser.
  Mais pour revenir aux vrais voyages, j’en attends des surprises, des découvertes, y compris, et peut-être surtout, sur moi-même.
  Et puis aussi j’en ai marre de végéter ici et même si ce voyage présentera probablement des difficultés, j’ai vraiment envie de tenter le coup et de prouver que je peux le faire.

Pour sa part, Philippe n’était pas très attiré par les raves parties et la musique qu’il leurs associait ne correspondait pas vraiment à ses goûts qui étaient plutôt orientés vers le jazz. Il avait participé à plusieurs grands festivals et se souvenait notamment de concerts mémorables de Sonny Rollins, de Santana et même du grand Ray Charles. Quant à la drogue, même s’il avait plusieurs fois eu l’occasion d’y goûter, il en était toujours resté éloigné de peur de perdre le contrôle de lui-même.

Par contre il se considérait comme un grand voyageur et lui-même avait fait une expérience de travail dans un pays lointain. Il avait trouvé cette période de sa vie géniale et il considérait qu’elle lui avait permis de relativiser beaucoup des difficultés et épreuves qu’il avait eu à affronter par la suite. Un bon nombre des ornements qui décoraient son salon venait de ce pays. Durant de nombreuses années, il s’était offert, seul ou en famille, un voyage annuel ce qui lui avait permis de découvrir de nombreuses contrées aux quatre coins du monde, mais, alors qu'il avait silloné le Québec, il ne connaissait pas l’ouest canadien. Evitant les grands circuits touristiques, il avait, à chaque fois, rencontré des gens extraordinaires et ils en gardaient des souvenirs intenses. Mais chaque voyage avait aussi conforté son opinion que la France était un pays formidable. Il souhaitait à Harold de pouvoir aussi faire ces expériences.

Durant certains de ses voyages, il avait aussi connu quelques péripéties un peu pénibles, mais à chaque fois il s’en était sorti sans conséquences. Il pensait que Harold aurait, lui aussi les moyens de se tirer de quelques mauvais pas. Du moins, il l’espérait.

Leurs verres étant vides, l'arcitecte se leva pour les remplir. En revenant, il s’assit naturellement aux côtés de Harold.