Chapitre 37 : "Oeufs sur le plat"

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La journée qui suivit passa à une allure d’escargot, les membres du groupe tous très fatigués de s’être trop amusés la veille.

Alex et Sky avaient combattu toute la matinée contre leur gueule de bois, tandis que Loyd se voulait frais comme un pinson d'avoir été raisonnable. Pour certains, plus que d’autres, l’après-midi tarda donc à arriver, les filles baillant derrière leur banc. Laure ne fit pas exception. Simplement, elle le fit avec plus d’élégance que sa voisine de classe. Lorsqu’elle fut surprise à ne pas se couvrir la bouche par Sky, Kimi la referma immédiatement, créant une situation où ils sourirent tous les deux de leur côté, une fois retournés.

Seule Nice était bien éveillée, vive et aux aguets, en compagnie de Selim. Si bien qu’à la dernière pause, elle sursauta lorsque Loyd l’interpella.

  • Tu peux venir avec moi un moment ? lui demanda-t-il en l’appelant de son doigt.
  • Euh oui… répondit-elle en jetant un œil à son amoureux qui lui fit signe d’y aller d’un mouvement de tête.

Le suivant, elle vit que Selim garda un œil sur eux jusqu’à ce qu’ils s’éclipsent. Loyd l’avait amenée au même endroit où ils avaient discutés avec Sky.

  • Tu voulais quelque chose ? demanda-t-elle timidement.
  • Oui, hum… se râcla-t-il la gorge. Tu sais qu’on a passé la soirée ensemble avec les garçons et donc, qu’avec Selim, nous avons plus ou moins mis les choses à plat.
  • Il m’a dit, oui…
  • Seulement, voilà… Tu mérites des excuses aussi. Nice, je… je suis désolé. Tu m’as épaulé quand ça n’allait pas et je t’ai fait quelque chose qui… Je n’aurais jamais dû, déclara-t-il dans une courbette.

Touchée de son geste, Nice l’obligea à remonter la tête.

  • Je ne veux pas que ce bisou change quelque chose entre nous deux ! J’apprécie beaucoup les moments qu’on passe ensemble au sein du conseil, je… pour moi, tu es devenue une confidente et… rougit-il presque. J’espère que nous pourrons continuer à être amis comme avant…
  • Loyd, lui sourit-elle doucement. Je suis la première à savoir que tu ne voulais pas m’embrasser, répondit-elle avec beaucoup de maturité. C’est vrai que… c’est un peu étrange, mais, tu comptes aussi pour moi, alors tout va bien.
  • Merci… souffla-t-il tristement.

Elle vit à sa posture et à son regard qu’il était sincèrement désolé. Puis, comme piqué par une mouche, il releva les épaules et inspira un grand coup, claquant ensuite dans ses mains.

  • Mais je dois aussi te parler de quelque chose d'autre !
  • Oui, je… dis-moi ? sursauta-t-elle.
  • Tu sais que la prochaine étape, c’est de préparer le voyage au ski ?
  • Ah oui, nous en avons discuté à la dernière réunion…
  • À la prochaine, nous nous répartirons les tâches et, à ce propos, j’aimerais te demander une faveur.

***

Toute guillerette, Nice revint de sa discussion avec Loyd presque en sautillant. Lorsqu’elle se planta à côté de Selim, ce dernier la regarda d’un air louche.

  • Alors, il te voulait quoi ? demanda-t-il avec une légère appréhension dans la voix.
  • Il s’est excusé, lui répondit-elle, toute souriante.
  • C’est tout ? Pourquoi tu as l’air de meilleure humeur ? continua-t-il de l’interroger en venant fourrer son nez dans son cou pour la chatouiller.
  • Mais pour rien, gloussa-t-elle.

Lorsqu’il déposa un baiser sur son épaule, elle repensa aux conseils que les filles lui avaient donné : “Prends les devants !”. D’un air très déterminé, elle le fixa de ses petites prunelles noisette au point de le déstabiliser.

  • Tu agis bizarrement, toi, rit-il en finissant par admirer son joli minois. Tu magouilles quelque chose ? fit-il ensuite, son instinct sonnant l’alerte.
  • Non, pas du tout ! En fait, hum, hésita-t-elle un instant. J’ai envie que tu fasses dodo avec moi cette nuit, tu veux bien ? lui demanda-t-elle d’une bouille si adorable que Selim fondit immédiatement.
  • Pas de problème, répondit-il en lui collant cette fois un baiser sur la joue.

***

Au soir, lorsqu’ils arrivèrent dans la chambre, Nice attrapa immédiatement la main de Selim, à sa grande surprise, et le tira jusqu’au lit où elle s’assit formellement, sur les talons. D’un air très sérieux, elle le fixa droit dans les yeux, rendant son petit-ami nerveux. Il eut l’impression d’avoir fait une bêtise.

  • Qu’est-ce... qu'il y a ? demanda-t-il, déstabilisé.
  • J’aimerais te parler de quelque chose… commença-t-elle, d’une voix à la fois ferme et gênée.
  • Euh, oui… Vas-y… Tu me fais stresser, purée, fit-il en déposant une main sur son torse.
  • Moi aussi, je stresse, avoua-t-elle finalement.
  • Mais pourquoi ?! s’interloqua-t-il, encore plus anxieux.
  • Parce que je… j’aimerais qu’on le fasse !! explosa-t-elle d’avoir rassemblé tout son courage.

Inerte, Selim cligna des yeux.

  • Hein ? lâcha-t-il ensuite, n’étant pas certain d’avoir compris ou du moins n’osant pas le croire.
  • L’amour… rougit-elle en enfonçant sa tête dans ses épaules, les lèvres pincées.
  • Hein ? répéta-t-il, cette fois en rougissant graduellement, tel un thermomètre qui aurait pris un coup de chaleur. Attends… Euh… Faire l’amour ? clarifia-t-il, déglutissant.
  • Ne me fais pas répéter ! s’écria-t-elle en baissant la tête cette fois.
  • Mais… Oui, ok…

Il fut déstabilisé lorsque Nice remonta son regard dans le sien et sortit du lit, parce qu’il ne tenait plus en place, les jambes tremblantes.

  • Enfin, je veux dire… se couvrit-il la bouche, tout rouge. Quand… ? Et…
  • Maintenant ? répondit-elle en lui faisant la moue.
  • Maintenant ?! cria-t-il en se rattrapant de ses deux mains au lit, son visage rapproché du sien.
  • Tu ne veux pas ? le fit-elle craquer à nouveau avec sa bouille demandeuse et pas rassurée.
  • Si ! Je suis juste… étonné, je ne savais pas que tu y pensais et c’est… Pourquoi tout d’un coup ? la questionna-t-il rapidement, entre l’excitation et l’incompréhension.
  • Ça fait un moment qu’on est ensemble, se mit-elle à bouder. Je pensais que tu voudrais…
  • Mais je le veux ! s’exclama-t-il en enfuyant ses prunelles dans les siennes. Je suis juste surpris, s’assit-il ensuite à ses côtés. Hum…

Selim réfléchit un instant au fait d’avoir le matériel nécessaire : préservatifs dans le portefeuille, lubrifiant et mouchoirs dans le tiroir, il avait juste besoin de sentir la rose pour sa dulcinée. Le silence naissant le poussa à se calmer, à agir comme un “homme”, il devait assurer. Profitant de leur proximité, il s’assura également qu’elle était sûre d’elle. Sur son petit visage moins pâle que d’habitude, il la trouva dans l’attente et un peu agitée. Lorsque leur regards se croisèrent, la proposition devint davantage concrète, l’atmosphère s’épaississant. Selim voulu la mettre à l’aise.

  • Tu as pris une douche ? lui demanda-t-il en constatant qu’elle sentait le shampooing.
  • Oui, je… je me suis un peu préparée… Au cas où, déclara-t-elle en remettant timidement une mèche noire derrière son oreille.

En train de péter un plomb dans sa tête, Selim sauta sur ses deux pieds et encadra son visage de ses mains avant de l’embrasser.

  • J’ai besoin de me laver, donc… Hum, met toi à l’aise…
  • Je n’ai pas pris de pyjama, le coupa-t-elle pour lui provoquer un nouveau foudroiement, l’obligeant à se contenir pour ne pas mourir d’une crise cardiaque.
  • Sers-toi dans mes affaires, j’arrive, fit-il en déposant un nouveau baiser sur ses jolies lèvres roses.

Pendant que Selim passait sous la douche, récurant chaque partie de son corps, Nice se retrouva déstabilisée, ne sachant où l’attendre, ni dans quel accoutrement. Elle fouilla dans sa garde-robe pour trouver un t-shirt large, puis se déshabilla pour l’enfiler au-dessus d’un mignon ensemble de lingerie bleu pastel. Elle se faufila dans les draps, le stress montant de plus en plus pensant à de nombreux “et si”...

Et si elle ne lui plaisait pas ? Et si ça ne fonctionnait pas ? Et si elle avait mal ?

À se faire du mouron, le temps fila à toute vitesse. Elle sursauta en entendant le claquement de la porte de la salle de bain. Selim en sortit, frais, mais bouillonnant, dans un short sous lequel il ne portait rien. Il voulait que tout se déroule de manière fluide. En tombant sur la forme au milieu de son entrejambe, Nice releva la couverture jusqu’au-dessus de son nez. Grimpant doucement sur le lit, Selim s’assura à nouveau qu’elle en avait toujours envie.

  • Tu es certaine… ?
  • Oui ! s’exclama-t-elle, recroquevillée au fond du lit, hochant frénétiquement la tête.

Un doux sourire égaya la frimousse de Selim, plus qu’heureux de voir du désir dans ses yeux. Nice, attendant qu’il fasse un pas devint encore plus anxieuse quand il se passa un long temps où ils ne firent que se regarder bêtement.

Qu’est-ce qu’il attendait ?

Courageusement, Selim rassemblait toute son énergie pour entamer les choses. Il monta alors jusqu’à elle pour l’embrasser délicatement, son cœur éclatant sous son torse. Nice sentit qu’il ne le faisait pas comme d’habitude, plus tendre, plus profondément, en caressant ses mâchoires de ses pouces, pour ensuite les glisser sur ses bras. Elle eut une première bouffée de chaleur quand il déposa des gentils baisers dans son cou, découvrant le drap qui l’aidait à se cacher. Nerveusement, mais à son rythme, il entama un voyage de caresses sous son t-shirt avant de lui ôter une fois qu’elle fut en totale confiance. Il osa à peine la regarder, collant son front au sien. De la voir pour la première fois en sous-vêtements, il pensa qu’une si belle chose, qu’un tel bonheur, ne devrait pas exister. Tout de feu, Selim ressentit une énorme pression à l’idée de passer à l’étape supérieure. La surplombant, il retira son haut également et dut se calmer quelque peu. Lorsqu’il passa ses mains sous son dos, jouant avec les agrafes de son soutien, il vit qu’elle n’était pas totalement à l’aise.

Ce moment d’hésitation poussa Nice à l’attraper par les avants-bras et à le renverser pour le chevaucher. Ce fut facile, car il ne s’y était pas du tout attendu. La vision qu’elle lui offrait le rendit complétement fou, couvrant ses yeux de ses mains, en laissant une petite ouverture.

  • Hum, Nice… Euh… C’est chouette, mais… balbutia-t-il alors qu’un volcan grondait en son for intérieur.

La mine renfrognée qu’elle fit l’interpella.

  • Ça ne va pas ? s’inquiéta-t-il en déposant une main sur sa cuisse.
  • Je… n’aime pas être couchée…
  • Oh, je… je suis désolé, ça te fait peur ?
  • Non !

Déboussolé, Selim ne comprenait pas, cherchant dans son regard ce qui n’allait pas. Elle devint de plus en plus rouge.

  • Quand je suis sur le dos… Ils ressemblent à des œufs sur le plat… lâcha-t-elle en pointant sa poitrine du doigt, écarlate et ennuyée.
  • Quoi, mais… Ahahahahah ! éclata-t-il de rire, la trouvant extrêmement mignonne.
  • Ce n’est pas drôle !! poussa-t-elle sur son torse en même temps que ses fesses sur ses hanches.
  • Waw… Ne fais plus ça, par contre, dit-il en déviant le regard.
  • Pourquoi ? Tu…

La bosse qu’elle sentit lui ôta les mots de la bouche. Super gêné, Selim attrapa gentiment sa main pour y déposer un léger baiser. Il se sentait bien.

  • Tu sais… J’adore les œufs sur le plat, ricana-t-il, avec un sourire en coin. Mais, c’est comme tu veux. Juste, je ne suis pas sûr que… ce soit la meilleure manière de… Enfin, tu vois ? fit-il, un peu mal à l’aise.
  • Je… suis plus à l’aise… en haut… déclara-t-elle, rouge comme une pivoine.
  • D’accord, mais… J’avais prévu de t’embrasser tout plein, je peux avoir un bisou ? dit-il en appuyant sur sa bouche.

Alors qu’elle se penchait pour accéder à sa réclamation, Selim pensa qu’il n’aurait jamais cru être celui qui se ferait dévorer. Éteignant la lumière en tendant son bras sur le mur derrière lui, il se releva et s’accrocha à sa taille pour prendre tout ce qu’il fallait dans son tiroir, un peu à l’aveuglette. S’habituant tous deux à la pénombre qui laissa, petit à petit deviner les formes de l’autre, ils joignirent leurs mains ensemble. Finalement, il l’aida en basculant légèrement pour l’attraper dans ses bras et se connecter à elle. Ils ne l’avaient jamais autant été.

***

Une petite mèche rebelle trônait sur le front de Nice qui planait sur un petit nuage, la tête enfoncée dans l’oreiller, et les joues toutes rosies. Dans le même état, Selim l’accompagna dans sa quête d’étoiles aux plafonds, mais il n’y en avait que dans leurs yeux. Quand ils se croisèrent, ils partagèrent le même sourire, timide, satisfait et incroyablement amoureux. Le plus bronzé des deux se tourna sur le flanc, déposant un bras au-dessus de la couverture pour attraper sa main. Nice le regardait avec émerveillement et tendresse.

  • Tu ne regrettes pas ? lui demanda-t-il assez fièrement.
  • Pas du tout, souffla-t-elle d’une voix douce qui le déstabilisa et le fit rougir.
  • Waw…
  • Hum ? fit-elle, ses petits yeux tombants d’apaisement.
  • Je t’aime trop… Je ne sais même pas comment… te le faire comprendre… Je t’aime, vraiment fort.

Nice le contamina de ses larmes naissantes dans ses prunelles noisette. Elle l’aimait de la même manière, avec cette sensation indescriptible et parce qu’ils partageaient ce même amour, Selim lui partagea autre chose.

  • Il y a un truc que j'aimerais te dire… commença-t-il.
  • Tu veux faire l’amour ? sortit Nice qui se couvrit la bouche instantanément.

Après un rire commun, il devint un peu plus sérieux.

  • Je ne dirais pas non, mais… Comment dire ? Tu sais… tout le monde à ses propres secrets…

Le visage de Nice se referma quelque peu, soudainement effrayée de ce qu’il s’apprêtait à dire.

  • Des secrets ? répteta-t-elle. Non, je… je n’en ai pas pour toi.
  • Je… sais, moi non plus, mais parfois, lorsque ça concerne la famille, il n’y a pas le choix. Mais je crois que tu mérites de savoir.
  • Ta famille ? Je… je ne t’oblige à rien, dit-elle, le cœur battant, aussi perplexe que curieuse.
  • J’ai envie de te le dire. Mes parents vont divorcer.

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