Chapitre 57 : La ligne d'arrivée n'est-elle pas un départ ?

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Depuis la somptueuse villa des Ibiss, entièrement recouverte par la neige, Laure sortait de sa chambre de princesse, ou plutôt de lolita, dans un joli ensemble confectionné par ses soins.

Elle avait une sensation de déjà vu, car ce moment, elle l’avait déjà vécu. Celui où elle avait osé se présenter dans une de ses créations pour n'obtenir que le dédain de sa mère et l'indifférence de son père, aveugles de son talent. Mais de ces mêmes parents, elle avait appris à persévérer, et se planta donc en haut de l’escalier dans la tenue qui l’avait occupée après les examens.

Une simple combinaison noire serrait sa silhouette et se recouvrait d’une veste blanche au motif de serpent dont les écailles étaient argentées : l’élément phare. Ses ongles peints de noir étaient décorés de la même manière.

A ses pieds montaient de grosses et longues bottines noires, dont le rembourrage blanc ressortait de ses lacets, pour allonger ses fines jambes.

Une main sur la taille, elle attendit que le majordome et la bonne viennent l’aider à porter ses valises pour entamer la descente des marches. Un fin sourire se creusa sous une de ses pommettes quand sa mère s’arrêta dans le hall. De ses yeux de serpent, elle la dévisagea autant que d’habitude, un chignon noir bien serré sur le dessus de sa tête. Quant à son père, ce dernier se préparait à quitter la maison, toujours sur son trente-et-un.

Chuck prit la peine de s'arrêter sur sa fille quand elle frôla le carrelage marbré du hall :

  • C’est nouveau, ma chérie ? lui demanda-t-il gentiment, ses cheveux bleus tombant devant ses yeux.

Il était rare qu’il ne les coiffe pas en arrière, lui donnant un petit côté négligé.

  • Hum, acquiesça-t-elle avant de remercier les porteurs d’un signe de main. Oui, c’est nouveau.

Priss croisa les bras, et la regarda depuis ses talons Richelieu vernis. Elle ravala les compliments qui tendaient à sortir, sachant pertinemment qu’elle avait travaillé sur cette tenue.

  • Quel créateur ? demanda-t-il en venant ouvrir doucement sa veste, remarquant qu’il y avait des plumes noires, légèrement mauves, qui s’y cachaient.
  • C’est de moi, lâcha-t-elle en continuant son chemin vers l’entrée principale, le nez levé sur les lustres en diamant aussi précieux que son attitude.

Il se retourna doucement, Laure faisant de même, en chassant sa longue chevelure. Priss sourit.

  • Cela manque toujours autant de classe… prit-elle plaisir à dire.
  • Mince, fit-elle faussement la moue. Alors que tu es ma plus grande inspiration… Je plaisante, lâcha-t-elle ensuite dans un murmure avec une pointe de sarcasme.

Priss ne s'offusqua pas. Au contraire, sa grimace s'étira en un sourire sous ses pupilles luisantes. Le mal s'en dégageait. Elle appréciait le répondant que sa fille n'avait habituellement pas.

Moins Chuck, qui s'étonnait autant de la remarque que de cette annonce :

  • Laure, c'est toi qui à créé cette… veste ? fit-il en y regardant encore une fois.

Elle hocha de la tête et tourna sur elle-même pour s'admirer dans le miroir. Tout comme ses parents, malgré sa fine taille, elle prenait de la place dans le grand hall luxueux.

  • C’est ça, oui. C’est une double veste, montra-t-elle le côté serpent, puis le côté oiseau. Sympa, non ? Je l’ai appelé “Vipère au poing", dit-elle en levant les sourcils tout en regardant sa mère.
  • Tu n'as pourtant pas de méchante belle-mère, fit remarquer Priss, les pierres précieuses de ses bracelets clinquant en même temps qu'elle croisa les bras.
  • Encore heureux, sortit-elle en ouvrant ses lourdes paupières sur son père.

Chuck ne reconnut pas le faciès dont Laure se pourvut, son petit nez se tortillant en même temps que l'image d'une blonde aux boucles surréalistes, tellement elles étaient bien faites, vint se loger dans son esprit.

Dans ses jolis yeux clairs, habituellement si doux et pimpants de curiosité, intelligents, charmeurs, il vit de la malice et une pointe de déception.

Laure attrapa un long manteau noir pour se couvrir davantage et confronter le froid de l’hiver. Elle enroula une grosse écharpe autour de son cou et se munit d’une paire de gants en daim, sombres également.

Sceptique, son père racla sa gorge avant d'enfiler lui aussi une veste chaude :

  • Parlons-en sur le chemin, tu veux bien ? Il est temps que…

Il s'arrêta quand elle soupira et qu'elle se planta dos à la porte d'entrée tandis que les valises partaient dans la limousine.

  • Excuse-moi papa, mais j'ai dépassé l'âge de me faire conduire par mes parents.
  • Comment ça ? pouffa-t-il assez chaleureusement, ne la prenant pas au sérieux. Je t'accompagne, c'est évident…
  • Je ne préfère pas, l'arrêta-t-elle tout de suite d'un geste. Ce n'est pas contre toi. Je ne veux juste pas passer pour la fifille à son papa, d'accord ? C’est mieux comme ça.

Elle ne lui laissa pas le choix en venant lui dire au-revoir sur la joue. Chuck resta stupide alors qu'elle prenait le large, un sourire aux lèvres.

Ce dernier redressa ses cheveux en l'air, dévoilant ses sourcils rapprochés, clairement touché par son comportement.

  • Qu'est-ce que c'est que ces conneries ? souffla-t-il, d'un visage livide.

"La fille à son papa" ? Le coup de couteau avait tout juste frôlé la première couche sur le diamant, mais la douleur qu'il ressentit l'enquiquina quelque peu. Laure lui donnait bien plus de fil à retordre que prévu et la nouvelle qu’elle jouait des siennes l’avait retourné.

La mode ? Évidemment, il pensa à Marry, son conseil tournant encore bien dans son l’esprit. Il prenait même un peu plus sens. Chuck se tourna ensuite vers Priss, se rappelant de leur discussion dans la salle de bain. Elle était déjà au courant de cette vocation. Cette dernière siffla simplement quelques sarcasmes :

  • Je commence à l'apprécier cette enfant, dit-elle en replaçant une mèche de cheveux noire dans son chignon, avant de rejoindre tout de suite ses quartiers.

Sa silhouette se balançant de droite à gauche était toujours aussi envoûtante. Il avait reconnu cette démarche chez Laure. Un soupçon d'inquiétude s'installa en lui.

Autrefois pie, il ne voulait pas la voir devenir vipère.

***

Tous les Richess n'avaient pas eu la chance, ou plutôt le cran, d'obliger leurs parents à rester à la maison.

Sur le siège passager, Nice se retrouvait dans une position délicate.

Voilà près d'une demi-heure qu'elle s’inquiétait de ce qui arriverait une fois à destination. Elle mêlait férocement ses doigts les uns avec les autres, intimidée par la présence de son père qui avait tenu bon jusqu'au bout pour l'accompagner.

Michael avait effectivement tapé du poing sur la table quand sa fille avait émis l'idée de partir seulement en compagnie de leur chauffeur :

  • Non, je viens. Nous prenons la voiture privée.
  • Mais… !

Dès cette exclamation, Nice s'était trahie.

  • Je veux le voir, avait-il brièvement déclaré. Le garçon qui te fait tourner la tête.

L'étonnement dans son expression n’arrangea pas la situation. Michael y lut un : "Comment es-tu au courant ?"

  • Je suis ton père, c'est normal que je sente ces choses-là.

Nice se retrouvait donc bloquée. Qu'il soit au courant qu'elle ait un petit ami était une chose, mais qu'ils se rencontrent en était une autre. Très discrètement, elle avait envoyé un message à Selim pour le prévenir de ne pas lui sauter dessus à l'arrivée, mais ce dernier ne répondait pas. La petite Richess jura dans sa tête dégagée.

Avec les fêtes, elle avait fait une folie. Adieu la frange lourde et lugubre. Elle avait opté pour un carré dégagé, une mèche rebelle venant encadrer son minuscule visage, la même qu'elle glissait fréquemment derrière son oreille de petite souris.

Le changement lui allait bien, mais l'idée que son amoureux devienne fou d'amour en voyant en vrai sa nouvelle coupe la tétanisait. Pourquoi ne répondait-il pas ? Alors qu'elle contrôlait son stress grandissant à mesure qu’ils arrivaient, Nice se demanda avec colère ce qu'il pouvait bien fabriquer.

***

Sur un parking bien rempli où résidaient déjà pas mal de parents autour de leurs enfants, le calme régnait dans le froid. Partout, sauf d'un côté, où un idiot défiait un homme au sang chaud dans un duel de pierre papier ciseaux :

  • Ok ! Si je gagne cette fois, vous me dites comment s'est passé votre rendez-vous avec ma mère ! s'exclama Selim en glissant son poing derrière son dos.

Elliot regarda le fils de Katerina avec un visage à la fois exaspéré et amusé. Au grand étonnement de Faye, il se prêta au jeu. La rousse suivit le combat blotti dans un long manteau de daim brun à la fourrure blanche. Ses grands yeux verts s'illuminèrent avant de découvrir le résultat :

  • Merde ! jura-t-elle face à la défaite de son ami.
  • Soutiens-moi au moins ! C'est du propre, ricana Elliot qui attirait l'attention de plusieurs mamans sur le parking, le poing sur les ciseaux de Selim.
  • Pff ! Encore une manche, réclama ce dernier.
  • Hors de question, lâcha le grand roux d’un air triomphant.
  • Mais je veux savoir ! J’ai le droit même, dit-il une main sur le torse, fier.
  • Tu ne veux pas savoir, crois-moi… sourit l’autre bêtement avec l’espoir de lui rabattre son clapet.

Le petit bout ne se démonta pas, une expression taquine et vicieuse venant l’égayer :

  • Vous êtes sérieusement un cochon pour oser dire ça…
  • Pfff, arrête ! explosa de rire Faye qui lui tapa sur l’épaule.
  • Mais c’est vrai que Maman est rentrée de bonne humeur, fit-il mine de réfléchir.

Il donnait du fil à retordre à Elliot qui se retint de lui attraper sa petite tête pour l'ébouriffer. Il en avait fallu peu pour qu’il s’attache à ce boute-en-train. Le même qu’il avait défendu auprès de Michael, vexé que sa fille ne lui ait rien avoué de leur relation.

Le jeu restait dangereux. Il le prévint.

  • Ce n’est pas que tu me déranges Selim, mais tu ferais mieux de prendre un peu de distance avec nous, dit-il à voix basse, voyant qu’ils attiraient l’attention.
  • Pourquoi ? rétorqua-t-il immédiatement, plus froidement.

Ce côté de Selim était parfois effrayant. Il pouvait passer du plus adorable des garçons au plus sérieux et têtu. Il était presque intimidant malgré sa petite taille, le sang chaud coulant dans ses veines. Elliot grimaça. Ce fut sa copine rousse qui le calma :

  • Parce qu’on est soumis au plus secret des top secrets, fit-elle, l'index sur ses lèvres pulpeuses, en s’approchant de l’oreille de Selim. Et parce que ta copine arrive, chuchota-t-elle ensuite, heureuse de voir sa meilleure amie débarquer.

Toute amertume le quitta à l’instant où il constata que sa dulcinée entrait sur le parking. Il en oublia la présence de son père tellement il la trouva belle. Elle lui avait manqué pour le début des fêtes. Nice avait presque disparu dans son gros manteau blanc, les moufles sur son visage pour se réchauffer du vent glaçant.

Selim s’apprêtait à la retrouver quand elle le foudroya, le clouant au sol de toute la persuasion dont elle savait faire preuve. Derrière son dos, apparu la grande silhouette de Michael dont les yeux l’empêchèrent d’avancer deux fois plus. Celui-ci se montrait peut-être parfois un peu trop protecteur envers sa fille malgré le peu de communication qu’ils avaient tous les deux.

Selim détesta l’impression de se retrouver à mille kilomètres de sa chérie, alors qu’elle n’était seulement qu’à quelques mètres. Sous les yeux de la famille Fast, et de bien d’autres, il gonfla les narines et le torse : “Comme s’il allait se laisser faire”, rugit-il à l’intérieur. D’un pas lourd et rapide, il réduit la distance entre eux et se cala aux côtés de Nice. Il attrapa sa main et pointa son nez vers Michael qui le regardait, un peu agité, de ses yeux clairs.

  • Bonjour Monsieur ! Selim Hodaïbi, je suis le petit ami de Nice, se présenta-t-il en lui tendant sa main. Vous savez ? Le fils de votre amie Katerina Hodaïbi ? ajouta-t-il pour doublement lui mettre la pâtée, un léger sourire en coin afin de rester amical.

Nice rougit de tout son soûl, à la fois affreusement gênée et en colère qu’il agisse avec autant d’impolitesse. Michael en resta bouche bée.

  • Si je comprends bien, jeune homme… Tu m’annonces que vous sortez ensemble ? Alors que vous savez pertinemment que c’est interdit ? Et sous prétexte que j’ai pu côtoyer Katerina à l’époque de Saint-Clair, tu penses qu’il s’agit d’un argument valable pour briser la loi qui entoure nos familles ?
  • Ouais. Tout juste !
  • Ah, rit-il un peu nerveusement. Enchanté, lui tendit-il ensuite sa main.

Michael le sonda une nouvelle fois. Il avait la chaleur de son père et ce petit côté décalé de Katerina. Il porta alors son regard sur sa fille. Elle semblait aux bords des larmes, la frimousse rougie par la peine et livide à cause de la peur. Selim passa une main sous son bras pour la rattraper quand il la vit chanceler doucement. Le constat était là, les deux ados débordaient de tendresse l’un envers l’autre, et restaient solidaires face à la menace qu’il pouvait représenter malgré la crainte.

La limousine argentée qui débarqua et s’arrêta sur le trottoir ne passa pas inaperçue. Les Akitorishi montraient le bout de leurs nez. Michael soupira, pris de nostalgie, et également d’une folie qu’il cachait bien à l’intérieur.

Il reprit pour les deux ados qui suivaient aussi l’arrivée des numéros trois de la hiérarchie :

  • C’est beau de proclamer son amour, et c’est même admirable, dit-il en accordant d’abord un doux regard à Nice. Mais sache que ce n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît, enchaîna-t-il du ton calme qui lui seyait parfaitement. Il ne suffit pas de crier qu’on aime quelqu’un pour avoir le droit de rester avec.
  • Je sais, mais vos lois… le coupa Selim en serrant le poing tandis que Nice l’entourait de sa petite main.
  • Ce ne sont pas “nos lois”, fit-il de même.
  • Vous les avez suivies pourtant, lança-t-il dans un reproche.
  • Je ne pensais pas devoir débattre de ça aujourd’hui en conduisant ma fille à son voyage, dit-il avec un semblant d’ironie et un visage amitueux. C’est vrai, et d’ailleurs, si nous ne les avions pas suivies, vous ne seriez même pas ensemble aujourd’hui. Je ne crois pas que ceci, tu puisses me le reprocher, alors que tu t’exposes devant les parents des autres étudiants. Les nouvelles vont vite. Ça pourrait vous être fatal…
  • Papa, arrête… couina Nice, toute intimidée face à ses arguments.
  • Nous en discuterons de toute manière à un autre moment, répondit ce dernier en tapotant sa tête. Passe un bon séjour.

Sur ce geste affectif, le couple le vit se diriger vers Elliot, échangeant sa place avec Faye qui vint les rejoindre.

  • C’est grave bizarre de les voir ensemble, vous trouvez pas ? demanda-t-elle en marchant à reculons, curieuse de ce qu’ils pouvaient se raconter.
  • Plus que bizarre… Hum ? Nice… souffla Selim en voyant de grosses larmes dégringoler sur ses joues.

Elle avait également les jambes qui tremblaient et elle refusa difficilement les câlins des deux autres Richess, refusant que son père la voit dans cet état. Elle se jurait de trouver une solution à cette horrible loi quand Alex débarqua de nulle part pour l’attraper par la taille. Pendant un court instant, les pieds de Nice décollèrent du sol. En tombant dans ses yeux fatigués du matin, qu’il cachait sous ses mèches blondes rebelles et plus longues, elle émit une plainte et le serra fort dans ses bras.

La mâchoire de Selim se décrocha par terre, jaloux, quand le grand blond vint le choper par l’épaule pour l’attraper également dans ses bras. Il était d’une douceur sans égale. Son regard croisa ensuite celui de Faye et devint fougueux dans l’instant T. Les deux amoureux se sourirent longuement, puis s’embrassèrent au-dessus des têtes émotives et curieuses de leurs deux amis.

  • Baaaak, lâcha Selim avec une grimace.
  • Ils peuvent nous empêcher d’être amoureux, dit Alex en observant les parents curieux aux regards perfides, mais pas d’être amis.
  • Quel saint, le charria immédiatement Faye, souriant de toutes ses dents.

***

Davantage rempli, le parking devenait de plus en plus mouvementé avec le chargement des valises dans les deux cars.

Au milieu des Richess, Loyd récapitulait, un itinéraire en mains, le trajet du voyage jusqu’à la montagne. Sky reposait sa tête sur son épaule, crevé de sa nuit. Il adorait particulièrement les sports d’hiver et était devenu ridiculement impatient la veille.

Depuis son point de contrôle, Eglantine attendait patiemment le départ entre Elliot et Michael.

  • Ils ont l’air de bien s’entendre, dit-elle à haute voix, mais pensive.
  • Un peu trop, grogna Michael dont le cœur se brisait à mesure qu’il voyait sa fille sourire à son amoureux.
  • Pfff, rabat-joie ! s’exclama Elliot en riant avant de déposer une main sur sa grande épaule. S’ils savaient…
  • Chut, le coupa-t-il immédiatement.

Un sourire à peine perceptible égaya la frimousse pâle d’Eglantine, qui gardait les jambes et les bras croisés, son regard rivé sur son fils. Ce dernier se sentait plus qu’observé. Au cours des jours passés en sa compagnie sur le début des vacances d’hiver, il avait émit l’hypothèse que sa mère lui cachait quelque chose. La voir entre ces deux hommes le perturbait énormément, encore plus quand le grand roux retourna dans sa voiture pour checker son téléphone qui chargeait.

La distance entre Michael et Eglantine se réduit, toujours en tenant leur comportement d'adultes.

  • C’est irréel, d’être ici avec toi, d’assister à leur départ au ski, comme si… c’était normal, fit Michael.
  • Je ne peux qu’être d’accord, répondit-elle de sa voix angélique.
  • Ils n’ont pas l’air de savoir…
  • Comment pourraient-ils ? rétorqua-t-elle en lui montrant une mine réjouie.

L’ancien couple, et les nouveaux amants, se détaillèrent en écoutant le brouhaha qu’émettait les étudiants. Sur ces doux visages, aussi inébranlables, personne n’auraient pu dire que dans leurs pensées, une voiture se déhanchait, chaud souvenir d’une virée sur un parking. Michael avait des étoiles dans ses yeux éclairés par le ciel blanc.

  • J’ai toujours su que tu étais intelligente, mais finalement… Tu es peut-être aussi la plus secrète.

Eglantine se retint de lâcher un petit rire, sentant ses pommettes remonter. Le sérieux revint rapidement. Il avait des questions plus importante à lui poser.

  • Après… Cette fois-là, dit-il évasivement, ce que tu m’as dit à propos de Louis… Est-ce que ça avance ? lui demanda-t-il, un peu nerveux. Tu crois que les recherches peuvent aboutir ?

Après un temps à réfléchir, interpellée par les deux voitures bien différentes qui arrivaient, Eglantine serra un peu plus ses bras, et observa Kimi sortir du petit bolide avec Dossan. Elle la suivit tout du long de sa traversée jusqu’à Laure Ibiss qui triomphait sur la cour grise, et s’approchait rapidement également pour la réceptionner. Les sourires des deux filles n’existaient pas chez Eglantine qui fronça les sourcils.

  • Ça fonctionne, mais… Est-ce que ce sera nécessaire ? réfléchit-elle à haute voix, les larmes aux yeux, émue de voir la fille d’Alicia.
  • La voilà, souffla Michael. Notre promesse. Elle est belle, sourit-il difficilement.

Depuis sa voiture, les mains sur le volant, Elliot avait relâché sa tête sur le siège, une bouille meurtrie l’ayant gagné aussi.

  • Kimi ! Tu aurais pu faire un effort vestimentaire, s’en alla Laure en l’attrapant par le bras.
  • Tu parles… leva-t-elle les yeux au ciel. C’est toi la star de l’école !

Les deux copines rigolèrent bêtement en rejoignant le groupe, la blonde lança des regards à Dossan qui était heureux de la voir bien entourée. Elle fut prise au dépourvu par ses émotions quand elle le vit saluer de loin ses anciens copains. Ils étaient aussi ceux de sa mère. Kimi perçut qu’ils la regardaient avec à la fois amour et tristesse. Chamboulée, elle fut heureuse d’avoir la main de Laure à laquelle se raccrocher et qui ne lésina pas pour la serrer.

Elle tomba ensuite dans les yeux de Sky.

  • Salut, dit-il simplement.
  • Salut… Tu…
  • J’arrive tout de suite, enchaîna-t-il à l’égard du groupe.

Quelques secondes plus tard, il se retrouva planté face à Dossan. Ce dernier attendit qu’il se prononçe, plein d’empathie envers ce jeune garçon débordant de colère. Sky avait un trop plein, serrant les poings :

  • Je ne vous pardonne pas… lâcha-t-il en premier. Je ne vous pardonne pas, mais… Je m’excuse, grogna-t-il entre ses dents. Pour vous…
  • Sky, je t’en prie… Tutoie-moi, osa-t-il le couper dans son élan.
  • Si… ça peut vous… Te… permettre d’excuser mon comportement…
  • Bien sûr, je sais pourquoi tu t’es énervé, répondit-il avec compassion, ses mains blanche enfouies dans sa grosse veste.
  • Laisse-moi m’excuser correctement ! s’agaça-t-il les yeux rivés au sol. Je sais que je vous ai fait de la peine, à toi, Kimi, peut-être même à l’autre nain, marmonna-t-il en revoyant Leroy embrasser sa sœur, et je n’aurai pas dû réagir comme ça. Voilà. C’est pour ça que je m’excuse, mais, appuya-t-il, je ne peux pas pardonner le fait que tu aies menti. Les conseils que tu m’as donné…
  • Étaient sincères, souffla-t-il, la brise soulevant ses mèches noires.
  • Mais pas honnêtes.

Un temps de silence se créa entre les deux. Sky le regardait, comme en danger, mal à l’aise d’en arriver là. Dossan hocha un peu de la tête et vint tapper sa main sur son épaule qu’il retira presque instinctivement.

  • Excuses acceptées. Moi non plus, je n’aurais pas dû m’immiscer. Allez, va ! fit-il d’un mouvement de tête. Là, le plus important, c’est de profiter de ce voyage, lui sourit-il ensuite de toutes ses dents.

Grognon, Sky partit en marche à arrière pour rejoindre ses copains.

Au moment de monter dans les cars, chacun fit des signes à leurs parents, dont Kimi à Dossan, et le beau brun également, les siens n’étant pas présents.

Et sur les marches du bus, l’immense cri de Selim, hurlant “à moi la raclette !!”, le poing levé, fit rire toute la galerie.

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